La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/08/2024 | FRANCE | N°24/03751

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 11, 19 août 2024, 24/03751


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 11

L. 743-22 du Code de l'entrée et du séjour

des étrangers et du droit d'asile



ORDONNANCE DU 19 AOUT 2024

(3 pages)



Numéro d'inscription au numéro général et de décision : B N° RG 24/03751 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJ3SW



Décision déférée : ordonnance rendue le 16 août 2024, à 10H37, par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris



Nous, Elise Thevenin-Scott,

conseillère, à la cour d'appel de Paris, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée de Victoria Renard, greffière aux débats et...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 11

L. 743-22 du Code de l'entrée et du séjour

des étrangers et du droit d'asile

ORDONNANCE DU 19 AOUT 2024

(3 pages)

Numéro d'inscription au numéro général et de décision : B N° RG 24/03751 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJ3SW

Décision déférée : ordonnance rendue le 16 août 2024, à 10H37, par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris

Nous, Elise Thevenin-Scott, conseillère, à la cour d'appel de Paris, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée de Victoria Renard, greffière aux débats et au prononcé de l'ordonnance,

APPELANTS :

1°) LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE PRÈS LE TRIBUNAL JUDICIAIRE DE PARIS,

MINISTÈRE PUBLIC, en la personne de Sylvie Schlanger, avocat général,

2°) LE PRÉFET DE POLICE,

représenté par Me Nicolas Rannou du cabinet Centaure Avocats, avocat au barreau de Paris

INTIMÉ:

M. [R] [H]

né le 15 Janvier 1988 à [Localité 1]

de nationalité Marocaine

RETENU au centre de rétention de [Localité 2] / [Localité 3],

assisté de Me Layla Saidi, avocat de permanence au barreau de Paris et de Mme [Z] [E] (Interprète en arabe) tout au long de la procédure devant la cour et lors de la notification de la présente ordonnance, serment préalablement prêté,

ORDONNANCE :

- contradictoire,

- prononcée en audience publique,

- Vu le décret n° 2024-799 du 2 juillet 2024 pris pour l'application du titre VII de la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration, relatif à la simplification des règles du contentieux ;

Constatant qu'aucune salle d'audience attribuée au ministère de la justice spécialement aménagée à proximité immédiate du lieu de rétention n'est disponible pour l'audience de ce jour ;

- Vu l'ordonnance du 16 août 2024, à 10h37, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris constatant l'irrégularité de la procédure, rejetant la demande de prolongation de la rétention administrative, ordonnant la mise en liberté de M. [R] [H], disant n'y avoir lieu à mesure de surveillance et de contrôle, rappelant à l'intéressé qu'il a l'obligation de quitter le territoire national ;

- Vu l'appel de ladite ordonnance interjeté le 16 août 2024 à 15h54 par le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Paris, avec demande d'effet suspensif ;

- Vu l'appel de ladite ordonnance, interjeté le 16 août 2024, à 16h42, par le préfet de police ;

- Vu l'ordonnance du 17 août 2024 conférant un caractère suspensif au recours du procureur de la République ;

- Vu la décision de jonction, par mention au dossier, des deux appels ;

- Vu les observations :

- de l'avocat général tendant à l'infirmation de l'ordonnance ;

- du conseil de la préfecture lequel, s'associant à l'argumentation développée par le ministère public, nous demande d'infirmer l'ordonnance et de prolonger la rétention pour une durée de 26 jours ;

- de M. [R] [H], assisté de son conseil qui demande la confirmation de l'ordonnance ;

SUR QUOI,

Sur la nullité de la garde à vue :

Il appartient au juge judiciaire, en sa qualité de gardien de la liberté individuelle, de se prononcer sur les irrégularités, invoquées par l'étranger, affectant les procédures préalables à la notification de la décision de placement en rétention. (2e Civ., 28 juin 1995, pourvoi n° 94-50.002, Bull. 1995, II, n° 221, 2e Civ., 28 juin 1995, pourvoi n° 94-50.006, Bull. 1995, II, n° 212, 2e Civ., 28 juin 1995, pourvoi n° 94-50.005, Bull., 1995, II, n° 211).

Aux termes de l'article L. 743-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, toute juridiction, y compris la Cour de cassation, qui est saisie d'une demande d'annulation ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée de la mesure de placement en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger.

Selon les art. 63 et 63-1, la personne qui, pour les nécessités de l'enquête, est, sous la contrainte, mise à la disposition de l'officier de police judiciaire, doit immédiatement être placée en garde à vue et recevoir notification des droits attachés à cette mesure. Un report de cette notification peut être accepté à la seule condition que la procédure établisse une circonstance insurmontable justifiant le retard (Crim. 31 mai 2007, n°07-80.928). Tout retard injustifié dans la notification des droits porte atteinte aux intérêts de la partie qu'elle concerne s'il n'est pas justifié par une circonstance insurmontable. (Crim. 14 déc. 1999, n° 99-84.148). La circonstance insurmontable doit être imprévisible, et extérieure.

En l'espèce, Monsieur [R] [H]a été interpellé et retenu, sans liberté d'aller et venir, à compter du 11 août 2024 à 0h30. Il a été présenté à l'officier de police judiciaire et placé en garde à vue le 11 août 2024 à 2h35. Le procureur de la République a été avisé du placement en garde à vue intervenu à 2h35, à 2h38.

Un procès-verbal intitulé « circonstances insurmontables » établi le 11 août 2024 à 2h25 indique que « Le contexte des jeux olympiques 2024 organisés à [Localité 2] engendre (') une saturation de l'espace public et un trafic routier très perturbé du fait des restrictions de circulations imposées (') augmentant les délais de route » pour expliquer le délai entre le moment de l'interpellation et celui du placement en garde à vue. Or, force est de constater qu'au milieu de la nuit il n'existait aucune épreuve sportive pouvant expliquer un retard dans la conduite de la personne de son lieu d'interpellation au commissariat, a fortiori lorsque les deux lieux son éloignés uniquement de quelques kilomètres comme ici, de même qu'il n'est pas justifié d'un traffic perturbé de façon telle qu'il faille plus de 2h pour parcourir une distance se faisant en temps habituel en 10 minutes.

Il n'est donc pas justifié de circonstances exceptionnelles et insurmontables de sorte que le retard dans le placement en garde à vue est excessif et porte nécessairement atteinte aux droits de Monsieur [R] [H] qui a été privé de liberté plus de deux heures sans pouvoir avoir connaissance de ses droits et sans pouvoir les exercer.

Il en résulte la nullité de la garde à vue et des actes subséquents, dont l'arrêté de placement en rétention pris durant la mesure annulée.

En conséquence, l'ordonnance déférée sera infirmée et la requête de l'administration rejetée.

PAR CES MOTIFS

INFIRMONS l'ordonnance,

STATUANT À NOUVEAU,

REJETONS la requête du préfet de police,

DISONS n'y avoir lieu à prolongation de la rétention administrative de M. [R] [H],

RAPPELONS à l'intéressé qu'il a l'obligation de quitter le territoire français,

ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d'une expédition de la présente ordonnance.

Fait à Paris le 19 août 2024 à

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :

Pour information :

L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.

Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.

Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

Le préfet ou son représentant L'intéressé L'interprète

L'avocat de l'intéressé L'avocat général


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 24/03751
Date de la décision : 19/08/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 25/08/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-08-19;24.03751 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award