RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
L. 742-1 et suivants du Code de l'entrée et du séjour
des étrangers et du droit d'asile
ORDONNANCE DU 07 AOUT 2024
(3 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général et de décision : B N° RG 24/03558 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJ2G6
Décision déférée : ordonnance rendue le 05 août 2024, à 16h09, par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Meaux
Nous, Michel Rispe, président de chambre à la cour d'appel de Paris, agissant par délégation du premier président de cette cour, assisté de Mélanie Thomas, greffier aux débats et au prononcé de l'ordonnance,
APPELANT :
M. [U] [B]
né le 08 novembre 1992 à [Localité 1], de nationalité tunisienne
RETENU au centre de rétention : [Localité 2] n°3
assisté de Me Dieunedort Wouako, avocat de permanence, avocat au barreau de Paris
INTIMÉ :
LE PREFET DE SEINE-ET-MARNE
représenté par Me Sophie Schwilden du groupement Gabet / Schwilden, avocat au barreau de Seine-Saint-Denis substituant le cabinet Centaure, avocat au barreau de Paris
MINISTÈRE PUBLIC, avisé de la date et de l'heure de l'audience
ORDONNANCE :
- contradictoire
- prononcée en audience publique
- Vu le décret n° 2024-799 du 2 juillet 2024 pris pour l'application du titre VII de la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration, relatif à la simplification des règles du contentieux ;
Constatant qu'aucune salle d'audience attribuée au ministère de la justice spécialement aménagée à proximité immédiate du lieu de rétention n'est disponible pour l'audience de ce jour ;
- Vu l'ordonnance du 05 août 2024 du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Meaux déclarant la requête recevable et la procédure régulière et ordonnant la prolongation de la rétention de M. [U] [B] au centre de rétention administrative n°3 du [Localité 2] (77), ou dans tout autre centre ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée de quinze jours à compter du 04 août 2024 ;
- Vu l'appel motivé interjeté le 06 août 2024, à 12h50, par M. [U] [B] ;
- Après avoir entendu les observations :
- de M. [U] [B], assisté de son avocat, qui demande l'infirmation de l'ordonnance ;
- du conseil du préfet de Seine-et-Marne tendant à la confirmation de l'ordonnance ;
SUR QUOI,
Selon l'article L 742-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :'A titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4, lorsqu'une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :
1° L'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement ;
2° L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement :
a) une demande de protection contre l'éloignement au titre du 5° de l'article L. 631-3 ;
b) ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3° La décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
Le juge peut également être saisi en cas d'urgence absolue ou de menace pour l'ordre public.
L'étranger est maintenu en rétention jusqu'à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l'expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d'une durée maximale de quinze jours.
Si l'une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l'avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n'excède alors pas quatre-vingt-dix jours.'
En l'espèce, à l'appui de son appel, l'intéressé soutient que les conditions prévues par l'article précité ne sont pas réunies, en l'absence de caractérisation d'une menace à l'ordre public et en l'absence de perspective de délivrance d'un document de voyage à bref délai.
S'agissant des circonstances retenues par le juge des libertés et de la détention, celui-ci a notamment relevé à juste titre que la commission d'une infraction pénale n'est pas de nature à elle seule à établir que le comportement de l'intéressé présenterait une menace pour l'ordre public et que l'appréciation de la menace doit prendre en considération les risques objectits que l'étranger en situation irrégulière fait peser sur l'ordre public.
Et, au vu des pièces de la procédure, il a relevé que M. [U] [B] a fait objet d'une condamnation le 21 mai 2024, par le tribunal judiciaire de Meaux, à une peine de 3 ans d'interdiction du territoire français avec exécution provisoire du chef de maintien irrégulier sur le territoire français après placement en rétention ou assignation à résidence d'un étranger ayant fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire.
Il a encore observé qu'outre cette condamnation, M. [U] [B] a fait preuve d'un comportement inadapté en rétention où il s'adonnerait à la consommation de produits stupéfiants et aurait menacé un agent de la PAF ainsi qu'en atteste le rapport établi le 30 mai 2024 versé en procédure, ce dont il a déduit la réalité, la gravité et l'actualité de la menace que constitue le comportement personnel de l'intéressé.
Toutefois, ces constats, outre leur caractère hypothétique pour partie d'entre eux, apparaissent insuffisants à caractériser la menace pour l'ordre public imputée à M. [U] [B].
Par ailleurs, il est constant qu'il ne résulte du dossier aucune obstruction imputable à l'intéressé et qui serait apparue dans les quinze jours qui ont précédé la saisine du juge des libertés et de la détention.
Enfin, si les diligences, le dynamisme et la bonne foi des services de la préfecture qui ont saisi les autorités consulaires et procédé aux relances utiles ne sont aucunement mis en cause, il y a lieu cependant de constater que la perspective d'une délivrance à bref délai de documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé, reste à démontrer.
Par voie de conséquence, l'administration ne pouvait pas se fonder sur les dispositions précitées pour solliciter une quatrième prolongation de rétention.
Par ces motifs, il convient d'infirmer l'ordonnance critiquée et de rejeter la requête en prolongation présentée par le préfet.
PAR CES MOTIFS
INFIRMONS l'ordonnance entreprise,
RAPPELONS à M. [U] [B] qu'il doit quitter le territoire français,
ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d'une expédition de la présente ordonnance.
Fait à Paris le 07 août 2024 à
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS : Pour information : L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
Le préfet ou son représentant L'intéressé L'avocat de l'intéressé