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18/07/2024 | FRANCE | N°24/03248

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 11, 18 juillet 2024, 24/03248


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 11

L. 743-22 du Code de l'entrée et du séjour

des étrangers et du droit d'asile



ORDONNANCE DU 18 JUILLET 2024

(1 pages)



Numéro d'inscription au numéro général et de décision : B N° RG 24/03248 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJXK7



Décision déférée : ordonnance rendue le 16 juillet 2024, à 16h27, par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris



Nous, Stéphanie Gargou

llaud, présidente de chambre, à la cour d'appel de Paris, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée de Agnès Allardi, greffier...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 11

L. 743-22 du Code de l'entrée et du séjour

des étrangers et du droit d'asile

ORDONNANCE DU 18 JUILLET 2024

(1 pages)

Numéro d'inscription au numéro général et de décision : B N° RG 24/03248 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJXK7

Décision déférée : ordonnance rendue le 16 juillet 2024, à 16h27, par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris

Nous, Stéphanie Gargoullaud, présidente de chambre, à la cour d'appel de Paris, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée de Agnès Allardi, greffier aux débats et au prononcé de l'ordonnance,

APPELANTS :

1°) LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE PRÈS LE TRIBUNAL JUDICIAIRE DE PARIS,

MINISTÈRE PUBLIC, en la personne de Martine Trapero, avocat général,

2°) LE PRÉFET DE POLICE,

représenté par Me Diana Capuano du cabinet Actis Avocats, avocats au barreau du Val-de-Marne

INTIMÉ:

M. [U] [T]

né le 04 Avril 1968 à [Localité 1], de nationalité gabonaise

RETENU au centre de rétention de [Localité 2] / [Localité 3],

assisté de Me Lorraine Chretien, avocat de permanence au barreau de Paris

ORDONNANCE :

- contradictoire,

- prononcée en audience publique,

- Vu le décret n° 2024-799 du 2 juillet 2024 pris pour l'application du titre VII de la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration, relatif à la simplification des règles du contentieux ;

- Constatant qu'aucune salle d'audience attribuée au ministère de la justice spécialement aménagée à proximité immédiate du lieu de rétention n'est disponible pour l'audience de ce jour.

- Vu l'ordonnance du 16 juillet 2024, à 16h27, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris rejetant la demande de prolongation de la rétention administrative, disant n'y avoir lieu à mesure de surveillance et de contrôle et rappelant à l'intéressé qu'il a l'obligation de quitter le territoire national,

- Vu l'appel de ladite ordonnance interjeté le 16 juillet 2024 à 18h01 par le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Paris, avec demande d'effet suspensif ;

- Vu l'appel de ladite ordonnance, interjeté le 16 juillet 2024, à 23h30, par le préfet de police ;

- Vu l'ordonnance du 17 juillet 2024 conférant un caractère suspensif au recours du procureur de la République ;

- Vu la décision de jonction, par mention au dossier, des deux appels ;

- Vu les observations :

- de l'avocat général tendant à l'infirmation de l'ordonnance ;

- du conseil de la préfecture lequel, s'associant à l'argumentation développée par le ministère public, nous demande d'infirmer l'ordonnance et de prolonger la rétention pour une durée de

15 jours ;

- de M. [U] [T], assisté de son conseil qui demande la confirmation de l'ordonnance ;

SUR QUOI,

Sur les conditions d'une troisième prolongation de la rétention administrative

Il résulte des dispositions de l'article L. 742-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qu'à titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4, lorsqu'une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :

1° L'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement ;

2° L'étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d'éloignement :

a) une demande de protection contre l'éloignement au titre du 5° de l'article L. 631-3 ;

b) ou une demande d'asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;

3° La décision d'éloignement n'a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l'intéressé et qu'il est établi par l'autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.

Le juge peut également être saisi en cas d'urgence absolue ou de menace pour l'ordre public.

Ces critères ne sont pas cumulatifs et un seul peut justifier la prolongation de la mesure de rétention.

Ainsi que le relève le premier juge, pour l'application du dernier alinéa de l'article précité à la requête en troisième prolongation, créé par la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration, il appartient à l'administration de caractériser l'urgence absolue ou la menace pour l'ordre public.

Dans ce contexte, la menace pour l'ordre public fait l'objet d'une appréciation in concreto, au regard d'un faisceau d'indices permettant, ou non, d'établir la réalité des faits, la gravité, la récurrence ou la réitération, et l'actualité de la menace selon le comportement de l'intéressé et, le cas échéant, sa volonté d'insertion ou de réhabilitation.

Dans le cadre adopté par le législateur, la notion de menace à l'ordre public a pour objectif manifeste de prévenir, pour l'avenir, les agissements dangereux commis par des personnes en situation irrégulières sur le territoire national.

L'appréciation de cette menace doit prendre en considération les risques objectifs que l'étranger en situation irrégulière fait peser sur l'ordre public (ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat dont la jurisprudence peut inspirer le juge judiciaire dans un souci de sécurité juridique CE, Réf. N°389959, 7 mai 2015, ministre de l'intérieur, B).

La commission d'une infraction pénale n'est pas de nature, à elle seule, à établir que le comportement de l'intéressé présenterait une menace pour l'ordre public, et, surtout, cette menace doit être réelle à la date considérée, étant précisé que ce n'est pas l'acte troublant l'ordre public qui est recherché, mais bien la réalité de la menace à a date de la saisine du juge.

Si le premier juge a retenu a juste titre qu'une signalisation était insuffisante à caractériser la menace pour l'ordre public, qui est un des critères soutenus par le préfet, et que l'actualité de la menace faisait défaut, il convient cependant de préciser que les risques peuvent découler de la crainte d'une réitération probable de faits qui, pris isolément serait insuffisants, mais dont la fréquence concourt à une atteinte au maintien de l'ordre.

En l'espèce, il y a lieu de constater que M. [T] a fait l'objet d'un arrêté d'expulsion du 9 mai 2023, notifié le 11 mai 2023, qui porte mention de vingt-sept condamnations suivantes :

21/06/2005 par le Tribunal Correctionnel de Paris à 3 mois d'emprisonnement pour entrée ou séjour irrégulier d'un étranger en France, soustraction à l'exécution d'une mesure de reconduite à la frontière :

19/10/2005 par le Tribunal Correctionnel de Bobigny à 3 mois d'emprisonnement et à une interdiction du territoire français pendant 3 ans pour entrée ou séjour irrégulier d'un étranger en France, soustraction à l'exécution d'une mesure de reconduite à la frontière, soustraction à l'exécution d'une mesure de reconduite à la frontière, vol aggravé par deux circonstances : 08/06/2006 par le Tribunal Correctionnel de Paris à 3 mois d'emprisonnement pour vol, entrée ou séjour irrégulier d'un étranger en France, soustraction à l'exécution d'une mesure de reconduite à la frontière ;

11/01/2007 par le Tribunal Correctionnel de Paris à 6 mois d'emprisonnement pour recel de bien provenant d'un vol, entrée ou séjour irrégulier d'un étranger en France, soustraction à l'exécution d'une mesure de reconduite à la frontière :

24/05/2007 par le Tribunal Correctionnel de Paris à 4 mois d'emprisonnement pour vol aggravé par deux circonstances (récidive), entrée ou séjour irrégulier d'un étranger en France, soustraction à l'exécution d'une mesure de reconduite à la frontière, recel de bien provenant d'un vol : 25/01/2008 par le Tribunal Correctionnel de Nanterre à 1 an d'emprisonnement pour vol (récidive), soustraction à l'exécution d'une mesure de reconduite à la frontière ;

14/05/2009 par le Tribunal Correctionnel de Paris à 6 mois d'emprisonnement et à une interdiction du territoire français pendant 1 an pour vol aggravé par deux circonstances (récidive), recel de bien provenant d'un vol (récidive), soustraction à l'exécution d'une mesure de reconduite à la frontière., vol ;

23/11/2009 par la Chambre des Appels Correctionnels de Paris à 3 ans d'emprisonnement et à une interdiction du territoire français pendant 3 ans pour vol aggravé par deux circonstances (récidive), rol commis dans un véhicule affecté au transport collectif des voyageurs, entrée ou séjour irrégulier l'un étranger en France

18/08/2012 par le Tribunal Correctionnel de Paris à 3 mois d'emprisonnement pour entrée au sejour irrégulier d'un etranger en France, soustraction à l'erécution d'une mesure de reconduite a la frontière

26/2/2012 par le Tribunal Correctionnel de Paris à 8 mois d'emprisonnement pour recel de bien Provenant d'un vol, vol commis dans un véhicule au transport collectif de voyageurs

09/01/2014 par le Tribunal Correctionnel de Paris à 4 mois d'emprisonnement pour voi commis dans un lieu destiné à lacces a un moyen de transport collectif de voyageurs (récidive) 21/08/2014 par le Tribunal Correctionnel de Paris à 4 mois d'emprisonnement pour tecel de bien provenant d'un vol (récidive)

04/03/2015 par le Tribunal Correctionnel de Paris à 2 mois d'emprisonnement pour vol commis dans un lieu destiné a l'accès à un moyen de transport collectif de voyageurs (récidive)

23/06/2015 par le Tribunal Correctionnel de Paris à 4 mois d'emprisonnement pour recel de bien provenant d'un vol (récidive) :

29/01/2016 par le Tribunal Correctionnel de Paris à 8 mois d'emprisonnemen: dont 3 mois assorti d'une mise a répreuve pendant 2 ans pour usage illicite de stupéfiants, recel de bien provenani d'un vol (récidive), vol (récidive), port sans motif légitime d'arme blanche ou incapacitante de catégorie D voi commis dans un vehicule affecté au transport collectif de voyageurs (récidive), (révocation totale du sursis avec mise à l'epreuve)

06/04/2016 par la Chambre des Appels Correctionnels de Paris à 4 mois d'emprisonnement pour usage illicite de stupéfiants (recidive) :

12/11/2016 par le Tribunal Correctionnel de Bobigny à 4 mois d'emprisonnement pour vol commis dans un véhicule affecté au transport collectif de voyageurs : -

15/05/2017 par le Tribunal Correctionnel de Paris à 5 mois d'emprisonnement pour recel de bien provenant d'un vol (recidive) : -

06/07/2017 par le Tribunal Correctionnel de Bobigny a une contrainte pénale pendant 1 an à titre principal pour vol commis dans un véhicule affecté au transport collectif de voyageurs : ' 14/04/2018 par le Tribunal Correctionnel de Paris a une contrainte pénale pendant 3 ans à titre principal pour vol commis dans un véhicule affecté au transport collectif de voyageurs (récidive) :

20/04/2018 par le Tribunal Correctionnel de Paris a 4 mois d'emprisonnement pour vol commis dans un véhicule affecté au transport collectif de voyageurs .

07/01/2019 par le Tribunal Correctionnel de Paris à 6 mois d'emprisonnement pout vol commis dans un lieu destiné à l'acces a un moyen de transport collectif de voyageurs (récidive) : 08/07/2019 par le Tribunal Correctionnel de Paris a 5 mois d'emprisonnement pour vol commis dans un véhicule affecté au transport collectif de voyageurs (récidive)

21/10/2019 par le Tribunal Correctionnel de Bobigny à 1 an d'emprisonnement pour vol commis dans un véhicule affecté au transport collectif de voyageurs (récidive) : .

16/09/2020 par le Président du Tribunal judiciaire de Bobigny à 8 mois d'emprisonnement vol-commis dans un véhicule affecté au transport collectif de voyageurs (recidive) :

26/02/2021 par le Tribunal Correctionnel de Bobigny a 6 mois d'emprisonnement avec sursis probatoire pendant 2 ans pour vol commis dans un véhicule affecté au transport collectif de voyageurs (récidive) :

29/04/2022 par le President du Tribunal de Paris à 4 mois d'emprisonnement pour vol commis dans un vehicule affecté au transport collectif de voyageurs.

Il ne peut qu'être constaté que les mesures de contrainte sont demeurées sans effet et qu'en retenant les six dernières condamnations, sur les cinq dernières années, M. [T] a cumulé trois ans et neuf mois d'emprisonnement.

Or aucune pièce n'accrédite de la volonté d'insertion ou de réhabilitation de M. [T], de sorte que la menace à l'ordre public perdure donc au sens de l'article L.742-5 précité et doit être considérée comme établie à la date à laquelle le préfet a saisi le juge. L'administration peut donc se fonder sur cette disposition, sans qu'il y ait lieu de statuer les autres critères, pour solliciter une troisième prolongation de rétention.

Il convient donc d'infirmer l'ordonnance critiquée, de constater que les critères d'une troisième prolongation sont établis et de prononcer la prolongation de la rétention pour une durée de 15 jours.

PAR CES MOTIFS

INFIRMONS l'ordonnance,

Statuant à nouveau,

ORDONNONS la prolongation de la mesure de rétention pour une durée de 15 jours à compter du

16 juillet 2024;

ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d'une expédition de la présente ordonnance.

Fait à Paris le 18 juillet 2024 à

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :

Pour information :

L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.

Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.

Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

Le préfet ou son représentant L'intéressé

L'avocat de l'intéressé L'avocat général


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 24/03248
Date de la décision : 18/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-18;24.03248 ?
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