La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/07/2024 | FRANCE | N°24/06799

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 5, 11 juillet 2024, 24/06799


Copies exécutoires République française

délivrées aux parties le : Au nom du peuple français





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 5





ORDONNANCE DU 11 JUILLET 2024

(n° /2024)





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/06799 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJHUC



Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 Février 2024 du Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2022058600



Nature de la décision : Contradictoire



NOUS, Laurent NAJEM

, Conseiller, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assisté de Cécilie MARTEL, Greffière.



Vu l'assignation en référé délivrée à la requête de :





DEMANDEUR

...

Copies exécutoires République française

délivrées aux parties le : Au nom du peuple français

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 5

ORDONNANCE DU 11 JUILLET 2024

(n° /2024)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/06799 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJHUC

Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 Février 2024 du Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2022058600

Nature de la décision : Contradictoire

NOUS, Laurent NAJEM, Conseiller, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assisté de Cécilie MARTEL, Greffière.

Vu l'assignation en référé délivrée à la requête de :

DEMANDEUR

S.A.S. ARCHIPEL

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par la SELARL BAECHLIN MOISAN Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L34

Et assistée de Me Philippe BRUNSWICK de la SELEURL PBRU CONSEIL, avocat plaidant au barreau de PARIS, toque : P299

à

DÉFENDEUR

Monsieur [E] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Et assisté de Me Victor LEFEBVRE substituant Me Victor CHAMPEY de la SELARL BERENICE AVOCATS, avocat plaidant au barreau de PARIS, toque : C2056

Et après avoir appelé les parties lors des débats de l'audience publique du 18 Juin 2024 :

Un jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 23 février 2024 a :

- condamné la SAS Archipel à payer à M. [E] [Y] la somme de 405 000 euros au titre du Complément de Prix N°2 du contrat de cession de 2015, augmentée d'intérêt au taux légal à compter du 7 avril 2022,

- ordonné la capitalisation des intérêts,

- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;

- condamné la SAS Archipel à payer à M. [E] [Y] la somme de 10 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SAS Archipel aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 70,86 € dont 11,60 € de TVA.

La société Archipel a interjeté appel de cette décision par déclaration en date du 25 mars 2024.

Par acte d'huissier en date du 18 avril 2024, la société Archipel a fait citer M. [Y] devant le premier président de la cour d'appel de Paris, en référé aux fins de voir :

- juger que le jugement dont appel, rendu le 23 février 2024 par le Tribunal de commerce de Paris (RG n°2022058600) comporte des moyens sérieux de réformation et d'annulation et que la poursuite de l'exécution provisoire de droit attachée audit jugement entraînerait des conséquences manifestement excessives pour la société Archipel ;

En conséquence,

- ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire attachée au jugement du 23 février 2024 du tribunal de commerce de Paris (RG n°2022058600) ;

- condamner M. [E] [Y] au paiement de la somme de 7.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [E] [Y] aux entiers dépens.

Suivant conclusions déposées et développées à l'audience du 18 juin 2024 par son conseil, la société Archipel maintient ses demandes.

Suivant conclusions déposées à l'audience et développées oralement par son conseil, M. [Y] demande de :

- juger que la société Archipel ne démontre pas l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de reformation du jugement rendu le 23 février 2024 par le tribunal de commerce de Paris, ce qui, en soi, suffit à faire échec à sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire ;

Subsidiairement, juger que la société Archipel ne démontre pas l'existence de conséquences manifestement excessives qu'entraînerait pour elle l'exécution du jugement rendu le 23 février 2024 par le Tribunal de commerce de Paris ;

En conséquence,

- débouter la société Archipel de sa demande visant à voir ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire attachée au jugement rendu le 23 février 2024 par le tribunal de commerce de Paris ;

- débouter la société Archipel de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- condamner la société Archipel à payer à M. [E] [Y] une somme de 8.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamner la société Archipel aux entiers dépens de l'instance.

Conformément aux dispositions des articles 446-1 et 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour l'exposé des moyens développés au soutien de leurs prétentions respectives.

MOTIVATION

Sur la demande principale

Il résulte de l'article 514-3 du code de procédure civile qu'en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.

Il est rappelé que les deux conditions prévues par l'article 514-3 du code de procédure civile sont cumulatives et que les conséquences manifestement excessives s'apprécient, s'agissant des condamnations pécuniaires, par rapport aux facultés de paiement du débiteur et aux facultés de remboursement de la partie adverse en cas d'infirmation de la décision assortie de l'exécution provisoire. Elles supposent un préjudice irréparable et une situation irréversible en cas d'infirmation.

La société Archipel fait valoir que sa situation est très fragile et que l'exécution du jugement la placerait en état de cessation de paiement. Elle rappelle que plusieurs saisies de M. [Y] se sont révélées infructueuses.

Elle fait valoir qu'elle a saisi le tribunal de commerce d'une demande d'ouverture de procédure collective d'apurement du passif ; qu'elle a effectué une demande de déclaration de cessation des paiements ; qu'elle a sollicité le renvoi dans l'attente de la présente décision ; que le seul actif disponible a été saisi par M. [Y] ; que la réduction de capital ne modifiera nullement sa situation financière.

En réponse, M. [Y] fait valoir que la société Archipel ne produit pas ses comptes sociaux récents complets ; que les documents versés sont inexploitables ; que la demanderesse a fait disparaître ou lourdement déprécié quasiment tous ses postes d'actif, soit près de 90 % de son actif en un an ; que l'expert-comptable indique simplement que la situation de trésorerie actuelle ne permet pas de faire face à cette dette. Il considère qu'il est tout à fait possible pour la demanderesse de récupérer les fruits d'une ou plusieurs participations qu'elle détient.

Comme le relève M. [Y], en première instance, la société Archipel a sollicité que l'exécution provisoire soit écartée, sans faire valoir l'existence de difficultés financières mais en alléguant uniquement un risque de non-restitution des sommes en cas d'infirmation de la décision à intervenir.

La société Archipel ne publie pas ses comptes annuels et dans le cadre de la présente procédure, elle ne verse pas ses comptes de manière exhaustive (ses pièces 23, 24 et 30). Ainsi, il n'est pas possible de connaître le détail des postes mentionnés et aucune annexe n'est produite.

Elle ne permet donc pas à la présente juridiction de s'assurer de la réalité de sa situation, dans le cadre d'un débat contradictoire.

En outre, M. [Y] note légitimement que la rubrique " autres immobilisations financières " qui faisait apparaître la somme de 962 648,07 euros le 28 février 2023, ne figure plus au 29 février 2024. Les " autres créances " pour 358 278,16 euros au 28 février 2023 ne sont plus mentionnées que pour la somme de 15 629 euros au 29 février 2024. Les " autres participations " se retrouvent dépréciées de plus de 40 %.

Il en résulte qu'en un an, l'actif total a été diminué de près de 90 %.

En l'absence de pièces comptables exhaustives, il n'est pas possible de s'assurer des raisons d'une telle évolution.

M. [Y] expose que le 29 mai 2024, la société Archipel a déposé au greffe du tribunal de commerce de Paris une délibération de ses associés intervenue le 29 mars 2021 (sa pièce 23) dont il résulte une réduction de capital. Il relève à juste titre qu'il en ressort l'annulation de 596 de ses propres actions rachetées pour 951 293,20 euros (950 697,20 euros + 596 euros).

L'expert-comptable de la société Archipel expose dans un courriel du 17 juin 2024 (pièce 32) que les titres auto-détenus n'ont pas disparu et que compte-tenu de la décision de régulariser juridiquement la situation, cet actif a été provisionné à 100 % soit la somme de 951 293,20 euros, afin de prendre en compte la valeur économique de ces titres à 0. Il indique que la dotation aux provisions de ce montant affecte négativement les capitaux propres de ce montant et diminue le passif de la société d'un montant de 951 293,20 euros.

Cependant, le capital social est toujours mentionné à hauteur de 5 965 euros (pièce 31), ce dont il résulte que la diminution du capital n'a pas été répercutée 3 ans après la décision en ce sens et que la diminution de l'actif total n'est pas davantage intervenue immédiatement à la suite de la décision de 2021 mais n'apparaît qu'en 2024, au seul titre des pièces versées dans le cadre de la présente instance.

Il en résulte une opacité de la situation financière de la société Archipel que la production partielle des comptes ne permet pas de lever.

A ce titre, l'attestation de l'expert-comptable apparaît trop succincte en ce que ce dernier fait uniquement état de ce que la situation de trésorerie actuelle de la société ne permet pas de faire face au règlement d'une dette de 405 000 euros, sans que le montant de la trésorerie ne soit précisé.

Enfin, la société Archipel détient des participations dans deux sociétés qu'elle peut également céder.

Au regard des éléments pour le moins lacunaires produits et des anomalies qui y ont été relevés, la société Archipel ne justifie pas des conséquences manifestement illicites qu'elle invoque alors qu'une telle preuve lui incombe.

Par conséquent, et sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens sérieux allégués, les deux conditions de l'article 514-3 du code de procédure civile étant cumulatives, il y a lieu de rejeter la demande d'arrêt de l'exécution provisoire.

La société Archipel sera condamnée aux dépens ainsi qu'à payer la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Rejetons la demande d'exécution provisoire formée par la société Archipel ;

Condamnons la société Archipel à payer à M. [Y] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons la société Archipel aux dépens ;

ORDONNANCE rendue par M. Laurent NAJEM, Conseiller, assisté de Mme Cécilie MARTEL, greffière présente lors de la mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

La Greffière, Le Conseiller


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 24/06799
Date de la décision : 11/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-11;24.06799 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award