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05/07/2024 | FRANCE | N°24/00365

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 12, 05 juillet 2024, 24/00365


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS





Pôle 1 - Chambre 12





SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT





ORDONNANCE DU 05 JUILLET 2024



(n°365, 4 pages)







N° du répertoire général : N° RG 24/00365 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJT72



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 24 Juin 2024 -Tribunal Judiciaire de PARIS (Juge des Libertés et de la Détention) - RG n° 24/01940



L'audience

a été prise au siège de la juridiction, en audience publique, le 01 Juillet 2024



Décision réputée contradictoire



COMPOSITION



Stéphanie GARGOULLAUD, président de chambre à la cour d'appel, agissant...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 12

SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT

ORDONNANCE DU 05 JUILLET 2024

(n°365, 4 pages)

N° du répertoire général : N° RG 24/00365 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJT72

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 24 Juin 2024 -Tribunal Judiciaire de PARIS (Juge des Libertés et de la Détention) - RG n° 24/01940

L'audience a été prise au siège de la juridiction, en audience publique, le 01 Juillet 2024

Décision réputée contradictoire

COMPOSITION

Stéphanie GARGOULLAUD, président de chambre à la cour d'appel, agissant sur délégation du Premier Président de la cour d'appel de Paris,

assisté de Joanna FABBY, greffier lors des débats et de Roxane AUBIN, lors de la mise à disposition de la décision

APPELANTE

Madame [N] [H] (Personne faisant l'objet de soins)

née le 01/04/2000 à [Localité 5]

demeurant SDC

Actuellement hospitalisée au GHU [Localité 3] psychiatrie et neurosciences site [4]

comparante en personne, assistée de Me Cécile CHAUMEAU, avocat commis d'office au barreau de Paris,

INTIMÉ

M. LE DIRECTEUR DU GHU [Localité 3] PSYCHIATRIE SITE [4],

demeurant [Adresse 1]

non comparant, non représenté,

TIERS

Mme [D] [K] [B]

demeurant [Adresse 2]

non comparante, non représentée,

MINISTÈRE PUBLIC

Représenté par Mme Brigitte AUGIER DE MOUSSAC, avocate générale,

Comparante,

DÉCISION

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE,

Mme [H] a été admise en soins psychiatriques sans consentement le 13 juin par une décision prise par le directeur d'établissement, en urgence à la demande d'un tiers (sa cousine germaine).

Par requête enregistrée le 17 juin 2024, le directeur d'établissement a saisi le juge des libertés et de la détention dans le cadre du contrôle obligatoire de la mesure prévu à l'article L. 3211-12-1 du code de la santé publique.

Par ordonnance du 24 juin, le juge des libertés et de la détention a ordonné la poursuite de la mesure.

Mme [H] a interjeté appel de cette ordonnance le 25 juin 2024.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 1er juillet 2024.

L'audience s'est tenue au siège de la juridiction, en audience publique.

L'avocate de Mme [H] soutient que la procédure est irrégulière pour deux motifs :

- Les conditions de l'article L. 3212-3 ne sont pas réunies à défaut de démonstration du risque à l'intégrité de la patiente ;

- La notification des décisions du 13 juin et du 16 juin est tardive pour être intervenue le 17 juin, ce qui lui cause nécessairement un grief.

L'avocat général constate qu'aucun grief n'est établi du fait d'une notification qui est intervenue dès que possible, le 17 juin, sans qu'aucun grief ne soit démontré. Sur le maintien de la mesure, il est relevé que le certificat de situation ne contient aucun élément justifiant la poursuite de la mesure. A ce titre, le ministère public conclut à la mainlevée de la mesure.

Le certificat médical de situation du 28 juin 2024 relève que la patiente n'est pas connue du secteur et ne présente pas d'antécédent psychiatrique. Il ajoute que " Les faits récents sont marqués par un nomadisme depuis plus un an sous tendu par des idées délirantes et une désorganisation de la pensée. Elle se présente au CPOA en demande d'aide en l'absence de logement de nuit. Depuis son arrivée, la patiente est calme et n'a pas présenté de trouble du comportement dans l'unité. L'évolution clinique reste fragile, il persiste une discordance idéo-affective, des raisonnements paralogiques, des idées de culpabilité, un vécu persécutif vis-à-vis de ses parents avec des ruminations. Elle présente un trouble du jugement. La conscience des troubles reste fragile et il persiste une ambivalence aux soins. Cet état nécessite encore la poursuite de la mesure de soins sans consentement en hospitalisation complète afin de poursuivre : -l'évaluation diagnostique -l'adaptation des traitements et la surveillance de leur efficacité -l'élaboration d'un projet de soins et médico-social pour la suite pour elle. "

MOTIVATION,

L'office du juge judiciaire implique un contrôle relatif à la fois à la régularité de la décision administrative d'admission en soins psychiatriques sans consentement et au bien-fondé de la mesure, en se fondant sur des certificats médicaux.

Il résulte de l'article L. 3216-1 du code de la santé publique que l'irrégularité affectant une décision administrative de soins psychiatriques sans consentement n'entraîne la mainlevée de la mesure que s'il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en fait l'objet. Il appartient donc au juge de rechercher, d'abord, si l'irrégularité affectant la procédure est établie, puis, dans un second temps, si de cette irrégularité résulte une atteinte aux droits de l'intéressé.

Dans l'exercice de son office, le juge ne saurait se substituer au médecin dans l'appréciation de l'état mental du patient et de son consentement aux soins (1re Civ., 27 septembre 2017, n°16-22.544).

Sur la notification des décisions relatives aux soins psychiatriques sans consentement

Le deuxième alinéa de l'article L.3211-3 du code de la santé publique prévoit que " Avant chaque décision prononçant le maintien des soins en application des articles L. 3212-4, L. 3212-7 et L. 3213-4 ou définissant la forme de la prise en charge en application des articles L. 3211-12-5, L. 3212-4, L. 3213-1 et L. 3213-3, la personne faisant l'objet de soins psychiatriques est, dans la mesure où son état le permet, informée de ce projet de décision et mise à même de faire valoir ses observations, par tout moyen et de manière appropriée à cet état. "

En outre, toute personne faisant l'objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale est informée :

a) Le plus rapidement possible et d'une manière appropriée à son état, de la décision d'admission et de chacune des décisions mentionnées au deuxième alinéa du présent article, ainsi que des raisons qui les motivent ;

b) Dès l'admission ou aussitôt que son état le permet et, par la suite, à sa demande et après chacune des décisions mentionnées au même deuxième alinéa, de sa situation juridique, de ses droits, des voies de recours qui lui sont ouvertes et des garanties qui lui sont offertes en application de l'article L. 3211-12-1.

L'avis de cette personne sur les modalités des soins doit être recherché et pris en considération dans toute la mesure du possible. "

En l'espèce, il résulte des pièces du dossier que les décisions du 13 juin et du 16 juin ont été notifiées ensemble le 17 juin, lorsque l'intéressée a été en mesure de recevoir cette notification ainsi qu'il résulte du certificat des 72 heures du 16 juin, précédent de 24 heures la notification, dans des circonstances qui ne sont pas de nature à porter atteinte aux droits de Mme [H]. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur les conditions de poursuite de la mesure

L'article L. 3212-3 du code de la santé publique prévoit en cas d'urgence, lorsqu'il existe un risque grave d'atteinte à l'intégrité de la personne, que le directeur d'un établissement peut à titre exceptionnel, prononcer à la demande d'un tiers, l'admission en soins psychiatriques d'une personne malade au vu d'un seul certificat médical émanant le cas échéant d'un médecin exerçant dans l'établissement.

Il est rappelé que les conditions d'urgence et de risque d'atteinte à l'intégrité doivent être caractérisées lors de l'admission mais non lors des prolongations des mesures (1re Civ., 20 mars 2024, pourvoi 22-21.919).

Cependant, le maintien de la mesure à l'égard d'une personne atteinte de troubles mentaux ne s'impose que si sont réunies les conditions prévues à l'article L.3212-1 du code de la santé publique :

1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l'article L.3211-2-1.

En l'espèce, le certificat médical de situation du 28 juin 2024 relève que la patiente n'est pas connue du secteur et ne présente pas d'antécédent psychiatrique. Il ajoute que " Les faits récents sont marqués par un nomadisme depuis plus un an sous tendu par des idées délirantes et une désorganisation de la pensée. Elle se présente au CPOA en demande d'aide en l'absence de logement de nuit. Depuis son arrivée, la patiente est calme et n'a pas présenté de trouble du comportement dans l'unité. L'évolution clinique reste fragile, il persiste une discordance idéo-affective, des raisonnements paralogiques, des idées de culpabilité, un vécu persécutif vis-à-vis de ses parents avec des ruminations. Elle présente un trouble du jugement. La conscience des troubles reste fragile et il persiste une ambivalence aux soins. Cet état nécessite encore la poursuite de la mesure de soins sans consentement en hospitalisation complète afin de poursuivre :

-l'évaluation diagnostique

-l'adaptation des traitements et la surveillance de leur efficacité

-l'élaboration d'un projet de soins et médico-social pour la suite pour elle. "

Ces constatations médicales, qui évoquent certes une fragilité et un trouble du jugement, ne caractérisent pas les troubles mentaux rendent impossible son consentement, ni n'établissent qu'une surveillance médicale constante s'impose pour établir le projet " médico-social " envisagé.

A ce stade, et alors que les pièces précitées ont été soumises au débat contradictoire, il n'est donc pas établi que les troubles psychiques décrits nécessitent à ce jour des soins en hospitalisation complète.

En conséquence, et conformément aux réquisitions du Ministère public, il y a lieu d'ordonner la levée de la mesure.

Toutefois, en application de l'article L. 3211-12, III, alinéa 2, du code de la santé publique et au regard de la situation de Mme [H] telle que décrite par les certificats médicaux, il y a lieu de décider que cette mainlevée sera différée, dans un délai maximal de 24 heures, afin qu'un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi.

PAR CES MOTIFS,

Le magistrat du premier président, statuant en dernier ressort, publiquement, par décision réputée contradictoire mise à disposition au greffe

DÉCLARE l'appel recevable,

INFIRME l'ordonnance du juge des libertés et de la détention,

ORDONNE la mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète de Mme [N] [H],

DECIDE que cette mainlevée prend effet dans un délai maximal de 24 heures, afin qu'un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi ;

LAISSE les dépens à la charge de l'État.

Ordonnance rendue le 05 JUILLET 2024 par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DÉLÉGATAIRE

Une copie certifiée conforme notifiée le 05/07/2024 par fax / courriel à :

X patient à l'hôpital

ou/et ' par LRAR à son domicile

X avocat du patient

X directeur de l'hôpital

X tiers par LS

' préfet de police

' avocat du préfet

' tuteur / curateur par LRAR

X Parquet près la cour d'appel de Paris


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 24/00365
Date de la décision : 05/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-05;24.00365 ?
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