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05/07/2024 | FRANCE | N°22/06555

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 4, 05 juillet 2024, 22/06555


Copies exécutoires République française

délivrées aux parties le : Au nom du peuple français





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 4





ORDONNANCE DU 05 JUILLET 2024

(n° , 4 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/06555 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFR6L



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 02 Mars 2022 Cour d'Appel de PARIS - RG n° 18/15283



Nature de la décision : Par défaut



NOUS, Anne-Gaël BLANC, Conseillèr

e, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assistée de Sonia DAIRAIN, Greffière.



Statuant sur le recours formé par :





DEMANDERESSE



PIASA

[Adresse 4]

[L...

Copies exécutoires République française

délivrées aux parties le : Au nom du peuple français

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 4

ORDONNANCE DU 05 JUILLET 2024

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/06555 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFR6L

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 02 Mars 2022 Cour d'Appel de PARIS - RG n° 18/15283

Nature de la décision : Par défaut

NOUS, Anne-Gaël BLANC, Conseillère, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assistée de Sonia DAIRAIN, Greffière.

Statuant sur le recours formé par :

DEMANDERESSE

PIASA

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentée par Me Anne LAKITS, avocat au barreau de PARIS, toque : C0765, substituée par Me SCHLEGEL

contre

DEFENDEURS

Monsieur [K] [T]

[Adresse 3]

[Localité 6]

représenté par Me DEVAUX, avocat au barreau de Paris, toque B522

SCI COMPENDIO GALLERY- sans retour de convocation ni d'AR

[Adresse 7]

[Localité 2] ITALIE

Monsieur [F] [I]- sans retour de convocation ni d'AR

[Adresse 8]

[Localité 1] ITALIE

Défaillants

Et après avoir appelé les parties lors des débats de l'audience publique du 03 Juin 2024 :

Le 8 octobre 2014, la société Compendio Gallery et M. [I] ont confié différents objets à la société Piasa, dont une paire d'appliques Concetto Spaziale Max Ingrand, afin que ceux-ci soient vendus aux enchères.

Soutenant que ces objets avaient été endommagés par leur dépositaire, la société Compendio Gallery et M. [I] ont assigné la société Piasa pour voir notamment ordonner à cette dernière de lui restituer les appliques en valeur et obtenir une indemnisation de leur préjudice.

Par jugement du 8 mars 2018, le tribunal de grande instance de Paris a condamné la société Piasa à réparer le préjudice subi.

Par arrêt du 2 juin 2020, la cour d'appel de Paris, infirmant partiellement le jugement, a ordonné une expertise judiciaire confiée à M. [T] aux fins de procéder notamment à l'examen de l'authenticité des appliques, à leur estimation, d'apprécier si elles étaient ou non réparables et de chiffrer le coût éventuel de leur réparation ou de la moins-value. Une consignation de 2 500 euros était mise à la charge de la société Piasa.

Le 28 décembre 2021, l'expert a déposé son rapport qui concluait au caractère authentique des appliques et au fait qu'elles n'étaient pas réparables.

Le 12 janvier 2022, l'expert a demandé la fixation de ses honoraires à hauteur de 8 770 euros HT soit 10 524 euros TTC.

La société Piasa a contesté ce montant au regard des diligences effectuées.

Par une ordonnance du 2 mars 2022, le conseiller taxateur près la cour d'appel de Paris a fixé la rémunération de l'expert à la somme de 10 428 euros TTC, en rapportant à deux les quatre heures décomptées au titre des frais de déplacement et dit que le solde des honoraires était de 7 928 euros.

La société Piasa a formé un recours contre cette ordonnance.

A l'audience du 3 juin 2024, soutenant oralement ses conclusions écrites, elle demande au délégué du premier président de :

- déclarer la société Piasa recevable et bien fondée en son recours ;

Et y faisant droit,

- infirmer l'ordonnance du 2 mars 2022 ;

Et statuant à nouveau,

- fixer la rémunération de l'expert à la somme de 3 475 euros HT soit 4 530 TTC.

Au soutien de ses prétentions, elle fait notamment valoir que, contrairement à ce qu'il affirme, l'expert n'a pas annoncé le coût total de ses honoraires lors de la première réunion et que, au regard de la valeur des appliques, soit 13 000 euros, le montant de ceux-ci est disproportionné.

Elle ajoute que le temps facturé, qu'il concerne les déplacements, les réunions, les recherches ou la rédaction, est surévalué.

L'expert, soutenant oralement ses conclusions écrites, demande au délégué du premier président de :

- débouter la société Piasa de ses prétentions et de confirmer l'ordonnance entreprise ;

- condamner la société Piasa à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il soutient qu'il a informé les parties du montant de ses honoraires dès la première réunion ce qui est confirmé par son message du 12 décembre 2021. Il ajoute qu'en la matière la durée des recherches étant difficilement anticipable, cette information en amont est nécessairement sujette à caution. Il fait valoir que son temps de travail n'a pas été surévalué et souligne qu'il ne facture pas un certain nombre de frais et que le taux horaire applicable à ses frais de déplacement est inférieur à l'usage. Concernant les heures retenues, il souligne qu'elles intègrent notamment la marge prise lors des trajets, des déplacements dans des bibliothèques ou chez des restaurateurs de verre, le temps de préparation de la réunion et des recherches qui n'ont pas abouti et qui sont dès lors difficilement objectivables.

SUR CE,

L'article 724 du code de procédure civile dispose que les décisions mentionnées aux articles 255, 262 et 284, émanant d'un magistrat d'une juridiction de première instance ou de la cour d'appel, peuvent être frappées de recours devant le premier président de la cour d'appel dans les conditions prévues aux articles 714 (alinéa 2) et 715 à 718.

Si la décision émane du premier président de la cour d'appel, elle peut être modifiée dans les mêmes conditions par celui-ci.

Le délai court, à l'égard de chacune des parties, du jour de la notification qui lui est faite par le technicien.

Le recours et le délai pour l'exercer ne sont pas suspensifs d'exécution. Le recours doit, à peine d'irrecevabilité, être dirigé contre toutes les parties et contre le technicien s'il n'est pas formé par celui-ci.

En l'espèce, à titre liminaire, il sera observé que le recours a été dénoncé aux autres parties, de sorte qu'il est recevable.

Concernant le fond, en application de l'article 284, alinéa 1er, du code de procédure civile, le juge fixe la rémunération de l'expert en fonction notamment des diligences accomplies, du respect des délais impartis et de la qualité du travail fourni.

L'utilisation de l'adverbe 'notamment' permet au juge taxateur de ne pas limiter son appréciation aux seuls critères énoncés par l'article 284.

Par ailleurs, l'article 280, alinéa 2, du code de procédure civile dispose que, en cas d'insuffisance manifeste de la provision allouée, au vu des diligences faites ou à venir, l'expert en fait sans délai rapport au juge, qui, s'il y a lieu, ordonne la consignation d'une provision complémentaire à la charge de la partie qu'il détermine. A défaut de consignation dans le délai et selon les modalités fixées par le juge, et sauf prorogation de ce délai, l'expert dépose son rapport en l'état.

Ces dispositions, visant à ce que la provision consignée soit aussi proche que possible de la rémunération définitive, ont pour finalité de garantir le règlement des honoraires de l'expert, ainsi protégé contre une éventuelle insolvabilité ou un refus de paiement du débiteur. Elles permettent également aux parties d'apprécier le coût de la mesure d'instruction ordonnée et d'évaluer l'intérêt qu'elles peuvent avoir, eu égard au montant du litige, à poursuivre dans cette voie ou, au contraire, à y renoncer.

Il ressort de ce qui précède que, dès lors qu'il tient compte aussi des critères énumérés à l'article 284 du code de procédure civile, le juge peut sans méconnaître les exigences de ce texte, fixer la rémunération de l'expert en prenant en considération l'écart entre le montant des provisions accordées et celui de la rémunération réclamée à l'issue de l'expertise ( 2e Civ., 25 févr. 2010, n° 08-20495).

Il suffit que le juge ait pris en compte plusieurs critères, tenant notamment aux diligences et à la qualité du travail de l'expert, pour que sa décision soit justifiée, et ce même si seul le critère tenant à l'écart entre les provisions et la rémunération réclamée s'avère défavorable à l'expert.

Au cas présent, au regard des pièces produites et du contenu du rapport, les diligences dont la réalité est contestée sont suffisamment justifiées par l'expert dans la mesure où les heures facturées intègrent nécessairement la marge prise par l'expert lors de ses déplacements, le temps de préparation de la réunion et des recherches qui n'ont pas nécessairement abouti.

Cependant, la mission de l'expert prévoyait que celui-ci devait indiquer le montant de sa rémunération dans les deux mois de sa désignation.

L'expert fait valoir qu'il a procédé à cette information lors de la réunion qui s'est tenue le 28 mai 2021 ainsi que le confirme un courriel du 12 décembre 2021 qui mentionne un montant des honoraires définitifs compris entre 10 000 et 12 000 euros HT, cohérent avec la somme demandée au titre de sa rémunération finale.

Or, en application de l'article 280, alinéa 2, susmentionné, au regard du montant de 2 500 euros initialement consigné, manifestement insuffisant compte tenu des honoraires définitifs ainsi prévus, il incombait à l'expert d'en faire, sans délai, rapport au juge afin qu'il ordonne, s'il l'estimait nécessaire, une consignation complémentaire et que les parties puissent, en toute connaissance de cause, au regard de l'enjeu du litige, à savoir le remboursement d'appliques de 13 000 euros, apprécier l'opportunité de consigner ou non et de poursuivre les opérations d'expertise ou d'y renoncer.

Or, ce rapport n'a pas été fait.

Dès lors, au regard, d'une part, des diligences accomplies, des délais dans lequel le rapport a été rendu et de la qualité du travail fourni et, d'autre part, de l'absence de demande de consignation complémentaire malgré l'enjeu du litige et la différence entre le montant initialement consigné et celui des honoraires demandés, il convient de limiter le montant des honoraires dus à l'expert et de fixer celui-ci à la somme de 8 000 euros TTC.

L'ordonnance de taxe sera infirmée de ce chef.

M. [T] sera condamné aux dépens de la présente procédure.

La demande au titre des frais irrépétibles sera rejetée.

PAR CES MOTIFS

INFIRMONS l'ordonnance de taxe entreprise ;

FIXONS la rémunération de l'expert à la somme de 8 000 euros TTC ;

ORDONNONS à la société Piasa de payer directement à l'expert le solde restant dû après déduction de la consignation soit 5 500 euros TTC ;

REJETONS les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNONS la société Piasa aux dépens de la présente procédure.

ORDONNANCE rendue par Mme Anne-Gaël BLANC, Conseillère, assistée de Mme Sonia DAIRAIN, greffière lors de la mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

La Greffière, La Conseillère.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 22/06555
Date de la décision : 05/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-05;22.06555 ?
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