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05/07/2024 | FRANCE | N°21/03332

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 05 juillet 2024, 21/03332


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 05 Juillet 2024



(n° , pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 21/03332 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDPZV



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 04 Mars 2021 par le Pole social du TJ d'EVRY RG n° 19/00903



APPELANTE

Madame [S] [Y] épouse [R]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Olivier HASCOE

T, avocat au barreau d'ESSONNE substitué par Me Camille JAMI, avocat au barreau d'ESSONNE



INTIME

CAISSE NATIONALE D'ASSURANCE VIEILLESSE - ILE DE FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 05 Juillet 2024

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 21/03332 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDPZV

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 04 Mars 2021 par le Pole social du TJ d'EVRY RG n° 19/00903

APPELANTE

Madame [S] [Y] épouse [R]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Olivier HASCOET, avocat au barreau d'ESSONNE substitué par Me Camille JAMI, avocat au barreau d'ESSONNE

INTIME

CAISSE NATIONALE D'ASSURANCE VIEILLESSE - ILE DE FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Mme [T] [P] en vertu d'un pouvoir spécial

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Mai 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Raoul CARBONARO, président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Raoul CARBONARO, président de chambre

Madame Carine TASMADJIAN, présidente de chambre

Monsieur Christophe LATIL, Conseiller

Greffier : Madame Agnès ALLARDI, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Monsieur Raoul CARBONARO, président de chambre et par Madame Fatma DEVECI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

La cour statue sur l'appel interjeté par Mme [S] [Y] (l'assurée) d'un jugement rendu le 4 mars 2021 par le tribunal judiciaire d'Évry dans un litige l'opposant à la Caisse nationale d'assurance vieillesse (la caisse).

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de préciser que Mme [S] [Y] a formé un recours devant une juridiction en charge du contentieux de la sécurité sociale à l'encontre de la décision du 15 décembre 2018 par laquelle la Caisse nationale d'assurance vieillesse a rejeté sa demande de bénéfice d'une retraite personnelle au titre de l'inaptitude au travail présentée le 2 juin 2018.

Par ordonnance du 10 avril 2019, le président de la formation de jugement du tribunal de grande instance de Paris a déclaré la juridiction incompétente au profit du tribunal de grande instance d'Évry.

Par jugement en date du 4 mars 2021, le tribunal :

déclare le recours de Mme [S] [Y] recevable ;

déboute Mme [S] [Y] de ses demandes ;

condamne Mme [S] [Y] aux dépens de l'instance.

Le tribunal a jugé qu'en ne produisant pas le rapport médical du médecin-conseil de la caisse sur sa demande de retraite personnelle pour inaptitude, l'assurée ne remettait pas en mesure d'en apprécier la critique. Il a ajouté que les documents médicaux présentés n'étaient pas contemporains de la demande de mise à la retraite.

Le jugement a été notifié par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception remise le 15 mars 2021 à Mme [S] [Y] qui en a interjeté appel par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception adressée le 25 mars 2021.

Par conclusions écrites visées et développées oralement à l'audience par son avocat, Mme [S] [Y] demande à la cour de :

déclarer Mme [S] [Y] recevable et fondée en ses demandes, fins et conclusions ;

y faire droit,

infirmer le jugement entrepris en ses dispositions critiquées dans la déclaration d'appel ;

avant dire-droit sur son recours tendant à bénéficier d'une pension de retraite au titre de l'invalidité, désigner tel médecin expert qu'il plaira au tribunal, avec mission de :

convoquer les parties avec mention qu'elles pourront se faire assister par le médecin conseil de leur choix,

se faire communiquer toutes les pièces des parties et, par tous tiers concernés (médecin, établissement hospitalier, établissement de soins,') toutes les pièces qui ne lui auraient pas été communiquées par les parties et dont la production lui apparaîtrait nécessaire à l'accomplissement de sa mission,

examiner, interroger Mme [S] [Y] et reconstituer l'ensemble des éléments de fait et médicaux ayant conduit à la présente procédure ;

s'adjoindre en cas de besoin le concours de tout spécialiste de son choix, dans un domaine distinct du sien, après en avoir avisé les conseils des parties,

donner tous les éléments de fait et médicaux permettant à la juridiction saisie de déterminer si Mme [S] [Y] présente à titre définitif une incapacité de travail ;

dire si cette incapacité est totale ou partielle et en déterminer le taux ;

dire et juger que l'expertise se fera aux frais avancés de la CNAV ILE DE France,

à titre subsidiaire, si la cour estimait qu'elle n'était pas fondée à solliciter la désignation d'un médecin expert, renvoyer l'affaire pour conclusions des parties au fond ;

réserver les demandes sur le fond de Mme [S] [Y] et les dépens.

Mme [S] [Y] expose qu'elle n'a toujours pas eu connaissance du rapport du médecin conseil ayant fondé la décision de rejet ; que la décision de rejet du 15 décembre 2018 met en avant la décision, du médecin en indiquant que ce dernier n'a pas considéré que son état de santé justifiait la demande ; qu'elle n'a jamais reçu copie de cet avis défavorable du médecin du travail ; que pourtant, depuis plusieurs années, son état de santé l'empêche de travailler ; qu'elle n'a pas pu être prise en charge par la Caisse primaire d'assurance-maladie du fait qu'elle se trouvait au chômage, en fin de droit ; que les examens qu'elle produit justifient de son état d'invalidité ; que son taux d'incapacité fonctionnelle est de 35 % ; qu'il a été évalué à 100% au plan professionnel en 2007 ; que son état de santé est confirmé par les nouvelles pièces médicales qu'elle produit ; que le recours à une expertise est donc nécessaire.

Par conclusions écrites visées et développées oralement à l'audience par son représentant, la Caisse nationale d'assurance vieillesse demande à la cour de :

confirmer qu'au 01 août 2018, Mme [S] [Y] ne présentait pas à titre définitif une incapacité de travail au moins égale à 50 % ;

confirmer en conséquence la décision de la Caisse nationale d'assurance vieillesse Ile-de-France du 15 décembre 2018 ;

débouter Mme [S] [Y] de ses demandes, fins et conclusions.

La Caisse nationale d'assurance vieillesse expose qu'à la demande de liquidation de sa retraite, l'assurée n'a pas atteint l'âge du taux plein et ne remplissait pas la condition de durée d'assurance requise ; que conformément à l'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale, l'assuré reconnu inapte au travail dans les conditions prévues à l'article L. 351-7 peut cependant bénéficier du taux plein (taux maximum de 50 %) pour le calcul de sa pension dès l'âge légal de départ en retraite même s'il ne justifie pas de la durée d'assurance requise ; qu'est considéré inapte au travail, l'assuré qui ne peut pas travailler sans nuire gravement à sa santé et se trouve définitivement atteint d'une incapacité de travail médicalement constatée de 50 % ; que le médecin conseil a rendu un avis défavorable à l'attribution d'une pension de retraite pour inaptitude au travail, l'incapacité définitive de travail étant inférieure au taux de 50 % ; que le médecin conseil ne peut communiquer son rapport sans demande expresse de l'assurée, ce qu'elle n'a pas fait.

SUR CE

L'article L. 351-8 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue de la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 applicable au litige, dispose que :

« Bénéficient du taux plein même s'ils ne justifient pas de la durée requise d'assurance ou de périodes équivalentes dans le régime général et un ou plusieurs autres régimes obligatoires :

1° Les assurés qui atteignent l'âge prévu à l'article L. 161-17-2 augmenté de cinq années ;

1° bis Les assurés ayant interrompu leur activité professionnelle en raison de leur qualité d'aidant familial telle que définie à l'article L. 245-12 du code de l'action sociale et des familles qui atteignent l'âge de soixante-cinq ans dans des conditions déterminées par décret en Conseil d'Etat ;

1° ter Les assurés justifiant d'une incapacité permanente au moins égale à un taux fixé par décret, qui atteignent l'âge mentionné à l'article L. 161-17-2 ;

2°) les assurés reconnus inaptes au travail dans les conditions prévues à l'article L. 351-7 ;

3°) les anciens déportés ou internés titulaires de la carte de déporté ou interné de la Résistance ou de la carte de déporté ou interné politique ;

4°) les mères de famille salariées justifiant d'une durée minimum d'assurance dans le régime général, ou dans ce régime et celui des salariés agricoles qui ont élevé au moins un nombre minimum d'enfants, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article L.342-4, et qui ont exercé un travail manuel ouvrier pendant une durée déterminée ;

4° bis) les travailleurs handicapés admis à demander la liquidation de leur pension de retraite avant l'âge prévu au premier alinéa de l'article L. 351-1 ;

5°) les anciens prisonniers de guerre lorsque, sur leur demande, leur pension est liquidée à un âge variant suivant la durée de captivité dans des conditions fixées par décret.

Les anciens prisonniers de guerre évadés de guerre, au-delà d'un certain temps de captivité, et les anciens prisonniers rapatriés pour maladie peuvent choisir le régime le plus favorable.

Toute partie de mois n'est pas prise en considération.

Les dispositions du 5°) ci-dessus s'appliquent à tous les anciens combattants pour leur durée de service actif passé sous les drapeaux ».

L'article R. 351-21 du même code énonce que :

« La définition contenue dans l'article L. 351-7 est applicable à l'inaptitude au sens des articles L. 351-8, L. 357-10 et L. 357-14 et de l'article R. 351-31.

Le taux d'incapacité de travail prévu à l'article L. 351-7 est fixé à 50 %.

Pour apprécier si le requérant n'est pas en mesure de poursuivre l'exercice de son emploi sans nuire gravement à sa santé, il est tenu compte, lorsque l'intéressé n'exerce aucune activité professionnelle au moment de sa demande, de la dernière activité exercée au cours des cinq années antérieures. Au cas où aucune activité professionnelle n'a été exercée durant cette période, l'inaptitude au travail est appréciée exclusivement par référence à la condition d'incapacité de travail de 50 % médicalement constatée compte tenu des aptitudes physiques et mentales à l'exercice d'une activité professionnelle.

La procédure de reconnaissance de l'inaptitude est, dans tous les cas, celle qui est prévue à l'article R. 351-22 ci-après ».

L'article R. 351-22 précise les modalités d'adressage par le médecin traitant de l'assuré social certificat médical descriptif de l'état d'invalidité de celui-ci au médecin-conseil de la caisse.

Il résulte de ces textes que, l'assurée qui n'avait pas atteint l'âge légal pour solliciter la liquidation de sa retraite à taux plein pouvait bénéficier, sur preuve d'un état d'invalidité caractérisée par un taux d'incapacité de travail de 50 %, d'une pension à taux plein, dès lors qu'elle exerçait aucune activité professionnelle à la date de la demande de liquidation.

La date de référence à prendre en considération est la date de la demande de liquidation de la retraite, de telle sorte que les pièces médicales postérieures l'année 2018 ne sont d'aucun emport sur la solution du litige.

En l'espèce, Mme [S] [Y] ne dépose pas les documents remis par son médecin traitant à la caisse et ne prouve pas avoir sollicité le rapport du médecin-conseil de la caisse primaire d'assurance-maladie, alors qu'elle y était invitée par le tribunal, si tant est qu'elle n'ait pas reçu la correspondance adressée en lettre simple du 3 novembre 2020 qui lui demandait de le faire.

Les pièces médicales contemporaines à la demande de liquidation de la retraite sont un certificat médical du docteur [G] [J] indiquant qu'elle est victime de troubles proprioceptifs cervicaux qui se manifestent par des troubles de l'équilibre changement de position, notamment aux torsions cervicales. Le certificat médical du docteur [F] [H] du 28 septembre 2019 mentionne une hernie discale paramédiane C6 ' C7 entraînant des troubles de type cervicalgies invalidante, les insomnies des céphalées et des vomissements.

L'I.R.M. du rachis lombaire du 10 août 2017 indique une discopathie dégénérative étagée avec un pincement discal étagé prédominant en L4/L5 et L5/S1. Il est décrit une discopathie protrusive global en L4/L5 avec une saillie discale focale paramédiane et foraminale gauche venant au contact des racines L4 et L5 gauches. Il s'y associe une arthrose interapophysaire postérieure avec une hypertrophie du ligament jaune responsable d'un rétrécissement canalaire et foraminale bilatéral. Il est fait état d'une arthrose interapophysaire postérieure étagée.

Le taux d'incapacité retenue par la compagnie d'assurances [5] ne saurait faire référence dès lors que l'incapacité fonctionnelle n'est pas établie sur les mêmes barèmes.

Si les pièces présentées par l'assurée démontrent l'existence d'une situation d'invalidité, l'absence de production du rapport du médecin-conseil de la caisse primaire d'assurance-maladie qui a rendu un avis défavorable à la requête et l'absence de communication de la copie du rapport de son médecin traitant sur sa situation d'invalidité ne permettent pas de caractériser une contestation d'ordre médical nécessitant le recours à une mesure d'expertise, aucune des pièces présentées ne permettant de justifier à elles seules un taux d'incapacité permanente de 50 % au moins.

L'assurée qui ne peut exiger de la caisse qu'elle produise des documents couverts par le secret médical et qu'elle ne détient pas, est seule habilitée à le lever et à solliciter du médecin-conseil de la caisse la production du dossier qu'il en sa possession. Faute de démontrer l'avoir fait, elle ne démontre pas l'impossibilité d'obtenir ce document, de telle sorte qu'un des éléments de preuve nécessaire à la contestation d'ordre médical qu'elle entend soulever ne figure pas au dossier.

Or, ce document est nécessaire pour l'expert judiciaire, dès lors que l'analyse à laquelle il devrait procéder ne peut se réaliser que sur les documents contemporains de la demande de liquidation de la retraite, à défaut de tous éléments postérieurs.

La demande d'expertise sera donc rejetée.

Mme [S] [Y] demandant à conclure au fond à titre subsidiaire, et ne l'ayant pas fait, le débats seront rouverts.

Les dépens seront par voie de conséquence réservés.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

DÉCLARE recevable l'appel de Mme [S] [Y] ;

DÉBOUTE Mme [S] [Y] de sa demande d'expertise ;

ORDONNE la réouverture des débats à l'audience du :

Lundi 10 février 2025 à 09h00

en salle Huot-Fortin, 1H09, escalier H, secteur pôle social, 1er étage,

afin que Mme [S] [Y] conclue au fond ;

SURSOIT à statuer sur les demandes ;

RÉSERVE les dépens ;

DIT que la notification du présent arrêt vaut convocation à l'audience.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 21/03332
Date de la décision : 05/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-05;21.03332 ?
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