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04/07/2024 | FRANCE | N°23/19176

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 04 juillet 2024, 23/19176


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 2



ARRÊT DU 04 JUILLET 2024



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/19176 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CITHZ



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 25 Octobre 2023 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MEAUX - RG n° 23/00625





APPELANTE



S.A. AXA FRANCE IARD, RCS de Nanterre

sous le n°722 057 460, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représenté...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRÊT DU 04 JUILLET 2024

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/19176 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CITHZ

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 25 Octobre 2023 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de MEAUX - RG n° 23/00625

APPELANTE

S.A. AXA FRANCE IARD, RCS de Nanterre sous le n°722 057 460, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me François MEURIN de la SELARL TOURAUT AVOCATS, avocat au barreau de MEAUX, substitué par Me Bertrand DURIEUX

INTIMÉ

M. [S] [X]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Anne-charlotte PASSELAC, avocat au barreau de PARIS, toque : D1903

Ayant pour avocat plaidant Me Marc MORIN, avocat au barreau de TOURS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 804, 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Mai 2024, en audience publique, devant Michèle CHOPIN, Conseillère, chargée du rapport, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre,

Michèle CHOPIN, Conseillère,

Laurent NAJEM, Conseiller,

Qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSE DU LITIGE

M. [X] est propriétaire, depuis le 21 avril 2009, d'une maison à usage d'habitation située [Adresse 2] à [Localité 3] (77). Il a souscrit auprès de la société Axa France Iard une assurance habitation qui couvre notamment les dommages survenus en raison d'évènements climatiques reconnus comme catastrophe naturelle par arrêté interministériel.

Par arrêté en date du 18 juin 2019, l'état de catastrophe naturelle a été reconnu pour les mouvements de terrain différentiels consécutifs à la sécheresse et à la réhydratation des sols du 1er octobre 2018 au 31 décembre 2018 sur la commune de [Localité 3].

Constatant que la dalle de sa maison s'affaissait, M. [X] a obtenu en référé la désignation d'un expert judiciaire par ordonnance du 8 septembre 2021.

L'expert a déposé son rapport le 30 décembre 2022.

Par acte du 4 juillet 2023, M. [X] a assigné la société Axa France Iard devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Meaux aux fins de voir :

à titre principal, condamner la société Axa France Iard à faire procéder à ses frais aux travaux de reprise de la dalle de son bien immobilier selon la solution préconisée par l'expert judiciaire, c'est-à-dire une reprise par micropieux et longrines sous dallage, dans un délai de deux semaines courant à compter de la signification de la décision à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard en se réservant la liquidation de l'astreinte ;

à titre subsidiaire, condamner la société Axa France Iard à lui payer la somme de 462.400 euros ;

à titre plus subsidiaire, condamner la société Axa France Iard à faire procéder à ses frais aux travaux d'injection de résine sous dallage, gestion des eaux et reprise du dallage et plancher chauffant courant à compter de la signification de la décision à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard en se réservant la liquidation de l'astreinte ;

En tout état de cause :

*condamner la société Axa France Iard à prendre en charge ses frais de relogement à hauteur de 19.550 euros selon le détail suivant : 13.500 euros pour le relogement, 2.000 euros pour le déménagement et 4.050 euros pour le box ;

*condamner la société Axa France Iard à lui payer la somme provisionnelle de 44.062,59 euros selon le détail suivant :

- 6.985 euros au titre des frais d'expert judiciaire ;

- 3.600 euros au titre des frais 1G Solutions ;

- 27.077,59 euros au titre des frais Déterminant ;

- 2.400 euros au titre des frais de l'expert qui l'a assisté au cours de l'expertise, M. [Z] ;

- 4.000 euros au titre des frais d'avocat ;

réserver les dépens et de voir ordonner l'exécution provisoire.

Par ordonnance contradictoire du 25 octobre 2023, le juge des référés du tribunal judiciaire de Meaux a :

dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de condamnation de la société anonyme Axa France Iard à faire procéder à ses frais aux travaux de reprise de la dalle de son bien immobilier selon la solution préconisée par l'expert judiciaire ;

condamné la société anonyme Axa France Iard à payer à M. [X] la somme de 462.400 euros à titre de provision à valoir sur l'indemnisation de son préjudice ;

dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de provision au titre des frais de relogement ;

condamné la société anonyme Axa France Iard aux dépens ;

condamné la société anonyme Axa France Iard à payer à M. [X] la somme de 44.062,59 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 29 novembre 2023, la société anonyme Axa France Iard a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 22 avril 2024, la société anonyme Axa France Iard demande à la cour de :

réformer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;

dire et juger que les demandes de M. [X] se heurtent à des contestations sérieuses excluant la compétence de la juridiction des référés pour en connaître, et renvoyer le demandeur à mieux se pourvoir au fond ;

débouter M. [X] de l'ensemble de ses demandes ;

le condamner à lui payer la somme de 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

le condamner aux dépens.

La société anonyme Axa France Iard soutient que :

les désordres affectant la maison de M. [X] ont eu pour cause principale des phénomènes de catastrophe naturelle garantis par la police d'assurance mais qui ne nuisent aucunement à l'habitabilité de la maison ;

M. [X] fonde ses demandes sur l'article 835 du code de procédure civile mais l'alinéa 1 se heurte à l'absence de dommage imminent ou trouble manifestement illicite et l'alinéa 2 ne peut pas non plus être utilement invoqué en ce qu'il existe des contestations sérieuses quant à la conclusion du rapport d'expertise et l'opportunité de recourir à l'injection de résine, solution approuvée puis abandonnée par M. [P], expert judiciaire.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 29 avril 2024, M. [X] demande à la cour, au visa des articles 76, 81, 835 et 837 du code de procédure civile, de :

le recevoir en ses demandes et l'y déclarer bien fondés ;

En conséquence :

A titre principal :

confirmer la décision rendue par le juge des référés près le tribunal judiciaire de Meaux rendue le 25 octobre 2023 ;

Et s'y ajoutant :

condamner la société Axa France Iard à lui verser la somme de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel ;

condamner la société Axa France Iard aux entiers dépens ;

Subsidiairement :

renvoyer l'affaire au fond par devant le tribunal judiciaire de Meaux ;

fixer la date d'audience au fond en prévoyant un délai suffisant pour permettre au défendeur de disposer d'un temps suffisant pour préparer sa défense.

M. [X] soutient que :

l'expertise judiciaire constate les désordres et préconise la responsabilité de la société Axa France Iard dans l'indemnisation de son préjudice ;

l'origine de catastrophe naturelle des désordres est donc certaine ;

plus le temps passe, plus sa maison devient dangereuse, ce logement étant son logement principal ; l'affaissement du plancher rend inutilisable le chauffage au sol et provoque des infiltrations d'eau et devient de ce fait indécent ;

il n'existe pas de contestations sérieuses en ce que l'expertise judiciaire a repris à son compte l'avis technique posé par l'entreprise 1G Solutions les 26 avril 2022 et 28 novembre 2022 ;

la société Axa France Iard qui entend s'opposer à la solution définitive retenue par l'expert judiciaire, M. [P], n'a rapporté aucun dire de technicien ;

la société Axa France Iard reconnaît elle-même dans ses conclusions que les désordres proviennent bien de catastrophes naturelles couvertes dans la garantie d'assurance.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

SUR CE,

Selon l'article 835, alinéa 2, du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Il est rappelé que la condition d'urgence n'est pas requise par ce texte.

Il est constant que le juge des référés ne peut interpréter un contrat, toute difficulté sérieuse d'interprétation relevant du juge du fond. Cependant, il lui appartient de faire application d'une clause contractuelle claire et précise.

En l'espèce, il n'est pas contesté par la société Axa France Iard qu'elle entend couvrir au titre de sa garantie les phénomènes de catastrophe naturelle comme stipulé au contrat d'assurance habitation souscrit par M. [X].

Il ressort du rapport d'expertise déposé le 30 décembre 2022 que le dallage de la maison s'affaisse en périphérie intérieure, que cet affaissement est compris selon les pièces entre 7 et 18 mm, qu'il entraine dans la cuisine le décalage d'un meuble et du plan de travail par rapport à la crédence du mur, et que l'épisode de sécheresse et de réhydratation des sols survenu sur la commune de [Localité 3] entre le 1er octobre et le 31 décembre 2018 constitue la cause déterminante de ces désordres.

L'expert préconise deux solutions réparatoires :

- par micropieux et longrines,

- par injection de résine.

Le BET Déterminant, missionné par M. [X], a considéré dans son rapport soumis à l'expert que les deux solutions étaient pérennes mais que la solution par injection de résine était préférable.

La société 1G Solutions préconise qu'après analyse, une injection sous dallage présente le risque de poussées latérales sur les pieux sur lesquels repose la maison.

L'expert dans son document de synthèse expose que la solution de l'injection présente l'avantage d'un coût inférieur mais se trouve « disqualifiée par le risque inacceptable évoqué par 1G solutions ».

Il ressort ainsi du rapport d'expertise que « les tassements ayant affecté le dallage ne sont pas susceptibles d'impacter la structure de la maison » mais qu'il « est fortement attendu qu'un tassement plus prononcé à l'avenir conduise à une rupture du circuit de chauffage » ce qui « compromettrait les conditions d'habilité ». Il ressort encore de ce rapport que « les désordres constatés n'ont pas à l'heure actuelle affecté les éléments structuraux et n'ont pas compromis l'habitabilité de la maison ».

L'expert indique encore :

« de plus, sans réparation pérenne, l'aggravation des tassements conduira à court ou moyen terme à des infiltrations d'eau en pied des murs, ce qui rendra la maison inhabitable. Des réparations visant l'élimination de la cause s'avèrent donc nécessaires ».

Or, il apparaît bien que d'une part, la société Axa France Iard, qui ne dénie pas sa garantie, ne conteste pas in fine son obligation d'indemnisation mais critique la solution retenue par l'expert, au motif qu'il a repris à son compte l'avis technique de la société IG Solutions.

Toutefois, l'utilisation d'une solution par micropieux et longrines est bien la solution retenue par l'expert alors que la société Axa France Iard ne produit aucun document, dire ou avis technique permettant de l'exclure ou de considérer que la solution par injection comporterait des risques moindres que ceux identifiés par l'expert.

S'agissant de l'étude de la société Déterminant, il s'avère qu'il s'agit de la reprise à l'identique d'un ancien rapport, qui disqualifie aussi l'usage de la résine.

De la sorte, la solution préconisée, à savoir l'utilisation d'une solution par micropieux et longrines par l'expert n'est pas discutable, son coût qui ressort d'une facture établie au mois de décembre 2022 à hauteur de 462.400 euros n'étant pas critiqué.

De la sorte il y a lieu de confirmer l'ordonnance rendue en ce qu'elle a alloué à M. [X] une provision de 462.400 euros à titre de provision sur son indemnisation à valoir, l'obligation de paiement de la société Axa France Iard n'étant pas sérieusement contestable.

S'agissant des autres demandes, l'ordonnance entreprise a condamné la société Axa France Iard aux dépens et aux frais irrépétibles, accordant à M. [X] au titre de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 44.062, 59 euros, exposant qu'il a fait l'avance des frais d'expertise à hauteur de 6.985 euros, réglé les factures du cabinet 1G Solutions pour la somme de 3.600 euros, celles de la société Déterminant pour la somme de 27.077,59 euros, outre la somme qu'elle a été contrainte d'engager à hauteur de 4.000 euros au regard des factures et notes d'honoraires d'avocats produites.

En application de l'article 695 du code de procédure civile, les frais d' expertise judiciaire sont compris dans les dépens.

En l'espèce, M. [X], ayant sollicité une mesure d' expertise, celle-ci a été ordonnée à ses frais avancés.

Il en résulte que l'ordonnance rendue sera infirmée en ce qu'elle a condamné la société Axa France Iard aux dépens de première instance n'incluant pas les frais d' expertise judiciaire.

La société Axa France Iard sera donc condamnée aux dépens de première instance comprenant les frais d'expertise ains qu'aux dépens de l'appel.

S'agissant des frais irrépétibles, qui sont susceptibles d'inclure l'ensemble des dépenses engagées par M. [X] pour les besoins de cette procédure, l'ordonnance rendue sera infirmée en ce qu'elle a condamné la société Axa France Iard à payer à M. [X] la somme de 44.062, 59 euros.

Sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, il sera alloué à M. [X] la somme de 40.000 euros en première instance et en appel.

PAR CES MOTIFS

Infirme l'ordonnance entreprise sur le sort des dépens et des frais irrépétibles,

Confirme l'ordonnance rendue pour le surplus,

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Condamne la société Axa France Iard aux dépens de première instance et d'appel en ce compris les frais d'expertise,

Condamne la société Axa France Iard à payer à M. [X] une somme de 40.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en appel,

Rejette toute autre demande.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 23/19176
Date de la décision : 04/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;23.19176 ?
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