La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/07/2024 | FRANCE | N°23/07043

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 2, 04 juillet 2024, 23/07043


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2



ARRÊT DU 04 JUILLET 2024

(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/07043 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CHOZ4



Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Février 2023 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Paris - RG n° 21/13741





APPELANTE :



Comité d'établissement COMITE SOCIAL ET ÉCONOMIQUE (CSE) DE LA SOCIÉ

TÉ MO MENTUM SERVICES LTD

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représentée par Me Jérémie JARDONNET, avocat au barreau de PARIS, toque : D1987 et par Me SIMONE Marion, avocat ...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2

ARRÊT DU 04 JUILLET 2024

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/07043 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CHOZ4

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Février 2023 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Paris - RG n° 21/13741

APPELANTE :

Comité d'établissement COMITE SOCIAL ET ÉCONOMIQUE (CSE) DE LA SOCIÉTÉ MO MENTUM SERVICES LTD

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Jérémie JARDONNET, avocat au barreau de PARIS, toque : D1987 et par Me SIMONE Marion, avocat au barreau de PARIS,

INTIMÉE :

S.A.R.L. MOMENTUM SERVICES LTD, SARL d'un Etat membre de la CE ou partie à l'accord sur l'Espace Economique Européen.

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Pauline LARROQUE DARAN, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Juin 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame LAGARDE Christine, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Marie-Paule ALZEARI, présidente

Eric LEGRIS, président

Christine LAGARDE, conseillère

Greffière lors des débats : Madame Sophie CAPITAINE

ARRÊT :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

- signé par Marie-Paule ALZEARI, présidente et par Sophie CAPITAINE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

La société à responsabilité limitée Momentum Services LTD (ci après la société Momentum) est une société de restauration ferroviaire qui intervient exclusivement pour le compte de la société Eurostar, son unique client, par la tenue des services de restauration au sein des wagons première classe et du bar à bord des trains Eurostar.

La convention collective nationale de la restauration ferroviaire est applicable.

La société Momentum emploie 215 salariés en France qui occupent principalement des emplois de commerciaux de bord.

La relation contractuelle entre la société Momentum Services LTD et son client Eurostar est régie par un contrat cadre conclu entre les parties le 24 février 2014. Ce contrat cadre devait arriver à échéance le 31 mai 2021.

Par courrier du 30 novembre 2020, les membres du CSE ont fait valoir auprès de la direction une absence de communication de documents sur la mise à jour du lien contractuel avec Eurostar, relevant notamment le fait qu'à huit mois d'échéance du contrat, aucun appel d'offre avec cahier des charges n'avait été communiqué à la direction et donc à eux-mêmes. Ils demandaient ainsi à cette dernière de communiquer tout document leur permettant de les éclairer sur la situation et le devenir de l'ensemble de l'entité Momentum ainsi que la production des documents nécessaires à la bonne compréhension du processus de renouvellement du contrat cadre de 2014.

Cette demande est restée sans réponse de la direction. Lors des réunions du CSE tenues entre septembre 2020 et février 2021, les élus ont régulièrement interrogé la direction sur le renouvellement du contrat cadre de 2014 avec Eurostar.

Le 11 février 2021, la société Momentum a signé un avenant au contrat de 2014 avec la société Eurostar, ce contrat étant prévu pour une durée minimale de 18 mois à compter du 1er juin 2021 et pouvant être prorogé jusqu'au 31 mai 2028.

Lors de la réunion du 22 février 2021, le CSE a été informé de la signature de l'avenant du 11 février 2021.

Par convocation du 11 mars 2021, la direction a initié une procédure d'information consultation sur les orientations stratégiques de l'entreprise / information consultation sur les modifications des conditions de travail, avec la présentation du nouveau contrat conclu avec Eurostar et ses éventuelles incidences sur les conditions de travail, les réunions du CSE étant fixées les 26 mars, 14 avril et 21 avril, 27 mai, 7 juin et 24 juin 2021.

Lors de la réunion du CSE du 7 juin 2021, les élus ont voté une délibération aux termes de laquelle ils considéraient qu'ils auraient dû être consultés préalablement à la conclusion de l'avenant au contrat conclu avec Eurostar en raison de son caractère structurant quant à l'activité de la société Momentum et donnaient mandat pour ester en justice aux fins de voir reconnaître une atteinte aux attributions et prérogatives du CSE.

Par acte d'huissier de justice en date des 14 et 19 octobre 2021, le CSE a assigné la société Momentum devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins de juger qu'une atteinte avait été portée à ses attributions et prérogatives du CSE et la condamner à lui verser des dommages et intérêts.

Par jugement du 28 février 2023, le tribunal a rendu la décision suivante :

« Déboute le COMITE SOCIAL ET ECONOMIQUE DE LA SOCIETE MOMENTUM SERVICES LTD de toutes ses demandes ;

Condamne le COMITE SOCIAL ET ECONOMIQUE DE LA SOCIETE MOMENTUM SERVICES LTD à verser à la SOCIETE MOMENTUM SERVICES LTD la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties du surplus et autres demandes

Rappelle que l'exécution provisoire est de droit ;

Condamne le COMITE SOCIAL ET ECONOMIQUE DE LA SOCIETE MOMENTUM SERVICES LTD aux dépens. »

Le CSE a interjeté appel le 5 avril 2023.

PRÉTENTIONS :

Par dernières conclusions transmises par RPVA le 4 juillet 2023, le CSE demande à la cour de :

« d'infirmer le jugement du Tribunal Judiciaire du 28 février 2023 en ce qu'il a :

- DEBOUTÉ le CSE MOMENTUM SERVICES LTD de toutes ses demandes ;

- CONDAMNÉ le CSE MOMENTUM SERVICES LTD la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En statuant à nouveau :

- JUGER le CSE MOMENTUM recevable et bien fondée en ses demandes ;

- JUGER que la société MOMENTUM SERVICES LTD a porté atteinte aux attributions et prérogatives du CSE en ne le consultant pas préalablement à la signature du contrat conclu avec la société EUROSTAR le 11 février 2021.

En conséquence,

- CONDAMNER la société MOMENTUM SERVICES LTD à verser au CSE MOMENTUM la somme de 15.000€ à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi lié au non-respect de ses attributions et prérogatives,

- CONDAMNER la société MOMENTUM SERVICES LTD à verser au CSE MOMENTUM la somme de :

o 5.000€ en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en appel ;

o 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés en première instance ;

- DEBOUTER la société MOMENTUM SERVICES LTD de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

- CONDAMNER la société MOMENTUM SERVICES LTD aux dépens. »

Par dernières conclusions transmises par RPVA le 3 octobre 2023, la société Momentum demande à la cour de :

« À TITRE PRINCIPAL :

- CONFIRMER la décision du Tribunal Judiciaire de Paris en ce qu'elle a jugé que la Société n'avait aucune obligation de consulter le CSE préalablement à la signature d'un avenant à un contrat commercial ;

- CONFIRMER la décision du Tribunal Judiciaire de Paris en ce qu'elle a condamné le CSE à payer à la Société MOMENTUM la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

En conséquence,

- CONFIRMER la décision du Tribunal Judiciaire de Paris en ce qu'elle a débouté le CSE de l'ensemble de ses demandes.

EN TOUT ETAT DE CAUSE

- DEBOUTER le CSE de ses demandes au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

A TITRE RECONVENTIONNEL :

- CONDAMNER le CSE à la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux dépens. »

La clôture a été prononcée le 3 mai 2024.

Il est fait expressément référence aux pièces du dossier et aux écritures déposées et visées ci-dessus pour un plus ample exposé des faits de la cause et des prétentions des parties conformément aux dispositions de l'article 455 du code procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

A titre liminaire, il n'y a pas lieu de répondre aux demandes de la Société tendant voir « juger » qui ne constituent pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile en ce qu'elles rappellent les moyens invoqués par elle au soutien de ses demandes et sont dépourvues d'effet juridictionnel.

Sur la procédure d'information consultation préalablement à la signature du contrat conclu avec la société Eurostar le 11 février 2021 :

Le CSE fait valoir que :

- Eurostar est le seul partenaire de la société Momentum de sorte que la conclusion d'un contrat commercial a un impact sur la viabilité économique et financière de cette dernière et sur la situation de l'ensemble de ses salariés puisque l'existence de leurs fonctions ne tenait qu'au maintien et à l'extension du contrat commercial ; il existe une dépendance de la société Momentum à l'égard d'Eurostar de sorte que les clauses contenues dans le contrat commercial ont mécaniquement un impact sur l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise ; toute modification ou renégociation, même mineure, de ce contrat devait conduire la direction à engager et mettre en 'uvre une procédure d'information consultation du CSE ;

- l'ouverture des négociations n'est pas incompatible avec la mise en place d'une information consultation alors que la négociation de l'extension du contrat commercial était un projet suffisamment précis permettant l'information consultation du CSE dans la mesure où il avait pour objet la négociation des modalités d'extension du contrat commercial conclu en 2014 et des enjeux connus, à savoir assurer la poursuite de l'activité de restauration dans un contexte de pandémie et de limitation du trafic ferroviaire, en proposant des tarifs concurrentiels afin de renouveler le contrat commercial conclu avec Eurostar ;

- l'ouverture de la négociation du contrat commercial était compatible avec la mise en 'uvre d'une consultation ponctuelle du CSE alors que la société Momentum savait que le contrat commercial conclu en 2014 avec Eurostar, arrivait à terme au mois de juin 2021 ce qui lui laissait toute latitude pour organiser une information consultation du CSE pour anticiper les propositions et concessions qu'elle serait capable de formuler en réponse aux exigences d'Eurostar, en vue de l'extension du contrat commercial ;

- une seconde consultation aurait pu avoir lieu, afin d'informer et consulter les élus des conditions émises par Eurostar et des propositions de la société Momentum pour y répondre ; rien n'empêchait la société Momentum de soumettre aux élus du CSE le projet abouti de l'accord à l'issue de la phase de négociation, avant la signature du contrat définitif ; cette consultation était d'autant plus facilitée que si la signature de l'extension du contrat commercial a eu lieu le 11 février 2021, la mise en 'uvre effective des modalités du contrat a été repoussée au 1er juillet 2021 et elle disposait donc de six mois pour l'informer et le consulter, afin de recueillir les observations des élus et d'être en mesure d'intégrer leurs préconisations éventuelles avant de signer le contrat définitif ;

- une négociation entre la société Momentum et un tiers ne pouvait avoir pour effet de le priver d'une information consultation dans la mesure où le contrat commercial impactait la gestion et l'évolution économique et financière de l'entreprise ainsi que l'organisation du travail ;

- sur les impacts concrets de l'extension du contrat commercial Eurostar : la note d'information consultation de la société Momentum sur les orientations stratégiques de l'entreprise, mentionne que l'extension du contrat « comprend des économies » dans la mesure où « des solutions ont dû être trouvées pour que son coût soit moindre en accord avec la baisse de 8% de nos tarifs » ; face à cette baisse le CSE a reproché d'avoir été privé de consultation alors que la direction aurait dû l'associer pour dire ce qui allait impacter l'organisation de travail pour les années à venir ; la société Momentum lui a imposé cette décision sans lui laisser l'opportunité de se prononcer sur les alternatives possibles ; 

cette extension du contrat a pour incidence la suppression de 19 postes pour le personnel de bord ce qui constitue une mesure impactant directement l'emploi, la structure des effectifs ainsi que les conditions d'emploi et de travail impliquant une consultation préalable à cette décision ;

- les juges de première instance ont admis que la société Momentum est tenue de prendre des décisions à la suite de la conclusion du contrat commercial avec Eurostar reconnaissant donc que la signature de ce contrat avait des incidences sur l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise, mais sans en tirer la conséquence de la nécessaire consultation préalable du CSE ; la signature du contrat commercial avec Eurostar sans clause « d'adaptation », implique nécessairement le respect des engagements pris et les incidences certaines sur les conditions de travail des salariés ;

- au vu de l'importance du contrat d'extension signé, la société Momentum ne pouvait s'exonérer d'une telle consultation de sorte que l'atteinte aux prérogatives du CSE est constituée.

La société Momentum oppose que :

- elle a régulièrement consulté le CSE sur les éventuelles incidences de l'avenant du 11 février 2021 avant de prendre une quelconque décision relative à cet accord ;

- il n'existe aucune obligation légale ou jurisprudentielle lui imposant une consultation du CSE préalablement à la signature d'un avenant à un contrat commercial ; outre le fait que cette procédure parait matériellement impossible à mettre en 'uvre, elle conduirait à rendre impossible la gestion des entreprises tout en multipliant les risques de violations des secrets commerciaux et de négociation ; l'obligation de consultation du CSE ne lui confère pas un droit de cogestion ;

- le CSE a été régulièrement informé de l'entrée en négociation et de l'évolution de négociations ; la relation contractuelle qui la lie à son client Eurostar est régie par un contrat cadre conclu entre les parties le 24 février 2014 qui devait arriver à échéance le 31 mai 2021, et quelques mois avant le terme, les parties se sont rapprochées afin d'échanger sur les éventuelles modalités d'une prorogation du contrat par le biais d'un avenant contractuel ; dès qu'elle a entendu mener les négociations, elle a informé le CSE sur l'ouverture et l'évolution des négociations ;

- dès la signature de l'avenant contractuel, elle a organisé une procédure d'information consultation portant sur les nouvelles conditions tarifaires du contrat et sur ses éventuelles incidences sur les conditions de travail, la date de déploiement étant fixée au mois de juillet 2021 ;

- l'avenant au contrat commercial de 2014 ne prévoit pas de réduction du nombre de salariés à bord, il ne porte que sur des tarifs et relations commerciales entre la société et son client ; la réduction du nombre de personnel à bord est une décision de la société et le CSE a été informé et consulté sur ce projet et a régulièrement rendu son avis.

Sur ce,

L'article L. 2312-8 du code du travail, définit les « attributions générales » du CSE :

« Le comité social et économique a pour mission d'assurer une expression collective des salariés permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts dans les décisions relatives à la gestion et à l'évolution économique et financière de l'entreprise, à l'organisation du travail, à la formation professionnelle et aux techniques de production, notamment au regard des conséquences environnementales de ces décisions.

II. - Le comité est informé et consulté sur les questions intéressant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise, notamment sur :

1° Les mesures de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs ;

2° La modification de son organisation économique ou juridique ;

3° Les conditions d'emploi, de travail, notamment la durée du travail, et la formation professionnelle ;

4° L'introduction de nouvelles technologies, tout aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail ;

5° Les mesures prises en vue de faciliter la mise, la remise ou le maintien au travail des accidentés du travail, des invalides de guerre, des invalides civils, des personnes atteintes de maladies chroniques évolutives et des travailleurs handicapés, notamment sur l'aménagement des postes de travail ».

L'article L. 2312-14 du code du travail précise :

« Les décisions de l'employeur sont précédées de la consultation du comité social et économique, sauf, en application de l'article L. 2312-49, avant le lancement d'une offre publique d'acquisition ».

Il ressort du procès-verbal de la réunion extraordinaire du CSE du 22 février 2021, que ce dernier a été informé de la prolongation du contrat initial par la « signature du contrat par Eurostar 12 février », la direction précisant que seul « Londres en a eu connaissance » et qu'elle ne peut pas le transmettre au CSE. Précédemment, la direction avait informé ce dernier de l'ouverture de négociations avec Eurostar lors de réunions qui se sont tenues de septembre 2020 au 22 février 2021 sans que des informations particulières ne soient communiquées sur le contenu de ces discussions, la direction informant le CSE lors de cette dernière réunion de la signature du contrat le 12 février 2021 et précisant ne pas savoir s'il y a un impact sur la politique sociale et l'organisation du travail de l'entreprise.

La signature de l'avenant est intervenue le 11 février 2021, et la Société a convoqué le CSE à une première réunion qui s'est tenue le 26 mars 2021 en vue de l'information consultation sur les orientations stratégiques de l'entreprise, information consultation sur la modification des conditions de travail avec communication de l'avenant du contrat en anglais et présentation du nouveau contrat en français.

Le CSE a été consulté à plusieurs reprises et notamment le 14 avril 2021 avec une présentation française de l'avenant et la présentation des aménagements de services.

Des réunions ont suivi les 21 avril, 27 mai, 7 juin avec notamment la présentation du rapport de l'expert 3E rendu dans le cadre de la consultation sur les orientations stratégiques, et ensuite le 24 juin 2021.

Il ressort des textes précités, qu'aucune disposition légale ne subordonne la négociation et la signature d'un contrat commercial, ou de son renouvellement ou de sa modification par voie d'avenant ou encore de la durée de sa reconduction, à la consultation préalable du CSE, et ce, quand bien même ce contractant serait l'unique partenaire de l'entreprise, la négociation et la signature de contrats commerciaux relevant du pouvoir de gestion et de direction de l'employeur.

En effet, la signature d'un document contractuel avec un tiers ne saurait s'analyser en des « décisions » au sens des textes précités, quand bien même l'exécution de ses obligations contractuelles par l'entreprise, ou en l'espèce une réduction de 8% des prestations de la Société et la définition de nouveaux ratios de services conduirait à des décisions de l'employeur pour s'adapter aux nouvelles conditions (tarifaires au cas d'espèce) ayant des impacts sur l'organisation du travail, décisions qui, elles, relèvent du champ de la consultation du CSE qui a été mise en oeuvre tel que rappelé plus haut.

Il résulte des considérations qui précèdent que la société Momentum n'a commis aucun manquement à son obligation de consultation information, de sorte que c'est à bon droit que le tribunal a débouté le CSE de ses demandes entraînant la confirmation du jugement.

Sur la demande de dommages et intérêts du CSE :

Le CSE fait valoir que :

- la signature du contrat commercial est intervenue en l'absence de consultation préalable du CSE ce qui constitue une atteinte à ses prérogatives n'ayant pas été en mesure de faire part de l'expression collective des intérêts des salariés qu'elle représente alors que le contrat commercial a des impacts conséquents sur l'emploi et les effectifs, avec notamment la définition de nouveaux ratios ;

- il a, à plusieurs reprises, alerté la société Momentum sur la nécessaire organisation de son information consultation préalablement à la signature du contrat commercial sans obtenir de réponse favorable ;

- il a été délibérément été écarté du processus ayant trait à la signature du contrat commercial avec Eurostar, impactant les conditions de travail des salariés.

La société Momentum oppose qu'elle n'avait aucune obligation de consulter le CSE préalablement à la signature d'un contrat commercial de sorte que cette demande doit être rejetée.

Sur ce,

La société Momentum n'ayant commis aucun manquement, tel que cela a été analysé au développement qui précède il n'est pas justifié d'une atteinte aux prérogatives du CSE de sorte que cette demande ne pouvait utilement aboutir.

Le jugement sera aussi confirmé sur ce point, de même que sur la condamnation prononcée au titre des frais de procédure.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

le CSE qui succombe sur les mérites de son appel, doit être condamné aux dépens et débouté en sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Il sera fait application de cet article au profit de l'intimée.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

CONFIRME le jugement ;

Y ajoutant,

CONDAMNE le CSE de la société à responsabilité limitée Momentum Services LTD aux dépens d'appel ;

CONDAMNE le CSE de la société à responsabilité limitée Momentum Services LTD à payer à la société à responsabilité limitée Momentum Services LTD la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et le déboute de sa demande à ce titre.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 23/07043
Date de la décision : 04/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;23.07043 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award