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04/07/2024 | FRANCE | N°22/19034

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 11, 04 juillet 2024, 22/19034


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11



ARRET DU 04 JUILLET 2024



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/19034 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGVTJ



Décision déférée à la Cour : jugement du 28 mai 2019 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 17/01156





APPELANTS



Madame [F] [Z] veuve [C] agissant tant en son nom personnel

qu'en qualité de représentante légale de son fils [S] [C], né le [Date naissance 3] 2006

[Adresse 11]

[Localité 13]

Née le [Date naissance 7] 1970 à [Localité 15] (CEYLAN)
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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11

ARRET DU 04 JUILLET 2024

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/19034 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGVTJ

Décision déférée à la Cour : jugement du 28 mai 2019 -Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY - RG n° 17/01156

APPELANTS

Madame [F] [Z] veuve [C] agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentante légale de son fils [S] [C], né le [Date naissance 3] 2006

[Adresse 11]

[Localité 13]

Née le [Date naissance 7] 1970 à [Localité 15] (CEYLAN)

Représentée par Me Cyril IRRMANN de la SELARL IRRMANN FEROT ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C0778

Assistée par Me Stéphanie FEROT, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [M] [C]

[Adresse 11]

[Localité 13]

Né le [Date naissance 10] 2002 à [Localité 16]

Représenté par Me Cyril IRRMANN de la SELARL IRRMANN FEROT ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : C0778

Assisté par Me Stéphanie FEROT, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

FONDS DE GARANTIE DES ASSURANCES OBLIGATOIRES DE DOMMAGES

[Adresse 9]

[Localité 14]

Représenté par Me Alain LABERIBE de l'AARPI CABINET LABERIBE & VU NGOC AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : E1217

Assisté par Me André JESUSEK, avocat au barreau de PARIS

CPAM DE SEINE SAINT DENIS

[Adresse 4]

[Localité 12]

représentée par Me Maher NEMER de la SELARL BOSSU & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R295

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 février 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Nina TOUATI, présidente de chambre, chargée du rapport, et Mme Dorothée DIBIE, conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Nina TOUATI, présidente de chambre

Mme Dorothée DIBIE, conseillère

Mme Sylvie LEROY, conseillère

Greffier lors des débats : Mme Emeline DEVIN

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Nina TOUATI, présidente de chambre et par Emeline DEVIN, greffière, présente lors de la mise à disposition à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Le [Date décès 8] 2014 [Y] [C], piéton, a été percuté par un véhicule dont le conducteur a pris la fuite et n'a pas pu être identifié. [Y] [C] est décédé de ses blessures.

Par acte en date du 23 janvier 2017 la veuve de [Y] [C], Mme [F] [Z] veuve [C] agissant tant à titre personnel qu'en qualité d'administratrice légale de ses enfants mineurs [M] [C], né le [Date naissance 10] 2002 et [S] [C], né le [Date naissance 3] 2006, ses frères, M. [Y] [A] et M. [W] [Y], sa belle-soeur, Mme [U] [R], et M. [Y] [A] et Mme [U] [R] agissant en qualité de représentant légaux de leurs enfants mineurs, neveu et nièces de [Y] [C], [H] [A], née le [Date naissance 6] 2005, [P] [A], né le [Date naissance 5] 2009 et [J] [A], née le [Date naissance 2] 2010, ses nièces et neveux (les consorts [C]-[A]) ont assigné le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (le FGAO) devant le tribunal de grande instance de Bobigny au contradictoire de la caisse primaire d'assurance maladie de Seine Saint Denis (la CPAM) pour obtenir l'indemnisation des préjudices consécutifs au décès de [Y] [C].

Par ordonnance du 7 juillet 2017, le juge de la mise en état de ce tribunal a alloué à Mme [F] [Z] veuve [C] agissant tant à titre personnel qu'en qualité d'administratrice légale de [M] [C] et de [S] [C] une provision de 2 000 euros pour chacun et a rejeté les demandes des autres membres de la famille.

Par jugement du 28 mai 2019 le tribunal de grande instance de Bobigny a :

- dit la décision opposable à la CPAM,

- condamné le FGAO à verser à Mme [F] [Z] veuve [C] agissant tant à titre personnel qu'en qualité d'administratrice légale de [M] [C] et de [S] [C] les sommes suivantes en réparation des préjudices subis par [Y] [C]

* 2 000 euros au titre des souffrances endurées

* 8 000 euros au titre du préjudice d'angoisse de mort imminente

* 100 euros au titre du préjudice matériel,

- condamné le FGAO à verser, en réparation de leur préjudice d'affection, à :

* Mme [F] [Z] veuve [C] : 25 000 euros

* [M] et [S] [C] : 22 000 euros chacun,

- condamné le FGAO à verser, en réparation de leur préjudice économique, à :

* Mme [F] [Z] veuve [C] : 202 641,03 euros

* [M] [C]: 29 542,20 euros

* [S] [C]: 30 509,87 euros,

- débouté « pour le surplus »,

- dit que les provisions versées par le FGAO devront être déduites de ces sommes,

- condamné le FGAO à verser à M. [Y] [A] et M. [W] [Y] la somme de 8 000 euros chacun en réparation de leur préjudice d'affection,

- débouté Mme [U] [R], [H] [A], [J] [A] et [P] [A] de leurs demandes,

- dit que les sommes allouées seront employées sous le contrôle du juge des tutelles territorialement compétent,

- rappelé que ces sommes portent intérêts au taux légal à compter de ce jour,

- débouté « pour le surplus », y compris pour la demande en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné le FGAO aux dépens avec distraction.

Par déclaration du 25 juillet 2019 enregistrée sous le numéro RG 19/15521 les consorts [C]-[A] ont interjeté appel de cette décision en ce qu'elle les a déboutés de leurs demandes suivantes :

- au titre de l'indemnisation des préjudices du de cujus

* souffrances endurées

* déficit fonctionnel temporaire total

* préjudice esthétique temporaire

- au titre de l'indemnisation des préjudices des victimes par ricochet

* préjudice moral et préjudice d'affection,

* préjudice économique de la veuve et de ses enfants

- visant à voir déduire la créance des organismes sociaux, poste par poste, sur les indemnités qui réparent les préjudices qu'elle est susceptible de prendre en charge,

- de doublement des intérêts en application des articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances

- au titre de l'article 700 code de procédure civile.

Par déclaration enregistrée sous le numéro RG 19/17235, le FGAO a interjeté appel du jugement en ses dispositions suivantes :

- en ce qu'il l'a condamné à payer :

- au titre des postes de préjudice suivants de [Y] [C], à Mme [F] [Z] veuve [C], tant en son nom personnel qu'ès qualités les sommes suivantes :

* au titre des souffrances endurées : 2 000 euros

* au titre du préjudice d'angoisse de mort imminente : 8 000 euros

- au titre des préjudices d'affection :

* à Mme [F] [Z] veuve [C] : 25 000 euros

* à [M] [C] et [S] [C] : 22 000 euros chacun

* à Mme [F] [Z] et M. [Y] [C] : 8 000 euros chacun

- au titre du préjudice économique

* à Mme [F] [Z] veuve [C] : 202 641,03 euros

* à [M] [C] : 29 542,20 euros

* à [S] [C] : 30 509,87 euros

- en ce qu'il l'a condamné aux dépens avec distraction

- en ce qu'il a ordonné l'exécution provisoire.

Ces deux procédures ont été jointes.

Par arrêt du 12 avril 2021, la cour d'appel de Paris a :

- infirmé le jugement sur :

- les souffrances endurées et le préjudice d'angoisse de mort imminente soufferts par [Y] [C]

- le préjudice d'affection de Mme [U] [R], [H] [A], [J] [A] et [P] [A]

- l'application de la sanction du doublement du taux de l'intérêt légal pour les indemnités allouées en réparation de leur préjudice d'affection à M. [Y] [A], M. [W] [Y], Mme [U] [R] et M. [Y] [A] et Mme [U] [R] agissant en qualité de représentant légaux de leurs enfants mineurs, [H] [A], [P] [A] et [J] [A]

- l'article 700 du code de procédure civile et les dépens,

- sursis à statuer sur le préjudice économique de Mme [F] [Z] veuve [C], de [M] [C] et de [S] [C] et sur la demande de Mme [F] [Z] veuve [C] agissant tant à titre personnel qu'ès qualités d'application de la sanction du doublement du taux de l'intérêt légal,

- invité Mme [F] [Z] veuve [C] agissant tant à titre personnel qu'ès qualités à communiquer à la présente juridiction les éléments lui permettant de déterminer le montant des prestations qui auraient dû être versées par la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-Saint-Denis en vertu des articles L. 434-7 et suivants et R. 434-10 et suivants du code de la sécurité sociale, si l'accident avait été déclaré en accident de trajet, notamment par une étude faite par cet organisme,

- ordonné le renvoi de l'affaire à l'audience du 18 novembre 2021,

- confirmé le jugement pour le surplus,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

- condamné le FGAO à payer à Mme [F] [Z] veuve [C] agissant tant à titre personnel qu'en qualité d'administratrice légale de ses enfants mineurs [M] [C] et [S] [C] les sommes suivantes, provisions et sommes versées en vertu de l'exécution provisoire du jugement non déduites, avec répartition selon les parts de chacun dans la succession de [Y] [C] en réparation des préjudices ci-après subis par celui-ci :

* souffrances endurées incluant le préjudice né de la conscience de l'imminence de sa mort : 10 000 euros

* déficit fonctionnel temporaire : 20 euros

* préjudice esthétique temporaire : 150 euros,

- condamné le FGAO à payer à M. [Y] [A] et M. [W] [Y] les intérêts au double du taux légal sur le montant de l'offre du FGAO, avant déduction des provisions versées, du 25 novembre 2016 jusqu'au 27 janvier 2020,

- condamné le FGAO à payer à Mme [U] [R] la somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice d'affection avec les intérêts au double du taux légal du 25 novembre 2016 jusqu'au jour de l'arrêt devenu définitif et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,

- condamné le FGAO à payer à M. [Y] [A] et Mme [U] [R] agissant en qualité de représentant légaux de leurs enfants mineurs, [H] [A], [P] [A] et [J] [A], la somme 3 000 euros pour chacun des enfants avec les intérêts au double du taux légal du 25 novembre 2016 jusqu'au jour de l'arrêt devenu définitif et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,

- condamné le FGAO à verser à Mme [F] [Z] veuve [C] agissant tant à titre personnel qu'en qualité d'administratrice légale de ses enfants mineurs [M] [C] et [S] [C] la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en première instance,

- laissé la charge des dépens de première instance au Trésor public,

- réserve les frais irrépétibles, les dépens d'appel et la demande relative aux droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement.

L'affaire a été radiée par ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 18 novembre 2021 puis rétablie le 3 novembre 2022 à la demande de Mme [F] [Z] veuve [C], agissant tant à titre personnel qu'en sa qualité de représentante légale de son fils mineur, [S] [C] et de M. [M] [C] (les consorts [C]).

Par ordonnance sur incident en date du 13 avril 2023, le conseiller de la mise en état a :

- débouté les consorts [C] de leurs demandes tendant à ce qu'il soit ordonné à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-Saint-Denis, au besoin sous astreinte, de :

* communiquer les éléments permettant de déterminer le montant des prestations qui auraient pu théoriquement être versées en application des articles L. 434-7 et suivants et R. 434-10 et suivants du code de la Sécurité sociale, si l'accident avait été un accident de trajet, ou toute étude en ce sens,

* confirmer que les calculs établis par les consorts [C] dans leur courrier du 7 décembre 2021 est conforme aux dispositions des articles L. 434-7 et suivants et R. 434-10 et suivants du code de la sécurité sociale,

* confirmer que l'accident de [Y] [C] n'a pas été reconnu par la CPAM en accident du travail et qu'en conséquence Mme [F] [Z] veuve [C] ne pouvait pas prétendre à une quelconque rente dite accident du travail,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les dépens de l'incident suivront le sort des dépens au fond.

Sur le pourvoi formé par les consorts [C], faisant grief à l'arrêt du 12 avril 2021 d'avoir sursis à statuer sur le préjudice économique de Mme [F] [Z] veuve [C], de [M] [C] et de [S] [C] et sur la demande de Mme [F] [Z] veuve [C] agissant tant à titre personnel qu'ès qualités d'application de la sanction du doublement du taux de l'intérêt légal, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a par un arrêt du 21 septembre 2023 rejeté le pourvoi par une décision non spécialement motivée.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Vu les dernières conclusions après réouverture des débats des consorts [C], notifiées le 6 février 2024, aux termes desquelles ils demandent à la cour, au visa des articles L. 211-9, L. 211-13, L. 211-16, L. 211-22, L. 421-2, R. 211-40, R. 421-2 et R. 421-13 du code des assurances ainsi que des articles 564 et suivants du code de procédure civile et 1321-7 et 1343-2 du code civil, de :

-juger Mme [F] [C], son fils mineur, représenté par sa mère, [S] [C], et M. [M] [C], recevables en leur appel et bien fondés en leurs demandes,

- juger, au visa de l'article 564 du code de procédure civile, le FGAO irrecevable en ses demandes nouvelles visant à sanctionner les consorts [C], en imputant une somme correspondant à des prestations non-dues au titre d'un accident du travail imaginaire sur leur préjudice, et l'en débouter,

- juger, au visa du principe de l'estoppel, le FGAO irrecevable en ses demandes visant, en contradiction avec sa position initiale au cours de l'instance et à leur détriment, à sanctionner les consorts [C], en imputant des sommes correspondant à des prestations non-dues au titre d'un accident du travail imaginaire sur leur préjudice, et l'en débouter,

- débouter le FGAO de ses demandes, fins et conclusions,

- infirmer le jugement en ce qu'il a :

* évalué le préjudice économique de Mme [F] [C] à la somme de 202 641,03 euros, de M. [M] [C] à la somme de 29.542,20 euros et de [S] [C] à la somme de 30 509,87 euros,

*rejeté le doublement des intérêts en application des articles L. 211-9 et L. 211-13 du code des assurances

*rejeté toute condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

En conséquence, statuant à nouveau,

-juger que les préjudices économiques des consorts [C], doivent être évalués, sauf à parfaire, de la manière suivante :

* Mme [F] [C] : 506 864,27 euros

* M. [M] [C] : 22 490,82 euros

* [S] [C] : 30 677,06 euros

- juger le FGAO irrecevable tant en ses demandes nouvelles qu'en violation du principe de l'estoppel, en conséquence, condamner ce dernier à payer les sommes susvisées de la manière suivante à :

* Mme [F] [C] : 506 864,27 euros

* M. [M] [C] : 22 490,82 euros

* [S] [C] : 30 677,06 euros

A titre subsidiaire, si la cour considérait le FAGO recevable en ses demandes, l'en débouter néanmoins en l'absence d'accident du travail et les consorts [C] étant exempts de toute faute, et en conséquence, condamner ce dernier à payer les sommes susvisées de la manière suivante à :

* Mme [F] [C] : 506 864,27 euros

* [M] [C] : 22 490,82 euros

* [S] [C] : 30 677,06 euros

- A titre infiniment subsidiaire, si la cour considérait qu'il convient d'imputer une rente accident du travail imaginaire et jamais perçue, malgré l'absence de toute faute des consorts [C],

- condamner le FGAO à payer au titre du préjudice économique par ricochet les sommes susvisées de la manière suivante à :

* Mme [F] [C] : 269 979, 20 euros

* M. [M] [C] : 0 euro

* [S] [C] : 0 euro

En tout état de cause,

-condamner le FGAO à payer à la CPAM le montant des sommes servies par cette dernière aux consorts [C] au titre de sa créance,

- juger qu'aucune offre, provisionnelle ou définitive, n'a été faite,

En conséquence,

- juger que l'évaluation qui sera faite des préjudices des consorts [C], créance de la CPAM et provisions incluses, portera intérêts au double du taux de l'intérêt légal à compter du 7 mai 2015 jusqu'à la date à laquelle l'arrêt à intervenir sera définitif, avec anatocisme,

- condamner le FGAO au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 au bénéfice de Mme [F] [C], en cause d'appel,

- mettre les entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Cyril Irrmann du cabinet Irrmann Ferot Associés, avocat aux offres de droit, à la charge du Trésor public,

- juger que les sommes mises à la charge du FGAO porteront intérêts au taux légal à compter du [Date décès 8] 2014 (date de l'accident) ou à tout le moins à compter du 22 mars 2016 (date de réception du dossier pénal), avec anatocisme,

- mettre, conformément aux dispositions de l'article R. 631-4 du code la consommation, à la charge du FGAO l'intégralité des droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement prévus à l'article L. 111-8 du code des procédures civiles d'exécution que pourrait avoir à supporter les consorts [C].

Vu les dernières conclusions du FGAO après réouverture des débats, notifiées le 15 février 2024, aux termes desquelles, il demande à la cour de :

- rejeter l'ensemble des demandes des consorts [C], ou en tout état de cause prononcer de nouveau la radiation de l'affaire dans l'attente des éléments demandés par la cour d'appel de Paris aux termes de son arrêt du 12 avril 2021, soit : « les éléments lui permettant de déterminer le montant des prestations qui auraient dû être versées par la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-Saint-Denis en vertu des articles L. 434-7 et suivants et R. 434-10 et suivants du code de la sécurité sociale, si l'accident avait été déclaré en accident de trajet, notamment par une étude faite par cet organisme »,

- sous réserve de la production des pièces demandées par la cour ou en tout état de cause sous réserve que le calcul effectué par les consorts [C] de la rente accident du travail qui leur aurait été attribuée en leur qualité d'ayants droit de la victime, selon les modalités prévues aux articles R. 434-10 et suivants du code de la sécurité sociale, soit validé par la CPAM, évaluer le préjudice économique des consorts [C] comme suit :

* Mme [F] [C] : 287.629,35 euros avant déduction des indemnités versées et susceptibles d'être versées par les tiers payeurs si l'accident avait été déclaré en accident de trajet :

- par la Caisse nationale d'assurance vieillesse (CNAV) au titre de la pension veuvage, soit la somme 2 410,88 euros

- par AG2R [l'institution de prévoyance AG2R La Mondiale (AG2R), soit la somme de 6 050,25 euros,

- par la CPAM : 236 885,07 euros

Solde : 42 283,15 euros en faveur de Mme [F] [C],

* M. [M] [C] : 25.223,97 euros avant déduction des indemnités versées et susceptibles d'être versées par les tiers payeurs si l'accident avait été déclaré en accident de trajet :

- par AG2R : rente éducation d'un montant de 5 701,31 euros,

- par la CPAM : rente annuelle correspondant à 25% du salaire annuel du défunt, versée jusqu'aux 20 ans de l'enfant.

* [S] [C] : 32.794,52 euros avant déduction des indemnités versées et susceptibles d'être versées par les tiers payeurs si l'accident avait été déclaré en accident de trajet :

- par AG2R : rente éducation d'un montant de 6.912,36 euros,

- par la CPAM : rente annuelle correspondant à 25% du salaire annuel du défunt, versée jusqu'aux 20 ans de l'enfant.

- débouter les consorts [C] du surplus de leurs demandes.

- rappeler que le FGAO ne peut être condamné au paiement des dépens, qui ne figurent pas au rang des charges qu'il est tenu d'assurer.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le préjudice économique des proches

*Sur la fin de non-recevoir tirée de l'article 564 du code de procédure civile

Les consorts [C] concluent que la demande du FGAO tendant à voir déduire de leur préjudice économique le montant d'hypothétiques rentes d'ayants droit qu'ils n'ont jamais perçu est irrecevable, s'agissant d'une demande nouvelle en cause d'appel.

Ils font observer que le FGAO ne pouvait ignorer dès sa saisine que l'accident de la victime directe pourrait relever, le cas échéant, de la législation sur les accidents de trajet et qu'il n'a formulé aucune demande d'information sur ce point à la CPAM avant le mois de juillet 2019.

Ils estiment que la demande du FGAO tendant à voir imputer des prestations non servies, est sans rapport avec celle relative à l'imputation de la créance des organismes sociaux, et s'analyse en une sanction de leur prétendue négligence qui n'ayant pas été présentée devant le premier juge est nouvelle en cause d'appel.

Le FGAO réplique que la cour d'appel a d'ores et déjà écarté la fin de non-recevoir tirée de la nouveauté des demandes en cause d'appel dans son précédent arrêt du 11 avril 2021.

Il ajoute qu'en tout état de cause, il ne s'agit pas d'une prétention nouvelle, dans la mesure où il n'a été informé de l'absence de déclaration à la CPAM de l'accident de trajet de [Y] [C] que postérieurement au jugement, ce qui caractérise la survenance ou la révélation d'un fait rendant sa demande recevable, que cette demande tend aux même fins que celle soumise au premier juge au sens de l'article 565 du code de procédure civile et qu'elle constitue également, en application de l'article 566 du même code, l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaires aux prétentions de première instance, à savoir l'évaluation du préjudice économique des proches au regard du caractère subsidiaire de l'obligation d'indemnisation du FGAO en application de l'article L. 421-1 du code des assurances.

Sur ce, il convient d'abord de relever que la cour d'appel ne s'est pas prononcée dans le dispositif de son précédent arrêt du 12 avril 2021, qui seul est revêtu de l'autorité de la chose jugée, sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité des prétentions nouvelles en cause d'appel, invoquée par les consorts [C].

Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, « A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait»

Si le FGAO fait valoir pour la première fois en cause d'appel qu'en application de l'article L. 421-1,III, du code des assurances, il convient, pour déterminer le montant de l'indemnité revenant aux ayants droits de [Y] [C] au titre de leur préjudice économique, de tenir compte de rentes qui n'ont pas été perçues mais qui auraient dû l'être au titre de la législation sur les accidents de travail, s'ils n'avaient pas laissé s'éteindre leurs droits, il ne s'agit pas d'une prétention nouvelle, irrecevable en cause d'appel, mais d'un moyen de défense au fond pouvant être invoqué en tout état de cause, tendant à faire écarter les prétentions indemnitaires des consorts [C] à l'égard du FGAO en raison du caractère subsidiaire de son intervention.

La fin de non-recevoir tirée de l'article 564 du code de procédure civile sera, en conséquence, rejetée.

* Sur la fin de non-recevoir tirée de l'interdiction de se contredire au détriment d'autrui

Les consorts [C] soutiennent que nul ne peut au cours d'une procédure se contredire au détriment d'autrui, à peine d'irrecevabilité, et que tel est le cas en l'espèce du FGAO, qui ayant fait le choix, en toute connaissance de cause, de ne pas se prévaloir d'un prétendu accident du travail et ne saurait adopter une position contraire devant la cour, en se contredisant à leur détriment.

Sur ce, la fin de non-recevoir tirée du principe selon lequel nul ne peut se contredire au détriment d'autrui sanctionne l'attitude procédurale consistant pour une partie, au cours d'une même instance, à adopter des positions contraires ou incompatibles entre elles dans des conditions qui induisent en erreur son adversaire sur ses intentions.

Outre que l'instance d'appel constitue une instance distincte de celle engagée en première instance, le principe sus-visé ne fait pas obstacle à ce qu'une partie invoque des moyens de défense nouveaux en cause d'appel.

Or, en soutenant que pour déterminer le montant de l'indemnité revenant aux ayants droits de [Y] [C] au titre de leur préjudice économique, il convient de tenir compte de rentes qui n'ont pas été perçues mais qui auraient dû l'être au titre de la législation sur les accidents de travail, s'ils n'avaient pas laissé s'éteindre leurs droits, le FGAO oppose un moyen de défense nouveau, conformément à l'article 563 du code de procédure civile.

La fin de non-recevoir tirée de l'interdiction de se contredire au détriment d'autrui sera, en conséquence, rejetée.

* Sur le moyen du FGAO selon lequel il convient de déduire du préjudice économique des consorts [C] des rentes d'ayants droits auxquelles ils auraient pu prétendre

Les consorts [C] soutiennent qu'il n'y a pas lieu de déduire de leur préjudice économique des prestations hypothétiques qu'ils n'ont pas perçues, ainsi qu'il résulte du décompte définitif de débours de la CPAM.

Ils estiment transposable au FGAO, la jurisprudence de la Cour de cassation en matière d'indemnisation des victimes d'infractions écartant, en application de l'article 706-9 du code de procédure pénale, l'imputation de prestations au titre d'un accident de travail ou de service qui n'ont pas été perçues et qui n'étaient ni définitivement fixées ni exécutoires au jour où la commission d'indemnisation des victimes d'infractions ou la cour d'appel se prononce (Civ. 2e, 16 janvier 2020, n° 18-23.604 ; Civ. 2e, 14 octobre 2021, n° 20-15.746, publié) .

Ils font valoir, en outre, que les déclarations de Mme [F] [C] selon lesquelles son époux aurait été victime d'un accident de trajet alors qu'il se rendait à pied sur son lieu de travail sont dépourvues de valeur probante, compte tenu des circonstances dans lesquelles elles ont été recueillies, alors que l'intéressée était encore sous le choc du décès de son époux, qu'elle ne s'exprime pas en français et qu'elle a dû être entendue avec l'assistance d'un interprète.

Ils ajoutent que l'employeur de [Y] [C], la société Limpa nettoyages, a établi le 5 avril 2023 une attestation dans laquelle elle explique n'avoir effectué aucune déclaration d'accident du travail, dans la mesure où son salarié travaillait du lundi au vendredi de 18 heures à 20h30, de sorte que l'accident survenu le [Date décès 8] 2014, vers 6h25 ne pouvait être considéré ni comme un accident du travail ni comme un accident de trajet ; ils estiment qu'aucun élément complémentaire ne permet de démontrer que la victime travaillait ce matin-là pour un autre employeur.

Le FGAO soutient que la question a d'ores et déjà été tranchée par la cour d'appel dans son précédent arrêt du 12 avril 2021, de sorte que les consorts [C] ne peuvent plus soutenir que l'accident survenu le [Date décès 8] 2014 n'était pas un accident du travail et qu'il n'y a pas lieu de tenir compte des prestations qui auraient été versées par la CPAM si l'accident avait été déclaré en accident de trajet.

Il fait valoir qu'il résulte du procès-verbal de police que l'accident s'est produit le [Date décès 8] 2014 vers 6h25 sur le trajet que [Y] [C] empruntait à pied pour se rendre sur son lieu de travail, que Mme [F] [C], qui a été entendue avec l'assistance d'un interprète en langue tamoul, a en effet indiqué, dans son audition, que son mari était parti du domicile, vers 6h15, 6h20, comme tous les matins, pour se rendre à son travail et prendre le RER, qu'il avait emporté de la nourriture pour le repas de midi, et qu'elle a reçu un appel téléphonique de son travail vers 7h30, 8h, l'informant qu'il ne s'était pas présenté.

Le FGAO estime que l'attestation établie tardivement par la société Limpa nettoyages est dépourvue de valeur probante et qu'en tout état de cause, Mme [F] [C] a indiqué devant les services de police que son mari travaillait pour la société [B] dont elle a produit un bulletin de paie, et qu'il est probable que [Y] [C] travaillait au moment des faits pour ces deux employeurs.

Il affirme qu'il est établi que l'accident du [Date décès 8] 2014 est un accident de trajet, qui aurait dû être pris en charge par la CPAM au titre de la législation sur les accidents du travail.

Il avance qu'en application de l'article L. 421-1 du code des assurances, il n'a pas vocation à prendre en charge les sommes auxquelles la victime peut prétendre au titre d'un autre régime d'indemnisation et n'a pas à supporter le manque de diligence de la victime dans l'exercice de ses droits (Crim., 14 septembre 1972, n° 71-91.174 ,Crim., 5 octobre 2010, n° 09-88.692) ; il ajoute qu'il ressort de cette jurisprudence qu'il y a lieu d'imputer les sommes que la victime ou ses ayants droit auraient dû percevoir s'ils n'avaient pas laissé s'éteindre leur droit à indemnisation en raison de leur carence.

Le FGAO fait observer qu'il résulte de la lettre de la CPAM du 30 septembre 2019 qu'aucun accident du travail n'a été déclaré à cet organisme, que l'article L. 441-2 du code de la sécurité sociale prévoit qu'en l'absence de déclaration de l'accident par l'employeur, la victime ou ses ayants droit disposent d'un délai de deux ans à compter de l'accident pour effectuer cette déclaration auprès de la CPAM, qu'en l'espèce, l'accident datant du [Date décès 8] 2014, les ayants droit de [Y] [C] disposaient d'un délai jusqu'au [Date décès 8] 2016 pour effectuer cette déclaration auprès de la CPAM, ce qu'ils n'ont pas fait bien qu'ils aient été assistés d'un avocat depuis le 16 février 2015.

Il ajoute que la jurisprudence invoquée par les consorts [C], relative à l'indemnisation des victimes d'infractions, n'est pas transposable en l'espèce, dans la mesure où contrairement, au FGTI, l'obligation d'indemnisation du FGAO revêt un caractère subsidiaire.

Sur ce, il convient d'abord de relever que dans son précédent arrêt du 12 avril 2021, la cour d'appel a sursis à statuer sur le préjudice économique de la veuve et des enfants de la victime directe, préjudice sur lequel elle ne s'est donc pas prononcée dans le dispositif de la décision, étant rappelé que les motifs de cet arrêt, fussent-ils le soutien nécessaire de la décision, sont dépourvus d'autorité de la chose jugée.

Selon l'articles L. 421-1, III, du code des assurances, « Lorsque le fonds de garantie intervient au titre des I et II, il paie les indemnités allouées aux victimes ou à leurs ayants droit qui ne peuvent être prises en charge à aucun autre titre lorsque l'accident ouvre droit à réparation. Les versements effectués au profit des victimes ou de leurs ayants droit et qui ne peuvent pas donner lieu à une action récursoire contre le responsable des dommages ne sont pas considérés comme une indemnisation à un autre titre ».

L'article R. 421-13 du code des assurances, dans sa rédaction applicable au litige, prévoit que « Les victimes d'accident ou leurs ayants droit doivent adresser au fonds de garantie leurs demandes d'indemnité par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. A l'appui de leur demande, ils sont tenus de justifier :

(...)

2° Que l'accident ouvre droit à réparation à leur profit dans les termes de la législation française sur la responsabilité civile et qu'il ne peut donner droit à indemnisation complète à aucun titre. Si la victime ou ses ayants droit peuvent prétendre à une indemnisation partielle à un autre titre, le fonds de garantie ne prend en charge que le complément. Pour permettre de déterminer le préjudice complémentaire de la victime ou de ses ayants droit, les tiers payeurs, définis par la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, doivent faire connaître au fonds de garantie le montant des versements effectués au profit de ceux-ci, au plus tard dans un délai de quatre mois à compter de la demande émanant du fonds ».

L'article 29, 1° de la loi du 5 juillet 1989, qui énumère les prestations ouvrant droit à un recours subrogatoire en cas de dommage résultant d'une atteinte à la personne, vise les prestations versées par les organismes, établissements et services gérant un régime obligatoire de sécurité sociale, ce qui est le cas de la CPAM.

Il résulte de la combinaison de ces textes que, nonobstant le caractère subsidiaire de l'obligation du FGAO, les prestations qui n'ont ni été ni demandées ni perçues par les ayants droit de la victime d'un accident mortel du trajet et dont la prise en charge par un organisme gérant un régime obligatoire de sécurité sociale n'est pas effective mais seulement éventuelle à la date à laquelle le juge statue, ne constituent pas une indemnisation versée à un autre titre devant s'imputer sur le préjudice économique des ayants droit.

On relèvera que l'article L. 441-2 du code de la sécurité sociale dont le FGAO se prévaut pour justifier de l'imputation de prestations non perçues en raison de la carence des consorts [C] prévoit que « l'employeur ou l'un de ses préposés doit déclarer tout accident dont il a connaissance à la caisse primaire d'assurance maladie dont relève la victime selon des modalités et dans un délai déterminés » et que « la déclaration à la caisse peut être faite par la victime ou ses représentants jusqu'à l'expiration de la deuxième année qui suit l'accident », ce dont il ne résulte aucune obligation pour les ayants droits de la victime de déclarer un tel accident.

Il convient ainsi de dire que les rentes hypothétiques qui auraient pu être versées au titre de la législation sur les accidents du travail aux ayants droits de [Y] [C] ne peuvent être déduites des indemnités à la charge du FGAO au titre de leur préjudice économique, nonobstant les motifs de l'arrêt du 12 avril 2021, rendu par la cour dans une autre composition étant relevé que selon le décompte définitif de créance de la CPAM en date du 24 janvier 2022, seuls ont été pris en charge par cet organisme, consécutivement à l'accident de [Y] [C] en date du [Date décès 8] 2014, des frais de transport d'un montant de 120,94 euros et un capital décès d'un montant de 1 831,38 euros.

Sur l'indemnisation de la perte de revenus des proches

En cas de décès de la victime directe, le préjudice patrimonial subi par l'ensemble de la famille proche du défunt doit être évalué en prenant pour élément de référence le revenu annuel du foyer avant le dommage ayant entraîné le décès de la victime directe, en tenant compte de la part de consommation personnelle de celle-ci, et des revenus que continue à percevoir le conjoint survivant, ainsi que de tout nouveau revenu qui est la conséquence directe et nécessaire du décès.

* Sur les revenus du foyer avant le décès de [Y] [C]

Les consorts [C] demandent à la cour de retenir comme revenu de référence la rémunération de la victime figurant au titre de l'année 2013, dernière année entière précédant l'accident, sur le relevé de carrière établi par la Caisse nationale d'assurance vieillesse (la CNAV).

Le FGAO qui se réfère à ce même document soutient qu'en raison du caractère fluctuant des revenus perçus par [Y] [C] et de l'alternance de périodes d'activité et de chômage, il convient de retenir comme salaire de référence la moyenne des revenus mentionnés sur le relevé de carrière de la CNAV au titre des années 2011, 2012 et 2013, soit la somme de 11 858,66 euros.

Sur ce, il convient d'observer à titre liminaire que les consorts [C] n'ont pas versé aux débats les avis d'imposition de [Y] [C] au titre des années 2011, 2012 et 2013 précédant l'accident, mais seulement son relevé de carrière établi par la CNAV, lequel mentionne année par année le montant de ses rémunérations brutes, ce que confirme l'examen comparatif de l'avis d'imposition au titre des revenus de l'année 2014, année de l'accident, qui fait état d'un revenu net imposable d'un montant de 11 125 euros, alors que le relevé carrière de la CNAV mentionne au titre de cette même année une rémunération d'un montant de 13 352 euros.

Toutefois, force est de constater que le FGAO admet que le salaire de référence de la victime soit fixé en fonction des revenus mentionnés dans ce relevé de carrière auquel il se réfère expressément.

Compte tenu du caractère fluctuant des revenus de la victime, qui alternait avant l'accident des périodes de chômage et d'activité et qui, selon les mentions de son relevé de carrière, a bénéficié d'une rémunération annuelle de 10 553 euros en 2011, de 5 485 euros en 2012 et de 16 588 euros en 2013, il est justifié de retenir comme salaire de référence la moyenne des revenus de ces trois années, soit la somme de 11 858,66 euros, proposée par le FGAO [(10 553 euros + 8 435 euros + 16 588 euros) / 3].

Il n'est pas contesté que Mme [F] [C] qui souffrait d'un glaucome bilatéral sévère opéré en 2011 ayant laissé des séquelles importantes au niveau du champ visuel gauche (pièce n° 6.5), d'un syndrome néphrotique et d'une maladie asthmatique invalidante (pièce n° 6.4), ne travaillait pas avant l'accident et ne percevait aucun revenu.

Les revenus annuels du ménage avant le décès de [Y] [C] s'élevaient ainsi à la somme de 11 858,66 euros.

* Sur le revenu disponible du foyer

Les consorts [C] proposent de retenir une part de consommation personnelle du défunt de 15 % alors que le FGAO propose de la fixer à 20 %.

Sur ce, compte tenu de la structure du foyer composé de deux adultes et de deux enfants, mais également du faible niveau de revenus de [Y] [C] qui était le seul à exercer une activité professionnelle, il y a lieu de fixer à 15 % sa part d'auto-consommation.

Le revenu disponible du foyer après déduction de la part de consommation personnelle du défunt s'élève ainsi à la somme annuelle de 10 079,86 euros [11 858,66 euros - (11 858,66 euros x 15 %)].

* Sur les revenus postérieurs au décès

Mme [F] [C] n'ayant aucune activité professionnelle génératrice de gains avant l'accident, le préjudice économique annuel du foyer s'élève à la somme de 10 079,86 euros.

* Sur le préjudice viager du foyer

Pour la détermination des préjudices économiques respectifs de Mme [F] [C] et de ses fils, M. [M] [C], né le [Date naissance 10] 2002, et [S] [C] né le [Date naissance 3] 2006, il convient de faire application de la méthode consistant à déduire du préjudice viager du foyer le préjudice temporaire des enfants, ce qui permet de réintégrer dans la part du conjoint survivant la fraction des revenus du foyer devenue disponible à la date d'accession à l'autonomie financière des enfants.

Les parties s'opposant sur le barème de capitalisation à utiliser, il convient de faire application pour l'évaluation des arrérages à échoir du préjudice viager du foyer du barème publié par la Gazette du palais le 31 octobre 2022 avec un taux d'intérêts de 0 % qui est le plus approprié en l'espèce pour assurer la réparation intégrale du préjudice économique des proches.

[Y] [C] et son épouse, Mme [F] [C], étant nés respectivement les [Date naissance 1] 1968 et [Date naissance 7] 1970 ainsi qu'il résulte de l'acte de mariage annexé à la procédure pénale, de sorte que l'espérance de vie de l'époux était inférieure à celle de l'épouse, il convient de faire application de l'euro de rente prévu par le barème retenu par la cour pour un homme qui aurait été âgé de 54 ans à la date de la liquidation.

Le préjudice viager du foyer s'établit de la manière suivante :

- arrérages échus entre le [Date décès 8] 2014, date de l'accident mortel, et la date du présent arrêt

* 10 079,86 euros x 9,62 ans = 96 968,25 euros

- arrérages à échoir par capitalisation viagère selon l'euro de rente viagère prévu par le barème retenu par la cour pour un homme qui aurait été âgé de 54 ans à la date de la liquidation, soit 27,725

* 10 079,86 euros x 27,725 = 279 464,12 euros

Soit une somme totale de 376 432,37 euros

* Sur le préjudice de M. [M] [C]

M. [M] [C], né le [Date naissance 10] 2002, était âgé de 12 ans à la date du décès de son père, le [Date décès 8] 2014.

Il convient de retenir, conformément à la demande des consorts [C], que sa part de consommation des revenus du foyer était de 15 % et de faire application d'un euro de rente temporaire jusqu'à l'âge de 25 ans.

Le préjudice économique de M. [M] [C] s'établit ainsi de la manière suivante:

- arrérages échus de la date du décès à celle du présent arrêt

* 10 079,86 euros x 15 % x 9,62 ans = 14 545,24 euros

- arrérages à échoir par capitalisation selon l'euro de temporaire jusqu'à l'âge de 25 ans prévu par le barème retenu par la cour pour un jeune homme de sexe masculin âgé de 21 ans à la date de la liquidation :

* 10 079,86 euros x 15 % x 3,994 = 6 038,84 euros

Soit une somme totale de 20 854,08 euros.

Il ressort des pièces versées aux débats (pièces n° 1-16 et 1.17) que M. [M] [C] bénéficie d'une rente d'éducation servie jusqu'à l'âge de 25 ans par l'institution de prévoyance AG2R La Mondiale à laquelle son père était affilié et dont le montant non contesté s'élève à la somme de 5 701,31 euros.

Il est admis tant par les consorts [C] que par le FGAO que cette rente d'éducation doit s'imputer sur le préjudice économique de M. [M] [C] qu'elle a vocation à indemniser, étant rappelé qu'aux termes de l'article L. 931-11 du code de la sécurité sociale, pour le paiement des prestations à caractère indemnitaire, les institutions de prévoyance sont subrogées jusqu'à concurrence de ces prestations dans les droits et actions du participant, du bénéficiaire ou de leurs ayants droit contre les tiers responsables.

Après déduction de cette rente d'éducation, il revient à M. [M] [C] la somme de 15 152,77 euros (20 854,08 euros - 5 701,31 euros).

* Sur le préjudice de [S] [C]

[S] [C], représenté par sa mère, Mme [F] [C], était âgé de 7 ans, à la date du décès de son père, le [Date décès 8] 2014, comme étant né le [Date naissance 3] 2006.

Il convient de retenir, conformément à la demande des consorts [C], que sa part de consommation des revenus du foyer était de 15 % et de faire application d'un euro de rente temporaire jusqu'à l'âge de 25 ans.

Le préjudice économique de [S] [C] s'établit ainsi de la manière suivante :

- arrérages échus de la date du décès à celle du présent arrêt

* 10 079,86 euros x 15 % x 9,62 ans = 14 545,24 euros

- arrérages à échoir par capitalisation selon l'euro de temporaire jusqu'à l'âge de 25 ans prévu par le barème retenu par la cour pour un jeune homme âgé de 17 ans à la date de la liquidation :

* 10 079,86 euros x 15 % x 7,983 = 12 070,13 euros

Soit une somme totale de 26 615,37 euros.

Il ressort des pièces versées aux débats (pièces n° 1-16 et 1.17) que [S] [C] bénéficie d'une rente d'éducation servie jusqu'à l'âge de 25 ans par l'institution de prévoyance AG2R La Mondiale à laquelle son père était affilié et dont le montant non contesté s'élève à la somme de 6 912,36 euros.

Il est admis tant par les consorts [C] que par le FGAO que cette rente d'éducation doit s'imputer sur le préjudice économique de [S] [C] qu'elle a vocation à indemniser, étant rappelé qu'aux termes de l'article L. 931-11 du code de la sécurité sociale, pour le paiement des prestations à caractère indemnitaire, les institutions de prévoyance sont subrogées jusqu'à concurrence de ces prestations dans les droits et actions du participant, du bénéficiaire ou de leurs ayants droit contre les tiers responsables.

Après déduction de cette rente d'éducation, il revient à [S] [C] la somme de 19 703,01 euros (26 615,37 euros - 6 912,36 euros).

* Sur le préjudice de Mme [F] [C]

Le préjudice économique de Mme [F] [C] correspond à la différence entre le préjudice viager du foyer et le préjudice économique temporaire des enfants avant déduction des prestations imputables sur celui-ci, soit la somme de 328 962,92 euros (376 432,37 euros - 20 854,08 euros - 26 615,37 euros).

Doivent s'imputer sur le préjudice économique de Mme [F] [C] les prestations suivantes qu'elles ont vocation à réparer :

- l'allocation de veuvage versée par la CNAV pour un montant total de 2 410,88 euros (pièce n° 4.4), étant observé que cet organisme gère un régime obligatoire de sécurité sociale, de sorte que ses prestations constituent une indemnisation versée à un autre titre au sens de l'article L. 421-1 du code des assurances,

- le capital décès d'un montant de 6 050,25 euros (pièce n° 1.16) versé par l'institution de prévoyance AG2R La Mondiale, dont le caractère indemnitaire n'est pas contesté, étant rappelé qu'aux termes de l'article L. 931-11 du code de la sécurité sociale, pour le paiement des prestations à caractère indemnitaire, les institutions de prévoyance sont subrogées jusqu'à concurrence de ces prestations dans les droits et actions du participant, du bénéficiaire ou de leurs ayants droit contre les tiers responsables,

- le capital décès d'un montant de 1 831,38 euros versé par la CPAM ainsi qu'il résulte du décompte définitif de créance du 24 janvier 2022, étant observé que cette prestation servie par un organisme gérant un régime obligatoire de sécurité sociale, au sens de l'article 29,1° de la loi du 5 juillet 1985, ouvre droit à une action contre la personne tenue à réparation cet constitue une indemnisation versée à un autre titre au sens de l'article L. 421-1 du code des assurances.

Après déduction des prestations sus-mentionnées, il revient à Mme [F] [C] la somme de 318 670,41 euros (328 962,92 euros - 2 410,88 euros - 6 050,25 euros - 1 831,38 euros).

**************

Le jugement qui a condamné le FGAO à verser, en réparation de leur préjudice économique, la somme de 202 641,03 euros à Mme [F] [C], la somme de 29 542,20 euros à M. [M] [C] et la somme de 30 509,87 euros à [S] [C], sera infirmé.

Sur la sanction du doublement du taux de l'intérêt légal

La cour d'appel a dans son précédent arrêt du 21 avril 2021 sursis à statuer sur la demande d'application de la sanction du doublement de l'intérêt légal de Mme [F] [C], agissant tant à titre personnel qu'en qualité de représentante légale de ses enfants mineurs, [M] et [S] [C].

Elle a, en revanche, statué sur les demandes de doublement du taux de l'intérêt légal formées par les autres victimes par ricochet.

Les consorts [C] font valoir que le FGAO n'a formulé aucune offre d'indemnisation provisionnelle ou définitive dans les 8 mois de l'accident et relèvent qu'ayant reçu le dossier pénal le 22 mars 2016, il disposait à cette date, de tous les éléments lui permettant de prendre position.

Ils soutiennent que l'offre du 26 janvier 2016 dont se prévaut le FGAO ne répond pas aux exigences prévues par la loi en ce qu'elle ne comporte pas, outre l'évaluation de chaque préjudice, la créance des tiers payeurs et les sommes revenant au bénéficiaire, qu'elle ne mentionne pas la possibilité de renoncer à la transaction dans le délai de 15 jours, et qu'elle n'a pas été adressée à Mme [F] [C] personnellement mais à son avocat qui ne disposait pas à cette date d'un mandat pour la représenter, aucune procédure judiciaire n'étant en cours.

Ils invoquent le fait qu'en tout état de cause, cette offre était incomplète puisqu'elle ne comportait aucune proposition d'indemnisation des préjudices subis par [Y] [C] avant son décès, et des préjudices économiques de la veuve et des enfants de la victime directe et qu'elle était, en outre, manifestement insuffisante puisque le FGAO proposait une indemnité d'un montant de 69 000 euros, alors que le tribunal a alloué aux consorts [C] la somme de 349 793,10 euros.

Ils rappellent que l'assureur ne peut opposer à la victime l'absence de renseignement sur la créance d'un organisme social pour se dispenser de faire une offre sur un élément du préjudice et concluent que cette offre équivaut à une absence d'offre.

Les consorts [C], demandent ainsi à la cour de juger que l'évaluation qui sera faite de leurs préjudices, créance de la CPAM et provisions incluses, portera intérêt au double du taux de l'intérêt légal à compter du 7 mai 2015 jusqu'à la date à laquelle l'arrêt à intervenir sera définitif.

Le FGAO répond que les délais d'offre ne courent qu'à compter du jour où il a reçu les éléments justifiant son intervention conformément à l'article L. 211-22 du code des assurances, qu'en l'espèce il n'a reçu communication du procès-verbal de police que le 22 mars 2016, que néanmoins il avait déjà formulé une offre le 26 janvier 2016 « pour le compte de qui il appartiendra », que cette offre ne portait que sur les préjudices d'affection de la veuve et des enfants de la victime directe, dès lors qu'il n'était pas en mesure de formuler une offre au titre du préjudice économique tant que les créances des organismes sociaux n'étaient pas connues et que la question de la rente d'accident du travail n'était pas réglée.

Il fait observer qu'il avait déjà rappelé dans une lettre du 14 avril 2015 au conseil des consorts [C] la nécessité de produire la créance des tiers payeurs, ce à quoi ce dernier avait répondu que la demande au titre du préjudice économique était réservée ; il estime qu'il ne peut, en conséquence, lui être reproché de ne pas avoir formulé, à cette date, une offre au titre du préjudice économique, alors qu'il ne disposait d'aucune pièce justificative.

Le FGAO ajoute qu'une offre formulée par lettre simple adressée à l'avocat mandaté par la victime est conforme aux exigences de l'article L. 211-9 du code des assurances et fait observer qu'en l'espèce, l'avocat des consorts [C], était bien mandaté pour formuler une demande d'indemnité.

Il relève que compte tenu du caractère subsidiaire de son intervention, il ne peut formuler d'offre tant que la créance des tiers payeurs n'a pas été obtenue.

Il conclut ainsi à la confirmation du jugement qui a rejeté la demande de doublement du taux de l'intérêt légal présentée par les consorts [C].

Sur ce, en application de l'article L. 211-9 du code des assurances, l'assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d'un véhicule terrestre à moteur est tenu de présenter à la victime, lorsque la responsabilité, n'est pas contestée, et le dommage entièrement quantifié, une offre d'indemnité motivée dans le délai de trois mois à compter de la demande d'indemnisation qui lui est présentée. Lorsque la responsabilité est rejetée ou n'est pas clairement établie, ou lorsque le dommage n'a pas été entièrement quantifié, l'assureur doit, dans le même délai, donner une réponse motivée aux éléments invoqués dans la demande.

Une offre d'indemnité comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice doit être faite à la victime qui a subi une atteinte à sa personne dans un délai maximal de huit mois à compter de l'accident. Cette offre peut avoir un caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de l'état de la victime et l'offre définitive d'indemnisation doit alors être faite dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation. En cas de décès de la victime, l'offre est faite à ses héritiers et, s'il y a lieu à son conjoint. L'offre comprend alors tous les éléments indemnisables du préjudice, y compris les éléments relatifs aux dommages aux biens lorsqu'ils n'ont pas fait l'objet d'un règlement préalable.

Par ailleurs, il résulte de l'article L. 211-22 du code des assurances que les dispositions des articles L. 211-9 de ce code sont applicables au FGAO dans ses rapports avec la victime ou ses ayants droit mais que les délais prévus par l'article L. 211-9 courent contre le FGAO, à compter du jour où celui-ci a reçu les éléments justifiant son intervention, lesquels sont précisés à l'article R. 421-13 du même code qui, dans sa rédaction applicable au litige, vise, notamment, les éléments établissant, soit que le responsable de l'accident n'a pu être identifié, soit qu'il n'est pas assuré ou que son assureur est totalement ou partiellement insolvable par suite du retrait de l'agrément administratif.

En l'espèce, il ressort de la lettre du FGAO au conseil des consorts [C] en date du 24 mars 2016, que le FGAO n'a reçu communication du procès-verbal de police, dont il résulte que l'auteur de l'accident n'a pu être identifié, qu'à cette date ; le délai qui lui était imparti pour formuler une offre en application des articles L. 211-9 et L. 211-22 du code des assurances n'a donc pu courir qu'à compter du 24 mars 2016.

Ainsi le FGAO devait présenter à Mme [F] [C], épouse du défunt, ainsi qu'à [M] et [S] [C], dont la qualité d'héritiers n'est pas contestée et résulte des dispositions de l'article 734 du code civil, d'une part, une offre d'indemnisation portant sur tous les éléments indemnisables du préjudice de [Y] [C], d'autre part, une offre d'indemnisation complète au titre de leurs préjudices personnels, et ce, au plus tard le 24 novembre 2016.

La première offre dont le FGAO justifie a été faite « pour le compte de qui il appartiendra » par lettre du 26 janvier 2016, adressée à l'avocat de Mme [F] [C] et ne portait que sur les préjudices d'affection de la veuve et des enfants de la victime directe.

Il n'est pas justifié que l'avocat de Mme [F] [C] disposait d'un mandat spécial l'autorisant à représenter sa cliente dans la procédure d'offre prévue à l'article L. 211-9 du code des assurances, ce que la seule circonstance que cet avocat a formulé une demande d'indemnisation lors de pourparlers avec le FGAO ne suffit pas à établir, étant rappelé qu'un avocat ne dispose du pouvoir de représenter son client, sans avoir à justifier d'un mandat, que dans le cadre de la procédure judiciaire et qu'en l'espèce aucune procédure n'avait été engagée à la date de l'offre.

Il en résulte que l'offre irrégulière du 26 janvier 2016 équivaut à une absence.

Les offres ultérieures faites par le FGAO par voie de conclusions notifiées le 3 octobre 2018 devant le tribunal (pièce n° 1.5 des consorts [C]) puis par voie de conclusions notifiées les 27 janvier 2020, 22 mai 2020, et 25 janvier 2021 devant la cour, sont incomplètes, en ce qui concerne les préjudices subis par [Y] [C] avant son décès, pour ne comporter aucune proposition d'indemnisation au titre du déficit fonctionnel temporaire et du préjudice esthétique temporaire, pourtant caractérisés par les constatations du rapport de police.

Le FGAO encourt ainsi à l'égard des consorts [C], s'agissant des préjudices subis par la victime directe, la pénalité prévue à l'article L. 211-13 du code des assurances, entre le 25 novembre 2016 et la date de l'arrêt du 12 avril 2021, devenu définitif, qui a définitivement fixé les préjudices subis par [Y] [C] avant son décès.

Le FGAO sera ainsi condamné à payer aux consorts [C] au titre de l'action successorale, les intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur le montant des indemnités allouées par le tribunal et par la cour au titre des préjudices subis par [Y] [C], avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées, à compter du 25 novembre 2016 et jusqu'à la date de l'arrêt du 12 avril 2021, devenu définitif.

Le FGAO a, par ailleurs, fait une offre d'indemnisation par voie de conclusions notifiées le 3 octobre 2018 (pièce n° 1.5 des consorts [C]) au titre des préjudices subis par ricochet par Mme [F] [C], M. [M] [C] et [S] [C].

Cette offre porte sur tous les éléments indemnisables de leurs préjudices personnels et n'est pas manifestement insuffisante, pour représenter plus de 50 % des indemnités allouées.

Le FGAO sera ainsi condamné à payer aux consorts [C] au titre de leurs préjudices personnels, les intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur le montant de l'offre faite par conclusions notifiées le 3 octobre 2018, avant déduction de la créance des tiers payeurs et des provisions versées, à compter du 25 novembre 2016 et jusqu'au 3 octobre 2018.

Le jugement sera infirmé.

Sur les intérêts moratoires et la capitalisation des intérêts

Les consorts [C] demandent à la cour de juger que les sommes mises à la charge du FGAO porteront intérêts au taux légal à compter du [Date décès 8] 2014, date de l'accident, ou à tout le moins du 22 mars 2016, date de réception du dossier pénal par le FGAO, avec anatocisme « et ce compris au titre du doublement des intérêts ».

Sur ce, aux termes de l'article 1153-1, devenu 1231-7 du code civil « En toutes matière, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal même en l'absence de demande ou de disposition spéciale du jugement. Sauf disposition contraire de la loi, ces intérêts courent à compter du jugement à moins que le juge n'en dispose autrement ».

En l'espèce, aucune circonstance ne justifie de fixer le point de départ des intérêts moratoires au [Date décès 8] 2014 ou au 22 mars 2016.

Il y a lieu de dire qu'en application de l'article 1231-7 du code civil les indemnités allouées par le tribunal produiront intérêts au taux légal à compter du jugement sur les sommes allouées par celui-ci et à compter du présent arrêt pour le surplus.

Il convient de prévoir, conformément à la demande des consorts [C], que tant les intérêts au double du taux légal qui ont la nature d'intérêts moratoires, que les intérêts au taux légal, produiront eux-mêmes intérêts dans les conditions prévues à l'article 1343-2 du code civil.

Sur la demande des consorts [C] tendant à voir condamner le FGAO au paiement de la créance de la CPAM

Les consorts [C] demandent que le FGAO soit condamné à payer à la CPAM le montant de sa créance au titre des prestations qui leur ont été servies.

Toutefois, compte tenu du caractère subsidiaire de son obligation d'indemnisation, les tiers payeurs ne bénéficient d'aucune recours subrogatoire à l'encontre du FGAO, de sorte que la demande sera rejetée.

Sur les demandes annexes

L'équité commande d'allouer à Mme [F] [Z] veuve [C] en application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, étant rappelé que le FGAO qui a la qualité de partie, peut être condamné sur ce fondement.

Les dépens d'appel qui ne figurent pas au rang des charges que le FGAO est tenu d'assurer seront mis à la charge du Trésor public, avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

S'agissant des droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement visés à l'article L.111-8 du code des procédures civiles d'exécution, qui n'étant pas mentionnés dans la liste limitative de l'article 695 du code de procédure civile ne constituent pas des dépens, leur répartition entre le débiteur et le créancier est prévue à l'article R.444-55 du code de commerce et ne peut être remise en cause dans le présent litige en application de l'article R.631-4 du code de la consommation dès lors que le litige en cause n'est pas né de l'application du code de la consommation.

PAR CES MOTIFS

Vu l'arrêt du 12 avril 2021,

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et par mise à disposition au greffe,

- Rejette les fins de non-recevoir soulevées par Mme [F] [Z] veuve [C], agissant tant à titre personnel qu'en qualité de représentante légale de son fils mineur, [S] [C] et par M. [M] [C], et de l'interdiction de se contredire au détriment d'autrui,

- Dit que les rentes hypothétiques qui auraient pu être versées au titre de la législation sur les accidents du travail aux ayants droits de [Y] [C] ne peuvent être déduites des indemnités à la charge du Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages, au titre de leur préjudice économique,

- Infirme le jugement en ses dispositions relatives au préjudice économique de Mme [F] [Z] veuve [C], M. [M] [C] et [S] [C],

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

- Condamne le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages à payer à Mme [F] [Z] veuve [C] la somme de 318 670,41 euros au titre de son préjudice économique, majorée des intérêts au taux légal à compter du jugement à concurrence des sommes allouées par le tribunal, et à compter du présent arrêt pour le surplus,

- Condamne le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages à payer à Mme [F] [Z] veuve [C], les intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur le montant de l'offre faite par conclusions notifiées le 3 octobre 2018, avant déduction de la créance des tiers payeurs et des provisions versées, à compter du 25 novembre 2016 et jusqu'au 3 octobre 2018,

- Condamne le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages à payer à Mme [F] [Z] veuve [C], en sa qualité de représentante légale de son fils mineur, [S] [C], la somme de 19 703,01 euros au titre du préjudice économique de ce dernier, majorée des intérêts au taux légal à compter du jugement,

- Condamne le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages à payer à Mme [F] [Z] veuve [C], ès qualités, les intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur le montant de l'offre faite par conclusions notifiées le 3 octobre 2018, avant déduction de la créance des tiers payeurs et des provisions versées, à compter du 25 novembre 2016 et jusqu'au 3 octobre 2018,

- Condamne le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages à payer à M. [M] [C] la somme de 15 152,77 euros au titre de son préjudice économique, majorée des intérêts au taux légal à compter du jugement,

- Condamne le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages à payer à M. [M] [C] les intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur le montant de l'offre faite par conclusions notifiées le 3 octobre 2018, avant déduction de la créance des tiers payeurs et des provisions versées, à compter du 25 novembre 2016 et jusqu'au 3 octobre 2018,

- Condamne le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages à payer à M. [M] [C] les intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur le montant de l'offre faite par conclusions notifiées le 3 octobre 2018, avant déduction de la créance des tiers payeurs et des provisions versées, à compter du 25 novembre 2016 et jusqu'au 3 octobre 2018,

- Condamne le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages à payer à Mme [F] [Z] veuve [C], tant à titre personnel qu'ès qualités et à M. [M] [C], en leur qualité d'ayants droit de [Y] [C], les intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur le montant des indemnités allouées par le tribunal et par la cour au titre des préjudices subis par [Y] [C], avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées, à compter du 25 novembre 2016 et jusqu'à la date de l'arrêt du 12 avril 2021, devenu définitif,

- Rejette la demande tendant à voir condamner le Fonds de garantie des assurances obligatoire de dommages à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-Saint-Denis le montant des sommes servies par cette dernière aux consorts [C] au titre de sa créance,

- Rejette la demande formée au titre des droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement,

- Condamne le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages à payer à Mme [F] [Z] veuve [C] en application de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

- Met les dépens d'appel à la charge du Trésor public avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 22/19034
Date de la décision : 04/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;22.19034 ?
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