Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 3
ARRET DU 04 JUILLET 2024
(n° , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/06639 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFSIQ
Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Janvier 2022 -Tribunal de proximité de JUVISY-SUR-ORGE - RG n° 20-000653
APPELANTE
Madame [R] [L] veuve [P]
née le 17 février 1964 à [Localité 5] (MAROC)
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée et assistée par Me Omar OUABBOU, avocat au barreau de PARIS, toque : G0084
INTIMEE
Appelante à titre incident
S.C.I. JA
RCS n° 382 598 597
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Priscillia MIORINI de la SELAS AVOCATS ASSOCIES MIORINI, avocat au barreau d'ESSONNE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Juin 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Aurore DOCQUINCOURT, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Mme Anne-Laure MEANO, Présidente de Chambre
Mme Muriel PAGE, Conseillère
Mme Aurore DOCQUINCOURT, Conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Joëlle COULMANCE
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Anne-Laure MEANO, Présidente de Chambre et par Joëlle COULMANCE, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
*****
EXPOSÉ DU LITIGE :
M. [E] [P] a épousé Mme [Y] [D] le 20 mars 1972 au Maroc. Cinq enfants sont nés de cette union.
M. [E] [P] a ensuite épousé Mme [R] [L] en secondes noces au Maroc, alors qu'il était toujours marié à sa première épouse. De cette seconde union deux enfants sont nés en France.
M. [E] [P] est décédé le 12 mars 2016.
Par jugement en date du 2 juin 2020, le tribunal judiciaire d'Evry-Courcouronnes a notamment:
- prononcé la nullité du mariage célébré à une date indéterminée au Maroc entre M. [E] [P] et Mme [R] [L] ;
- débouté Mme [D] et ses enfants de leur demande tendant à voir refuser à Mme [R] [L] le bénéfice du mariage putatif.
Mme [R] [L] occupe un appartement situé au [Adresse 6] à [Localité 4], appartenant à la société civile immobilière JA.
Se prévalant d'un bail portant sur ces locaux, la société civile immobilière JA a, par acte d'huissier en date du 21 mars 2019, adressé un congé pour vente à Mme [R] [L], à effet au 31 octobre 2019.
Par acte d'huissier en date du 29 juin 2020, la société civile immobilière JA a fait assigner Mme [R] [L] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Juvisy-sur-Orge, aux fins de :
- valider le congé délivré à Mme [R] [L] le 21 mars 2019 pour le 31 octobre 2019 et constater que, le bail étant résilié depuis le 1er novembre 2019 à 00h00, Mme [R] [L] est déchue de tout titre d'occupation depuis cette date ;
- surabondamment, prononcer la résiliation judiciaire du bail liant les parties pour faute du preneur ;
- ordonner l'expulsion de Mme [R] [L], ainsi que celle de tous occupants de son chef et au besoin, avec l'assistance de la force publique ;
- condamner Mme [R] [L] au paiement de la somme de 49.660,14 euros au titre des loyers, charges et indemnités d'occupations dus avec le terme de juin 2020 selon décompté édité le 12 juin 2020 annexé et signifié avec la présente assignation ;
- fixer l'indemnité mensuelle d'occupation due à compter de la date de la présente assignation au montant du loyer qui aurait été dû si le bail s'était poursuivi majoré de 50 % et des charges ;
- condamner Mme [R] [L] à payer tous loyers, charges, et indemnités d'occupation exigibles jusqu'à complète libération des lieux ;
- condamner Mme [R] [L] au paiement de la somme de 2.000,00 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;
- ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir nonobstant opposition ou appel et sans caution.
Par jugement contradictoire entrepris du 11 janvier 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Juvisy-sur-Orge a ainsi statué :
CONSTATE que le congé délivré à Mme [R] [L] par la société civile immobilière JA pour le 31 octobre 2019 est régulier ;
ORDONNE l'expulsion de Mme [R] [L] ainsi que tout occupant de son chef, du bien sis [Adresse 2] à [Localité 4], si besoin est avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier ;
CONDAMNE Mme [R] [L] à payer à la société civile immobilière une indemnité mensuelle d'occupation mensuelle égale au montant des loyers et charges qui auraient été dus en cas de non-résiliation du bail, ce à compter du 1er novembre 2019 et jusqu'au jour de la libération totale des lieux, avec les intérêts légaux à compter du présent jugement pour les indemnités échues et à compter de chaque indemnité pour les indemnités à échoir ;
DÉBOUTE les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires ;
CONDAMNE Mme [R] [L] à verser à la société civile immobilière la somme de 800,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Mme [R] [L] aux entiers dépens de l'instance ;
RAPPELLE que l'exécution provisoire est de droit pour les décisions de première instance ;
DIT que copie de la présente décision sera communiquée par les soins du greffe au représentant de l'État dans le département, en application de l'article R.412-2 du code des procédures civiles d'exécution.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Vu l'appel interjeté le 31 mars 2022 par Mme [R] [L],
Vu les dernières conclusions remises au greffe le 30 juin 2022 par lesquelles Mme [R] [L] demande à la cour de :
JUGER l'appel interjeté par Mme [R] [L] à l'encontre du jugement rendu le 11 janvier 2022 par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Juvisy-Sur-Orge, recevable et bien fondé ;
Y faisant droit,
INFIRMER le jugement déféré en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,
JUGER infondées les demandes de la SCI JA ;
JUGER qu'aucun bail verbal à titre onéreux n'existe entre la SCI JA et Mme [R] [L] ;
JUGER que Mme [R] [L] bénéficie d'un bail verbal à titre gracieux ;
JUGER que le congé délivré en date du 21 mars 2019 est entaché de nullité ;
JUGER que Mme [R] [L] dispose d'un droit au maintien dans l'appartement sis [Adresse 2] à [Localité 4] ;
CONDAMNER la SCI JA à payer à Mme [R] [L] la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
CONDAMNER la SCI JA aux entiers dépens.
Vu les dernières conclusions remises au greffe le 04 juillet 2022 aux termes desquelles la SCI JA demande à la cour de :
DEBOUTER Mme [L] de l'intégralité de ses demandes,
ORDONNER la jonction de la présente instance avec l'instance pendante devant la Cour d'appel de Paris (Pôle 4 ' Chambre 3) sous le numéro RG 22/07410 opposant la SCI JA à Mme [L]
INFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la SCI JA de sa demande de condamnation de Mme [L] à payer la somme de 63.891,78 €uros au titre de l'arriéré de loyers, échéance de septembre 2021 incluse.
CONFIRMER le jugement entrepris en toutes ses autres dispositions
Statuant a nouveau :
CONDAMNER Mme [L] au paiement de la somme de 70.550,12 euros au titre des loyers, charges, et indemnités d'occupation dues, terme du mois d'avril 2022 inclus,
CONDAMNER Mme [L] à payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
CONDAMNER Mme [L] aux entiers dépens de l'instance.
Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions remises au greffe et au jugement déféré.
MOTIFS DE LA DÉCISION
En application de l'article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n'est pas tenue de statuer sur les demandes tendant à " constater ", " donner acte ", " dire et juger " en ce qu'elles ne sont pas, exception faite des cas prévus par la loi, des prétentions, mais uniquement des moyens, comme c'est le cas en l'espèce.
Il convient de constater que le premier juge a évoqué à titre liminaire dans sa motivation la question du caractère putatif du mariage de Mme [L], et que celle-ci conteste ladite motivation dans la partie 'discussion' de ses écritures. Toutefois, aucune prétention n'étant formée à ce titre, et le premier juge n'ayant dès lors pas tranché ce point dans son dispositif, il ne sera pas statué sur cette question.
Sur la jonction
La SCI JA sollicite d'ordonner la jonction de la présente instance avec l'instance pendante devant la Cour d'appel de Paris (Pôle 4 ' Chambre 3) sous le numéro RG 22/07410 opposant la SCI JA à Mme [L].
Or, cette jonction a déjà été prononcée par ordonnance du conseiller de la mise en état du 22 septembre 2022, de sorte qu'il n'y a pas lieu de l'ordonner.
Sur les demandes principales de la SCI Ja
La cour constate que, dans le dispositif de ses conclusions qui seule saisit la cour en application de l'article 954 du code de procédure civile, la SCI Ja sollicite uniquement la confirmation du jugement entrepris qui avait accueilli ses demandes principales (outre un appel incident s'agissant de la demande principale en paiement de l'arriéré locatif), mais ne forme pas de demande subsidiaire telle que formulée devant le premier juge, de sorte que la cour n'en est pas saisie.
*Sur la demande de validation du congé pour vente
Mme [L] fait grief au jugement entrepris d'avoir constaté que le congé pour vente délivré par la SCI Ja pour le 31 octobre 2019 était régulier, après avoir considéré qu'un contrat de bail verbal liait les parties, alors qu'elle fait valoir qu'elle occupe le bien à titre gracieux, ce qui lui avait été consenti par M. [E] [P] avec lequel elle avait contracté mariage et qui est le père de ses deux enfants. Elle soutient qu'à l'exception des pièces correspondant aux quittances de loyer de juillet 2009 et de la demande de la CAF du 23 octobre 2015, toutes les autres pièces sont postérieures au décès de M. [E] [P] à la suite duquel les tensions avec la SCI Ja sont apparues, celle-ci étant dorénavant gérée par un fils du premier lit de M. [P].
Elle souligne que le courrier de reprise de gestion de la société Laforêt du 1er décembre 2016 et l'avis d'échéance de ladite société pour le mois de décembre 2016 concernent un autre logement situé [Adresse 1] à [Localité 4].
Elle fait valoir que les autres pièces produites par la SCI Ja sont dépourvues de valeur probante, en ce qu'elles consistent en des demandes d'information de la CAF ou des réponses de celle-ci à des demandes de la SCI Ja sur fourniture du contrat de bail dont le premier juge a exactement considéré qu'il était dépourvu de valeur probante.
Elle relève que la SCI Ja ne rapporte aucune preuve de versement direct, effectif et régulier de la part de Mme [L] de sommes au titre des loyers, ni de la souscription d'une assurance.
La SCI Ja conclut à la confirmation du jugement entrepris, en faisant valoir que M. [W] [P], frère de M. [E] [P] et gérant de la SCI lors de la signature du contrat de bail du 1er novembre 2007, atteste avoir signé ledit bail avec Mme [L] et établi les quittances de loyer et les 'papiers de la CAF pour les APL'. Elle affirme que l'agence Laforêt a informé Mme [L] de son mandat de gestion le 1er décembre 2016 et lui a adressé des avis d'échéance. Elle soutient que la preuve du bail est rapportée par les divers documents de la CAF qu'elle produit, ainsi que par des quittances de loyer.
¿ Sur l'existence d'un contrat de bail liant les parties
- La validité du contrat de bail écrit daté du 1er novembre 2007 produit par la SCI Ja
Selon l'article 287, alinéa 1er, du code de procédure civile, si l'une des parties dénie l'écriture qui lui est attribuée ou déclare ne pas reconnaître celle qui est attribuée à son auteur, le juge vérifie l'écrit contesté à moins qu'il ne puisse statuer sans en tenir compte. Si l'écrit contesté n'est relatif qu'à certains chefs de la demande, il peut être statué sur les autres.
L'article 288 du même code prévoit qu'il appartient au juge de procéder à la vérification d'écriture au vu des éléments dont il dispose après avoir, s'il y a lieu, enjoint aux parties de produire tous documents à lui comparer et fait composer, sous sa dictée, des échantillons d'écriture. Dans la détermination des pièces de comparaison, le juge peut retenir tous documents utiles provenant de l'une des parties, qu'ils aient été émis ou non à l'occasion de l'acte litigieux.
L'article 299 du code de procédure civile dispose quant à lui que si un écrit sous seing privé produit en cours d'instance est argué faux, il est procédé à l'examen de l'écrit litigieux comme il est dit aux articles 287 à 295.
Lorsque l'écriture et la signature d'un acte sous seing privé sont déniées ou méconnues, il résulte des articles 287 et 288 du code de procédure civile qu'il appartient au juge de vérifier l'acte contesté à moins qu'il puisse statuer sans en tenir compte (3e Civ., 9 mars 2022, pourvoi n° 21-10.619).
Si la vérification ne permet pas de conclure à la sincérité de l'acte, la partie qui fonde ses prétentions sur cet acte doit être déboutée (1re Civ., 25 juin 2009, pourvoi n° 08-15.596) : la charge de la preuve ne pèse donc pas sur celui qui a dénié ou méconnu l'écrit ou la signature.
En l'espèce, la SCI Ja produit en pièce 1 un contrat de bail daté du 1er novembre 2007 portant sur le logement litigieux sis [Adresse 2] [Localité 4], qui aurait été signé par Mme [L] en qualité de locataire, le loyer étant fixé à 650 euros et la provision sur charges à 200 euros.
Mme [L] soutient que ce contrat est un faux et que sa signature a été grossièrement imitée.
Il convient de procéder à la vérification de l'écrit contesté.
Ainsi que l'a considéré à juste titre le premier juge, il résulte de la comparaison de la signature attribuée à Mme [L] sur le contrat de bail litigieux et de la signature de cette dernière sur la carte nationale d'identité versée aux débats que les deux signatures sont très différentes. La cour observe que la signature figurant sur le contrat de bail comporte deux boucles très grossièrement tracées, le trait est tremblé, alors que la signature figurant sur la carte d'identité comporte une seule boucle tracée de façon nette.
S'agissant de l'attestation de M. [W] [P] selon laquelle il a signé un bail de location avec Mme [L], la cour relève que celui-ci est, selon ses propres déclarations, l'ancien gérant de la SCI Ja, de sorte que son attestation ne saurait être prise en compte, nul ne pouvant se constituer de preuve à soi-même.
La SCI Ja ne justifie d'aucun autre élément permettant de prouver que Mme [L] est bien la signataire du contrat de bail qu'elle produit.
En conséquence, la vérification ne permet pas de conclure à la sincérité de cet acte, et il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré dans sa motivation qu'aucune valeur probante ne pouvait être attachée au document intitulé 'contrat de location' daté du 1er novembre 2007.
- L'existence d'un bail verbal
C'est à celui qui invoque un bail qu'il incombe d'établir qu'un accord de volontés portant sur la conclusion d'un bail est intervenu.
La preuve du bail verbal ne résulte pas seulement de l'occupation d'un logement mais aussi du versement d'un loyer en contrepartie de cette jouissance.
Il se déduit des dispositions de l'article 1715 du code civil, que la preuve de l'existence d'un bail verbal peut être rapportée par tous moyens, lorsque le bail a reçu un commencement d'exécution. La preuve du bail verbal résulte de son commencement d'exécution, c'est-à-dire de la preuve qu'une personne jouit d'une chose qui ne lui appartient pas en contrepartie des deniers qu'elle verse au propriétaire de cette chose.
Par suite, la simple occupation, même prolongée, d'un local d'habitation ne suffit pas pour prouver l'existence d'un bail verbal, s'il n'est produit aucune justification d'un paiement quelconque qui serait la contrepartie de cette occupation, et s'il n'est pas justifié de faits positifs manifestant la volonté commune des parties au bail allégué.
En l'espèce, au soutien de l'existence d'un bail verbal entre les parties, la SCI Ja produit :
- des quittances de loyer de juillet 2009 établies par elle-même ; celles-ci ne seront pas retenues, nul ne pouvant se constituer de preuve à soi-même ;
- un courrier de la société Laforet du 1er décembre 2016 informant Mme [L] de la reprise de gestion de l'appartement loué, et un avis d'échéance établi par ladite société pour le mois de décembre 2016 ; toutefois, ainsi que le relève à juste titre Mme [L], ces deux documents concernent un logement situé [Adresse 1] [Localité 4], alors que le logement litigieux est sis [Adresse 2] à [Localité 4], de sorte qu'ils sont dépourvus de pertinence ;
- plusieurs courriers émanant de la CAF adressés à la SCI Ja :
- un courrier intitulé 'aide au logement - attestation de loyer' du 23 octobre 2015 pour lui demander de compléter ladite attestation afin d'étudier les droits au logement de Mme [L] ;
- un courrier intitulé 'demande d'informations' du 24 novembre 2016 sollicitant la communication de la demande de versement direct ;
- un courrier intitulé 'signalement impayé de loyers' du 13 décembre 2016 sollicitant de retourner l'imprimé 'impayé de loyers' complété, ainsi qu'un deuxième courrier du même jour lui demandant de négocier un plan d'apurement avec la locataire, et un troisième courrier de relance du 10 mai 2017 ;
- un courrier intitulé 'pour votre information' du 2 mars 2017 mentionnant les droits de Mme [L] à partir de mars 2017 à une ALF de 413 euros, sur lequel l'adresse du logement concerné n'est pas mentionnée.
- des captures d'écran censées émaner du site de la CAF, mais sur lesquelles le nom de l'allocataire et le logement loué ne sont pas identifiables, de sorte qu'elles ne sont pas pertinentes.
La cour relève que les courriers émanant de la CAF sont concomittants ou postérieurs au décès de M. [E] [P], avec lequel Mme [L] avait contracté mariage au Maroc, et qui était l'ancien gérant de la SCI Ja suivant les pièces produites ; or Mme [L] fait valoir que les relations entre les parties se sont détériorées suite à ce décès et à la reprise de la gérance par M. [G] [P], fils du premier lit de M. [P], et communique à cet égard la main courante et la plainte déposées respectivement le 2 février 2018 et le 26 septembre 2019 par son fils M. [J] [P] contre son demi-frère.
Surtout, ces documents ont été émis par la CAF suite aux déclarations de la SCI Ja, sur sa production du contrat de bail du 1er novembre 2007 dont la sincérité n'a pas été reconnue et qui est dépourvu de valeur probante, ainsi qu'il a été jugé plus haut. Il ne résulte d'aucun de ces documents que Mme [L] aurait effectué des démarches pour percevoir l'allocation logement pour le logement litigieux, le courrier précité du 2 mars 2017 ne mentionnant pas l'adresse du logement concerné, alors qu'il résulte des pièces produites que Mme [L] était locataire d'un autre logement durant cette période sis [Adresse 1] [Localité 4].
La cour relève que la SCI Ja, qui se prévaut d'impayés de loyers depuis 2016 de la part de Mme [L] portant sur le logement litigieux, ne justifie par aucune pièce de la perception effective de loyers antérieurement à cette date (tels que relevés de compte...), n'a adressé aucun commandement de payer à Mme [L] et ne lui a adressé qu'une unique mise en demeure le 25 juin 2020, soit quatre jours avant d'entamer la présente procédure.
Il convient dès lors de juger que la preuve de l'existence d'un bail verbal liant les parties, caractérisé par le paiement d'un loyer en contrepartie de l'occupation des lieux, n'est pas rapportée par la SCI Ja, infirmant le premier juge qui avait considéré dans sa motivation que ladite preuve était rapportée.
¿ Sur la validité du congé pour vente
Le congé pour vente délivré le 21 mars 2019 à effet au 31 octobre 2019, fondé sur un contrat de bail liant les parties dont la preuve n'a pas été rapportée, et au visa de l'article 15 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 qui n'est dès lors pas applicable, ne saurait dès lors être validé.
Il convient dès lors, infirmant le jugement entrepris sur ces points, de débouter la SCI Ja de ses demandes principales de validation du congé et de ses demandes subséquentes d'expulsion et de condamnation de Mme [L] au paiement d'une indemnité d'occupation égale au montant du loyer et des charges qui auraient été dus en cas de non-résiliation du bail.
* Sur la demande en paiement de l'arriéré locatif
La cour observe que le jugement entrepris, s'il mentionne dans ses motifs que Mme [L] est condamnée à verser à la SCI Ja la somme de 16.863,48 euros actualisée au 12 juin 2020 au titre de loyers, charges et indemnités d'occupation, échéance du mois de juin 2020 incluse, outre intérêts au taux légal à compter du 29 juin 2020, date de l'assignation, ne condamne pas Mme [L] audit paiement dans son dispositif, mais 'déboute les parties de leurs autres demandes, plus amples ou contraires'.
La SCI Ja forme appel incident sur ce point, et sollicite la condamnation de Mme [L] au paiement de la somme de 70.550,12 euros au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation dus, terme du mois d'avril 2022 inclus.
Mme [L] conclut au débouté de la SCI Ja, en faisant valoir qu'il n'existe aucun bail.
Dans la mesure où la preuve du contrat de bail liant les parties n'est pas rapportée, Mme [L] ne saurait être condamnée au paiement d'un arriéré locatif.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a, en son dispositif, débouté la SCI Ja de sa demande à ce titre.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Le sens de la présente décision commande d'infirmer le jugement entrepris s'agissant des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile.
La SCI Ja, partie perdante à titre principal, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.
L'équité commande de la condamner au paiement de la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Dit n'y avoir lieu à jonction,
Infirme, en ses dispositions frappées d'appel, le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a débouté la SCI Ja de sa demande en paiement de l'arriéré locatif,
Et statuant à nouveau et y ajoutant,
Déboute la SCI Ja de l'intégralité de ses demandes,
Condamne la SCI Ja à payer à Mme [R] [L] la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SCI Ja aux dépens de première instance et d'appel,
Rejette toutes autres demandes.
La greffière Le président