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03/07/2024 | FRANCE | N°23/17233

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 03 juillet 2024, 23/17233


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 6



ARRET DU 03 JUILLET 2024



ARRET SUR COMPETENCE

(n° , 20 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/17233 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CINGF



Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Octobre 2023 - tribunal de commerce de Paris - RG n° 2022049090





APPELANTE



Société BANK AUDI SAL société de droit libanais, immatriculée a

u registre de commerce et des sociétés libanais sous le n° 11347 (Duns n°44700841)

[Adresse 4]

[Adresse 4] (Liban)

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés e...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRET DU 03 JUILLET 2024

ARRET SUR COMPETENCE

(n° , 20 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/17233 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CINGF

Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Octobre 2023 - tribunal de commerce de Paris - RG n° 2022049090

APPELANTE

Société BANK AUDI SAL société de droit libanais, immatriculée au registre de commerce et des sociétés libanais sous le n° 11347 (Duns n°44700841)

[Adresse 4]

[Adresse 4] (Liban)

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Ayant pour avocat plaidant Me Jacques SIVIGNON du PARTNERSHIPS DECHERT (Paris) LLP, avocat au barreau de PARIS, toque : J096

INTIMÉ

Monsieur [R] [C]

né le [Date naissance 3] 1959 à [Localité 6] (Arabie Saoudite)

[Adresse 7]

[Adresse 7] (Liban)

Représenté par Me Florence GUERRE de la SELARL SELARL PELLERIN - DE MARIA - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018

Ayant pour avocat plaidant Me Julien VERNET de la SELEURL JULIEN VERNET AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : J098

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 28 Mai 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Marc BAILLY, président de chambre

M. Vincent BRAUD, président

Madame Laurence CHAINTRON, conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par M. Marc BAILLY dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie THOMAS

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marc BAILLY, président de chambre et par Mélanie THOMAS, greffier, présent lors de la mise à disposition.

* * * * *

M. [R] [C], citoyen saoudien domicilié à [Localité 5] au Liban, est actionnaire et dirigeant de la société saoudienne [C] Group.

Aux termes d'un contrat de prêt en date du 3 juin 2019, M. [C] a souscrit un prêt personnel d'un montant en principal de 3 000 000 euros pour une durée de six mois, auprès de la société anonyme Bank Audi France, filiale française de la banque libanaise Bank Audi S.A.L.

Ce prêt a été conclu sous réserve de la réalisation, à la satisfaction de Bank Audi France, de l'ensemble des conditions préalables visées à l'article 4 du contrat, parmi lesquelles un dépôt par M. [C] à hauteur de 115 % du montant du prêt, sur son compte épargne n° [XXXXXXXXXX01] ouvert dans les livres de Bank Audi S.A.L. M. [C] a ainsi déposé la somme de 4 035 363,10 dollars américains sur ce compte, à titre de cash collateral.

Par lettre-avenant en date du 16 décembre 2019, l'échéance du prêt initialement prévue au 12 décembre 2019 a été prorogée au 12 septembre 2020.

Par lettre en date du 14 septembre 2020, Bank Audi France a mis en demeure M. [C] de payer la somme de 3 084 760,27 euros, outre des intérêts.

M. [C] a rappelé à Bank Audi France que le prêt était garanti à hauteur de 115% par un gage-espèces constitué par un compte dédié ouvert dans les livres de Bank Audi S.A.L. Il a ensuite vainement mis en demeure Bank Audi France de solder le crédit par compensation avec les fonds déposés auprès de Bank Audi S.A.L. et de libérer le solde disponible sur son compte ouvert dans les livres de cette dernière.

M. [C] a réitéré sa mise en demeure par l'intermédiaire de son conseil le 29 septembre 2020.

Le 30 septembre 2020, M. [C] a assigné Bank Audi S.A.L. devant le juge des référés de Beyrouth en sollicitant que cette dernière soit condamnée à transférer au profit de Bank Audi France le solde de son compte épargne n° [XXXXXXXXXX01].

Le 5 octobre 2020, Bank Audi France a refusé de recevoir paiement par compensation au motif qu'elle n'était pas en possession effective des sommes versées sur le compte ouvert dans les livres de Bank Audi S.A.L. et que, de ce fait, la compensation légale ne pouvait s'opérer.

Parallèlement à la procédure devant les juridictions libanaises à l'encontre de Bank Audi S.A.L., M. [C] a fait assigner, le 13 janvier 2021, Bank Audi France devant le tribunal de commerce de Paris afin de la voir condamner à recevoir paiement par compensation du prêt personnel souscrit, au remboursement du solde des sommes données en garantie et à la restitution des sommes prélevées par elle au titre des intérêts de retard au taux majoré de 6,75 %.

Le 11 avril 2022, le juge des référés de Beyrouth a rejeté la demande de M. [C] à l'encontre de Bank Audi S.A.L. Ce dernier a interjeté appel contre cette décision.

Le 27 novembre 2022, M. [C] a fait assigner Bank Audi S.A.L. en intervention forcée devant le tribunal de commerce de Paris afin de la voir condamner à lui verser :

-à titre principal, dans l'hypothèse où le tribunal de commerce ordonnerait la compensation demandée dans l'instance principale par M. [C] : la différence entre la somme de 4 035 363,10 dollars américains ' soit le montant disponible sur son compte épargne n° [XXXXXXXXXX01] ouvert dans les livres de Bank Audi S.A.L. ' et la somme de 3 084 760,27 euros affectée au remboursement du prêt qu'il a souscrit auprès de Bank Audi France ;

-à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où le tribunal de commerce n'ordonnerait pas la compensation : la somme de 4 035 363,10 dollars américains ' soit la somme disponible sur son compte épargne n°[XXXXXXXXXX01].

Par un jugement contradictoire du 19 octobre 2023, le tribunal de commerce de Paris a :

-dit que la clause attributive de juridiction stipulée à l'article X du chapitre 6 des conditions générales de Bank Audi S.A.L. en date du 19 septembre 2016 est inapplicable au litige et s'est déclaré compétent pour connaitre de la présente instance ;

-débouté Bank Audi S.A.L. de sa demande de voir le présent tribunal se dessaisir de l'instance introduite par M. [C] à l'encontre de Bank Audi S.A.L. enregistrée sous le numéro RG 2022049090 au profit de la cour d'appel de Beyrouth ;

-dit que le greffe procédera à la notification de la présente décision par lettre recommandée avec accusé de réception adressée exclusivement aux parties ;

-dit qu'en application de l'article 84 du code de procédure civile, la voie de l'appel est ouverte contre la présente décision dans le délai de quinze jours à compter de ladite notification ;

-dit que le greffe convoquera les parties, sur la jonction, à l'audience du juge chargé d'instruire l'affaire du mercredi 8 novembre 2023 à 11h15, devant M. [F] ;

-condamné Bank Audi S.A.L. à payer à M. [C] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Par déclaration remise au greffe de la cour le 6 novembre 2023, Bank Audi S.A.L. a interjeté appel de cette décision contre M. [C] et elle a été autorisée à assigner à jour fixe M. [C] pour l'audience du 28 mai 2024.

Par jugement en date du 30 novembre 2023, le tribunal de commerce de Paris a sursis à statuer notamment sur le demande de jonction entre les affaires concernant, d'une part, la banque libanaise et, d'autre part, la filiale française.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 21 mai 2024, Bank Audi S.A.L. fait valoir :

Sur l'exception d'incompétence.

-qu'en vertu de l'article 333 du code de procédure civile, le tiers mis en cause est tenu de procéder devant la juridiction saisie de la demande originaire, sans qu'il puisse décliner la compétence territoriale de cette juridiction, même en invoquant une clause attributive de compétence. Il est de jurisprudence constante que cet article est inapplicable dans l'ordre international en présence d'une clause attributive de compétence ou d'une clause compromissoire. La jurisprudence fait aussi application de cette solution, nonobstant l'existence d'un lien de connexité entre les demandes formées ou le caractère indivisible du litige. En l'espèce, l'article X du chapitre 6 des conditions générales applicables au compte de M. [C] et acceptées par ce dernier contient une clause attributive de juridiction, par laquelle M. [C] s'est engagé à soumettre de manière exclusive tous les litiges qui découleraient des conditions générales et des comptes ouverts dans les livres de Bank Audi S.A.L. ainsi que des circonstances en lien avec ces comptes, aux tribunaux de Beyrouth. La demande principale comme la demande subsidiaire de condamnation de Bank Audi S.A.L., contenues dans l'acte introductif d'instance, découlent ainsi des comptes ouverts par M. [C] dans les livres de Bank Audi S.A.L. et des circonstances en lien avec ces comptes bancaires,

- que les rapports entre M. [C] et elle sont soumis au droit libanais, ainsi que le prévoient les conditions générales. C'est ainsi au regard des dispositions du droit libanais que doivent être appréciées les questions de l'applicabilité des conditions générales au compte épargne n° [XXXXXXXXXX01] de M. [C] et de la validité de la clause attributive de juridiction qu'elles contiennent, ce qui n'est pas contesté par M. [C],

- que le tribunal a retenu à tort que « tous les comptes ouverts seraient, en tant que composants d'un seul compte indivisible, assujettis aux mêmes conditions générales », en ce qu'elle ne prétendait pas qu'il existait un compte unique indivisible, mais que l'ensemble des comptes ouverts par M. [C] étaient soumis aux conditions générales,

- que le tribunal a retenu à tort que le compte n° [XXXXXXXXXX01] de M. [C] présentait « des caractéristiques sortant du cadre habituel des comptes de dépôt », au motif que ce compte serait un compte bloqué insusceptible d'être mouvementé, ouvert à la demande de Bank Audi France, laquelle aurait tous pouvoirs dessus. Ce compte entre dans la catégorie « comptes de dépôt », tel que cela est, in fine, prévu à l'article III du chapitre 2 des conditions générales. Bank Audi S.A.L. versait à M. [C] des intérêts sur les sommes déposées sur le compte, en raison de la nature de compte de dépôt dudit compte. M. [C] prétend de manière artificielle qu'il s'agirait d'un compte « épargne temps » qui, selon lui, serait exclu du champ d'application des conditions générales au motif que ces dernières ne s'appliqueraient qu'aux « comptes créditeurs ». Nonobstant la qualification que lui donne M. [C], le compte concerné est par définition un « compte créditeur », c'est-à-dire un compte dont le solde a vocation à demeurer positif, compte auquel les conditions générales sont applicables. Le fait que ce compte ait été un compté bloqué n'est en rien incompatible avec sa qualification de compte de dépôt, les conditions générales prévoyant expressément à l'article III du chapitre 2 que les comptes de dépôt peuvent être bloqués. Le fait que ce compte ait fait l'objet d'un nantissement n'est pas non plus une caractéristique inhabituelle des comptes de dépôts, cette faculté étant de nouveau prévue par ledit article III du chapitre 2 des conditions générales. Les conditions générales précisent en outre que le blocage du compte s'effectue en vertu d'un contrat spécial signé avec Bank Audi S.A.L. à cet effet, ce qui est le cas en l'espèce avec le contrat de nantissement. Contrairement à ce qu'a relevé le tribunal M. [C] avait, en sa qualité de titulaire du compte, seul les pouvoirs sur ce compte, sous réserve des droits du créancier nanti. Le fait que Bank Audi France ait demandé à M. [C] de garantir le remboursement du prêt contracté auprès d'elle au moyen d'un nantissement de l'un de ses comptes ouverts dans les livres de Bank Audi S.A.L. plutôt que dans les livres d'une autre banque est indifférent quant au régime juridique applicable audit compte. Enfin, le tribunal a retenu de manière erronée que ce compte ne ferait pas partie de la catégorie des comptes de dépôt classiques, susceptibles d'être mouvementés, excluant l'application des conditions générales. M. [C] a réalisé de nombreuses opérations sur ce compte, qui a ainsi été mouvementé à plusieurs reprises, à sa demande et sans l'intervention de Bank Audi France,

- que contrairement aux prétentions de M. [C], les retraits qu'il a effectués ne l'ont pas été en application de la circulaire n° 151 de la Banque du Liban. Cette circulaire, s'imposant aux établissements de crédit libanais, a pour objet de restreindre le droit des déposants disposant de comptes libellés en dollars américains de procéder au retrait de ces sommes compte tenu de la crise frappant le secteur bancaire libanais. En vertu de cette circulaire, les clients d'établissements de crédit ne peuvent procéder mensuellement au retrait que d'une partie des sommes qu'ils détiennent, sur leurs comptes libellés en dollars américains, en livres libanaises ' et non en dollars ' dans la limite d'un montant et à un taux de conversion qu'elle prévoit, lequel est supérieur au taux du marché, voire au taux de conversion officiel du Liban. Cette norme ne se substitue pas aux conditions générales et n'est pas génératrice de droits et tend, au contraire, à restreindre les droits des déposants de procéder à des retraits en espèce. M. [C] était conscient du contenu de ladite circulaire. Ainsi, dans sa demande du 28 février 2022, il a donné instruction à Bank Audi S.A.L. de remettre en espèces à son secrétaire, M. [S], les sommes qu'il est autorisé à retirer depuis l'ensemble de ses comptes, en ce compris le compte épargne n° [XXXXXXXXXX01], dans la limite du montant « autorisé » par la circulaire n°151 de la Banque du Liban, et selon « le taux de conversion de 8 000 livres libanaises [pour 1 dollar américain] » qu'elle prévoit. M. [C] prétend qu'il n'aurait pas eu d'accès direct à son compte épargne n° [XXXXXXXXXX01], que ses demandes de retrait ne visaient pas spécifiquement ce compte et que ce serait Bank Audi S.A.L. qui aurait décidé d'honorer ses demandes depuis « l'ensemble de [ses] comptes indifféremment, y compris le compte donné en gage au profit de Bank Audi France ». Or, l'ensemble des documents « Debit Advice » auxquels M. [C] ait référence dans ses écritures, et qui correspondent à des avis d'opéré mentionnent expressément son numéro de compte épargne n° [XXXXXXXXXX01] et ont été signés. Ainsi, M. [C] ne peut sérieusement soutenir qu'il n'aurait pas lui-même autorisé Bank Audi S.A.L. à mouvementer son compte. M. [C] allègue par ailleurs que la procuration qu'il avait donnée à M. [S] ne concernait pas le compte litigieux et que c'est ainsi en violation de cette procuration que M. [S] aurait pu se voir remettre des espèces issues du compte. Or, M. [C] s'abstient de produire cette procuration et a lui-même signé plusieurs avis d'opéré mentionnant son compte épargne n° [XXXXXXXXXX01], l'outrepassement de la procuration étant indifférente à la question de savoir si les conditions générales sont applicables au nom au compte litigieux. M. [C] allègue enfin qu'il n'aurait pas autorisé certaines des opérations effectuées sur son compte, notamment des opérations de transfert de fonds disponibles, réalisées le 4 avril 2022 et le 2 juin 2022. Or, cela est erroné en ce que les sommes visées par ces deux opérations ont été transférées sur le compte de M. [C], qui avait adressé des demandes de retrait à Bank Audi S.A.L,

- que le tribunal a retenu à tort que les conditions générales ne seraient pas applicables au compte épargne n° [XXXXXXXXXX01] de M. [C] au motif que ces dernières seraient exclusivement applicables aux comptes de M. [C] identifiées par la « racine client » 349680. Il s'infère à la fois de la généralité des termes des conditions générales signées par M. [C] et des usages bancaires en vigueur au Liban que les conditions générales sont applicables à l'ensemble des comptes ouverts par lui auprès de Bank Audi S.A.L. et ce, quel que soit le ou les numéros d'identification ou racines client attribués aux clients et leurs numéros de comptes. Il ressort de l'intitulé même de la convention conclue entre les parties que celle-ci a vocation à s'appliquer à l'ensemble des comptes de M. [C] et non à un compte en particulier. Les numéros d'identification ' ou racines client ' et les numéros de compte reprenant en partie ce numéro d'identification, ne sont qu'une modalité d'organisation interne de la banque, sans conséquences sur l'application des conditions générales. Un client est susceptible de se voir attribuer plusieurs numéros d'identification, ou racines client, différents, selon la nature des comptes qu'il ouvre dans les livres de la banque. En l'espèce, M. [C] est identifié auprès de Bank Audi S.A.L. par deux numéros d'identification différents (349680 et 349606). Il est en outre identifié par le numéro d'identification 289219 s'agissant des comptes joints dont il est cotitulaire. Nonobstant l'existence concurrente de numéros d'identification différents attribués à M. [C], ce dernier n'en demeure pas moins un unique client de la banque dont l'ensemble des comptes est régi par les mêmes conditions générales. Si le tribunal a relevé qu'il n'est pas établi que les notions de « numéro d'identification » et de « numéro d'identité » ont le même sens et la même fonction, ces deux terminologies sont équivalentes. La distinction faite à tort par le tribunal a pour origine une erreur de traduction contenue dans la version française des conditions générales produite par Bank Audi S.A.L. devant le tribunal. La traduction assermentée versée par Bank Audi S.A.L. aux débats fait ressortir que le terme figurant en première page des conditions générales, initialement traduit par « numéro d'identité », correspond en réalité au terme « numéro d'identification »,

- qu'en droit libanais, les usages constituent une source de droit au même titre que la loi et la jurisprudence. Le Professeur [T] atteste ainsi dans son certificat de coutume que les conventions doivent être comprises, interprétées et exécutées conformément à la bonne foi, à l'équité et aux usages. Or, il existe un usage établi au Liban consistant pour une banque et ses clients à ne conclure qu'un contrat d'ouverture et de fonctionnement de comptes, dont les dispositions régissent le fonctionnement de comptes de natures différentes et qui s'applique à tous les comptes ouverts par le client. Les banques n'ont donc pas pour habitude de conclure un nouveau contrat d'ouverture de compte à chaque fois qu'un nouveau compte est ouvert dans leurs livres par leurs clients existants. L'existence de cet usage est attestée par l'Association des banques du Liban. Il est par conséquent établi, en droit libanais, que les conditions générales ont vocation à régir l'ensemble des comptes que M. [C] serait amené à ouvrir et détenir dans les livres de Bank Audi S.A.L., indépendamment de la date de signature des conditions générales et de l'ouverture de ces comptes. En application de cet usage en vigueur au Liban ayant force de loi, l'absence de référence aux conditions générales faites dans le contrat de nantissement n'a donc aucune incidence sur l'application desdites conditions au compte épargne n° [XXXXXXXXXX01] de M. [C], contrairement à ce qu'a sous-entendu le tribunal de commerce de Paris dans son jugement du 19 octobre 2023,

- que M. [C] excipe de l'inopposabilité des conditions générales à son égard en soutenant de manière erronée que le compte épargne n° [XXXXXXXXXX01] aurait été ouvert sur le fondement d'un « contrat particulier » et ne serait pas soumis aux conditions générales. Ce faisant, M. [C] opère une confusion entre l'ouverture du compte, soumis aux conditions générales, et le nantissement, soit une sureté grevant le compte et régie par le contrat de nantissement. Les conditions générales ont vocation à régir l'ouverture et le fonctionnement de l'ensemble des comptes que M. [C] serait amené à détenir dans les livres de Bank Audi S.A.L. Ces conditions générales, dont la durée est indéterminée, ne nécessitent pas et ne prévoient pas la conclusion d'un nouvel acte à chaque demande d'ouverture d'un nouveau compte, qui renverrait ou, le cas échéant, exclurait leur application. Les décisions jurisprudentielles citées par M. [C] sont inapplicables à la présente affaire. Contrairement aux espèces citées, M. [C] s'est expressément engagé, en signant les conditions générales, à les respecter de sorte qu'elles lui sont nécessairement opposables. Il ne peut ainsi prétendre aujourd'hui qu'il ne serait pas lié par la clause attributive de juridiction qui y est contenue,

-que le Professeur [P], mandaté par M. [C], soutient de manière erronée que Bank Audi S.A.L. ne serait pas tenue de restituer à M. [C] le solde du compte épargne n° [XXXXXXXXXX01] en cas de non-réalisation de la garantie ou de mainlevée donnée par Bank Audi France, au motif que cette somme aurait perdu sa nature de dépôt et que c'est cette nature qui fonde l'obligation de restitution du dépositaire au déposant. Selon le Professeur [P], il conviendrait d'apprécier le champ d'application des conditions générales conclues entre Bank Audi S.A.L. et M. [C] en se plaçant du point de vue de Bank Audi France au motif que le compte n°[XXXXXXXXXX01] aurait été ouvert à la demande de Bank Audi France. Cependant, le champ d'application d'un contrat ne peut être apprécié par référence aux intérêts et à l'intention d'un tiers à ce contrat. Les conditions générales ont vocation à s'appliquer à tout « compte de dépôt », y compris aux comptes faisant l'objet d'un nantissement, d'un séquestre ou d'une fiducie. Or si le nantissement, le séquestre ou la fiducie dont le compte peut faire l'objet est susceptible d'impliquer ou de bénéficier à un tiers, cela est sans emport sur la convention régissant le fonctionnement du compte. Le Professeur [P] procède, par ailleurs, exclusivement par voie d'affirmation, sans citer de source juridique textuelle, jurisprudentielle ou doctrinale au soutien de sa consultation,

- sur l'exception de connexité, à titre subsidiaire, que si la cour devait confirmer le jugement du tribunal de commerce en ce qu'il s'est déclaré compétent pour connaître des demandes formées par M. [C] à l'encontre de Bank Audi S.A.L., elle devra toutefois dessaisir le tribunal du litige au profit de la cour d'appel de Beyrouth en raison de la connexité de la présente instance avec l'instance introduite par M. [C] pendante devant cette juridiction. La Cour de cassation a étendu dans l'ordre international l'exception de connexité prévue à l'article 101 du code de procédure civile. Par un arrêt en date du 22 juin 1999, la première chambre civile a précisé les trois conditions suivant lesquelles l'exception de connexité internationale avait vocation à s'appliquer : l'existence de deux instances en cours devant deux juridictions relevant de deux États différents, l'existence d'un lien étroit entre ces deux instances d'une nature telle qu'il existe un risque de contrariété de décisions, et la compétence des deux juridictions pour connaître de l'entier litige. Il convient de préciser que l'existence d'un risque de contrariété mentionnée dans la décision précitée n'implique toutefois pas une « contradiction de chose jugée ». L'existence de la triple identité de parties, d'objet et de cause est une condition de la litispendance prévue à l'article 100 du code de procédure civile et non de la connexité prévue à l'article 101 du même code. Le risque de contrariété est caractérisé, en matière de connexité internationale, par l'existence d'un « lien étroit » entre deux instances dont il résulte « un risque d'incompatibilité intellectuelle » entre les deux décisions à intervenir. Ce risque de contrariété sera ainsi caractérisé dès lors qu'une « question litigieuse identique » se pose devant le juge français et le juge étranger. En l'espèce, le tribunal a retenu que les conditions de la connexité internationale n'étaient pas réunies dès lors que « l'action pendante devant la cour d'appel de Beyrouth prend la suite de l'action en référé engagée sur un fondement différent » et que Bank Audi France « n'est pas partie à l'instance libanaise ». Or, ni l'identité de fondement, ni celle de parties ne constitue une condition de la connexité internationale. M. [C] a saisi le juge des référés de Beyrouth d'une action tendant à ce que Bank Audi S.A.L. soit condamnée, à titre principal, à transférer le solde du compte bancaire détenu par M. [C] à Bank Audi France et, à titre subsidiaire, à lui verser une somme correspondant à ce montant. Cette instance étant aujourd'hui pendante devant la cour d'appel de Beyrouth, la première condition tenant à l'existence de deux instances en cours devant deux juridictions relevant de deux États différents est donc remplie en l'espèce. Au soutien de sa demande de condamnation in solidum dirigée à l'encontre de Bank Audi S.A.L. dans la présente instance, M. [C] invoque la compensation entre la dette à laquelle il est tenu à l'égard de Bank Audi France au titre du prêt qu'il a souscrit auprès d'elle et la créance qu'il détient sur Bank Audi S.A.L. au titre des sommes qu'il a déposées sur son compte épargne n° [XXXXXXXXXX01]. M. [C] adopte une position similaire devant les juridictions libanaises. Il en résulte un risque de contrariété de décisions, de sorte que la deuxième condition tenant à l'existence d'un risque de contrariété de décisions est donc remplie en l'espèce. M. [C] considère enfin que la cour d'appel de Beyrouth est compétente pour mettre un terme définitif au litige l'opposant à Bank Audi S.A.L. à la fois devant le tribunal de commerce de Paris et au Liban. M. [C] allègue que si le tribunal de commerce de Paris était dessaisi du litige l'opposant à Bank Audi S.A.L. au profit de la juridiction libanaise, il perdrait le bénéfice du double degré de juridiction, alors qu'il est à l'origine des deux procédures devant les juridictions françaises et libanaises. En tout état de cause, et ainsi qu'il a été démontré, les demandes faites par M. [C] devant le tribunal de commerce de Paris et le juge libanais ont le même objet. Il s'ensuit que M. [C] bénéfice d'ores et déjà d'un double degré de juridiction au Liban et qu'il bénéficierait en réalité d'un « quadruple degré de juridiction » s'il était autorisé à faire juger la question de la compensation centrale dans son argumentation devant les juridictions françaises et les juridictions libanaises. La troisième et dernière condition tenant à la compétence de la juridiction étrangère est donc remplie en l'espèce,

- que sous couvert de rechercher la condamnation in solidum de Bank Audi S.A.L. dans l'instance l'opposant à Bank Audi France devant le tribunal de commerce de Paris, M. [C] tente en réalité de faire rejuger la demande dont il avait initialement saisi le juge des référés de Beyrouth et, alternativement, d'obtenir purement et simplement le transfert du solde de son compte bancaire. Le caractère artificiel des demandes d'intervention forcée et de condamnation formées par M. [C] devant le tribunal de commerce de Paris tout comme l'absence de fondement juridique invoqué à leur soutien est ainsi manifeste. Il ne peut être sérieusement contesté qu'il revient aux juridictions libanaises, statuant au fond, de trancher cette question en application de la clause attributive de juridiction contenue dans les conditions générales, dès lors que M. [C] était domicilié au Liban au moment de son acceptation des conditions générales régissant le fonctionnement de l'ensemble de ses comptes ouverts dans les livres de Bank Audi S.A.L. et qu'il a conclu les conditions générales avec Bank Audi S.A.L., une banque libanaise. Les relations contractuelles entre Bank Audi S.A.L. et M. [C] sont, par ailleurs, régies par le droit libanais. En saisissant les juridictions libanaises, M. [C] a ainsi reconnu implicitement la compétence des tribunaux libanais dans ses rapports avec Bank Audi S.A.L. M. [C] n'ignore toutefois pas la crise financière actuelle au Liban et le fait qu'un certain nombre d'épargnants libanais, « plusieurs centaines » selon ses écritures, ont saisi des juridictions étrangères de demandes de restitution ou de transfert de leurs comptes ouverts dans les livres de banques libanaises. C'est la raison pour laquelle M. [C] a décidé d'assigner Bank Audi S.A.L. devant le tribunal de commerce de Paris, espérant certainement que les juridictions françaises lui soient plus favorables que les juridictions libanaises devant lesquelles il a déjà porté des demandes et dont il a été débouté en première instance. La cour ne saurait ainsi permettre à M. [C] de contourner la compétence des juridictions libanaises au motif qu'il présenterait, de manière artificielle, une demande de condamnation in solidum de Bank Audi S.A.L,

- sur la validité de la clause attributive de juridiction contenue dans les Conditions générales, que contrairement aux prétentions de M. [C], la clause attributive de juridiction contenue dans les Conditions générales n'est pas abusive au sens du droit de la consommation libanais et ne doit pas être réputée non écrite,

- que M. [C] n'a pas la qualité de consommateur au sens du droit de la consommation libanais. Dans son certificat de coutume, le Professeur [T] rappelle que le consommateur est défini en droit libanais comme la « personne physique ou morale qui achète un service ou un produit 'à des fins non liées directement à son activité professionnelle' ». En l'espèce, le fait que M. [C] ait utilisé son compte épargne n° [XXXXXXXXXX01] à des fins directement liées à son activité de dirigeant de la société Hussein 1 AlHassan G [C] Bros For Modern Trading suffit pour qu'il soit exclu du champ d'application de la loi de protection du consommateur libanaise. M. [C] tente de caractériser le caractère personnel de la finalité qu'il aurait poursuivie en nantissant son compte épargne n° [XXXXXXXXXX01], en invoquant le fait que c'est à partir des sommes disponibles sur son compte joint qu'il aurait alimenté ce compte. Or, cet élément est toutefois indifférent pour apprécier la faculté de M. [C] de se prévaloir ou non de la qualité de consommateur dès lors que seul le critère de la finalité poursuivie par M. [C] à travers l'utilisation de son compte nanti est pris en compte en droit libanais. Le Professeur [T] conclut aussi que M. [C] utilisait le compte ouvert auprès de Bank Audi S.A.L. dans le cadre de l'opération de financement de l'apport en compte courant d'associé d'une société dont il est à la fois actionnaire et dirigeant, ce qui, par conséquent, rentrerait dans le cadre de son activité professionnelle et exclurait sa qualification de consommateur au sens de l'article 2 de la loi de protection du consommateur libanaise. À titre surabondant, Bank Audi S.A.L. fait valoir que les éléments factuels qu'elle rappelle conduiraient également à exclure M. [C] du champ d'application des dispositions du droit de la consommation en droit français. La jurisprudence française considère que l'individu qui contracte un prêt destiné à financer un apport en courant d'associés à la société dont cet individu est actionnaire et dirigeant agit à des fins professionnelles et ne peut, par conséquent, se prévaloir du statut de consommateur et des dispositions protectrices du droit de la consommation dont l'application découle de ce statut,

- que le caractère asymétrique de la clause attributive de juridiction contenue dans les conditions générales n'a pas pour effet de lui conférer un caractère abusif en application du droit libanais. Le Professeur [T] souligne dans son premier certificat de coutume que le juge libanais n'a jamais, à sa connaissance, appliqué l'annulation dans le contexte des clauses asymétriques de juridiction. M. [C] et le Professeur [P] ne citent pas non plus de décision de justice libanaise ayant annulé ou prononcé le caractère non écrit d'une clause attributive de juridiction asymétrique. Le caractère asymétrique de la clause attributive de juridiction contenue dans les conditions générales n'a pas pour effet, nonobstant le déséquilibre qu'elle crée entre les droits et obligations respectifs de M. [C] et Bank Audi S.A.L., de lui conférer, en lui-même, un caractère abusif en droit libanais. Ainsi que le précise également le Professeur [P], l'appréciation du caractère abusif d'une clause donnée se fait, en droit libanais, in concreto. En l'espèce, il ressort d'une appréciation in concreto de la clause attributive de juridiction contenue dans les conditions générales que celle-ci ne revêt pas un caractère abusif dès lors que Bank Audi S.A.L. a un intérêt légitime à disposer de la faculté de saisir une autre juridiction que les juridictions de Beyrouth désignées par la première branche de la clause et que la clause attributive de juridiction contenue dans les conditions générales ne répond pas aux critères fixés en droit libanais pour qu'une clause attributive de compétence soit qualifiée d'abusive dès lors qu'elle ne rend pas plus difficile ou onéreux pour M. [C] la défense de ses intérêts à l'égard de Bank Audi S.A.L. le Professeur [T] relève que Bank Audi S.A.L. dispose d'un motif légitime à bénéficier de l'option de compétence qui lui est octroyée dans la clause attributive de juridiction contenue dans les conditions générales et que le « déséquilibre dans la seconde branche est légitime et non pas abusif ». Cette clause n'a pas pour effet rendre l'exercice d'une action à l'encontre de Bank Audi S.A.L. difficile ou onéreux pour M. [C], pas plus qu'il ne limite le droit d'action de ce dernier à l'encontre de Bank Audi S.A.L. Enfin, l'option de compétence contractuelle n'a pas pour objectif de permettre à Bank Audi S.A.L. de saisir « tout » autre tribunal du monde entier mais permet aussi à Bank Audi S.A.L. de saisir les juridictions du lieu du domicile de M. [C]. Bank Audi S.A.L. fait valoir qu'à supposer même que le caractère abusif de la seconde branche de la clause soit établi, la sanction, en droit libanais, ne serait pas la nullité de la clause dans son ensemble mais uniquement la neutralisation de l'option de compétence octroyée à Bank Audi S.A.L. Il ressort de l'analyse du Professeur [T] que la clause attributive de juridiction est « parfaitement divisible » en ses deux branches, la jurisprudence admettant l'annulation partielle d'une clause, quand celle-ci est « divisible » et elle considère que « seule la prohibition prohibée doit être réputée non écrite »,

-que la branche de la clause attributive de juridiction prévoyant la compétence exclusive des tribunaux de Beyrouth est licite dès lors qu'elle ne méconnaît aucune règle de compétence territoriale impérative libanaise, comme le confirme le Professeur [T]. La position de M. [C] et du Professeur [P], tenant à alléguer que la première branche de la clause attributive de juridiction serait elle-même abusive au motif qu'elle aurait pour effet d'interdire à M. [C] d'attraire Bank Audi S.A.L. dans la procédure qu'il a engagée à l'encontre de Bank Audi France devant le tribunal de commerce de Paris et d'invoquer le droit à compensation dont il se prévaut à l'encontre de cette dernière, est erronée en ce qu'elle méconnaît l'essence même d'une clause attributive de compétence ainsi que la jurisprudence de la Cour de cassation concernant la non-application de l'article 333 du code de procédure civile dans l'ordre international. M. [C] invoque la compensation à l'encontre de Bank Audi France dans le cadre de la procédure devant le tribunal de commerce de Paris, et ce depuis son assignation signifiée au mois de janvier 2021. Dans ces conditions, l'allégation de M. [C] selon laquelle l'absence de participation de Bank Audi S.A.L. à cette procédure le priverait de la faculté de se prévaloir d'une prétendue compensation à l'égard de Bank Audi France est ainsi contraire à la réalité. Cette contradiction fait d'ailleurs ressortir le caractère purement artificiel de la demande d'intervention forcée de M. [C], introduite plus d'un an et demi après la mise en cause initiale de Bank Audi France devant le tribunal de commerce de Paris. A suivre le raisonnement de M. [C] et du Professeur [P], toute clause attributive de juridiction invoquée par un défendeur à une procédure en intervention forcé serait abusive en droit libanais puisqu'elle aurait, par définition et en application de la jurisprudence française, pour effet d'interdire la mise en cause de cette partie dans le cadre de la procédure principale française. M. [C] soutient aussi, sur le fondement du certificat de coutume du Professeur [P], que la clause attributive de compétence contenue dans les Conditions générales serait abusive au motif qu'elle « interdirait en effet la mise en exécution en France de toute décision obligeant Audi France à compenser ou à restituer à Mr [C] ce qui lui est dû, au cas où la compensation ne serait pas ordonnée en France ». Or, M. [C] est libre de faire valoir les droits qu'il allègue détenir à l'encontre de Banque Audi S.A.L. devant les juridictions libanaises désignées par la clause attributive de juridiction ce qu'il a par ailleurs fait le 30 septembre 2020 en assignant Bank Audi S.A.L. devant le juge des référés de Beyrouth. M. [C] est aussi à même de faire exécuter sur le territoire français, le cas échéant, une décision de justice libanaise qui prononcerait une condamnation à l'encontre de Bank Audi S.A.L. et / ou Bank Audi France. Enfin, contrairement à ce que M. [C] allègue, sans pour autant en tirer de conséquence juridique sur la validité de la clause attributive contenue dans les conditions générales, il n'existe aucune incompatibilité entre la clause attributive de juridiction contenue dans le contrat de prêt qu'il a conclu avec Bank Audi France et celle contenue dans les conditions générales qu'il a conclues avec Bank Audi S.A.L. M. [C] s'est engagé à soumettre tout différend concernant le contrat de prêt et la garantie l'opposant à Bank Audi France au tribunal de commerce de Paris et s'est engagé à soumettre à tout différend concernant ses comptes auprès de Bank Audi S.A.L. au tribunal de Beyrouth. Bank Audi S.A.L, étrangère au contrat de prêt conclu entre Bank Audi France et M. [C], ne peut ainsi se voir opposer la clause attributive qui y est contenue et qu'elle n'a pu, par définition, accepter. Ainsi que l'énonce le Professeur [T] dans son certificat de coutume complémentaire, l'office du juge est limité en matière de contrôle de la validité d'une clause attributive de juridiction au contrôle de la méconnaissance d'une règle de compétence territoriale impérative,

- à titre surabondant, que la position de la jurisprudence française sur la validité des clauses attributives de juridiction dites asymétriques est loin d'être unanime et tend, dans son dernier état, vers la reconnaissance d'un principe de validité de ces clauses lorsqu'elles sont invoquées par la partie bénéficiant de l'option compétence qu'elles confèrent. Contrairement à la première chambre civile dont M. [C] cite quelques décisions, la chambre commerciale a ainsi toujours considéré que les clauses attributives de compétence asymétriques sont valides en droit français. La première chambre civile a toutefois substantiellement assoupli sa position initiale issue de ses arrêts du 26 septembre 2012 et du 25 mars 2015 cités par M. [C]. La première chambre civile avait développé une position au terme de laquelle elle considérait que les clauses attributives de compétence asymétriques devaient être écartées du fait de leur caractère asymétrique dès qu'elles ne contenaient pas les éléments objectifs permettant d'identifier les juridictions susceptibles d'être saisies par le bénéficiaire de l'option de compétence qu'elles confèrent, au motif que ces clauses auraient été de ce fait, selon la première chambre civile, contraires à l'objet et à la finalité de la prorogation de compétence ouverte par l'article 23 du règlement dit « Bruxelles I ». Or, dans un arrêt du 28 septembre 2022, la première chambre civile est revenue sur sa position en indiquant que cette règle n'aurait pas vocation à s'appliquer dans l'hypothèse où la partie bénéficiant de l'option de compétence n'est pas à l'origine de la saisine de la juridiction française dont la compétence est contestée. En d'autres termes, cette règle aurait uniquement vocation à s'opposer à ce qu'une partie bénéficiant de l'option de compétence offerte par une clause de juridiction asymétrique imprécise puisse saisir une juridiction non identifiable dans ladite clause. À l'inverse, elle n'empêcherait pas cette partie de décliner la compétence de la juridiction française saisie au profit de la juridiction identifiée dans la première partie de la clause et s'imposant à l'autre partie. La première chambre civile a, par ailleurs, transmis trois questions préjudicielles concernant la validité des clauses attributives de juridiction asymétriques à la Cour de de justice de l'Union européenne, par un arrêt rendu en date du 13 avril 2023, dans un contexte où sa position faisait l'objet de vives critiques de la part de la doctrine de sorte qu'elle demande à la cour, au visa des articles 101 et suivants, 333 et 700 du code de procédure civile, de :

-Déclarer Bank Audi S.A.L. recevable en son appel ;

Y faisant droit,

Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris du 19 octobre 2023 en ce qu'il :

- dit que la clause attributive de juridiction stipulée à l'article X du chapitre 6 des conditions générales de Bank Audi S.A.L. en date du 19 septembre 2016 est inapplicable au litige et se déclare compétent pour connaitre de la présente instance ;

-déboute Bank Audi S.A.L. de sa demande de voir le présent tribunal se dessaisir de l'instance introduite par M. [C] à l'encontre de Bank Audi S.A.L. enregistrée sous le numéro RG 2022049090 au profit de la cour d'appel de Beyrouth ;

-dit que le greffe convoquera les parties, sur la jonction, à l'audience du juge chargé d'instruire l'affaire du mercredi 8 novembre 2023 à 11h15, devant M. [F] ;

-condamne Bank Audi S.A.L. à payer à M. [C] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

-condamné Bank Audi S.A.L. aux dépens de l'incident.

Statuant à nouveau,

In limine litis sur la compétence territoriale du tribunal de commerce de Paris :

- constater que les conditions générales sont applicables à l'ensemble des comptes de M. [C] et par conséquent au présent litige ;

-constater l'existence et la validité de la clause attributive de compétence soumettant le présent litige aux tribunaux de Beyrouth.

En conséquence :

juger que le tribunal de commerce de Paris est territorialement incompétent pour statuer sur les demandes de M. [C] à l'encontre de Bank Audi S.A.L. ;

-renvoyer M. [C] à mieux se pourvoir.

À titre subsidiaire sur l'exception de connexité internationale :

-constater l'existence d'un lien étroit entre la présente instance et l'instance entre M. [C] et Bank Audi S.A.L. pendante devant la cour d'appel de Beyrouth d'une nature telle qu'il existe un risque de contrariété de décisions ;

En conséquence :

-dessaisir le tribunal de commerce de Paris de l'instance introduite par M. [C] à l'encontre de Bank Audi S.A.L. enregistrée sous le numéro RG 2022049090 au profit de la cour d'appel de Beyrouth.

En tout état de cause :

-condamner M. [C] au paiement d'une somme de 25 000 euros à Bank Audi S.A.L. au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Par conclusions notifiées par voie électronique le 7 mai 2024, M. [R] [C] fait valoir :

- que les conditions générales opposées par Bank Audi S.A.L. ne s'appliquent pas au compte litigieux n° [XXXXXXXXXX01]. Le contrat intitulé « conditions générales » a été signé par M. [C] préalablement et indépendamment de l'ouverture, le 24 mai 2019, d'un compte épargne n° [XXXXXXXXXX01] dans les livres de Bank Aussi S.A.L. à la demande de sa filiale Bank Audi France, à titre de garantie accessoire au contrat de prêt personnel. La simple lecture de la traduction produite par la Banque Audi S.A.L. démontre qu'il s'agit d'un contrat, conclu entre deux parties, d'une part, la Banque Audi S.A.L. et d'autre part M. [C]. Il ne s'agit pas, comme le prétend Bank Audi S.A.L., d'un contrat-cadre régissant toutes relations futures entre les parties, l'objet du contrat étant, par ailleurs, mentionné en sa première page. En vertu de l'article I du premier chapitre, le client demande l'ouverture d'un ou plusieurs comptes « sous un numéro d'identification et la dénomination requise », dont le contrat régit le fonctionnement. Ces comptes sont ceux mentionnés sur la première page du contrat, qui renvoie expressément à cet article I, à savoir, en l'espèce un seul compte, de dépôt, ouvert au nom de « [C] [R] [O] » sous le numéro d'identification suivant : « 349680 ». Seul ce « compte », précisément défini et identifié comme objet du contrat est régi par les stipulations énoncées dans ce document. En revanche, le compte épargne n° [XXXXXXXXXX01] est exclu de son champ d'application. L'objet du litige porte sur le remboursement des sommes déposées à titre de garantie par M. [C], au bénéfice de Bank Audi France, sur ledit compte épargne. En vertu de la lettre de garantie, ce compte épargne donné en gage, et non un compte créditeur, n'est jamais défini comme un « compte » au sens des conditions générales visées par Bank Audi S.A.L., auxquelles il n'est pas non plus renvoyé. La traduction établie par Bank Audi France dans le cadre de l'autre instance ne diffère pas sur ce point de celle produite par M. [C]. Le compte litigieux ne peut pas non plus être considéré comme une « déclinaison » du compte visé dans les conditions générales, leurs numéros d'identification étant différents. Ce compte était en effet ouvert à titre accessoire du prêt personnel, dans le cadre d'une opération spécifique et indépendante menée sous le contrôle de Bank Audi France. Contrairement à ce qu'indique Bank Audi S.A.L., les conditions générales dont elle se prévaut ne prévoient pas que tous les comptes indistinctement ouverts « au nom » de M. [C] seraient régis à l'avenir par lesdites conditions générales. Le compte épargne n° [XXXXXXXXXX01] a été ouvert dans les livres de Bank Audi S.A.L. spécialement pour les besoins de l'opération, à titre de cash collateral, du prêt souscrit par M. [C] auprès de la filiale française Bank Audi France, à la demande de cette dernière, ce que confirme, par ailleurs, un employé de Bank Audi S.A.L. La convention de garantie est rédigée sous la forme d'une lettre de M. [C] à l'attention de Bank Audi S.A.L. Datée du 24 mai 2019, elle a été enregistrée devant notaire le 21 juin 2019 puis notifiée à Bank Audi France. Le Professeur [P] confirme, par ailleurs, dans sa consultation que la somme objet de la garantie a « été détachée » du dépôt et qu'elle est devenue indépendante, du contrat principal dans lequel est inscrite la clause de compétence exclusive,

- que Bank Audi S.A.L. prétend de manière inopérante qu'il conviendrait de s'extraire de la lecture du contrat et d'en faire un « référentiel contractuel unique » pour l'appliquer à tous les comptes ouverts au nom de M. [C], « quel que soit le numéro attribué administrativement par la banque au compte concerné ». M. [C] n'a pas sollicité l'ouverture d'un « compte client » identifié par la banque sous un numéro d'identification client, mais lui a demandé « d'ouvrir à son nom un compte conformément à l'article I du premier chapitre de ce contrat et qui sera de type (') individuel (') avec la désignation suivante ». Le contrat prévoyait, à la date de sa formation, l'hypothèse de l'ouverture d'« un ou plusieurs comptes créditeurs ». En l'espèce, un compte identifié sous le numéro 349680 a été ouvert. L'objet du contrat signé le 19 septembre 2016 est ainsi bien précis et déterminé. Le contrat n'avait ainsi pas vocation à régir les relations entre les parties pour tout compte existant ou à créer, ne s'applique qu'aux comptes mentionnés en première page dudit contrat. Dès lors, il ne peut régir les relations entre les parties relatives à un compte qui n'existait pas au moment de la signature du contrat, comme c'est le cas du compte ouvert trois ans plus tard. L'article VII du chapitre I du contrat prévoit aussi la faculté de Bank Audi S.A.L. de « retirer l'intégralité du solde du compte, de le clôturer et de déposer les fonds au nom du client auprès d'un notaire public », à sa seule discrétion. Bank Audi S.A.L. prétend cependant ne pas pouvoir verser à M. [C] le solde de ce compte sans une autorisation de Bank Audi France, alors qu'une telle autorisation n'est pas prévue en l'espèce. Bank Audi S.A.L. n'a d'ailleurs aucunement fait référence aux contrat intitulé « conditions générales » du 19 septembre 2016 dans le cadre du contentieux devant le Juge des référés de Beyrouth. Or, si ce contrat était applicable, Bank Audi S.A.L. s'en serait prévalue dans le cadre de son argumentaire en défense à la demande de M. [C]. Le tribunal de commerce a relevé que les conditions générales produites s'appliquent « à des comptes de dépôt classiques, susceptibles d'être mouvementés, en particulier par des moyens informatiques, et non à un compte ad hoc créé pour héberger des fonds nantis ». En cause d'appel, Bank Audi S.A.L. se prévaut d'opérations que M. [C] aurait effectuées sur le compte n° [XXXXXXXXXX01] et produit à cet égard des documents intitulés « Debit Advice ». Or, aucune opération n'a été effectuée par M. [C] sur les fonds bloqués au bénéfice de Bank Audi France. Les sommes déposées à titre de garantie du prêt sont restées intactes et n'ont jamais été mouvementées au sens des conditions générales du 19 septembre 2016. En second lieu, le compte n'est pas mouvementé « par des espèces, des virements ou tout service électronique que la banque décide de rattacher au compte de dépôt », tel que cela est prévu par les conditions générales. M. [C] n'a aucun accès direct au compte et n'a effectué aucun dépôt sur ce compte. Bank Audi S.A.L. a reversé elle-même des intérêts mensuels (« interest posting ») et prélevé des frais au titre de « withholding tax » et de « management fees ». En troisième lieu, les retraits (« cash withdrawal ») apparaissant sur le relevé de compte communiqué par Bank Audi S.A.L. n'ont pas davantage été effectués en application des conditions générales. Tous les documents intitulés « Debit Advice » comportent la mention de leur conformité à la circulaire n° 151 de la Banque du Liban. Le relevé de compte depuis la date de constitution du gage en juin 2019 montre en effet qu'aucun retrait n'a été effectué sur ce compte avant que des retraits ponctuels, de faibles montants, apparaissent à compter du mois de mai 2020. La circulaire n° 151 de la Banque du Liban est précisément entrée en vigueur en avril 2020. Ces retraits ne sont donc pas contractuels et ne constituent aucune mise en 'uvre quelle qu'elle soit du contrat intitulé « conditions générales », comme tente de le faire croire Bank Audi S.A.L. en réaction au jugement du tribunal de commerce de Paris. Ils ont été exécutés directement par Bank Audi S.A.L. en vertu de mesures exceptionnelles. En outre et en tout état de cause, les mouvements n'ont pas été opérés à la demande de M. [C]. Comme cela ressort des correspondances que ce dernier a adressées à sa banque, il avait sollicité des retraits « as per Central Bank last memo » et non spécifiquement depuis le compte donné en gage. Sa demande visait en effet ses cinq autres comptes, non bloqués, au sein de Bank Audi S.A.L., la procuration donnée à son secrétaire, M. [S], étant, à cet égard, limitée à ces cinq autres comptes. Aucune des correspondances de M. [C] ne vise en effet le compte épargne n° [XXXXXXXXXX01]. Bank Audi S.A.L. a unilatéralement décidé, sous sa responsabilité, d'appliquer la circulaire n° 151 de la Banque du Liban à l'ensemble des comptes indifféremment, y compris le compte donné en gage au profit de Bank Audi France. À cet égard, deux transferts depuis le compte nanti n° [XXXXXXXXXX01] vers le compte courant en livres libanaises n° [XXXXXXXXXX02], respectivement d'un montant de 3 000 dollars américains et de 1875 dollars américains, ont été réalisés le 4 avril 2022 et le 2 juin 2022 sans aucune autorisation de M. [C]. Ainsi, l'argument tendant à prêter des caractéristiques issues du contrat du 19 septembre 2016 au compte nanti, accessoire du prêt consenti par Bank Audi France, est inopérant, tout comme l'argument selon lequel des intérêts auraient été perçus et retirés du compte,

- que la clause attributive de juridiction stipulée à l'article X du chapitre 6 des conditions générales dont se prévaut Bank Audi S.A.L. est elle-même rédigée en référence au « compte » ou aux « comptes » préalablement définis. En omettant d'évoquer la définition du terme « compte » à la lecture de la première page et de l'article I des conditions générales, qu'elle n'avait pas fait traduire, Bank Audi S.A.L. prétend ainsi pouvoir étendre l'application de la clause attributive de juridiction à tous les comptes indistinctement, y compris au compte épargne-temps faisant l'objet du gage-espèces. Or, le compte épargne-temps affecté à titre de garantie du prêt a été ouvert de façon indépendante, selon des modalités de fond et de forme distinctes des autres comptes. Il ne s'agit pas d'un « compte » régi par le contrat du 19 septembre 2016. Le compte épargne identifié sous le numéro [XXXXXXXXXX01] a, en vertu de l'article 9 du contrat de prêt conclu par M. [C] avec Bank Audi France, été ouvert par cette dernière non à la demande de M. [C], mais de Bank Audi France. Sur le fond, cet acte juridique prévoit l'affectation des sommes déposées à la garantie des sommes dues par M. [C] à Bank Audi France, constituant ainsi le gage-espèces prévu par le contrat de prêt du 3 juin 2019. La convention de garantie ne contient aucune définition du terme « compte », ni aucun renvoi au contrat du 19 septembre 2016. En outre, le contrat de prêt, dont Bank Audi S.A.L. a nécessairement eu connaissance lors de la constitution de la sûreté, contient une clause soumettant expressément tout litige relatif indistinctement au prêt ou aux garanties, à la compétence exclusive du tribunal de commerce de Paris. Ainsi, l'application de la clause attributive de juridiction au compte de gage-espèces se doit d'être exclue,

-que la matière litigieuse en l'espèce se rapporte aux effets d'une sûreté, plus précisément à sa compensation avec le prêt dont elle est l'accessoire. Il ne s'agit aucunement de statuer sur les modalités d'ouverture et de fonctionnement d'un compte de dépôt. Le contrat intitulé « conditions générales » daté du 19 septembre 2016, et la clause attributive de juridiction qu'il contient, n'ont donc aucun rapport avec l'opération dont est saisi le tribunal de commerce de Paris. Celle-ci ne porte pas sur, ni ne résulte du contrat du 19 septembre 2016 dénommé « conditions générales ». Elle ne découle pas davantage d'un « compte du client » au sens de ce contrat et de la clause litigieuse, ni de « toutes circonstances en lien avec ou résultant des comptes ». C'est ainsi à tort que Bank Audi S.A.L. affirme que « les demandes formées par M. [C] dans la présente instance entrent dans le champ d'application de cette clause attributive de juridiction ».

- à titre subsidiaire, si le document daté du 19 septembre 2016 n'était pas qualifié de contrat unique mais de conditions générales à l'instar de conditions générales de ventes, celles-ci doivent, en tout état de cause, avoir été acceptées par celui auquel on les oppose pour entrer dans le champ contractuel. Telle est la solution du droit des obligations en droit français comme en droit libanais. M. [C] fait valoir qu'il développe dans ses écritures un raisonnement uniquement fondé sur le droit français car le droit libanais est le même sur ces questions, sans pour autant renoncer à soutenir l'applicabilité du droit libanais. Aux termes de la consultation du Professeur [P] et du nouvel article 1119 du code civil, les conditions générales doivent, pour être applicables, être portées à la connaissance du cocontractant pour chaque contrat conclu, ne serait-ce que par une clause de renvoi insérée dans le contrat particulier. À défaut d'une telle référence pour un nouveau contrat particulier, les conditions générales, le cas échéant contractualisées à l'occasion d'opérations antérieures, sont inopposables au cocontractant. Il est de jurisprudence que l'existence de relations d'affaires suivies ne justifient pas l'application de conditions générales antérieures au contrat litigieux en l'absence de référence à celles-ci et que la succession de contrats de même nature, dont certains visent les conditions générales et d'autres non, ne permet pas davantage d'appliquer celles-ci.

- qu'en l'espèce, il existe des clauses attributives de juridiction « incompatibles » puisque le contrat de prêt, dont la garantie est l'accessoire en vertu de l'article 9, stipule expressément à l'article 17 que le tribunal de commerce de Paris a compétence exclusive pour connaître de « tout litige ou toute autre procédure concernant la présente convention ou les garanties ». Outre l'obligation de Bank Audi S.A.L. de procéder devant le tribunal saisi des demandes initiales de M. [C] à l'encontre de Bank Audi France, le lien de connexité entre les affaires est tout aussi évident compte tenu de ce que la garantie est l'accessoire du prêt personnel en vertu de l'article 9 du contrat de prêt consenti par Bank Audi France. En conséquence, par application des articles 331 et 333 du code de procédure civile, Bank Audi S.A.L. est tenue de procéder devant la juridiction saisie de la demande originaire, à savoir devant le tribunal de commerce de Paris.

-que l'affirmation de Bank Audi S.A.L. selon laquelle l'action en intervention forcée de M. [C] aurait pour objet de « faire rejuger la demande dont il avait initialement saisi le juge des référés de Beyrouth » est erronée. M. [C] s'est clairement exprimé sur l'objet de son action en intervention forcée aux termes de son assignation du 27 septembre 2022. Ce dernier se retrouve conforté d'une part, à la résistance de Bank Audi France dans l'instance enregistrée sous le RG n°2021004753 et, d'autre part, à la résistance de Bank Audi S.A.L. qui considère qu'elle ne peut ni transférer les sommes en France sur le compte de Bank Audi France, ni les restituer à M. [C] sans une instruction expresse de sa filiale Bank Audi France. Les deux banques tentent de dissocier le prêt du compte qui lui est affecté à titre de garantie au Liban, alors qu'il s'agit d'une même opération, le compte épargne-temps ouvert au Liban étant l'accessoire du prêt personnel. C'est en raison de cette mauvaise foi des deux banques, et notamment de Bank Audi France en cours de procédure, que M. [C] s'est trouvé contraint d'attraire la banque libanaise à la procédure initialement engagée à l'encontre de la seule filiale Bank Audi France, devant le juge du fond compétent, à savoir le tribunal de commerce de Paris. L'action de M. [C] n'est donc aucunement motivée par le prétendu « échec » de son action en référés à Beyrouth à l'encontre de Bank Audi S.A.L.. L'argument de cette dernière tendant à faire reconnaître la compétence des juridictions libanaises n'est pas sérieux et est contradictoire avec ce qu'elle a soutenu devant le juge des référés de Beyrouth en réponse à l'argumentaire de M. [C]. Bank Audi S.A.L. a soulevé une irrecevabilité de l'action de M. [C] pour « défaut de qualité du demandeur », ce qu'a rejeté le tribunal. En revanche, le fait que M. [C] ait saisi le Juge des référés de Beyrouth n'est en aucun cas indicatif de la détermination du tribunal compétent dès lors qu'il s'agit d'une décision provisoire du juge des référés et que ce juge ne s'est pas prononcé d'office sur sa compétence ou son incompétence et n'a pas été saisi d'une telle exception. La position contradictoire de Bank Audi S.A.L. devant le juge des référés libanais et devant le juge du fond français a pour objet manifeste de nuire à l'action de M. [C], tant à son encontre qu'à l'encontre de sa filiale Bank Audi France et n'est ainsi pas recevable,

- sur la connexité, que l'origine factuelle commune de deux instances, ou l'existence d'un lien fort entre elles n'est ainsi pas suffisant pour qu'il y ait connexité. Il doit exister un risque de contrariété des décisions. Or, le juge des référés, soit le juge de l'évidence et du provisoire, et le juge du fond ne sont pas des juridictions également compétentes, puisqu'elles n'ont pas les mêmes pouvoirs juridictionnels. Il n'existe aucun risque de contrariété de décisions dès lors que le juge des référés statue sur un fondement juridique différent et, au provisoire. Le juge des référés de Beyrouth est en l'espèce saisi d'une demande de transfert à Bank Audi France des sommes données en gage par M. [C]. La seconde juridiction saisie est une juridiction de fond, le tribunal de commerce de Paris, qui est le juge du fond compétent pour statuer sur tout litige concernant le contrat de prêt ou les garanties. Ce dernier a été, en l'espèce, saisi par M. [C] d'une demande de condamnation solidaire de Bank Audi France et de Bank Audi S.A.L. à lui restituer les sommes déposées au Liban à titre de garantie, dans l'hypothèse où il serait fait droit à la demande reconventionnelle en remboursement du prêt de Bank Audi France. Il n'y a aucun risque que la décision du juge des référés de Beyrouth contredise celle à intervenir du tribunal de commerce de Paris, puisque le premier ne statue pas sur la demande au fond de M. [C] tendant à la condamnation solidaire de Bank Audi France et de Bank Audi S.A.L. à lui rembourser le montant de la garantie à défaut de compensation des créances. M. [C] fait valoir que Bank Audi S.A.L. tenterait aussi de détourner les écritures de son conseil au Liban lorsqu'elle indique que ce dernier considèrerait la cour d'appel de Beyrouth comme compétente pour trancher l'ensemble du litige. Or, M. [C] n'a eu cesse de réitérer dans le cadre de la présente instance ou au Liban, qu'il a intenté une action en justice devant le juge des référés libanais pour demander en urgence le transfert du montant déposé au Liban à Bank Audi France « afin de faciliter la mise en 'uvre de la compensation en France ».

- à titre subsidiaire et surabondant, que si les conditions générales communiquées par Bank Audi S.A.L. étaient néanmoins jugées applicables au présent litige, la clause attributive de juridiction figurant à l'article X du chapitre 6 desdites conditions générales est une clause abusive devant être réputée non écrite. Il s'agit d'une clause asymétrique revêtant un caractère purement potestatif pour la banque. Cette clause, qui doit être appréciée in concreto, est en outre abusive par l'usage qui est en fait par Bank Audi S.A.L. en l'espèce. M. [C] fait valoir, au regard du certificat de coutume établi par le Professeur [P], qu'il a agi à titre personnel en l'espèce. Il a ainsi, selon le droit libanais de la consommation, la qualité de consommateur. L'article 26 du code de la consommation libanais définit les clauses abusives comme celles qui « créent un déséquilibre entre droits et obligations du professionnel et du consommateur au détriment de ce dernier ». Ce même article donne des exemples de clauses abusives « à titre indicatif », la sanction du caractère abusif étant le réputé non écrit. Le Professeur [P] rajoute que l'appréciation du caractère abusif se fait in concreto. Son analyse de la clause attributive de juridiction litigieuse fait ressortir qu'outre le caractère unilatéral de la clause, pouvant, en soi, être une source de déséquilibre, elle porte atteinte au droit de M. [C] de récupérer le montant in valorem de sa créance et interdit la mise en exécution en France de toute décision obligeant Bank Audi France à compenser ou à restituer à M. [C] ce qui lui est dû. Le droit français, bien que non immédiatement transposable à la présente espèce, sanctionne lui aussi par le réputé non écrit les clauses qui créent au détriment du non-professionnel un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, comme en témoigne la jurisprudence. Si une question préjudicielle a été transmise à la Cour de de justice de l'Union européenne au vu des dissensions jurisprudentielles, il n'en demeure pas moins que le contrôle des clauses abusives a pour objet la prévisibilité et la sécurité juridique conférées par la clause litigieuse. Bank Audi S.A.L. est, par conséquent, mal fondée à se prévaloir de la clause attributive de juridiction pour écarter, par application de la jurisprudence qu'elle cite, les dispositions claires des articles 331 et 333 du code de procédure civile qui l'obligent à procéder devant le tribunal de commerce de Paris, saisi des demandes initiales de M. [C] à l'encontre de Bank Audi France,

- que le Professeur [T] prétend n'avoir eu « aucun contact avec la banque française Bank Audi France ». Or, ce dernier est membre de la commission juridique de l'Association des banques du Liban, dont Bank Audi S.A.L. est elle-même membre. Le Professeur [T] a aussi procédé à une analyse in abstracto de la clause attributive de juridiction en considérant le gage-espèces au profit de Bank Audi France comme un simple compte de dépôt ouvert par un client auprès de Bank Audi S.A.L., sans tenir compte des documents contractuels applicables en l'espèce au litige dont est saisi le tribunal de commerce de Paris. Bank Audi S.A.L. soutient, à l'appui du certificat de coutume qu'elle produit, que M. [C] ne devrait pas être considéré comme un consommateur au motif qu'il « suffit, comme en droit français, que cette personne physique ou morale ait agi à des fins directement liées à son activité professionnelle » pour être exclue du bénéfice des dispositions protectrices des consommateurs. Bank Audi S.A.L. cite à cet égard des jurisprudences rendues en droit français, alors qu'elle reconnaît le droit libanais comme seul applicable au contrat du 19 septembre 2016. Or, comme le souligne, le Professeur [P] dans sa consultation initiale, la notion de consommateur est beaucoup plus large en droit libanais qu'en droit français et trouve à s'appliquer à M. [C], en sa qualité de signataire d'un contrat bancaire. De surcroit en l'espèce, au jour de la signature du contrat intitulé « conditions générales », soit le 19 septembre 2016, M. [C] n'agissait pas « à des fins directement liées à des fins professionnelles », mais à titre purement personnel. Ensuite et comme un ancien employé de Bank Audi S.A.L. l'atteste, la sûreté a été consentie par M. [C] à titre personnel et non professionnel,

- en réponse aux arguments de Bank Aussi S.A.L. sur le caractère abusif de la clause attributive de juridiction, que ces derniers sont purement théoriques et détachés de toute analyse in concreto de la clause. L'usage par Bank Audi S.A.L. d'une clause attributive de compétence, figurant dans un contrat étranger à la présente affaire, revêt un caractère manifestement abusif puisque cette clause rend particulièrement difficile et onéreuse pour M. [C] la défense de ses intérêts à l'encontre de Bank Audi France et de Bank Audi S.A.L. L'existence même du présent incident de compétence, ainsi que les frais engagés pour que le tribunal puisse trancher en droit libanais sur l'applicabilité et la validité de cette clause au litige dont il est saisi, témoignent des entraves imposées à la défense des intérêts de M. [C], créancier de la restitution des sommes affectées à la garantie du prêt. Le recours à cette clause est artificiel, en ce qu'il a pour seul but d'éviter l'action en condamnation solidaire de M. [C] à l'encontre des deux banques. Or, M. [C] a un intérêt légitime évident à agir en intervention forcée contre Bank Audi S.A.L. devant le tribunal de commerce de Paris, les deux banques du groupe Bank Audi tentant de le contraindre à payer plus de deux fois la somme initialement prêtée par Bank Audi France. Le remboursement du prêt et la restitution de sa garantie sont deux sujets connexes, que le tribunal de commerce de Paris, juge du fond, doit trancher ensemble. Le Professeur [P] relève enfin qu'il convient de tenir compte du caractère abusif de l'intégralité de la clause en l'espèce. M. [C] fait ainsi valoir que la clause attributive de juridiction de soit d'être réputée non écrite en son intégralité, de sorte qu'il demande à la cour, au visa des articles 101, 331 et 333 du code de procédure civile, 26 du code libanais de la consommation, 124 du code libanais des obligations et des contrats et les articles 1343 et suivants du code civil, de :

-Confirmer le jugement rendu le 19 octobre 2023 par le tribunal de commerce de Paris dans l'intégralité de ses dispositions en ce qu'il :

-dit que la clause attributive de juridiction stipulée à l'article X du chapitre 6 des conditions générales de Bank Audi S.A.L. en date du 19 septembre 2016 est inapplicable au litige ;

-se déclare compétent pour connaître de l'instance enregistrée sous le numéro RG 2022049090 ;

-déboute Bank Audi S.A.L. de sa demande de voir le présent tribunal se dessaisir de l'instance introduite par M. [C] à l'encontre de Bank Audi S.A.L. sous le numéro RG 2022049090 au profit de la cour d'appel de Beyrouth ;

- condamne Bank Audi S.A.L. à payer à M. [C] la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

En tout état de cause, et y ajoutant au besoin,

-condamner Bank Audi S.A.L. à verser à M. [C] la somme de 25 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

-condamner Bank Audi S.A.L. aux entiers dépens ;

- débouter Bank Audi S.A.L.de l'intégralité de ses demandes, fins et exceptions à l'encontre de M. [C].

MOTIFS

Alors qu'est initiée par M. [C] devant les juridictions françaises une procédure contre la banque Bank Audi France relative au remboursement du prêt consenti et notamment au paiement réclamé par lui par compensation avec la garantie qu'il a constitué, à la demande de la banque française, sur un compte détenu par lui dans les livres de la banque libanaise et que celle-ci a été appelée en la cause par M. [C] aux fins d'obtenir, à titre principal si la compensation est ordonnée le versement du surplus figurant sur le compte et, si elle ne l'est pas, le versement de la totalité du compte, la banque libanaise AUDI SAL lui oppose une exception d'incompétence notamment fondée sur une clause attributive de compétence.

Les parties s'accordent sur la non application du principe de prorogation de compétence prévu à l'article 333 du code de procédure civile dans l'hypothèse d'une clause attributive de compétence dans l'ordre international.

Elles s'accordent également sur l'élément d'extranéité du litige dès lors que si elles sont toutes deux domiciliées à [Localité 5] au Liban, le nantissement constitué par M. [C] au Liban en vertu de l'article 9 du contrat de prêt entre lui et la banque Audi France garantit ce contrat soumis au droit français.

C'est à juste titre que la banque examine la validité de la clause sous l'empire de la loi libanaise, désignée par la convention d'ouverture des comptes de 2016 qui la contient dans la clause rapportée ci-dessus.

Il résulte des consultations juridiques relatives au droit libanais produites par chacune des parties, de Me [T] pour la banque et de M. [P] pour M. [R] [C], au-delà des divergences d'appréciation exprimées notamment sur la question du caractère éventuellement abusif de clause, que les principes généraux de l'interprétation des contrats et singulièrement d'une clause d'élection de for sont similaires à ceux du droit français.

En conséquence, hormis l'examen de son caractère éventuellement abusif invoqué à titre subsidiairement par M. [C] qui fait d'abord valoir que le présent litige n'entre pas dans son champ d'application, une telle clause attributive de compétence est, en principe, licite dès lors qu'elle a été consentie par chacune des parties à laquelle elle a été rendue opposable.

Il appartient donc au juge, dans un premier temps, d'examiner la commune intention des parties et de dire si la clause a été rendue opposable à M. [C] relativement au litige sur la garantie constituée par le nantissement du compte créée à cet effet.

La clause invoquée constituée par l'article X du chapitre 6 des conditions générales figurant dans le 'contrat général pour l'ouverture et le fonctionnement des comptes et les conditions générales relatives aux services bancaires électroniques'' du 19 septembre 2016 stipule que : 

« Nonobstant les stipulations du Paragraphe 1 de l'Article 1 du Chapitre 6 des présentes Conditions générales, ces Conditions générales sont soumises et doivent être interprétées conformément au droit libanais. Les tribunaux de Beyrouth ont compétence exclusive pour connaître de tous litiges découlant de ces Conditions générales et de leurs annexes ou des Comptes du Client ou des autres titulaires de Comptes et de toutes circonstances en lien avec ou résultant des Comptes. La Banque dispose toutefois du droit d'initier une action à l'encontre du Client, du Titulaire de la carte, l'Utilisateur Secondaire ou ses ayants-droits devant tout autre tribunal du Liban ou à l'étranger ».

La suite de la convention, constituée d'une ouverture usuelle de compte bancaire, prévoit les conditions d'ouverture, de fonctionnement et de clôture d'un compte 'créditeur', puis d'un compte 'courant', d'un compte 'épargne', d'un compte 'débiteur' et aussi d'un éventuel 'compte joint' avant que ne soient établies les conditions du service de banque électronique.

Il y a également lieu de rappeler qu'il ressort des pièces produites :

- que ladite garantie est prévue par l'article 9 du contrat de prêt du 3 juin 2019 liant M. [C] à la société Bank Audi France dans ces termes notamment 'le présent prêt sera garanti par un nantissement en USD au profit de la Banque d'ordre de M. [R] [C] à hauteur de 115 % du montant du Prêt sur son compte ouvert dans les livres de la Bank Audi SAL (le 'gage espèce'). Le Client, à sa charge exclusive, autorise d'ores et déjà la Banque à effectuer toutes les formalités nécessaires pour mettre en place la garantie citée ci-dessus, et débiter son compte des frais éventuels en conséquence', étant observé que le contrat de prêt stipule qu'il est soumis à la loi française et que tous litige afférent sera soumis au tribunal de commerce de Paris,

- que pour la mise en oeuvre de ladite garantie, M. [C] par acte en date du 24 mai 2019, a sollicité de la Banque Audi Sal qu'elle constitue un compte comme garantie de paiement de toute dette à l'égard de la société Bank Audi France, s'engageant à ne pas faire de retrait en autorisant toute opérations à cet effet et en sollicitant de la banque libanaise qu'elle informe la banque française de cette constitution de gage-espèce, le document étant revêtu du cachet de la Bank Audi SAL,

- qu'il ressort de l'attestation de [Z] [E], employé de la Bank Audi Sal, que pour la constitution de la garantie, un compte spécifique a été ouvert à la demande de son collègue, M. [I], employé de la banque française Bank Audi France - distinguant la somme de 4 millions de dollars y figurant des 35 millions auparavant détenus par M. [C] et son fils - une lettre notariée du mois de mai 2019 exposant que la somme était exclusivement destinée à la garantie du prêt consenti par la Bank Audi France,

- que le gage-espèce prévu a été respecté et que c'est inexactement que la société Bank Audi Sal fait valoir que le compte a été véritablement mouvementé alors que seuls ont été portés au débit le paiement de frais bancaires et de très modérés retraits en liquide qui correspondaient à la mise en oeuvre de la faculté très restreinte offerte aux particuliers par la banque centrale du Liban de disposer de certaines sommes limitées sur leur compte, étant observé qu'il n'est pas contesté que le gage-espèce devant correspondre à 115 % de la somme prêtée par la banque française a été maintenu.

Il doit être constaté, avec le tribunal, que le compte - exclusivement créé pour la constitution de la garantie en faveur de la société Bank Audi France comme la société Bank Audi Sal en était dûment informée puisque cette ouverture lui a été demandée par un préposé de la banque française M. [I], et intitulé 'Term Deposit', grevé dans son fonctionnement par sa nature de garantie en espèce - ne figure pas au rang de ceux cités ou envisagés dans la convention d'ouverture de compte.

Aucune des pièces établies pour la constitution de la garantie en faveur de la banque française ne réitère une attribution de compétence relative au litige sur ce compte 'gage espèce' au profit des juridictions libanaises.

S'il est exact qu'il ressort du certificat de coutume de l'association des banques du Liban versée aux débats par la banque qu'il est d'usage que les clauses attributives ne sont pas réitérées à chacune ouverture d'un nouveau compte, il n'est pas établi qu'il était de la commune intention des parties, en dépit de la généralité de la clause qui ne vise toutefois que les conditions générales qui la contiennent lesquelles n'envisage pas la constitution d'une garantie, qu'elle s'appliquerait audit gage-espèce, qui plus est constitué pour garantir une dette à l'égard d'une banque étrangère, la connaissance des litiges y relatifs étant attribuée expressément aux juridictions françaises.

En conséquence c'est à juste titre que M. [C], suivi par le tribunal, expose que la société Bank Audi Sal ne peut valablement lui opposer la clause d'élection du for dès lors que le sort de la garantie constituée par le compte gage espèce n'entre pas dans son champ d'application.

C'est encore à juste titre que le tribunal a rejeté l'exception de connexité internationale soulevée par la société Bank Audi Sal à raison de la procédure de référé se poursuivant devant la cour d'appel de Beyrouth dès lors que cette dernière, devant laquelle n'est pas attraite la société Bank Audi France, n'est pas saisie, au contraire du tribunal de commerce de Paris, de la question essentielle du paiement de la dette bancaire de M. [C] à l'égard de la banque française par voie de compensation, de sorte qu'il n'existe pas de risque de contrariété de décision, d'autant que la décision libanaise à venir en référé ne sera revêtue, comme c'est le cas en droit français, que d'une autorité relative de la chose jugée.

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a déclaré la clause litigieuse inapplicable au litige et en ce qu'il s'est reconnu compétent par application du principe de prorogation de compétence en l'absence d'une clause d'élection du for valablement opposable.

Il y a lieu de condamner la société Bank Audi Sal aux entiers dépens de l'incident ainsi qu'à payer à M. [R] [C] la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

En conséquence RENVOIE l'examen de l'affaire au tribunal de commerce de Paris ;

Y ajoutant,

CONDAMNE la société Bank Audi Sal à payer à M. [R] [C] la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Bank Audi Sal aux entiers dépens de la procédure incidente.

* * * * *

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 23/17233
Date de la décision : 03/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-03;23.17233 ?
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