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03/07/2024 | FRANCE | N°22/14604

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 4, 03 juillet 2024, 22/14604


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 4



ARRET DU 03 JUILLET 2024



(n° , 1 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 22/14604 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGIXQ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Juillet 2022 - Tribunal de Commerce de Paris, 19ème chambre - RG n° 2020026107





APPELANTE



S.A.S. TILM agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice,

domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 540 088 341

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Représentée par Me Nathalie Lesenechal, avocat au barrea...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 4

ARRET DU 03 JUILLET 2024

(n° , 1 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 22/14604 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGIXQ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Juillet 2022 - Tribunal de Commerce de Paris, 19ème chambre - RG n° 2020026107

APPELANTE

S.A.S. TILM agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice, domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 540 088 341

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Nathalie Lesenechal, avocat au barreau de Paris, toque : D2090

Ayant pour avocat plaidant Me Dahlia ARFI ELKAIM, avocat au barreau de Paris, toque : C1294, substituée à l'audience par Me Marine Leclerc, avocat au barreau de Paris

INTIMEE

S.A.S. HEWLETT PACKARD FRANCE SASU prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de Nanterre sous le numéro 652 031 857

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me François Teytaud de l'AARPI TEYTAUD-SALEH, avocat au barreau de Paris, toque : J125

Ayant pour avocat plaidant Me Frédéric FOURNIER de la SELARL REDLINK, avocat au barreau de Paris, toque : J044

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 22 Mai 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Agnès Bodard-Hermant, présidente de la chambre 5.4

M. Julien Richaud, conseiller

Mme Marie-Laure Dallery, magistrat à titre honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme Agnès Bodard-Hermant dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie Thomas

ARRET :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Agnès Bodard-Hermant, présidente de la chambre 5.4 et par M. Maxime Martinez, greffier, présent lors de la mise à disposition.

FAITS ET PROCÉDURE

La société TILM a pour activité la vente, entretien, négoce, ingénierie, assistance, maintenance de tous matériels informatiques et de projets informatiques audiovisuels et multimédia.

La société Hewlett-Packard France (HPE) a pour activité l'achat, la vente, l'importation, la réparation, l'entretien et le commerce en général de serveurs, des solutions de stockages et des services associés.

HPE distribue ses produits au travers d'un réseau de grossistes commercialisant eux-mêmes ses produits auprès de distributeurs agréés par elle dans le cadre de contrats de distribution.

Elle propose à ses distributeurs agréés un programme de remises indirectes dit "programme HPE de Prix Spécial client final" consistant à offrir à ses grossistes des remises complémentaires spécifiques afin qu'ils en fasse bénéficier les distributeurs agréés, pour la revente de certains produits à des clients finaux désignés au préalable, non revendeur, achetant pour leurs propres besoins et en raison de leurs volumes d'achats.

TILM et HPE ont conclu les 5 et 6 octobre 2012 un contrat de distribution portant sur la revente des produits HPE et autorisant TILM à acheter les produits HPE aux fins de revente à des clients finaux uniquement dans l'Espace Economique Européen (EEE) et en Suisse. TILM a été agrée en qualité de revendeur indirect.

Ce contrat se compose des conditions de distribution de HPE, de l'avenant relatif à l'agrément de partenaire HPE, des conditions générales du programme HPE de prix spécial client final et des conditions générales de programme HPE de prix spécial promotionnel.

Par lettre recommandée AR du 25 avril 2018, HPE a indiqué à TILM avoir identifié qu'un volume significatif de ventes de produits HPE fournis par TILM avaient été vendu à des clients et sur des territoires non autorisés contractuellement pour la période de janvier 2016 à début 2018 ayant généré un indu de remises perçues de 6 236 625,13 USD.

Par courrier en date du 10 mai 2018, TILM proposait à la société HPE de la recevoir au sein de ses locaux afin « de faire toute la transparence sur ces allégations qui selon nous ne sont pas fondées ».

Par lettre recommandée AR du 26 février 2019, HPE a résilié le contrat et mis en demeure TILM de lui rembourser les remises indument perçues et de lui payer la pénalité contractuelle forfaitaire de 10% du prix de la liste des produits détournés définie à l'article 8.c des Conditions Générales du Programme HPE de prix spécial client final.

Par acte du 29 juin 2020, elle l'a assignée devant le tribunal de commerce de Paris pour manquement contractuel et répétition de l'indu.

Par jugement du 6 juillet 2022, le tribunal de commerce de Paris a :

- Dit recevables les demandes de la SAS Hewlett-Packard France,

- Condamné la SAS TILM à payer à la SAS Hewlett-Packard France :

* la contrevaleur en euros de la somme de 5 926 810,66 USD à la date du 6 juillet 2022,

* la contrevaleur en euros de la somme de 1,00 USD à la date du 6 juillet 2022 au titre de la clause pénale,

* la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- Débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

- Ecarté l'exécution provisoire du présent jugement,

- Condamné la SAS TILM aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 70,86 € dont 11,60 € de TVA.

TILM a interjeté appel de ce jugement par déclaration reçue au greffe de la Cour le 2 septembre 2022 et elle demande à la Cour, par ses dernières conclusions, transmises par RPVA le 26 avril 2023, de :

Juger la société TILM bien fondée dans l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

Y faisant droit,

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- retenu que HPE échouait à rapporter la preuve que TILM avait violé ses obligations contractuelles à l'occasion des ventes n°95575882, 95557925, 95211618, 95354902, 95538227, 95371577 ;

- Condamné la SAS TILM à payer à la SAS Hewlett-Packard France la contrevaleur en euros de la somme de 1,00 USD à la date du 6 juillet 2022 au titre de la clause pénale ;

Infirmer le jugement rendu par le Tribunal de commerce de Paris le 06 juillet 2022 pour le surplus :

Réformant et statuant de nouveau,

Débouter la société Hewlett-Packard France de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

Subsidiairement et dans l'hypothèse où la Cour confirmerait tout ou partie de la décision rendue, il y aurait lieu de ramener la condamnation indemnitaire à de plus justes proportions, compte tenu des remises réellement perçues ;

Condamner la société Hewlett-Packard France à payer à la société TILM la somme 15 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamner la société Hewlett-Packard France aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel.

HPE par ses dernières conclusions, transmises par RPVA le 6 février 2024, demande à la Cour de :

Vu les articles 1134, 1147 et 1235du Code civil,

Vu l'ensemble des pièces versées au débat,

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- Dit recevables les demandes de la société Hewlett-Packard France ;

- Dit que la société TILM avait indûment perçu des remises au titre de ventes n°93773595, 95373046, 9577735, 95735854, 95215525, 95024307, 93300181, 94666260, 94809069, 94255493 et 95778591 réalisées en violation du contrat de distribution conclu avec la société Hewlett-Packard France ;

- Jugé que le contrat de distribution conclu entre les sociétés Hewlett-Packard France et TILM le 5 et 6 octobre 2012 avait été résilié aux torts exclusifs de la société TILM en date du 26 février 2019 ;

- Condamné la société TILM à verser à la société Hewlett-Packard France la contrevaleur en euros à la date du 6 juillet 2022 de la somme de 5 926 810,66 dollars américains au titre des remises additionnelles de vente indûment perçues ;

- Débouté la société TILM de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- Condamné la société TILM à payer à la société Hewlett-Packard France la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamné la société TILM aux entiers dépens.

Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- Dit que la société Hewlett-Packard France échouait à rapporter la preuve que TILM avait violé ses obligations contractuelles à l'occasion des ventes n°95575882, 95557925, 95211618, 95354902, 95538227 et 95371577 ;

- Dit que l'article 8.c des Conditions Générales du programme HPE de prix spécial client final constituait une clause pénale et que son montant était manifestement excessif ;

- Condamné la société TILM à payer à la société Hewlett-Packard France la contrevaleur en euros de la somme de 1,00 USD à la date du 6 juillet 2022 au titre de la clause pénale ;

Et, statuant à nouveau,

Dire que la société TILM a manqué à ses obligations contractuelles à l'occasion des ventes n°95575882, 95557925, 95211618, 95354902, 95538227 et 95371577 ;

Condamner la société TILM à verser à la société Hewlett-Packard France la contrevaleur en euros à la date de l'arrêt à intervenir de la somme de 704 114,22 dollars américains au titre des remises additionnelles de vente indûment perçues à l'occasion des ventes n°95575882, 95557925, 95211618, 95354902, 95538227 et 95371577 outre les intérêts ;

Condamner la société TILM à verser à la société Hewlett-Packard France la contrevaleur en euros à la date du jugement à intervenir de la somme de 446 961,95 dollars américains au titre de la pénalité forfaitaire prévue dans le contrat de distribution outre les intérêts ;

En tout état de cause,

Débouter la société TILM de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

Condamner la société TILM à payer à la société Hewlett-Packard France une somme de 50 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamner la société TILM aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître François Teytaud dans les conditions de l'article 699 du CPC.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 mars 2024.

La Cour renvoie à la décision entreprise et aux conclusions susvisées pour un exposé détaillé du litige et des prétentions des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIVATION

En vertu de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne peut que confirmer le chef du jugement entrepris qui dit recevables les demandes de HPE, chef dont TILM demande l'infirmation sans toutefois, la soutenir.

Par ailleurs et au vu de l'article 954 du code de procédure civile comme des dispositifs des conclusions des parties, la cour n'est saisie d'aucune prétention relative à la résiliation du contrat de distribution litigieux, étant observé que le jugement entrepris ne comprend aucun chef de dispositif à cet égard.

Enfin, les parties, qui ont toute deux leur siège social en France ne conteste pas l'application de la loi française au présent litige né de l'application du contrat de distribution litigieux qui les lie.

HPE fait grief à TILM d'avoir violé ses obligations au titre du contrat de distribution (articles 1.c, 1.i et 2.e) et des conditions générales du programme HPE de prix spécial client final (article 5.i), en vendant à des clients non-agréés ou à des clients agréés mais non-finaux et qui, pour certaines ventes, ont revendu les produits de celles-ci, le cas échéant en-dehors du territoire contractuel, en toute connaissance de cause de TILM.

Elle demande en conséquence le remboursement des remises spéciales ainsi indument perçues par TILM au titre de ces reventes, tel que prévu à l'article 8.b des conditions générales du programme HPE de prix spécial client final et le paiement de la pénalité forfaire de l'article 8.c des conditions générales du programme HPE de prix spécial client final.

TILM conteste avoir revendu à des clients non autorisés et avoir eu connaissance des reventes alléguées soutenant que la localisation des produits en cause n'est pas même établie, voire que HPE avait elle-même connaissance de ces reventes par le client final autorisé.

Elle conteste en conséquences devoir rembourser une quelconque remise spéciale perçue au titre de ces reventes et toute pénalité contractuelle, qu'elle analyse en une clause pénale manifestement excessive que le juge a justement réduit eu égard à l'absence de tout préjudice comptablement démontré.

Réponse de la cour,

I - Sur les reventes par TILM à un client final autorisé qui a prétendument lui-même revendu les produits en cause éventuellement hors du territoire contractuel

Vu l'article 1.i du contrat de distribution signé entre les parties les 5 et 6 octobre 2012 qui défini le territoire comme désignant les Etats Membres de l'Espace Economique Européen (EEE) et la Suisse,

Vu l'article 2.e de ce contrat de distribution qui se lit ainsi :

"Vous vous engagez à revendre les Produits et/ou Support au titre du présent Contrat uniquement à l'intérieur du territoire. Dans les limites de la loi applicable, les exportations ou importations de Produits a destination ou en provenance de pays hors du territoire sont interdites sauf autorisation contraire écrite de HPE. Vous ne pouvez revendre directement ou indirectement les produits à l'intérieur du territoire si les produits n'ont pas été achetés directement auprès de HPE ou d'un partenaire agréé HPE, ou si vous savez ou avez de bonnes raisons de croire que l'acheteur des produits ou un tiers a l'intention d'exporter (pour la vente ou la revente) ou d'importer les produits dans tout pays hors du territoire. Le non-respect des stipulations du présent article sera considéré comme une violation substantielle de vos obligations au sens de l'article 15.d".

Vu l'article 5.i des conditions générales du programme HPE de prix spécial ainsi libellé :

"vous acceptez que le Prix Spécial Client Final ne s'applique qu'exclusivement à la revente au Client Final identifié dans l'Affaire Gagnée et pour un usage interne uniquement. Dans le cadre du présent article 5a (sic), la notion de Client Final inclut celle de ses filiales dont il contrôle au moins cinquante et un pourcent (51%) du capital social ou des actifs",

Il n'est pas contesté que le programme de prix spécial HPE s'applique uniquement au Client Final défini à l'article 1.c des conditions générales du programme HPE de prix spécial client final comme « la société ou la partie mentionnée sur la Cotation de Prix Spécial Client Final ou l'Affaire Gagnée, qui est l'acheteur des Produits et/ou du Support HPE aux fins d'utilisation pour ses besoins propres sur le Territoire et non pour la revente ou la fourniture à une/d'autre(s) partie(s). »

' Sur les reventes ANEVIA

- revente n°93773595 pour une remise d'un montant de 1 411 094,99 USD :

Il n'est pas contesté qu'ANEVIA est un client final autorisé (pièce intiméé 50) pour cette vente sur bon de commande du 30 août 2016 dont les produits se trouvaient en Suisse le 16 octobre 2017, soit sur le territoire contractuel (pièce intimée 54).

Le seul fait, à le supposer même établi au vu des pièces produites par HPE (pièces 6 à 65 bis), que ANEVIA ait elle-même revendu les produits de cette vente en dehors du territoire contractuel, ne suffit pas à établir que TILM, au moment de la vente, savait ou avait de bonnes raisons de croire, au sens de l'article 2.e précité, que cette cliente allait agir ainsi, alors même qu'elle est autorisée.

En effet :

- d'une part, aucun aveu d'une telle connaissance par TILM ni aucun aveu d'avoir manqué à ses obligations contractuelles ne peut se déduire des extraits de ses conclusions de première instance cités par HPE (conclusions p21) : « HPE reconnaît dans cet email être parfaitement informée des reventes effectuées par la société ANEVIA à des clients finaux hors réseaux », ou encore « la société HPE, en la personne de ses dirigeants, avait donc parfaitement connaissance des ventes litigieuses réalisées par la société TILM avant qu'elle n'ait réalisé un audit », sans plus de précision quant à ces "ventes litigieuses"

- et, d'autre part, le mail du 21 mai 2018 (pièce intimée 22) - dans lequel TILM, répondant aux questions d'HPE dans le cadre de son audit, indique qu'interrogée, ANEVIA a indiqué avoir revendu les produits hors du territoire contractuel - est postérieur à cette revente du 30 août 2016.

Par ailleurs, en l'absence de tout faisceau d'indices permettant d'établir que TILM pouvait avoir un doute sur la qualification de client effectivement final d'ANEVIA au moment de la revente du 30 août 2016, HPE lui reproche vainement de n'avoir effectué aucune vérification de la destination des produits ou de ne pas avoir, a minima, informé ANEVIA de l'interdiction de revente des produits. Ce d'autant que les conditions générales du programme HPE de prix spécial client final sont taisantes à cet égard alors qu'elles prévoient (articles 4, 5ii et 5iii) une faculté pour HPE, d'effectuer une vérification en aval et en amont de la destination finale.

- reventes n° 95373046, n° 95377735 et n° 95735854 pour des remises d'un montant de 740 123,12 USD, de 95 252,63 USD et de 178 068,12 USD

ANEVIA est aussi un client final autorisé pour ces reventes des 21 novembre 2017, 22 novembre 2017 et 16 avril 2018 (pièces intimée 35-41-42) et HPE, qui fait à TILM les mêmes griefs que ci-dessus, ne démontre pas la prétendue violation par TILM de ses obligations contractuelles, pour les mêmes motifs que ci-dessus sauf à préciser que "le tableau des détournements de produits" est dénué de valeur probante s'agissant d'une preuve que HPE s'est faite à elle-même (pièce 27), alors qu'aucun autre élément ne permet d'établir la localisation des produits.

Par suite, TILM n'a pas violé ses obligations contractuelles pour ces reventes ANEVIA.

' Sur la revente INTERSEC n° 94255493 pour une remise d'un montant de 278 735,51 USD

INTERSEC est un client final autorisé (pièces intimée 26 et 53) pour cette revente de TILM du 25 octobre 2016.

Dès lors, HPE démontre, au vu d'un mail du 22 mai 2018 (sa pièce 28) dans lequel, à l'occasion de l'audit précité, TILM lui confirme que la destination finale des produits est Orange Sonatel Senegal Dakar, que l'acheteur a effectivement exporté les produits en cause hors du territoire contractuel.

Dès lors, la mention "projet SONATEL SENEGAL HARWARE" sur la facture de cette revente de TILM, datée du 28 février 2017 (pièce appelante 23) constitue un indice qui suffit à établir que TILM avait de bonnes raisons de croire qu'INTERSEC n'était pas réellement un client final, peu important que l'offre d'achat ne mentionne pas le Sénégal mais seulement "projet Sonatel" (pièces appelante n°22).

En conséquence, elle était tenue d'effectuer un minimum de diligences pour s'assurer de la destination finale des produits, ce dont elle ne justifie pas.

TILM, ainsi que le retient le premier juge, a donc violé ses obligations contractuelles à l'occasion de cette revente INTERSEC.

' Sur les reventes ESMERTEC devenue MYRIAD par fusion absorption en 2009 n° 95575882, n° 93300181, n° 95215525 et n°94666260 pour des montants de remise de 24 489,37 USD, 2 425 415,97 USD, 46 622,16 USD et 723 058,82 USD

Le jugement entrepris retient par des motifs pertinents que la Cour adopte que TILM était parfaitement informée par un courriel de Myriad du 2 février 2017 (pièce appelante 10) que cette dernière n'était pas un client final éligible aux remises querellées, dès lors qu'elle lui confirmait : "que les produits achetés (...) sont bien pour nos besoins et à destination de nos clients finaux".

Les trois dernières ventes étant des 26 septembre 2017, 30 08 2016 et 1er février 2017, elles sont concernées par cette confirmation. En revanche, la première, datée du 14 février 2018, lui est postérieure de près d'un an et n'est donc pas concernée par cette confirmation.

TILM a donc violé ses obligations contractuelles pour les seules trois dernières ventes ci-dessus peu important s'agissant du caractère indu des remises qui lui ont été accordées, que HPE ait, le cas échéant, connu ces reventes de Myriad.

II - Sur les reventes prétendument réalisées au profit d'un client autre que le client final autorisé

' Sur la revente SAMBRE AVESNOIS IMMOBILIER (SAI) n° 95024307 pour une remise d'un montant de 7 583,52 USD

Il n'est pas contesté que SAI est client final autorisé (pièce intimée 48) et que TILM a revenu à Metenext qui a revendu à Promocil.

Et TILM ne soutient pas utilement que Promocil, en tant que membre du GIE SAI (ses pièces 17-18) est un client final autorisé au sens du contrat, en ce que cette circonstance ne démontre pas qu'elle est une filiale de SAI à au moins 51%, telle que visée à l'article 5.i susvisé définissant le client final autorisé.

Le jugement entrepris retient donc à bon droit que TILM a violé ses obligations contractuelles our cette revente.

' Sur la revente RALLYE n° 94809069 pour une remise d'un montant de 11 415,81 USD

Rallye est le client final autorisé pour cette revente (pièce intimée 49).

Le jugement entrepris retient exactement que TILM a revendu les produits à Dolcevista qui les a revendus à Rallye, ce que TILM, qui fait valoir que Dolcevista n'est qu'un intermédiaire qui a livré les produits à Rallye, au sein du territoire contractuel, ne conteste pas utilement compte tenu des dispositions susvisées des articles 1.c et 5i précités.

Il suffira d'ajouter que les produits ont bien été revendus à Dolcevista, tiers non autorisé et non simplement livrés à Rallye (pièces appelante 20-21).

' Sur la revente CINQ HUITIEMES n°95557925 pour une remise d'un montant de 87 866,48 USD

Le jugement entrepris retient à bon droit, par motifs adoptés, que TILM a revendu les produits à cette société, client final autorisé (pièces intimée 40 et pièce appelante 25)et que HPE ne justifie pas du contraire au vu de son "tableau des détournements de produits" précité.

Il suffira d'ajouter, comme déjà relevé, que la simple revente des produits par le client final autorisé, à la supposer établie, ne suffit pas à établir que TILM savait ou avait de bonnes raisons de croire, au moment de la vente, que les produits allaient être revendus et non servir aux besoins propres du client final autorisé.

' Sur la revente VIEL et COMPAGNIE n° 95778591 pour une remise d'un montant de 9 440,10 USD

Cette société, client final autorisé le 3 mai 2018 (pièce intimée 43) avait pour filiale à plus de 50% au moment de la vente en 2018 la société Bourse Direct (pièces appelante 26-27), à qui TILM a revendu les produits en cause, conformément à la définition précitée du client final éligible, peu important qu'elle n'ait pas mentionné cette filiale dans sa demande de prix spéciaux.

Le jugement entrepris retient donc à bon droit que TILM n'a pas violé ses obligations contractuelles pour cette revente.

' Sur les reventes n° 95211618, n° 95354902 et 95538227 pour des remises d'un montant de 125 702,76 USD, 412 165,24 USD et 14 184,35 USD

Pour ces reventes, le client final autorisé était ESMERTEC (pièces intimée 29-31).

Le jugement entrepris retient exactement que le seul "tableau des détournements de produits" précité ne suffit pas à établir les reventes alléguées des produits, par TILM ou ESMERTEC, à des sociétés tierces.

Il suffira d'ajouter que TILM justifie qu'aucune des sociétés tierces visées ne figurent dans ses livres de compte (sa pièce 15).

' Sur la revente n°95371577 Hilton Hotel pour une remise d'un montant de 39 706,03 USD

HPE se fonde encore sur son seul "tableau des détournements de produits" précité, preuve à soi-même qu'aucun autre élément n'étaye, pour soutenir que TILM n'a pas revendu les produits à cette société, client final autorisé.

Sa demande ne peut donc prospérer, ainsi que l'a retenu le jugement entrepris.

III - Sur le remboursement des remises indument perçues

Vu l'article 8.b conditions générales du programme HPE de prix spécial client final selon lequel HPE est fondée à « demander le remboursement de toute remise avant ou remise arrière client final consentie à tort à titre de prix spécial client final »,

Vu l'article 15.d du contrat de distribution ainsi libellé : « En cas de violation substantielle de vos obligations au titre du présent Contrat, y compris celles découlant des conditions générales de nos programmes, nous nous réservons le droit de : (2) vous demander le remboursement ou l'annulation de toute remise ou de tout paiement au titre d"un programme versé(e) et/ou accumulé(e) au cours de la période du manquement à vos obligations »,

Vu la pièce 56 d'HPE que TILM ne conteste pas,

TILM doit payer à HPE la contre valeur en euros de la somme de 3 492 831,79 USD à la date du présent arrêt, correspondant aux remises indûment perçues ( 278 735,51 + 46 622,16 + 7 583,52 + 2 425 415,97 + 723 058,82 +11 415,81).

A cet égard, la participation éventuelle de HPE à la violation de son réseau est indifférente.

Le jugement entrepris sera donc infirmé de ce chef et TILM condamnée à payer à HPE la contrevaleur en euros de cette somme.

IV - Sur la pénalité forfaitaire

Vu l'article 8.c des conditions générales du programme HPE de prix spécial client final, selon lequel HPE dispose du droit de réclamer « le paiement d'une pénalité forfaitaire de 10% du prix liste HPE moins le montant de la remise accordée à titre de Prix spécial client final sur les produits et/ou support en cause ; cette pénalité sera due dès l"instant où HPE aura connaissance de votre manquement à vos obligations et sera exigible de plein droit sur simple demande de HPE »,

Cette pénalité expressément forfaire est également comminatoire de sorte que le premier juge, par des motifs pertinents que la cour adopte, a requalifié à bon droit, en vertu de l'article 1152 ancien du code civil, cette pénalité en clause pénale qu'il a réduit à la contrevaleur en euros d'un USD, compte tenu :

- de son caractère manifestement excessif au regard des profits indirectement tirés par HPE des ventes ayant donné lieu à des remises indues et en dépit de celles-ci

- et de l'absence de preuve d'un préjudice distinct de celui réparé par le remboursement de ces remises indues.

Il suffira d'ajouter que HPE ne rapporte la preuve d'aucun préjudice comptablement établi.

Le jugement entrepris sera donc confirmé de ce chef.

V - Sur les demandes accessoires

Le jugement entrepris a fait une exacte application de l'article 696 du code de procédure civile et une application équitable de l'article 700 de ce code.

TILM, partie perdante pour l'essentiel, doit supporter les dépens d'appel et l'équité ne commande pas de la condamner à payer une indemnité de procédure.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement entrepris en ses dispositions soumises à la Cour, sauf en ce qu'il condamne la SAS TILM à payer à la SAS HEWLETT-PACKARD FRANCE la contrevaleur en euros de la somme de 5 926 810,66 USD à la date du 6 juillet 2022 ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la SAS TILM à payer à la SAS HEWLETT-PACKARD FRANCE la contrevaleur en euros de la somme de 3 492 831,79 USD à la date du présent arrêt ;

Condamne la SAS TILM aux dépens d'appel et rejette toute autre demande.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 22/14604
Date de la décision : 03/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-03;22.14604 ?
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