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03/07/2024 | FRANCE | N°22/06685

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 5, 03 juillet 2024, 22/06685


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5



ARRET DU 03 JUILLET 2024



(n° /2024, 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/06685 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFSMJ



Décision déférée à la Cour : ordonnance du 17 mars 2022 - tribunal judiciaire de CRETEIL - RG n° 20/04917





APPELANTE



S.A. MAAF ASSURANCES prise en la personne de son repr

ésentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 4]



Représentée par Me Alexis BARBIER de la SELARL BARBIER ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARI...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5

ARRET DU 03 JUILLET 2024

(n° /2024, 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/06685 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFSMJ

Décision déférée à la Cour : ordonnance du 17 mars 2022 - tribunal judiciaire de CRETEIL - RG n° 20/04917

APPELANTE

S.A. MAAF ASSURANCES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Alexis BARBIER de la SELARL BARBIER ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANCAIS société d'assurance mutuelle à cotisations variables, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Anne-Marie MAUPAS OUDINOT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0653

Ayant pour avocat plaidant à l'audience Me Anne PUYBARET, avocate au barreau de VERSAILLES

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 avril 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Ludovic JARIEL, président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Ludovic JARIEL, président de chambre

Mme Vivianne SZLAMOVICZ, conseillère

Mme Florence MARQUES, conseillère

Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre DARJ

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Viviane Szlamovicz, conseillère pour le président empêché et par Manon CARON, greffière, présente lors de la mise à disposition.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

La société Jaurès a fait édifier, afin de le vendre en l'état futur d'achèvement, un ensemble immobilier sis [Adresse 1] à [Localité 6] (94).

Elle a souscrit auprès de la Mutuelle des architectes français (la MAF) une police d'assurance dommages-ouvrage, constructeur non réalisateur et tous risques chantier.

Sont intervenues aux opérations de construction :

- la société JL architecture, en qualité de maître d''uvre, assuré auprès de la MAF,

- la société IMSA pour le lot gros 'uvre, assurée auprès de la société Sagena, devenue SMA (la société SMA) et désormais placée en liquidation judiciaire,

- la société Eurofy pour les lots VMC et plomberie, assurée auprès de la société MAAF assurances (la MAAF) et désormais placée en liquidation judiciaire,

- la société Meusnier pour le lot électricité,

- la société Renovbat pour les lots menuiseries, revêtement de sol et peinture, assurée auprès de la société SMA et désormais placée en liquidation judiciaire,

- la société Mantrand pour le lot menuiseries intérieures,

- la société FM construction pour le lot serrurerie, assurée auprès de la MAAF et désormais placée en liquidation judiciaire,

- la société [J] pour le lot pierres de façade et revêtement de pierre dans le hall, assurée auprès de la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (la SMABTP) et désormais radiée,

- la société EMC pour le lot étanchéité, assurée auprès de la SMABTP et désormais en liquidation judiciaire,

- la société STI aménagement pour le lot cloison, doublage,

- la société Kone pour le lot ascenseur,

- la société Qualiconsult en qualité de contrôleur technique.

Le 9 mars 2010, la réception des parties communes est intervenue avec réserves.

Se plaignant de l'absence de levée des réserves, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 1] à [Localité 6] (le syndicat) a sollicité, en référé, la désignation d'un expert.

Par une ordonnance en date du 21 juin 2010, le juge des référés du tribunal de grande instance de Créteil a désigné M. [E] en qualité d'expert.

Par acte en date du 2 février 2011, la MAF a assigné la MAAF, en qualité d'assureur de la société FM construction et de la société Eurofy, aux fins que lui soient déclarées communes et opposables les opérations d'expertises.

Par une ordonnance en date du 21 mars 2011, le juge des référés du tribunal de grande instance de Créteil a mis hors de cause la MAAF, ès qualités.

Par actes en date des 20, 21, 22 et 23 juin 2011, le syndicat a assigné, en indemnisation de désordres, malfaçons et non-façons, la société Jaurès, la société JL architecture, la MAF, les sociétés STI aménagement, Axa, Qualiconsult, Meusnier, Kone, IMSA, [J] et Mantrand.

Une ordonnance du juge de la mise en état en date du 27 février 2018 a sursis à statuer sur les demandes dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise.

Par actes des 15, 18 et 19 juin et 4 août 2020, la MAF a, en lecture d'une note de synthèse de l'expert en date du 30 avril 2020, assigné en garantie, M. [D], en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Eurofy, la MAAF en qualité d'assureur de la société FM construction et de la société Eurofy, la société Meusnier, la société Qualiconsult, la SMABTP, en sa qualité d'assureur de la société EMC et de M. [J], et la société SMA, en sa qualité d'assureur de la société IMSA et de la société Renovbat.

Le 30 septembre 2020, l'expert a déposé son rapport.

Le 8 janvier 2021, la MAAF a formé un incident portant sur l'irrecevabilité, en raison de l'acquisition de la prescription, de l'appel en garantie de la MAF.

Par ordonnance du 17 mars 2022, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Créteil a statué en ces termes :

Disons recevables les demandes de la MAF à l'encontre de la condamner la MAAF ;

Rejetons la fin de non-recevoir de condamner la MAAF ;

Rejetons la demande de mise hors de cause de la SMA, en qualité d'assureur de la société Renovbat ;

Condamnons la MAAF à payer à la MAF la somme de mille euros (1 000 euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons la MAAF aux dépens de l'incident.

Par déclaration en date du 31 mars 2022, la MAAF a interjeté appel de l'ordonnance, intimant devant la cour la MAF.

EXPOSE DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 17 août 2022, la MAAF demande à la cour de :

Infirmer l'ordonnance déférée en ce qu'elle a :

Dit recevables les demandes de la MAF à l'encontre de la MAAF.

Rejeté la fin de non-recevoir de condamner la MAAF.

Condamné la MAAF à payer à la MAF la somme de mille euros (1 000 euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamné la MAAF aux dépens de l'incident.

Statuant à nouveau

Dire et juger non avenue l'interruption du délai de forclusion de la garantie décennale tirée de l'assignation délivrée par la MAF le 2 février 2011 et ayant donné lieu à l'ordonnance du 21 mars 2011 en ce qu'elle a prononcé la mise hors de cause de la MAAF

Dire et juger expirée la garantie décennale souscrite par les sociétés FM construction et Eurofy auprès de la MAAF

Dire et juger prescrite l'action diligentée par la MAF à l'encontre de la société MAAF

En conséquence

Juger irrecevables l'ensemble des demandes formulées à son encontre

Débouter la MAF de l'intégralité de ses demandes telles que dirigées à l'encontre de la MAAF

Condamner la société MAF d'avoir à payer à la société MAAF la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 21 juillet 2022, la MAF demande à la cour de :

Statuant sur l'appel interjeté par la MAAF à l'encontre d'une ordonnance du 17 mars 2022,

Le dire recevable mais mal fondé ;

En conséquence,

Confirmer la décision dont appel en toutes ses dispositions ;

Juger qu'une citation en justice interrompt le délai de prescription ;

Juger que la MAF a fait délivrer à la MAAF une assignation en février 2011 ;

Juger que le délai de prescription a été donc prolongé jusqu'en février 2021 ;

Juger que la MAF a bien fait délivrer une citation à la MAAF à l'intérieur de ce délai.

A tout le moins,

Juger que les demandes de la MAF ne peuvent être considérées comme ayant été définitivement rejetées dès lors que ses demandes au fond à l'encontre de la MAAF n'ont pas encore été examinées.

En conséquence,

Dire recevable la demande formée par la MAF à l'encontre de la MAAF ;

Débouter cette dernière de sa demande, tendant à voir constater l'irrecevabilité des demandes formées par la concluante.

Condamner la MAAF à verser à la MAF 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, avec le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 26 mars 2024 et l'affaire a été appelée à l'audience du 24 avril 2024, à l'issue de laquelle elle a été mise en délibéré.

MOTIVATION

Sur la recevabilité de l'appel en garantie de la MAAF

Moyens des parties

La MAAF soutient que l'action de la MAF est prescrite pour avoir été initiée plus de dix années après la réception de l'ouvrage soit le 15 avril 2009, ou, à tout le moins, le 9 mars 2010.

Elle souligne que l'effet interruptif de l'assignation à elle délivrée le 2 février 2011 a été rendu non avenu par l'ordonnance du 21 mars de la même année la mettant hors de cause, devenue définitive faute d'appel ; l'article 2243 du code civil ne distinguant pas selon que le rejet de la demande a été prononcé au fond ou en référé.

En réponse, la MAF fait valoir que l'assignation aux fins d'ordonnance commune a produit son effet interruptif et qu'il ne saurait être considéré que celui-ci aurait été rendu non avenu par l'ordonnance mettant hors de cause la MAAF dès lors que, n'ayant pas statué au fond sur les responsabilités encourues, elle n'a pas définitivement rejeté ses prétentions à l'encontre de celle-ci.

Réponse de la cour

Aux termes de l'article 1792-4-1 du code civil, toute personne physique ou morale dont la responsabilité peut être engagée en vertu des articles 1792 à 1792-4 du présent code est déchargée des responsabilités et garanties pesant sur elle, en application des articles 1792 à 1792-2, après dix ans à compter de la réception des travaux ou, en application de l'article 1792-3, à l'expiration du délai visé à cet article.

Aux termes du premier alinéa de l'article 2241 du même code, la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion.

Aux termes de l'article 2243 de ce code, l'interruption est non avenue si le demandeur se désiste de sa demande ou laisse périmer l'instance, ou si sa demande est définitivement rejetée.

Il est établi que la désignation d'un expert n'a pu avoir d'effet interruptif de prescription à l'égard de l'assureur mis hors de cause par le juge des référés (1re Civ., 9 juillet 2003, pourvoi n° 01-02.581, Bulletin civil 2003, I, n° 165).

Au cas d'espèce, statuant sur le fond du référé introduit devant lui, le juge des référés, ayant retenu que les garanties de la MAAF ne pouvaient s'appliquer, l'a mise hors de cause par son ordonnance rendue le 21 mars 2011.

Cette ordonnance est, faute d'appel, devenue définitive.

Par suite, elle a rendu non avenu l'effet interruptif de l'assignation aux fins d'ordonnance commune délivrée le 2 février 2011.

Il s'en infère que la réception étant intervenue au plus tard le 9 mars 2010, l'assignation délivrée le 15 juin 2020 à la MAAF l'a été, au-delà du délai décennal, de sorte que l'action en garantie de la MAF est prescrite et, par suite, irrecevable.

L'ordonnance sera infirmée de ce chef.

Sur les frais du procès

Le sens de l'arrêt conduit à infirmer l'ordonnance sur la condamnation aux dépens et sur celle au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En cause d'appel, la MAF, partie succombante, sera condamnée aux dépens et à payer à la MAAF la somme de 3 000 euros, au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme l'ordonnance en en ses dispositions soumises à la cour,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare irrecevables les demandes présentées par la Mutuelle des architectes français à l'encontre de la société MAAF assurances, en qualité d'assureur de la société FM construction et de la société Eurofy ;

Condamne la Mutuelle des architectes français aux dépens de première instance et d'appel ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la Mutuelle des architectes français et la condamne à payer à la société MAAF assurances la somme de 3 000 euros.

La greffière La conseillère pour le président empêché,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 22/06685
Date de la décision : 03/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-03;22.06685 ?
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