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03/07/2024 | FRANCE | N°21/07926

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 03 juillet 2024, 21/07926


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS









COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRET DU 03 JUILLET 2024



(n° 2024/ , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/07926 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CELZF



Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Juillet 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 20/07058



APPELANTE



Madame [A] [N]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Jouba WALKADI, avocat au barreau de PARIS, toque : A265



INTIME



Monsieur [E] [J]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Catherine SCHLEEF, avoca...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRET DU 03 JUILLET 2024

(n° 2024/ , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/07926 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CELZF

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Juillet 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 20/07058

APPELANTE

Madame [A] [N]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Jouba WALKADI, avocat au barreau de PARIS, toque : A265

INTIME

Monsieur [E] [J]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Catherine SCHLEEF, avocat au barreau de PARIS, toque : C1909

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Avril 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Nelly CHRETIENNOT, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Stéphane MEYER, président

Fabrice MORILLO, conseillère

Nelly CHRETIENNOT, conseiller

Greffier, lors des débats : Monsieur Jadot TAMBUE

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Stéphane MEYER, président de chambre et par Monsieur Jadot TAMBUE, greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Madame [A] [N] divorcée [S] a été embauchée aux termes d'un contrat de travail à durée indéterminée en date du 6 juin 2016, en qualité de serveuse par Monsieur [B] [X].

Le 15 octobre 2017, Monsieur [E] [J] a repris l'entreprise de bar-tabac et conservé l'emploi de celle-ci.

Le 1er juillet 2020, Monsieur [J] a notifié un avertissement à la salariée en raison de son comportement verbal agressif à son égard et à celui d'un autre salarié.

La salariée a été placée en arrêt de travail de façon quasi-continue entre le 17 septembre 2020 et le 21 janvier 2021.

Madame [N] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 1er octobre 2020, aux fins qu'il prononce l'annulation de l'avertissement du 1er juillet 2020, la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur, et qu'il condamne l'employeur à diverses sommes relativement à l'exécution de son contrat de travail.

Madame [N] a été convoquée le 23 décembre 2020 à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 8 janvier 2021.

Par courrier du 18 janvier 2021, elle s'est vue notifier son licenciement pour faute grave.

Par jugement du 29 juillet 2021, le conseil de prud'hommes de Paris l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes et a débouté Monsieur [J] de ses demandes de nullité de la requête introductive d'instance et d'irrecevabilité des prétentions nouvelles.

Madame [N] a régulièrement interjeté appel de ce jugement par déclaration du 22 septembre 2021, en visant expressément les dispositions critiquées.

Par écritures récapitulatives notifiées électroniquement le 26 mars 2024, Madame [N] demande à la cour de :

Infirmer le jugement, sauf en ce qu'il a débouté Monsieur [J] :

- de sa demande de nullité de la requête introductive d'instance,

- de sa demande d'irrecevabilité des prétentions nouvelles,

Statuant à nouveau,

- Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame [N] aux torts de Monsieur [J] à la date du licenciement, et subsidiairement, dire et juger le licenciement de Madame [N] nul et abusif,

- Condamner Monsieur [J] au paiement des sommes suivantes :

- 7.860 € à titre de dommages et intérêts pour rupture nulle et abusive du contrat de travail,

- 3.144 € au titre du préavis, outre 314 € à titre de congés payés y afférents,

- 1.670 € à titre d'indemnité de licenciement,

- 32.205 € à titre de rappels d'heures supplémentaires, outre 3.220 € à titre de congés payés y afférents,

- 9.432 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

- 3.000 € à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

- 1.000 € au titre de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat,

- 3.500 € au titre des frais de première instance et d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Annuler l'avertissement du 1er juillet 2020,

- Débouter Monsieur [J] de ses demandes,

- Dire que les sommes allouées porteront intérêt au taux légal,

- Condamner Monsieur [J] aux entiers dépens.

Par écritures récapitulatives notifiées électroniquement le 31 mars 2024, Monsieur [J] demande à la cour de confirmer le jugement entrepris et en conséquence :

- Débouter Madame [N] de l'ensemble de ses chefs de demande,

- Condamner Madame [N] au paiement de la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 2 avril 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions.

MOTIFS

Sur la demande de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires

Aux termes de l'article L. 3243-3 du code du travail, l'acceptation sans protestation ni réserve d'un bulletin de paie par le travailleur ne peut valoir de sa part renonciation au paiement de tout ou partie du salaire et des indemnités ou accessoires de salaire qui lui sont dus en application de la loi, du règlement, d'une convention ou d'un accord collectif de travail ou d'un contrat.

Aux termes de l'article L. 3171-4 du même code, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Il appartient donc au salarié de présenter, au préalable, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies, afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement, en produisant ses propres éléments.

Le salarié peut prétendre au paiement des heures supplémentaires accomplies, soit avec l'accord de l'employeur, soit s'il est établi que la réalisation de telles heures a été rendue nécessaire par les tâches qui lui ont été confiées.

Par ailleurs, l'article 6 de la convention collective applicable impose la mise en place de modalités quotidiennes, hebdomadaires et mensuelles de contrôle de la durée du travail.

En l'espèce, Madame [N] expose qu'au lieu des 35 heures hebdomadaires prévues dans son contrat de travail et pour lesquelles elle était payée, elle effectuait 53 heures par semaine non rémunérées au regard de ses horaires qui étaient selon elle les suivants : du lundi au samedi de 8h à 12h puis de 12h10 à 17h00.

Sur cette base, la salariée établit un décompte d'heures et chiffre le montant dû au titre des heures supplémentaires réalisées à 32.205 €, outre 322,05 € de congés payés afférents.

Elle produit à l'appui de ses dires quatre attestations de clients ou voisins du bar-tabac (Messieurs [W], [H] , [T] et [G]) qui exposent avoir observé que la salariée était présente tôt le matin, dès 8h15, à l'heure du repas, ainsi qu'en fin d'après-midi.

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l'employeur de les contester utilement et le chiffre allégué est exact sur le plan arithmétique.

Pour contester les allégations de la salariée, Monsieur [J] fait valoir que les horaires avancés par Madame [N] sont inexacts, et qu'il lui communiquait régulièrement ses plannings sur la base de 35 heures par semaine. Cependant, il ne verse aux débats que trois plannings hebdomadaires du 31 août au 19 septembre 2020. Si ceux-ci sont effectivement signés par les salariés, et mentionnent une pause repas de deux heures, ils ne peuvent à eux seuls suffire à contredire les allégations étayées de celle-ci pour l'ensemble de la période concernée, en l'absence de décompte horaire réalisé par l'employeur conformément aux dispositions de la convention collective.

L'employeur produit également neuf attestations de clients (Messieurs [O], [K], [M], [U], [L], [R], [V], [F] et Madame [P]) faisant état des horaires auxquels ils voyaient Madame [N] travailler dans l'établissement. Il ressort de l'ensemble de leurs témoignages que celle-ci était, contrairement à ce qu'elle affirme, en pause à l'heure du déjeuner.

En considération de ces éléments et de l'absence de la mise en place par l'employeur de modalités de contrôle de la durée du travail de la salariée, il y a lieu de retenir que celle-ci a réalisé des heures supplémentaires non rémunérées, mais dans un quantum moindre que celui qu'elle allègue, puisqu'il est établi par les attestations produites qu'elle bénéficiait d'une pause déjeuner, contrairement à ce qu'elle soutient.

Au regard des éléments produits, il sera retenu que Madame [N] a réalisé des heures supplémentaires qui auraient dû lui être rémunérées à hauteur de 10.000 €, outre 1.000 € de congés payés afférents.

En conséquence, il convient d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes à ce titre, et statuant de nouveau, de condamner l'employeur à lui verser ces sommes.

Sur la demande d'indemnité pour travail dissimulé

Il résulte des dispositions des articles L. 8221-5 et L. 8223-1 du code du travail, que le fait, pour l'employeur, de mentionner intentionnellement sur le bulletin de paie du salarié un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli est réputé travail dissimulé et ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaires.

En l'espèce, il résulte des développements qui précèdent que les bulletins de paie de Madame [N] mentionnent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli et que l'employeur ne pouvait l'ignorer ce fait.

Toutefois, le caractère intentionnel de la dissimulation n'est pas établi.

En conséquence, il y a lieu de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté l'intéressée de la demande d'indemnisation formulée à ce titre.

Sur la demande d'annulation de l'avertissement du 1er juillet 2020

Il résulte des dispositions de l'article L. 1333-1 du code du travail qu'en cas de litige relatif à une sanction disciplinaire, la juridiction saisie apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction, que l'employeur fournit les éléments retenus pour prendre la sanction et qu'au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, la juridiction forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'elle estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

Aux termes de l'article L. 1333-2 du même code, la juridiction peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.

Le 1er juillet 2020, Monsieur [J] a notifié un avertissement à la salariée en raison de son comportement verbal agressif à son égard et à celui d'un autre salarié.

Madame [N] en sollicite l'annulation, contestant les faits.

Il ressort toutefois de deux attestations produites par Monsieur [J] que la salariée avait un comportement inadapté avec son employeur et ses collègues :

- Monsieur [M] : " Elle se prend pour la patronne je la voyais souvent hausser le ton fréquemment sur des clients ainsi que sur ses patrons. " ;

- Madame [P] : " Je l'ai entendu, à maintes reprises, hausser la voix et crier sur son patron et ces collègues avec ténacité. "

Ces pièces confirment les griefs reprochés à Madame [N] dans le cadre de l'avertissement notifié, qui apparaît fondé et proportionné au regard des faits.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande d'annulation de l'avertissement.

Sur la demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral

Aux termes de l'article L. 4121-1 du code du travail, l'employeur a l'obligation de protéger la santé physique et mentale de ses salariés.

Aux termes de l'article L. 1152-4 du même code, l'employeur prend toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements de harcèlement moral.

Aux termes de l'article L. 1152-1 du même code, aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Conformément aux dispositions de l'article L. 1154-1 du même code, dans sa rédaction alors applicable au litige, il appartient au salarié de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement et au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces faits ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il juge utiles.

En l'espèce, Madame [N] fait valoir que dès qu'elle a commencé à réclamer le paiement de ses heures supplémentaires, elle n'a cessé d'être victime de pressions et d'un avertissement injustifié de son employeur notifié le 1er juillet 2020 pour des motifs fallacieux. Elle indique que suite à ces pressions, elle a dû être arrêtée de façon discontinue depuis le 17 septembre 2020 compte tenu de son état psychologique dégradé.

Il ressort des pièces produites que Madame [N] a émis des réclamations relativement à des heures supplémentaires impayées par courrier du 9 juillet 2020, dont le règlement lui a été refusé par son employeur ainsi que formalisé dans un courrier du 24 juillet 2020.

L'avertissement dont elle s'estime victime date du 1er juillet 2020, soit antérieurement à sa revendication du 9 juillet, et ainsi que précédemment jugé, les griefs qui le motivent sont justifiés. Il ne peut donc pas s'agir d'un élément constitutif de harcèlement moral.

S'agissant des pressions évoqués, Madame [N] ne présente aucun élément de fait laissant supposer qu'elles existeraient.

S'agissant des arrêts de travail qui seraient intervenus en conséquence d'un état psychologique dégradé, aucun des arrêts de travail produit ne mentionne le motif de l'arrêt, et aucune pièce médicale ou attestation n'évoque de difficulté psychologique.

Il ressort de ce qui précède que Madame [N] ne présente aucun élément de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral.

En conséquence, il convient de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté la salariée de sa demande d'indemnisation à ce titre.

Sur la demande au titre de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat

La salariée fait valoir qu'en 2020, l'employeur s'était engagé à lui verser la somme de 1.000 € au titre de la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat, et que cet engagement n'a pas été respecté.

Pour démontrer l'existence d'un engagement de son employeur à lui verser cette prime, la salariée produit un échange de SMS duquel il résulte que ce versement avait été envisagé mais qu'elle avait exprimé le souhait de ne pas en bénéficier afin de ne pas augmenter ses revenus en considération de sa procédure de divorce en cours. Par ailleurs, il ressort de l'attestation de l'expert-comptable produite par l'employeur qu'aucun salarié de l'entreprise n'a perçu cette prime.

En considération de ces éléments, il n'est pas démontré l'engagement pris par Monsieur [J] de verser une prime à Madame [N].

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté cette dernière de sa demande à ce titre.

Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame [N]

Il résulte des dispositions des articles 1224 et 1228 du code civil qu'un contrat de travail peut être résilié aux torts de l'employeur en cas de manquement suffisamment grave de sa part à ses obligations contractuelles.

La résiliation judiciaire prononcée aux torts de l'employeur produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le contrat est rompu au jour du prononcé de la décision judiciaire de résiliation.

Si, au cours de la procédure de résiliation judiciaire, l'employeur licencie le salarié, le juge devra examiner d'abord si la demande de résiliation était fondée. Si elle est reconnue fondée, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, mais la rupture est réputée intervenue au jour de la notification du licenciement.

Madame [N] expose solliciter la résiliation judiciaire de son contrat de travail compte tenu de manquements graves de l'employeur, à savoir : le défaut de paiement des heures supplémentaires, le travail dissimulé et le harcèlement moral subi. Au regard du harcèlement moral, elle considère que la résiliation doit produire les effets d'un licenciement nul.

Ainsi que précédemment jugé, Madame [N] n'a pas été victime de harcèlement moral.

En revanche, il est établi que la salariée a effectué de nombreuses heures supplémentaires durant sa période d'emploi, le présent arrêt condamnant l'employeur à ce titre à hauteur de 10.000 €, outre 1.000 € de congés payés afférents.

Lorsqu'elle en a sollicité le paiement à son employeur par courrier du 9 juillet 2020, celui-ci lui a opposé un refus par courrier du 24 juillet 2020, alors que le paiement du salaire, contrepartie du travail réalisé, est un droit essentiel du salarié.

Le défaut de paiement des heures supplémentaires justifie résiliation judiciaire du contrat.

En conséquence, il convient :

- de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande de résiliation valant licenciement nul, en l'absence de harcèlement moral,

- d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande de résiliation valant licenciement sans cause réelle et sérieuse, et statuant de nouveau, de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de Madame [N] aux torts de Monsieur [J], et de dire que la rupture est réputée intervenue au jour de la notification du licenciement soit le 18 janvier 2021.

Sur les conséquences de la résiliation aux torts de l'employeur

Madame [N] justifie de 4 ans et demi d'ancienneté et l'entreprise emploie habituellement moins de 11 salariés.

En dernier lieu, elle percevait un salaire mensuel brut de 1.572 €.

A la date de la rupture, Madame [N] avait plus de deux années d'ancienneté et est donc fondée à percevoir une indemnité compensatrice de préavis égale à deux mois de salaire sur le fondement des articles L. 1234-1 et L. 1234-5 du code du travail, soit la somme de 3.144 €, ainsi que l'indemnité de congés payés afférente, soit 314,40 €.

Madame [N] est également fondée à percevoir une indemnité de licenciement sur le fondement des dispositions des articles L. 1234-9 et R. 1234-2 du code du travail, à hauteur de sa demande, soit 1.670 €.

En application des dispositions de l'article L.1235-3 du code du travail, elle est fondée à obtenir une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse égale à une somme comprise entre 3 et 5 mois de salaire, soit entre 4.716 € et 7.860 €.

Au moment de la rupture, elle était âgée de 60 ans et elle justifie de sa situation de demandeur d'emploi jusqu'en mars 2024.

Au vu de cette situation, et de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle, il convient d'évaluer son préjudice à 7.000 €.

En conséquence, il convient d'infirmer la décision déférée sur ces points, et statuant de nouveau, de condamner l'employeur à lui verser ces sommes.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Il y a lieu d'infirmer la décision du conseil de prud'hommes sur ces points, et statuant de nouveau, de condamner Monsieur [J] aux dépens tant de la première instance que de l'appel, ainsi qu'à verser à Madame [N] la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [J] sera débouté de sa demande au titre des frais de procédure.

Sur les intérêts

Il convient de dire, conformément aux dispositions de l'article 1231-7 code civil, que les condamnations à caractère indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, que les autres condamnations porteront intérêts au taux légal à compter du 13 janvier 2021, date de convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation, conformément aux dispositions de l'article 1231-6 du même code.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté Madame [N] de ses demandes :

- de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires et congés afférents,

- de résiliation judiciaire du contrat valant licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- d'indemnité de préavis et congés payés afférents,

- d'indemnité de licenciement,

- d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- au titre des frais de procédure et des dépens,

- au titre des intérêts,

Statuant de nouveau,

PRONONCE la résiliation judiciaire du contrat de Madame [N] aux torts de Monsieur [J] avec effet au 18 janvier 2021,

CONDAMNE Monsieur [J] à verser à Madame [N] les sommes suivantes :

-10.000 € de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires, outre 1.000 € de congés payés afférents,

- 7.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 3.144 € au titre du préavis, outre 314 € à titre de congés payés y afférents,

- 1.670 € à titre d'indemnité de licenciement,

- 2.500 € au titre des frais de procédure de première instance et d'appel,

CONDAMNE Monsieur [J] aux dépens des procédures de première instance et d'appel,

DIT que les condamnations à caractère indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, et que les autres condamnations porteront intérêts au taux légal à compter du 13 janvier 2021.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 21/07926
Date de la décision : 03/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-03;21.07926 ?
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