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02/07/2024 | FRANCE | N°23/10074

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 9, 02 juillet 2024, 23/10074


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 9



ARRET DU 02 JUILLET 2024



(n° /2024, 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 23/10074 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CHXXN



sur renvoi après cassation, par arrêt de la chambre commeciale, financière et économique de la Cour de Cassation rendu le 04 janvier 2023 (pourvoi n°J20-18.051), d'un arrêt du pôle 5 chambre 8 de la Cour d'appel de PARIS rendu le 26 mai 2020 (RG n°18/14

799) rendu sur appel d'un jugement du Tribunal de commerce de PARIS - 16ème chambre - du 13 avril 2018 (RG n°J2018000207)





DEMANDERESSES À LA SAISIN...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 9

ARRET DU 02 JUILLET 2024

(n° /2024, 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 23/10074 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CHXXN

sur renvoi après cassation, par arrêt de la chambre commeciale, financière et économique de la Cour de Cassation rendu le 04 janvier 2023 (pourvoi n°J20-18.051), d'un arrêt du pôle 5 chambre 8 de la Cour d'appel de PARIS rendu le 26 mai 2020 (RG n°18/14799) rendu sur appel d'un jugement du Tribunal de commerce de PARIS - 16ème chambre - du 13 avril 2018 (RG n°J2018000207)

DEMANDERESSES À LA SAISINE

S.A. ASAPPRO

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Audrey SCHWAB de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Assistée de Me Anne-Sophie LIGETI de la SELARL SEGIF - d'ASTORG FROVO & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L022

S.A.S. MAGELLAN CONSULTING

Société au capital de 100 000 euros

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 508 426 574

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Audrey SCHWAB de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Assistée de Me Anne-Sophie LIGETI de la SELARL SEGIF - d'ASTORG FROVO & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L022

DÉFENDEURS À LA SAISINE

Monsieur [E] [K]

Né le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 8] (91)

De nationalité française

Demeurant [Adresse 2]

[Localité 7]

Représenté par Me Antoine LAMBERT de la SELARL LYVEAS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque B1036

Assisté de Me Antoine DE LA FERTE de la SELARL LYVEAS AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : 283

FINANCIERE ASAPPRO

Société civile au capital de 7 200 euros

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro SIREN 533 173 589

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 4]

[Localité 5]

Domiciliée chez la société SCS FINANCIERE

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentée par Me Antoine LAMBERT de la SELARL LYVEAS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque B1036

Assistée de Me Antoine DE LA FERTE de la SELARL LYVEAS AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : 283

S.A.R.L. SCS FINANCIERE

Société au capital de 70 000 euros

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de VERSAILLES sous le numéro SIREN 498 283 860

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentée par Me Antoine LAMBERT de la SELARL LYVEAS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque B1036

Assistée de Me Antoine DE LA FERTE de la SELARL LYVEAS AVOCATS, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : 283

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 30 Mai 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Sophie MOLLAT-FABIANI, Présidente de chambre,

Mme Alexandra PELIER-TETREAU, Conseillère

Mme Isabelle ROHART, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles,

qui en ont délibéré.

Un rapport a été présenté à l'audience par Sophie MOLLAT-FABIANI, Présidente de chambre, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Karine ABELKALON

ARRET :

Contradictoire

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

signé par Sophie MOLLAT-FABIANI Présidente de chambre et par Damien GOVINDARETTY, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

La société Magellan consulting est une société, par actions simplifiée ayant pour activité le conseil en stratégie. en organisation et en systèmes d'information.

La société Asappro est une société anonyme également spécialisée dans ce domaine dont le président-directeur général était M. [E] [K]. Elle avait pour actionnaires la société SCS Financière, dont le gérant est M. [K], détentrice de 1.082 actions, M. [I] [P], détenteur de 713 actions, et dix autres actionnaires, dont la société Financière Asappro, détenant chacun une action.

Aux termes d'un contrat de cession sous conditions suspensives en date du 30 mars 2015, la société Magellan consulting a acquis l.628 actions de Ia société Asappro sur les 1808 existantes, les cédants étant la société SCS Financière, M. [P] et les dix petits actionnaires dont M. [K] se portait fort de la cession de ieurs titres.

Le contrat prévoyait la démission de M. [K] de ses fonctions de président-directeur général de la société Asappro, ce qui fut acté par l'assemblée générale et le conseil d'administration de la société, M. [O] le remplaçant à ses fonctions et M. [K] demeurant administrateur, et un engagement de collaboration de M. [K] avec la société Asappro, par le biais de sa société SCS Financière nommée comme directrice générale, sanctionné, notamment en cas de cessation de la collaboration entre la société SCS Financière et la société Asappro, par la perte de la rémunération variable en cours, l'obligation de céder la totalité des actions encore détenues au capital de la société Asappro moyennant un prix d'un euro par action et une clause pénale d'un montant de 200.000 euros si l'événement à l'origine de la cessation de la collaboration intervenait dans les douze mois suivant la date de la réalisation.

Par courriel du 7.01.2016, M. [K] a informé M. [O] d'un arrêt de travail jusqu'au 6.03.2016 puis, à cette date, de la prolongation de celui-ci jusqu'au 3.05.2016.

Par courrier du 7.03.2016, la société Magellan consulting a notifié à M. [K] la mise en oeuvre des sanctions prévues au contrat de cession du 30.03.2015 et 1'a enjoint de s'acquitter de la somme de 200.000 euros au titre de la clause pénale et de retourner deux ordres de virement portant sur les 102 et 1 actions que les sociétés SCS Financière et Financière Asappro restaient détenir.

Le 30.03.2016 la société Magellan consulting a effectué, d'autorité et unilatéralement, le transfert des titres.

Le 28.06.2016, l'assemblée générale de la société Asappro a révoqué M. [K] de ses fonctions d'administrateur.

Par acte du 12.08.2016, la société Magellan consulting a assigné M. [K] et la société SCS financière devant le tribunal de commerce de Paris en paiement de la clause pénale et de dommages-intérêts. La société Financière Asappro est intervenue volontairement et la société Asappro a été assignée en intervention forcée. Reconventionnellement, M. [K] a soulevé le caractère vexatoire et abusif de sa révocation et les sociétés SCS financière et Financière Asappro ont contesté la régularité du transfert de leurs actions à la société Magellan consulting.

Par jugement en date du 13.04.2018, le tribunal de commerce de Paris a :

- dit les demandes de la société Financière Asappro et son intervention volontaire recevables ;

- dit l'intervention forcée de la société Asappro recevable ;

- joint les causes enregistrées sous les numéros RG 20160524720 et 2016069034 ;

- condamné in solidum M. [K] et la société SCS Financière à payer à la société Magellan consulting la somme d'un euro en application de la clause pénale prévue au contrat de cession du 30.03.2015 ;

- dit valable la cession forcée des titres 'détenus par M. [K]' au prix d'un euro par titre et régulière l'inscription de ses titres dans le registre des mouvements de titres de la société Asappro au profit de la société Magellan consulting ;

- dit la cession de l'action détenue par la société Financière Asappro régulière et l'a déboutée de sa demande d'indemnisation à ce titre ;

- condamné la société Magellan consulting à verser à M. [K] la somme de 10.000 euros en réparation de son préjudice moral, déboutant du surplus ;

- condamné la société Magellan consulting et la société Asappro in solidum à verser à M. [K] la somme de 10.000 euros, déboutant du surplus, au titre de sa révocation vexatoire ;

- rejeté les demandes des parties autres, plus amples ou contraires ;

- dit qu'il n'y a lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné M. [K], la société SCS Financière et la société Financière Asappro aux dépens.

Les sociétés Magellan consulting et Asappro ont interjeté appel de ce jugement suivant déclaration d'appel du 11.06.2018, la procédure portant le numéro RG 18/14982.

M. [K] et les sociétés SCS Financière et Financière Asappro ont également interjeté appel de ce jugement suivant déclaration d'appel du 19.06.2018, la procédure portant le numéro RG 18/14799.

Suivant ordonnance du 18.09.2018, la jonction des deux procédures sous le numéro RG 18/14799 a été ordonnée.

Par arrêt en date du 26.05.2020 la cour a:

Confirmé le jugement déféré en ce qu'il a :

- dit les demandes de la société Financière Asappro et son intervention volontaire recevables,

- dit l'intervention forcée de la société Asappro recevable,

- joint les causes enregistrées sous le numéros RG 20160524720 et 2016069034,

- dit valable la cession forcée des titres 'détenus par M. [K]' au prix d'un euro par titre et régulière l'inscription de ses titres dans le registre des mouvements de titres de la société Asappro au profit de la société Magellan consulting, sauf à rectifier que cette cession porte sur les 102 titres détenus par la société SCS Financière,

- débouté la société SCS Financière de sa demande de dommages et intérêts ;

- dit la cession de l'action détenue par la société Financière Asappro régulière et l'a déboutée de sa demande d'indemnisation à ce titre,

- débouté la société Magellan consulting de sa demande de dommages et intérêts ;

- dit n'y avoir lieu de faire application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné M. [E] [K], la société SCS Financière et la société Financière Asappro aux dépens ;

Infirmé pour le surplus ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Condamné in solidum M. [K] et la société SCS Financière à payer à la société Magellan Consulting la somme de 200.000 euros au titre de la clause pénale ;

Débouté M. [E] [K] de sa demande de dommages et intérêts au titre de sa révocation;

Débouté M. [E] [K] de sa demande de dommages et intérêts au titre d'un préjudice moral;

Y ajoutant,

Condamné in solidum M. [E] [K] et la société SCS Financière à payer à la société Magellan consulting et à la société Asappro la somme de 3.000 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; .

Condamné in solidum M. [E] [K], la société SCS Financiere et la société Financière Asappro aux dépens d'appel ;

Par arrêt du 4.01.2023 la Cour de cassation a cassé partiellement l'arrêt rendu en ce qu'il condamne in solidum M. [K] et la société SCS Financière à payer à la société Magellan Consulting la somme de 200 000 euros au titre de la clause pénale aux motifs que:

Vu l'article 1230 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 :

10. Aux termes de ce texte, soit que l'obligation primitive contienne, soit qu'elle ne contienne pas un terme dans lequel elle doive être accomplie, la peine n'est encourue que lorsque celui qui s'est obligé soit à livrer, soit à prendre, soit à faire, est en demeure.

11. Pour condamner in solidum M. [K] et la société SCS Financière à payer à la société Magellan Consulting la somme de 200 000 euros au titre de la clause pénale, l'arrêt retient que la société SCS Financière ayant cessé de rendre les prestations qu'elle devait, et ce, dans les douze mois de la date de la cession, la clause pénale était acquise au jour où la société

Magellan Consulting avait mis M. [K] en demeure de devoir s'en acquitter.

12. En se déterminant ainsi, sans constater, ainsi qu'il lui incombait, que la société Magellan Consulting avait mis la société SCS Financière en demeure d'exécuter son obligation de collaborer avec la société Asappro ou que,l'inexécution étant définitive, elle était dispensée de toute mise en demeure, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

La société Magellan Consulting et la société ASAPPRO ont saisi la cour de renvoi par déclaration du 1.06.2023.

Aux termes de leurs conclusions signifiées par voie électronique le 26.04.2024, elles demandent à la cour de:

- Déclarer recevables et bien fondées les sociétés Magellan Consulting et Asappro en leur appel.

Y faisant droit :

- Infirmer le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 13 avril 2018 en ce qu'il a :

o Condamné in solidum Monsieur [E] [K] et la société SCS Financière à payer à la société Magellan Consulting la somme de 1 euro en application de la clause pénale prévue au contrat de cession du 30 mars 2015.

Et statuant à nouveau :

- Condamner in solidum Monsieur [E] [K] et la société SCS Financière à payer à la société Magellan Consulting la somme de 200.000 euros en application de la clause pénale prévue au contrat de cession du 30 mars 2015.

En tout état de cause :

- Condamner in solidum Monsieur [E] [K], et la société SCS Financière à payer à la société Magellan Consulting la somme de 15.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

- Condamner in solidum Monsieur [E] [K], la société SCS Financière à payer à la société Asappro la somme de 15.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

- Condamner in solidum Monsieur [E] [K], et la société SCS Financière aux entiers dépens d'instance dont le recouvrement sera poursuivi par la SELARL 2H Avocats, en la personne de Maître Schwab, en application des dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

Aux termes de leurs conclusions signifiées par voie électronique le 26.03.2024, la société SCS Financière, Monsieur [E] [K], et la société Financière Asappro demandent à la cour de:

Vu l'arrêt de la Cour de cassation en date du 4 janvier 2023,

Vu les articles 1147, 1148, 1152, 1226, 1228 et 1230 du code civil dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016,

Vu les articles L. 341-1, L. 341-4, R. 341-2 et R. 341-5 du code de la sécurité sociale

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

Vu le contrat de cession du 30 mars 2015,

Vu les pièces versées aux débats,

- Déclarer la SARL SCS Financière, Monsieur [E] [K] et la société civile Financière Asappro bien fondés en leurs demandes et les recevoir ;

A titre principal :

- Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris en date du 13 avril 2018

en ce qu'il a :

Condamné in solidum Monsieur [E] [K] et la société SCS Financière à payer à la société Magellan Consulting la somme de 1 euro en application de la clause pénale prévue au contrat de cession du 30 mars 2015

Statuant à nouveau :

- Juger n'y avoir lieu à application de la clause pénale prévue à l'acte de cession en l'absence de

mandat de direction générale confié à Monsieur [E] [K],

- Juger n'y avoir lieu à application de la clause pénale prévue à l'acte de cession en présence

d'une incapacité de travail de Monsieur [E] [K] reconnue par la sécurité sociale,

démontrant la reconnaissance d'une incapacité physique au travail d'au moins 66% et indemnisée à hauteur de 50%,

- Juger irrecevable toute demande fondée sur la clause pénale prévue à l'acte de cession en l'absence de mise en demeure préalable obligatoire de reprendre l'accompagnement prévu à l'acte de cession,

- Débouter la SAS Magellan Consulting et la S.A. J2C sous le nom commercial Journey To Cloud, anciennement dénommée la S.A. Asappro, de leur demande de condamnation au titre de la clause pénale,

A titre subsidiaire :

- Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris en date du 13 avril 2018

en ce qu'il a :

Condamné in solidum Monsieur [E] [K] et la société SCS Financière à payer à la société Magellan Consulting la somme de 1 euro en application de la clause pénale prévue au contrat de cession du 30 mars 2015

Statuant à nouveau :

- Juger n'y avoir lieu à application de la clause pénale prévue à l'acte de cession pour cause de force majeure,

- Débouter la SAS Magellan Consulting et la S.A. J2C sous le nom commercial Journey To Cloud, anciennement dénommée la S.A. Asappro, de leur demande de condamnation au titre de la clause pénale,

A titre infiniment subsidiaire :

- Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris en date du 13 avril 2018 en ce qu'il a :

Condamné in solidum Monsieur [E] [K] et la société SCS Financière à payer à la société Magellan Consulting la somme de 1 euro en application de la clause pénale prévue au contrat de cession du 30 mars 2015

- Débouter la SAS Magellan Consulting et la S.A. J2C sous le nom commercial Journey To Cloud, anciennement dénommée la S.A. Asappro, de leur demande de condamnation au paiement de 200 000 euros au titre de clause pénale,

En tout état de cause :

- Débouter la SAS Magellan Consulting et la S.A. J2C sous le nom commercial Journey To Cloud, anciennement dénommée la S.A. Asappro, de l'ensemble de leurs moyens, demandes, fins et conclusions,

- Condamner in solidum SAS Magellan Consulting et la S.A. J2C sous le nom commercial Journey To Cloud, anciennement dénommée la S.A. Asappro au paiement de la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

MOTIFS DE LA DECISION

Les appelantes exposent qu'il était prévu dans le contrat des sanctions en cas de défaillance de Monsieur [K] dans l'exécution des obligations mises à sa charge, que l'une des sanctions était la cession des titres pour un montant de 1 euro et l'autre sanction le versement d'une somme à titre de clause pénale, que la Cour de cassation n'a pas remis en cause l'application de la première sanction et a ainsi validé la mise en oeuvre de celle-ci et donc, nécessairement, que la prestation de la SCS FINANCIERE n'était plus rendue par cette dernière, de manière définitive au jour de la mise en demeure que lui a adressée la société Magellan Consulting, le 7.03. 2016, justifiant ainsi la mise en 'uvre de la clause et l'obligation de ce dernier de céder la totalité de ses actions.

Elles en concluent que par conséquent, la cour d'appel de céans devra nécessairement valider l'autre sanction prévue par le contrat de cession en cas d'inexécution des prestations par Monsieur [K] ou sa société, la SCS FINANCIERE, à savoir le paiement de la somme de 200 000 euros au titre de la clause pénale.

Elles soulignent qu'à défaut on se trouverait dans une situation ubuesque et parfaitement contradictoire dans laquelle le principe de l'arrêt des prestations par la société SCS FINANCIERE et la sanction qui en découle relative à la cession de ses actions par Monsieur [K] sont acquis mais l'autre sanction qui résulte de cet arrêt définitif des prestations, à savoir le paiement d'une somme d'argent à titre de clause pénale, serait invalidée, faute de mise en demeure ou de démonstration que l'arrêt des prestations était définitif.

S'agissant de la mise en demeure elles exposent que la Cour de cassation a rappelé qu'il peut être dérogé à cette formalité si l'inexécution est devenue définitive, ce qui est le cas en l'espèce puisqu'il est prévu le versement d'une somme en application de la clause pénale si l'arrêt de la prestation intervient dans les 12 mois qui suivent la date de réalisation soit entre le 31.03.2015 et le 30.03.2016, qu'en l'espèce Monsieur [K] a informé la société de son arrêt entre le 7.01.2016 et le 6.03.2016 puis de la prolongation de cet arrêt jusqu'au 3.05.2016 soit postérieurement au 30.03.2016 et donc l'inexécution était devenue définitive.

Elles ajoutent que le comportement de Monsieur [K] a rendu toute reprise de la collaboration impossible et par la même l'inexécution définitive.

Elles indiquent qu'aucune mise en demeure préalable à la mise en oeuvre de la clause pénale n'était exigée par le contrat.

Elles réfutent toute force majeure dans la mesure où l'inexécution concerne une obligation pesant sur la société de Monsieur [K], la SC Financière et que, quand bien même Monsieur [K] aurait été dans l'incapacité d'exécuter le contrat il pouvait déléguer à un tiers l'exécution de la prestation.

Les intimés exposent:

- qu'il n'a existé aucune mise en demeure alors que l'obligation d'accompagnement devait être exécutée sur 36 mois et que les appelantes ne peuvent diviser cette période en trois périodes pour soutenir faussement que l'inexécution était définitive puisqu'au jour de l'arrêt de travail la période d'accompagnement de 36 mois n'était pas arrivée à son terme

- qu'aucune dispense de mise en demeure ne saurait se déduire du comportement de la société SCS Financière ou de Monsieur [K] ni de l'acte de cession.

SUR CE

L'article D/ du Titre IV Chapitre IV de l'acte de cession dispose que :

« Si l'un ou l'autre des Directeurs Généraux venait :

(a) à démissionner de leurs mandats sociaux de la société (hormis l'hypothèse de l'incapacité physique à plus de 50% de [E] [K] ou d'[I] [P] reconnue par la sécurité sociale), ou

(b) si la prestation de la structure juridique contrôlée par [E] [K] venait à s'arrêter ou à n'être plus rendue par ce dernier (hormis l'hypothèse de l'incapacité physique à plus de 50% de [E] [K] reconnue par la sécurité sociale)

ou

(c) à être révoquées de leurs mandats sociaux pour juste motifs, Monsieur [E] [K] et/ou [I] [P] s'exposerait aux sanctions cumulatives suivantes:

(i) perte de la rémunération variable pour l'année en cours,

(ii) obligation de céder la totalité des actions qu'il détiendrait encore au capital de la société ASAPPRO moyennant un prix par action de un (1) euro,

(iii) suppression du plafond de la garantie d'actif et de passif défini au Titre III,

(iv) cessation immédiate de l'engagement de contre garantie de Magellan visé au paragraphe III,

(v) versement à titre de clause pénale d'une somme de 200.000 euros si l'évènement à l'origine de la cessation de la collaboration intervient dans les douze mois suivant la Date de la réalisation, somme ramenée à 150.000 euros entre douze et vingt-quatre mois puis à 100.000 euros entre vingt-quatre et trente-six mois. »

La société Magellan Consulting demande la condamnation de Monsieur [K] en faisant valoir que celui-ci n'a pas rempli l'obligation qui était la sienne d'accompagner la société et elle a fait assigner celui-ci en paiement d'une somme de 200.000 euros.

L'exigence d'une mise en demeure est en principe requise en toute matière, pour toute espèce d'obligation sauf si la convention ou la nature de l'obligation l'excluent.

La Cour de cassation dans son arrêt du 4.01.2023 a rappelé la nécessité de mise en demeure du cocontractant d'exécuter l'obligation mise à sa charge préalablement à la mise en oeuvre de la sanction constituée par la clause pénale, sauf à ce que l'inexécution de cette obligation soit définitive et a cassé partiellement l'arrêt en date du 26.05.2020.

En cassant partiellement l'arrêt, laissant donc subsister l'application de l'autre sanction, la Cour de cassation n'a pas retenu l'existence d'une contradiction justifiant le rejet du pourvoi formé par Monsieur [K] formé contre les dispositions de l'arrêt ayant fait application de la clause pénale et il n'appartient pas à la présente cour de retenir l'existence d'une contradiction là où la Cour de cassation ne l'a pas retenu.

Ce moyen est donc inopérant.

Avant d'examiner le bien fondé de la demande de versement d'une somme à titre de la clause pénale, et en conséquence si ledit versement peut être ou non réclamé à Monsieur [K] qui n'a jamais été désigné en qualité de directeur général, étant précisé que la société SPS dont il est l'actionnaire unique et le représentant ne l'a pas été non plus, il convient de vérifier que les conditions de mise en oeuvre de l'action en paiement en application de la clause pénale ont été régulières.

La société Magellan soutient que l'inexécution par Monsieur [K] de son engagement d'accompagnement de la société Asappro après la cession de celle-ci, était définitive puisque le 06.03.2016 Monsieur [K] a adressé une prolongation de son arrêt de travail jusqu'au 3.05.2016 ne lui permettant donc pas d'accompagner la société après la date du 31.03.2016.

Or pour arriver à une telle conclusion la société Magellan divise artificiellement la durée d'accompagnement à laquelle s'était engagé Monsieur [K] par l'intermédiaire de sa société puisqu'il est prévu au contrat de cession, une durée d'accompagnement de 36 mois allant du 31.03.2015 au 30.03.2018. Les trois périodes d'un an prévues dans l'acte concernent non la durée de l'exécution de ce contrat d'accompagnement mais l'application de la clause pénale si celui-ci ne peut être mené à son terme par la volonté même du débiteur de l'obligation. La clause pénale due est alors dégressive au fur et à mesure de la réalisation de l'accompagnement.

Ainsi au 31.03.2016 et également au 3.05.2016 l'obligation d'accompagnement n'était pas définitivement inexécutée puisqu'elle courrait jusqu'au 30.03.2018.

En l'absence de caractère définitif de l'inexécution de l'obligation pour laquelle il est réclamé l'application de la clause pénale, il appartenait donc à la société Magellan de mettre en demeure Monsieur [K] d'exécuter ledit contrat, avant d'exiger le paiement issu de la clause pénale prévue en cas d'inexécution volontaire de celui-ci.

Or force est de constater que le courrier adressé le 7.03.2016 ne met pas en demeure Monsieur [K] d'exécuter le contrat mais le met en demeure de régler la somme due au titre de la clause pénale prévue au contrat de telle sorte qu'aucune mise en demeure n'a été régulièrement délivrée et qu'en conséquence la demande de condamnation est irrecevable comme ayant été irrégulièrement réclamée.

Il y a donc lieu d'infirmer le jugement et de dire irrecevable la demande de la société Magellan de condamnation de Monsieur [K] et de la société SCS.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Les éléments de l'instance caractérisés par une instance qui dure depuis 2016 et par le fait que Monsieur [K] a été victime d'un accident vasculaire très grave dont les conséquences physiques lui ont interdit d'exécuter les obligations auxquelles il s'était engagé justifient d'arbitrer la somme allouée au titre de l'article 700 à 15.000 euros.

Aux termes de l'article 639 du code de procédure civile, la juridiction de renvoi statue sur la charge de tous les dépens exposés devant les juridictions du fond y compris sur ceux afférents à la décision cassée.

Les dépens afférents à la décision cassée et à ceux concernant la procédure devant la cour d'appel de renvoi sont mis à la charge de la société Magellan et de la société Asappro.

PAR CES MOTIFS

La cour,

INFIRME le jugement rendu le 13.04.2018 en ce qu'il a condamné in solidum M. [K] et la société SCS Financière à payer à la société Magellan Consulting la somme d'un euro en application de la clause pénale prévue au contrat de cession du 30 mars 2015

et statuant à nouveau

DÉCLARE irrecevable la demande de la SAS Magellan Consulting et la S.A. J2C sous le nom commercial Journey To Cloud, anciennement dénommée la S.A. Asappro en condamnation de Monsieur [K] et de la société SCS Financière au titre de la clause pénale, faute de délivrance d'une mise en demeure d'exécuter l'obligation d'accompagnement

DÉBOUTE la SAS Magellan Consulting et la S.A. J2C sous le nom commercial Journey To Cloud, anciennement dénommée la S.A. Asappro de leurs demandes

CONDAMNE la SAS Magellan Consulting et la S.A. J2C sous le nom commercial Journey To Cloud, anciennement dénommée la S.A. Asappro à payer à Monsieur [K] et à la société SCS Financière la somme de 15.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE la SAS Magellan Consulting et la S.A. J2C sous le nom commercial Journey To Cloud, anciennement dénommée la S.A. Asappro aux dépens afférents à la décision cassée et à ceux relatifs à la présente procédure avec distraction en faveur des avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 23/10074
Date de la décision : 02/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-02;23.10074 ?
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