La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/06/2024 | FRANCE | N°24/01230

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 8, 28 juin 2024, 24/01230


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 8



ARRÊT DU 28 JUIN 2024



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/01230 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CIYGJ



Décision déférée à la cour : ordonnance du 08 novembre 2023 - président du TJ de Paris - RG n° 23/53434





APPELANTE



S.A.S. MERMOZ EB, prise en la personne de ses représentants léga

ux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représentée par Me Edouard HENRY DE VILLENEUVE, avocat au barreau de PARIS, toque : C386



INTIMÉE



S...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 8

ARRÊT DU 28 JUIN 2024

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/01230 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CIYGJ

Décision déférée à la cour : ordonnance du 08 novembre 2023 - président du TJ de Paris - RG n° 23/53434

APPELANTE

S.A.S. MERMOZ EB, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Edouard HENRY DE VILLENEUVE, avocat au barreau de PARIS, toque : C386

INTIMÉE

Société CR CAPITAL, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Frédéric LALLEMENT de la SELARL BDL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

Ayant pour avocat plaidant Me Isabelle HUGUES, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 mai 2024, en audience publique, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Florence LAGEMI, Président.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de:

Florence LAGEMI, Président,

Rachel LE COTTY, Conseiller,

Patrick BIROLLEAU, Magistrat honoraire

Greffier lors des débats : Jeanne PAMBO

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Rachel LE COTTY pour le Président empêché, et par Jeanne BELCOUR, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

Par acte du 18 février 2022, MM. [V] et [K] [L], aux droits desquels vient la société CR Capital, ont donné à bail commercial à la société Mermoz EB, des locaux situés [Adresse 1]), moyennant le paiement d'un loyer annuel de 52.200 euros hors charges et hors taxes.

Des loyers étant demeurés impayés, le bailleur a délivré au preneur, par acte du 9 mars 2023, un commandement de payer, visant la clause résolutoire, pour la somme de 14.874,31 euros au titre des loyers échus à cette date.

Par acte du 20 avril 2023, la société CR Capital a assigné la société Mermoz EB devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris aux fins, notamment, de constatation de l'acquisition de la clause résolutoire, expulsion de la locataire et condamnation de cette dernière au paiement, par provision, de l'arriéré locatif et d'une indemnité d'occupation.

Par ordonnance réputée contradictoire du 8 novembre 2023, le premier juge a :

constaté l'acquisition de plein droit de la clause résolutoire stipulée au contrat ;

dit que la société Mermoz EB devra libérer les locaux situés [Adresse 1]), et, faute de l'avoir fait, ordonné son expulsion ainsi que celle de tous occupants de son chef, avec le cas échéant, le concours de la force publique ;

rappelé que le sort des meubles sera réglé conformément aux dispositions des articles L.433-1 et suivants et R.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

condamné la société Mermoz EB à payer à la société CR Capital :

à compter du 10 avril 2023, une indemnité d'occupation provisionnelle équivalente au montant du loyer, des charges et des taxes applicables, dûment justifiées au stade de l'exécution, et ce, jusqu'à la libération effective des lieux ;

en conséquence, et d'ores et déjà, la somme de 29.436,80 euros à titre de provision à valoir sur les loyers, charges et indemnités d'occupation échus au 12 avril 2023, 2ème trimestre 2023 inclus, avec intérêt au taux légal à compter du 20 avril 2023 ;

la somme de 1.600 euros au titre des frais irrépétibles ;

condamné la société Mermoz EB au paiement des dépens en ce compris le coût du commandement de payer.

Par déclaration du 4 janvier 2024, la société Mermoz EB a interjeté appel de cette décision en critiquant l'ensemble de ses chefs de dispositif.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 29 février 2024, la société Mermoz EB demande à la cour de :

infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :

constaté l'acquisition de plein droit de la clause résolutoire stipulée au contrat ;

dit qu'elle devra libérer les locaux et, faute de l'avoir fait, ordonné son expulsion ainsi que celle de tous occupants de son chef, avec le cas échéant, le concours de la force publique ;

rappelé que le sort des meubles sera réglé conformément aux dispositions des articles L.433-1 et suivants et R.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

prononcé sa condamnation au paiement d'une indemnité d'occupation à compter du 10 avril 2023, d'une provision de 29.436,80 euros à valoir sur les loyers, charges et indemnités d'occupation échus au 12 avril 2023, 2ème trimestre 2023 inclus, avec intérêt au taux légal à compter du 20 avril 2023, d'une indemnité procédurale et aux dépens ;

la confirmer pour le surplus ;

En conséquence, statuant à nouveau,

prononcer l'échelonnement des sommes dues par elle au titre des condamnations provisionnelles selon l'échéancier suivant :

un premier paiement à hauteur de 25.000 euros le 1er juillet 2024 ;

un deuxième paiement à hauteur de 25.000 euros le 1er octobre 2024 ;

un troisième paiement à hauteur de 25.000 euros le 1er janvier 2025 ;

un paiement du solde, dont le montant sera à parfaire, le 1er avril 2025 ;

ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal et que les paiements s'imputeront d'abord sur le capital ;

ordonner la suspension des effets de la clause résolutoire jusqu'à l'expiration du délai de paiement ordonné et tant que celui-ci sera respecté ;

condamner la société CR Capital au paiement des entiers dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 1.500 euros.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 14 mars 2024, la société CR Capital demande à la cour de :

confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

débouter la société Mermoz EB de toutes ses demandes ;

constater l'acquisition de la clause résolutoire du bail la liant à la société Mermoz EB ;

En conséquence,

ordonner par provision l'expulsion de la société Mermoz EB des locaux qu'elle occupe au [Adresse 1]), et celle de tous occupants de son chef dans les lieux dès la signification de la décision, si besoin est avec l'assistance de la force publique ;

ordonner le transport et la séquestration des meubles, objets mobiliers et marchandises garnissant les lieux loués dans tel garde-meuble qu'il plaira désigner et ce en garantie des indemnités d'occupation et réparations locatives qui pourront être dues, aux frais, risques et périls du 'défendeur';

fixer le montant de l'indemnité d'occupation provisionnelle au montant du loyer mensuel, charges et taxes en sus ;

condamner, par provision, la société Mermoz EB à son paiement jusqu'à libération totale des lieux et remise des clés ;

condamner, par provision, la société Mermoz EB à lui payer la somme de 76.243,52 euros au titre de loyers et charges arriérés au 1er trimestre 2024 inclus avec intérêts de droit à compter de l'assignation ;

condamner la société Mermoz EB à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile pour la procédure d'appel ;

condamner 'le défendeur' en tous les dépens de première instance et d'appel comprenant le coût du commandement de payer.

La clôture de la procédure a été prononcée le 15 mai 2024.

Pour un exposé plus détaillé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie expressément à la décision déférée ainsi qu'aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Sur l'acquisition de la clause résolutoire et ses conséquences

Selon l'article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

Selon l'article 835 du même code, le président du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

En application de ces textes, il est possible, en référé, de constater la résiliation de plein droit d'un bail en application d'une clause résolutoire lorsque celle-ci est mise en oeuvre régulièrement.

Selon l'article L. 145-41 du code de commerce, toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

Les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.

Faute d'avoir payé ou contesté les causes du commandement de payer dans le délai imparti, prévu au bail, le locataire ne peut remettre en cause l'acquisition de la clause résolutoire sauf à démontrer la mauvaise foi du bailleur lors de la délivrance du commandement de payer. L'existence de cette mauvaise foi doit s'apprécier lors de la délivrance de l'acte ou à une période contemporaine à celle-ci.

Au cas présent, le bailleur a fait délivrer, le 9 mars 2023, à la société Mermoz EB un commandement de payer visant la clause résolutoire, pour la somme en principal de 14.874,31 euros au titre de l'arriéré locatif terme du premier trimestre 2023 inclus, dont nul ne conteste qu'elle n'a pas été réglée dans le mois de cet acte, de sorte que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire étaient réunies au 10 avril 2023 ainsi que l'a exactement retenu le premier juge.

La société Mermoz EB ne conteste d'ailleurs pas la réunion de ces conditions, celle-ci se bornant à solliciter des délais de paiement, et, par suite, la suspension des effets de la clause résolutoire.

Sur la provision

Selon l'article 835, alinéa 2, du code de procédure civile, dans les cas où l'existence d'une obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

La société CR Capital sollicite le paiement de la somme de 76.243,52 euros au titre de l'arriéré dû au premier trimestre 2024 inclus. Elle produit un décompte arrêté au 11 février 2024, démontrant que la dette de la société Mermoz EB, au demeurant non contestée, s'élève à cette somme et que depuis le 24 février 2023 aucun versement n'a été effectué par cette dernière.

L'obligation de la société Mermoz EB n'étant pas sérieusement contestable, il convient donc de la condamner à payer, à titre de provision, la somme susvisée, avec intérêts au taux légal à compter du 9 mars 2023, sur la somme de 14.874,31 euros, du 20 avril 2023, sur celle de 14.562,49 euros (29.436,80 - 14.874,31) et à compter du présent arrêt sur le surplus, l'ordonnance entreprise étant de ce chef infirmée.

Sur la demande de délais de paiement

Selon l'article 1343-5, alinéa 1, du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années le paiement des sommes dues.

La société Mermoz EB sollicite un échelonnement de la dette à compter du 1er juillet 2024.

Elle explique qu'elle a rencontré des difficultés à la fin de l'année 2022 puisqu'elle n'était pas en mesure d'exploiter le fonds, lequel faisait l'objet de travaux, qui ont été achevés au cours du premier trimestre 2023, ne permettant l'exploitation du fonds qu'à compter du mois de mars 2023. Elle indique être désormais en mesure de régler sa dette selon l'échéancier proposé en quatre échéances du 1er juillet 2024 au 1er avril 2025.

La société CR Capital s'oppose à cette demande qu'elle considère injustifiée et dilatoire en faisant observer qu'en dépit de l'exploitation du fonds depuis plus d'un an, aucun paiement n'est intervenu.

La société Mermoz EB ne verse aux débats aucune pièce comptable et financière de nature à établir sa capacité de régler la dette en plus du loyer courant dans le délai sollicité.

Au surplus, il est relevé que depuis le commandement de payer délivré le 9 mars 2023, la dette n'a cessé d'augmenter et qu'en dépit de l'exploitation du fonds depuis mars 2023, la société Mermoz EB n'a procédé à aucun versement depuis le 24 février 2023 ainsi que l'établit le décompte susvisé.

Dans ces conditions, sa demande de délais de paiement ne peut être que rejetée.

Sur le constat de la résiliation et ses conséquences

L'ordonnance entreprise sera donc confirmée en ce qu'elle a constaté l'acquisition de la clause résolutoire à compter du 10 avril 2023, statué sur les conséquences de la résiliation constatée et en ce qu'elle a condamné, par provision, la société Mermoz EB au paiement d'une indemnité d'occupation égale au montant du loyer majoré des charges et taxes depuis la résiliation et jusqu'à la libération effective des locaux.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le sort des dépens de première instance et l'application de l'article 700 du code de procédure civile ont été exactement appréciés par le premier juge.

Succombant en ses prétentions, la société Mermoz EB supportera les dépens d'appel et sera condamnée à payer à la société CR Capital, contrainte d'exposer des frais irrépétibles pour assurer sa défense, la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Infirme l'ordonnance entreprise en ses seules dispositions relatives au montant de la provision allouée ;

Statuant à nouveau du chef infirmé et vu l'évolution du litige,

Condamne la société Mermoz EB à payer à la société CR Capital la somme provisionnelle de 76.243,52 euros au titre de l'arriéré locatif et d'indemnités d'occupation dû au premier trimestre 2024 inclus, avec intérêts au taux légal à compter du 9 mars 2023, sur la somme de 14.874,31 euros, du 20 avril 2023, sur celle de 14.562,49 euros et du présent arrêt sur le surplus ;

Confirme l'ordonnance en ses autres dispositions ;

Y ajoutant,

Déboute la société Mermoz EB de sa demande de délais de paiement ;

Condamne la société Mermoz EB aux dépens d'appel et à payer à la société CR Capital la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER POUR LE PRÉSIDENT

EMPÊCHÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 24/01230
Date de la décision : 28/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-28;24.01230 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award