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27/06/2024 | FRANCE | N°21/09294

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 27 juin 2024, 21/09294


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRET DU 27 JUIN 2024



(n° 2024/ , 15 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/09294 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEUDI



Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Octobre 2021 -Conseil de Prud'hommes de PARIS 10 - RG n° 19/11220





APPELANT



Monsieur [X] [C]

[Adresse 3]

[Localité 4]
r>Représenté par Me Audrey HINOUX, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477, avocat postulant, ayant pour avocat plaidant Me Pierre DIDIER, avocat au barreau de PARIS, toque : G 626





INTIMEE
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Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRET DU 27 JUIN 2024

(n° 2024/ , 15 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/09294 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEUDI

Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Octobre 2021 -Conseil de Prud'hommes de PARIS 10 - RG n° 19/11220

APPELANT

Monsieur [X] [C]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Audrey HINOUX, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477, avocat postulant, ayant pour avocat plaidant Me Pierre DIDIER, avocat au barreau de PARIS, toque : G 626

INTIMEE

S.A.S. LABORATOIRES URGO

[Adresse 2]

[Localité 1]

Représentée par Me Coralie JAMOIS de la SELARL Littler France, avocat au barreau de PARIS, toque : R 163

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Novembre 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Christine HERVIER, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Marie-Christine HERVIER, Présidente de chambre et de la formation

Madame Marie-José BOU, Présidente de chambre

Madame Séverine MOUSSY, Conseillère

Greffier, lors des débats : Madame Joanna FABBY

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, prorogée à ce jour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Christine HERVIER, Présidente de chambre, et par Madame Joanna FABBY, Greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE :

Par contrat de travail à durée indéterminée à effet au 8 février 2018, M. [X] [C] a été engagé par la société Laboratoire Urgo (la société) en qualité de directeur des ressources humaines (DRH) de la division Urgo médical, statut cadre, coefficient 480, niveau VI, échelon 62 de la convention collective nationale du caoutchouc du 6 mars 1953, applicable à la relation de travail. M. [C] était soumis à une convention individuelle de forfait de 213 jours annuels de travail. En dernier lieu, il percevait une rémunération mensuelle brute de 8 808 euros outre des primes semestrielles et un bonus conduisant à une moyenne calculée sur les 12 derniers mois de 10'772,56 euros non discutée par les parties.

M. [C] a présenté des arrêts de travail du 23 septembre 2019 au 29 octobre 2018 prolongés jusqu'au 15 novembre 2019.

Par courrier recommandé du 18 octobre 2019, il a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 29 octobre 2019, repoussé au 5 novembre 2019 par courrier recommandé du 24 octobre 2019 puis s'est vu notifier son licenciement pour faute grave par courrier recommandé du 8 novembre 2019.

La société employait au moins 11 salariés lors de la rupture de la relation de travail.

Contestant la validité et le bien-fondé de son licenciement, invoquant une discrimination en raison de son état de santé et sollicitant des rappels de salaire au titre des heures supplémentaires effectuées et d'un bonus, M. [C] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 19 décembre 2019.

Par jugement du 8 octobre 2021 auquel la cour renvoie pour l'exposé des demandes initiales et de la procédure antérieure, le conseil de prud'hommes de Paris, section encadrement a :

' requalifié la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' prononcé la nullité de la convention de forfait jours,

' condamné la société Laboratoire Urgo à payer à M. [C] les sommes suivantes :

' 21'545 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse avec intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement,

' 4 713 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,

' 27'681 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 2 768 euros au titre des congés payés afférents au préavis,

' 20'000 euros de dommages-intérêts pour rupture brutale et vexatoire,

' 30'000 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires 2018/2019 outre 3 000 euros au titre des congés payés afférents,

' 13'219 à titre de rappel de bonus 2019 outre 1 321 euros au titre des congés payés afférents,

Et ce, avec intérêts au taux légal à compter de la réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation,

' rappelé l'exécution provisoire de droit,

' condamné la société Laboratoire Urgo à payer à M. [C] la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

' débouté M. [C] du surplus de ses demandes,

' condamné M. [C] à verser à la société Laboratoire Urgo la somme de 13'424,30 euros au titre du remboursement des jours de repos supplémentaires,

' débouté la société Laboratoire Urgo de surplus de ses demandes,

' condamné la société Laboratoire Urgo aux dépens.

M. [C] a régulièrement relevé appel partiel du jugement le 10 novembre 2021.

Aux termes de ses dernières conclusions d'appelant n° 3 notifiées par voie électronique le 6 octobre 2023 auxquelles la cour renvoie pour plus ample exposé des prétentions et moyens conformément à l'article 455 du code de procédure civile, M. [C] prie la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a :

* débouté de sa demande de nullité du licenciement,

* sur le quantum des condamnations prononcées pour:

- licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- indemnité légale de licenciement,

- rappel d'heures supplémentaires et congés payés afférents,

* débouté du surplus de ses demandes,

* condamné à rembourser à la société Laboratoire Urgo les jours de repos supplémentaires,

- confirmer le jugement pour le surplus,

Statuant à nouveau:

- débouter la société Laboratoire Urgo de l'ensemble de ses demandes,

- condamner la société Laboratoire Urgo à lui payer les sommes suivantes :

* fixation du salaire de référence à 10'772,26 euros,

* 129'270 euros de dommages-intérêts pour licenciement nul, subsidiairement pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 64'635 euros de dommages-intérêts pour discrimination liée à l'état de santé,

* 32'317 euros de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs,

* 14'047 euros à titre d'indemnité de licenciement,

* 122'391 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires pour les années 2018 et 2019 outre 12'139 euros au titre des congés payés afférents,

* 64'635 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,

- ordonner la remise d'une attestation pôle emploi, d'un bulletin de paie, du reçu pour solde de tout compte et d'un certificat de travail rectifiés pour tenir compte de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard et par document,

* 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- assortir les condamnations des intérêts au taux légal,

- condamner la société aux dépens éventuels de première instance comme d'appel, étant précisé que ceux d'appel seront recouvrés par la selarl Lex avoués Paris Versailles conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Aux termes de ses dernières conclusions d'intimée n° 2 notifiées par voie électronique le 6 octobre 2023 auxquelles la cour renvoie pour plus ample exposé des prétentions et moyens conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la société Laboratoire Urgo prie la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [C] de l'intégralité de ses demandes au titre de la discrimination,

En tout état de cause,

- débouter M. [C] de ses demandes au titre de :

* la dissimulation d'emploi,

* du manquement à l'obligation de sécurité,

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à indemniser un licenciement sans cause réelle et sérieuse, au titre de rappel d'heures supplémentaires, d'un rappel de bonus et d'une rupture brutale et vexatoire,

En conséquence,

- débouter M. [C] de l'intégralité de ses demandes au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- constater la validité de l'organisation du travail annuel en forfait jours,

- débouter M. [C] de l'intégralité de ses demandes au titre des heures supplémentaires,

- confirmer la condamnation de M. [C] à lui verser la somme de 13'424,30 euros à titre de remboursement des jours de repos supplémentaires octroyés,

- débouter M. [C] de l'intégralité des demandes formulées dans le cadre de la présente instance notamment au titre de préjudices annexes,

- condamner M. [C] à lui rembourser la somme de 125'448 euros, correspondant aux sommes versées au titre de l'exécution du jugement,

- condamner M. [C] à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [C] aux dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 11 octobre 2023.

MOTIVATION :

A titre liminaire la cour constate qu'elle n'est saisie par le dispositif des conclusions de la société Laboratoire Urgo d'aucune demande visant à ce que certaines des pièces communiquées par le salarié soient écartées des débats contrairement aux développements effectuées dans le corps des conclusions. La cour n'est donc pas saisie d'une quelconque contestation des pièces communiquées dont la valeur probante est soumise à son appréciation souveraine.

Sur la rupture du contrat de travail :

La lettre de licenciement fixant les limites du litige est rédigée dans les termes suivants :

« ['] vous avez été embauché le 07 février 2018 en qualité de directeur des ressources humaines pour la division Urgo médical. Votre mission consistait à être un référent et un conseil, tant au niveau stratégique qu'opérationnel, de la direction générale et de la direction des ressources humaines groupe. Ainsi, vous deviez garantir la bonne application de la politique de gestion des ressources humaines groupe, définie par le Board, dans sa globalité, à travers notamment :

la politique salariale,

la politique de recrutement, de mobilité,

la politique sociale,

la gestion prévisionnelle des emplois et compétences,

la politique de formation.

Au cours des derniers mois, votre attitude attentiste vous a été à plusieurs reprises reprochées notamment dans l'animation des dossiers clés de votre périmètre : gestion des départs sensibles, proposition de package dans le cadre des mobilités clés, supervision et implication dans les recrutements à forts enjeux et dans l'identification des hauts potentiels pour assurer le développement de la division.

Par ailleurs, vous avez fait l'objet d'alertes régulières depuis votre intégration au sein du groupe concernant nos exigences de rigueur et de respect des délais attendus dans l'application des directives de votre direction qui n'étaient pas toujours respectées et nous avons constaté au cours du mois de septembre dernier une persistance des écarts entre les consignes données et leur mise en 'uvre, relevant de la négligence fautive et caractérisée par deux éléments :

- des erreurs manifestes dans la transmission des données de rémunération de votre périmètre ayant pour conséquence des problématiques de validation, des incidences de masse salariale et d'insatisfaction de collaborateurs ;

- votre manque de respect des process internes et le fait que vous outre-passiez vos prérogatives, sans accord préalable de votre hiérarchie.

1/ des erreurs manifestes dans la transmission des données de rémunération :

En effet, vous devez être garant de la fiabilité des données que vous transmettez, notamment en matière de suivi de la politique salariale. Ainsi, chaque année, les directeurs des ressources humaines du groupe sont sollicités afin de compiler l'ensemble des informations relatives aux collaborateurs de leur périmètre percevant une rémunération annuelle brute chargée supérieure ou égale à 200 K€. Les données recueillies sont ensuite consolidées en Corporate et présentées au comité de surveillance pour réaliser un suivi des décisions prises et valider des éventuels ajustements ou revalorisations voire embauches.

Lors de la revue 2019, certaines informations ont dû être retraitées par le Corporate à la suite d'erreurs grossières dans les données que vous avez transmises pour votre périmètre. Aussi, les données rectifiées ont été présentées lors du comité de surveillance.

Ainsi, à l'issue de la présentation du 09 septembre 2019, M. [I] [W], président du pôle médical vous a adressé un mail pour vous faire part de son étonnement face aux chiffres présentés ne correspondant pas aux propositions salariales qu'il avait lui-même validées en amont. À date, cet e-mail reste sans réponse et sans justification des écarts constatés.

Ainsi les RH Corporate ayant constaté des anomalies dans les données ont dû modifier certaines de vos informations, portant ainsi à la connaissance de M.[I] [W] des écarts de rémunération entre l'existant et les éléments validés par ses soins. Ces écarts ont pour conséquence une perte de confiance de la fiabilité de vos données et un report de certaines revalorisations salariales afin de vérifier toutes les datas. Aussi, certains collaborateurs devant bénéficier d'une revalorisation au 1er septembre dernier, sont à date toujours en attente de traitement de leur dossier. De plus, ces écarts ont une incidence directe sur la gestion de la masse salariale de votre périmètre.

2/votre manque de respect des process internes et le fait que vous outre -passiez vos prérogatives, sans accord préalable de votre hiérarchie :

De plus, si vous devez être le conseil de la direction générale en matière de ressources humaines relevant de votre périmètre, vous devez néanmoins appliquer les directives arrêtés par celle-ci en matière de stratégie sociale.

Ainsi, dans le cadre de la gestion d'un dossier de sortie d'une collaboratrice relevant de votre périmètre qui avait sollicité la négociation d'une rupture conventionnelle de son contrat de travail, vous avez outrepassé vos prérogatives en toute connaissance de cause. En effet, la collaboratrice arguant d'un préjudice au cours de la relation de travail, vous avez pris contact avec une avocate afin de proposer la conclusion d'une transaction portant sur l'indemnisation du préjudice, indépendamment de la rupture contractuelle. Vous avez par ailleurs dès début septembre 2019 demandé à la Responsable Ressources Humaines régionale de la zone Asie-Pacifique vous reportant, d'avancer les discussions sur cette base avec la collaboratrice. Le 17 septembre dernier, vous finalisiez le texte de la transaction et receviez la collaboratrice pour lui présenter le document, et ce, en dehors de toute validation de votre Direction. C'est seulement le 19 septembre 2019 que vous avez demandé une autorisation d'enveloppe budgétaire à votre direction, c'est-à-dire postérieurement à la proposition faite à la salariée, démarche qui atteste que vous saviez pertinemment que votre proposition aurait dû être validée en amont de toute proposition formulée à la salariée. Vous avez d'ailleurs clairement manifesté votre conscience de ne pas avoir respecté les procédures internes en la matière. Votre direction a d'ailleurs refusé de valider votre proposition.

Cette proposition d'indemnisation formulée sans aucune validation préalable de votre direction et au mépris des consignes de notre entreprise caractérise une négligence fautive manifeste. ['] Nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave au motif de vos négligences fautives caractérisées. ['] ».

Sur le bien fondé du licenciement :

La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. La charge de la preuve repose sur l'employeur qui l'invoque.

Il ressort de la lettre de licenciement que deux séries de griefs sont développées à l'encontre du salarié :

- des erreurs manifestes dans la transmision des données,

- un manque de respect des process internes et le dépassement des prérogatives de M. [C] sans accord préalable de sa hiérarchie

S'agissant des erreurs manifestes dans la transmission des données.

L'employeur soutient que la faute grave est caractérisée et s'appuie sur

- l'attestation du président de Urgo médical, M. [W] pour établir que la masse salariale étant le premier poste de dépense du groupe, des normes précises ont été établies notamment pour les collaborateurs percevant une rémunération supérieure à 200 000 euros,

- des échanges de courriels qui ont eu lieu les 12 et 13 juin 2019 entre le service des ressources humaines groupe et M. [C] afin que celui-ci rectifie les données salariales de ses collaborateurs contenant des erreurs,

- le mail de M. [W] en date du 9 septembre 2019 faisant part à M. [C] des incohérences qu'il constatait entre les données transmises par le service des ressources humaines et celles transmises par M. [C],

- le tableau comparatif faisant apparaître les incohérences relevées.

M. [C] conteste les faits, en faisant valoir que les données erronées ne sont pas identifiées, que le mail de M. [W] ne suffit pas à démontrer que l'erreur provient de lui, qu'en réalité, il comparait des données différentes, qu'il s'est expliqué trés simplement sur les faits avec M. [W] puis avec le DRH Groupe pour recouper les données. En tout état de cause, il conteste que ce fait constituant selon ses écritures un non-évènement puisse constituer une faute grave.

La cour relève que si la différence dans les données est établie, les pièces communiquées par l'employeur ne suffisent pas à démontrer que ces différences proviennent de la négligence fautive de M. [C]. Quant aux messages des 12 et 13 juin 2019, plus anciens, qui établissent le contrôle des données transmises par M. [C] par la DRG Groupe, ils ne suffisent pas non plus à prouver une cause sérieuse de licenciement reflétant un processus normal de vérification. Il n'est par ailleurs communiqué aucun élément sur le retard qu'auraient subi certains salariés dans l'évaluation de leur rémunération.

Sur le manque de respect des process internes et le dépassement des prérogatives de M. [C] sans accord préalable de sa hiérarchie :

L'employeur vise une situation qui s'est produite en septembre 2019 et reproche au salarié d'avoir présenté à une collaboratrice une proposition de rupture conventionnelle comprenant un paiement d'indemnité important sans avoir requis l'accord de la DRH Groupe

L'employeur soutient que les faits sont caractérisés et fait valoir que toute rupture conventionnelle doit être validée en amont par le directeur général et le président dans la mesure où elle impacte le budget ainsi qu'en atteste le président M. [W]. Il soutient que M. [C] connaissait parfaitement cette règle en s'appuyant sur un échange de mail entre M. [C] et une de ses collaboratrices, en date du 4 septembre où, selon lui le salarié indique à celle-ci que 'nous pouvons demander à [D] et [V] notre mandat tout en leur faisant une reco', ce qui n'a pas été fait.

M. [C] de son côté conteste connaître les règles invoquées et soutient que le principe de la rupture conventionnelle avec cette salariée qui s'était plainte de subir des agissements de harcèlement moral avait été validée par la direction générale.

La cour considère que les éléments produits par l'employeur ne sont pas suffisants pour établir d'une part l'existence de la procédure interne à respecter en matière de rupture conventionnelle et donc la violation par M. [C] de cette procédure l'obligeant à recourir à la validation préalable de la rupture conventionnelle par le président ou le directeur général de la société, malgré les affirmations de M. [W] en ce sens non corroborées par des éléments objectifs.

La cour considère en conséquence que les faits ne sont pas matériellement établis.

En définitive, sur les deux griefs allégués par la société, la cour considère que l'employeur ne rapporte pas la preuve de ce que l'un et l'autre sont caractérisés, que les faits sont imputables au salarié et de nature à rendre imposible la poursuite du contrat de travail de sorte que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

Sur la demande de nullité du licenciement :

M. [C] sollicite la nullité du licenciement en faisant valoir que celui-ci est nul car il procède en réalité d'une discrimination en raison de son état de santé.

La société conclut au débouté en faisant valoir qu'elle avait connaissance de l'état de santé de M. [C] dès l'embauche de celui-ci, que le salarié ne subissait aucune surcharge de travail d'autant que pour l'aider à atteindre le niveau d'exigence attendu, il avait été déchargé d'une partie de ses tâches et qu'aucun lien n'est établi entre l'état de santé du salarié et ses conditions de travail.

La cour rappelle qu'aucun salarié ne peut subir une mesure discriminatoire directe ou indirecte en raison de son état de santé en application de L. 1132-1 du code du travail, qu'en cas de litige, l'article L. 1134-1 du même code prévoit que lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008 -496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

M. [C] présente les éléments de fait suivants :

- la dégradation de son état de santé est directement liée à ses conditions de travail,

- la procédure de licenciement a été mise en place juste après une nouvelle dégradation de son état de santé,

- le licenciement n'est pas fondé sur une cause réelle et sérieuse.

Sur ce dernier point, la cour a retenu que le licenciement ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse.

Sur la mise en place de la procédure de licenciement, M. [C] fait valoir que la procédure de licenciement a été diligentée alors qu'il était en arrêt de travail depuis le 23 septembre 2019 après avoir déclenché deux malaises les 18 et 23 septembre 2019 sans que la société ne déclare d'accidents du travail. Les faits sont établis par la communication de la déclaration d'arrêt de travail, des échanges de mails de M. [C] adressés à M. [H] le 23 octobre 2019 et du courrier de convocation à l'entretien préalable.

Sur la dégradation de l'état de santé de M. [C] en lien avec les conditions de travail, dès lors qu'il est établi que M. [C] souffrait d'une pathologie préexistente à son embauche (maladie de Ménière), le lien entre la dégradation alléguée et les conditions de travail n'est pas caractérisé et aucune constatation en ce sens du médecin du travail n'est communiquée

Cet ensemble de faits laisse supposer une discrimination à l'égard de M. [C] en raison de son état de santé et il appartient à la société de prouver qu'ils sont justifiés par des éléments objectifs qui y sont étrangers.

La cour observe que l'employeur reste taisant sur l'engagement de la procédure de licenciement le 18 octobre 2019 alors que l'arrêt de travail du salarié était prolongé et ayant retenu que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, considère que l'employeur n'établit pas les raisons objectives étrangères à la discrimination alléguée pour lesquelles le salarié souvent malade et dont il connaissait depuis lontemps les difficultés de santé a été licencié.

La cour retient en conséquence que la discrimination alléguée est établie;

Sur les demandes financières :

Sur les demandes présentées au titre de l'exécution du contrat de travail :

Sur les heures supplémentaires :

M. [C] soutient que la convention de forfait qui lui a été appliquée est nulle et lui est inopposable de sorte qu'il réclame la condamnation de l'employeur à lui verser un rappel de salaire de 122 391,23 euros outre les congés payés afférents et l'infirmation du jugement sur le quantum de la condamnation prononcée.

La société conclut au débouté et à l'infirmation du jugement en faisant valoir que la convention individuelle de forfait à laquelle était soumis M. [C] était valide et lui est opposable, qu'elle reposait sur un accord collectif du 22 novembre 2004, et qu'il n'a pas accompli d'heures supplémentaires.

Sur la validité de la convention de forfait :

Il résulte de l'article L. 3121-63 du code du travail que les forfaits annuels en heures ou en jours sur l'année sont mis en place par un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche.

Aux termes de l'article L. 3121-64 du code du travail, 'I.-L'accord prévoyant la conclusion de conventions individuelles de forfait en heures ou en jours sur l'année détermine :

1° Les catégories de salariés susceptibles de conclure une convention individuelle de forfait, dans le respect des articles L. 3121-56 et L. 3121-58 2° La période de référence du forfait, qui peut être l'année civile ou toute autre période de douze mois consécutifs ;

3° Le nombre d'heures ou de jours compris dans le forfait, dans la limite de deux cent dix-huit jours s'agissant du forfait en jours ;

4° Les conditions de prise en compte, pour la rémunération des salariés, des absences ainsi que des arrivées et départs en cours de période ;

5° Les caractéristiques principales des conventions individuelles, qui doivent notamment fixer le nombre d'heures ou de jours compris dans le forfait.'

L'accord d'entreprise du 22 novembre 2004 prévoit en son article 6, intitulé convention de forfait annuel en jours travaillés, que :

« Pour les cadres qui bénéficient d'une grande autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps, une convention de forfait annuel en jours travaillés peut être proposée. Sont concernées les catégories de cadres suivantes :

- les cadres affectés dans les services commerciaux, si de fréquents déplacements sont nécessaires ;

- les cadres itinérants ;

- les cadres dont la mission managériale implique une organisation non linéaire de leur emploi du temps ;

- les cadres experts qui peuvent être amenés à représenter l'entreprise dans de nombreuses manifestations et dont l'emploi du temps n'est pas intrinsèquement lié à l'organisation d'un service ;

- les cadres en charge de la supervision de la production, de la logistique, des fonctions support de l'industriel, qui doivent pouvoir adapter leur emploi du temps aux nécessités et aux fluctuations de la production.

[']

Le nombre de jours travaillés à accomplir est fixé à 213 dans le cadre de l'année civile.

Au plus tard le 25 du mois, M-1 le cadre concerné fait part par écrit sur le formulaire qui sera mis en place à cet effet de ses prévisions de jours de travail à sa hiérarchie. Au plus tard le 5 du mois M+ 1, il communique sur le document qui sera également mis en place à cet effet, les jours effectivement travaillés du mois M. Il est impératif qu'au 31 décembre de l'année concernée, le nombre de jours travaillés s'établisse à 213.

Plus aucune référence n'est faite à une quelconque durée du temps de travail en heures.

Ces dispositions ne font pas obstacle au respect de la règle du repos quotidien d'au moins 11 heures consécutives ainsi qu'au respect de la règle du repos dominical qui doit être d'au moins 35 heures consécutives.

Il est en outre expressément stipulé que le travail le dimanche demeure interdit. »

Comme le fait valoir à juste titre M. [C], les dispositions de l'accord collectif sur la base duquel la convention de forfait a été conclue, ne comprennent aucune disposition relative aux modalités selon lesquelles l'employeur assure l'évaluation et le suivi régulier de la charge de travail du salarié et des modalités selon lesquelles l'employeur et le salarié communiquent périodiquement sur la charge de travail de celui-ci sur l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle, sur sa rémunération ainsi que sur l'organisation du travail dans l'entreprise.

L'employeur ne justifie ni n'allègue avoir respecté les dispositions supplétives prévues par l'article L. 3121-65 du code du travail.

La convention individuelle de forfait de M. [C] est donc nulle. Le jugement est confimé de ce chef.

Sur la demande chiffrée :

La demande de M. [C] relève donc de l'application des dispositions de droit commun sur la durée de travail.

Il résulte des articles L. 3171-2, L. 3171-3 et L. 3171-4 du code du travail dans leur version applicable à l'espèce qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant;

M. [C] soutient avoir accompli de nombreuses heures supplémentaires et s'appuie sur deux pages de son agenda non datées, des mails adressés ou qui lui ont été adressés à des heures tardives ou matinales, des jours fériés ou le dimanche, ainsi que sur des avis de voyage pour soutenir qu'il effectuait un temps hebdomadaire moyen de travail de 55 heures sur l'ensemble de la période travaillée, qu'il a bénéficié de 52 jours de congé ou de repos de sorte qu'il a effectué 1 552 heures de travail dont il réclame le paiment sur la base d'un taux horaire brut de base de 55,87 euros brut.

De son côté, la société soutient que les éléments apportés par le salarié ne sont pas suffisamment précis pour lui permettre d'étayer sa demande, qu'il lui appartient de justifier que les heures supplémentaires alléguées ont été sollicitées par l'employeur, qu'il n'a procédé à aucune réclamation pendant l'exécution du contrat de travail et qu'il ne produit aucun décompte précis de ses supposés heures supplémentaires, se contentant de produire des mails dans lesquels il dit 'oui' ou dont les horaires sont à son initiative.

La cour considère que même s'il ne produit pas de tableaux sur les heures supplémentaires alléguées, M. [C], sur qui ne pèse pas la charge exclusive de la preuve, effectue dans ses écritures un calcul sur la base de 20 heures supplémentaires par semaine suffisamment précis pour permettre à l'employeur, en charge du contrôle du temps de travail de son salarié, de répondre en produisant ses propres éléments.

Au vu des pièces et observations fournies par les deux parties, la cour a la conviction que M. [C] a effectué des heures supplémentaires avec l'accord implicite de l'employeur compte tenu des horaires de certains échanges, mais dans une mesure moindre que celle qu'il revendique et condamne en conséquence la société à lui verser la somme de 30'000 euros à titre de rappel des heures supplémentaires effectuées en 2018 et 2019 sur la base d'un taux horaire de 55,87 euros brut outre 3 000 euros au titre des congés payés afférents. Le jugement est donc confirmé de ce chef.

Sur le travail dissimulé :

La seule omission sur les bulletins de salaire de la totalité des heures effectuées par un salarié qui été soumis à une convention de forfait ne suffit pas à caractériser la volonté de dissimulation alléguée de sorte que la demande d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé est rejetée. Le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté M. [C] de ce chef de demande.

Sur la demande de dommages-intérêts pour discrimination liée à l'état de santé :

M. [C] sollicite la condamnation de l'employeur à lui verser une somme de 64'635 euros de dommages-intérêts en réparation de son préjudice en faisant valoir qu'il a subi un préjudice particulièrement grave. La société conclut au débouté.

La cour ayant retenu que M. [C] avait été victime d'une discrimination en raison de son état de santé considère qu'il justifie ainsi d'un préjudice distinct de celui résultant de la nullité du licenciement et condamne la société à lui verser une somme de 5 000 euros de dommages-intérêts suffisant à réparer l'intégralité de son préjudice.

Le jugement est infirmé en ce qu'il a débouté de ce chef de demande.

Sur les dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat :

L'employeur tenu d'une obligation de sécurité envers ses salariés en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise doit en assurer l'effectivité. Ne méconnait pas son obligation, l'employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les article L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail

M. [C] sollicite la condamnation de l'employeur à lui verser une somme de 32'317 euros en faisant valoir qu'il s'est régulièrement plaint de sa charge de travail, se référant à ses différents SMS, à ses problèmes de santé, à son agenda et à ses mails.

La cour a retenu l'existence d'heures supplémentaires et considère que la société en n'assurant aucun suivi de la charge de travail du salarié malgré les alertes de ce dernier a manqué à son obligation de sécurité alors qu'elle n'ignorait pas la fragilité de la santé de M. [C] comme elle l'a reconnu elle-même, de sorte qu'elle est condamnée à verser à M. [C] une somme de 5 000 euros de dommages-intérêts suffisant à réparer son entier préjudice. Le jugement est infirmé en ce qu'il l'a débouté de ce chef de demande.

Sur les demandes présentées au titre de la rupture du contrat de travail :

Sur la demande de nullité du licenciement :

La cour ayant retenu que le licenciement était discriminatoire en prononce la nullité en application de l'article L. 1132-4 du code du travail. Le jugement est donc infirmé en ce qu'il a débouté le salarié de ce chef de demande.

Sur la demande d'indemnité pour nullité du licenciement :

M. [C] sollicite la condamnation de l'employeur à lui verser une somme de 129'270 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul en faisant valoir que son préjudice ne peut être estimés à une somme inférieure à six mois de salaire brut.

En application de l'article L. 1235-3-1 du code du travail, l'indemnité due au titre d'un licenciement nul ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Eu égard à son ancienneté dans l'entreprise, (embauche au 8 février 2018), au montant de son salaire mensuel brut, à ce qu'il justifie de sa situation postérieure au licenciement (perception ARE jusqu'en juin 2020), la cour condamne la société à verser à M. [C] la somme de 80'000 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul suffisant à réparer son entier préjudice. Le jugement est infirmé en ce qu'il l'a débouté de ce chef de demande et en ce qui lui a alloué une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents :

La société soutenant que le licenciement est fondé sur une faute grave conclut à l'infirmation du jugement. M. [C] n'a pas fait appel du jugement de ce chef et conclut à la confirmation.

Eu égard à la solution du litige, le jugement est confirmé en ce qu'il a condamné la société à verser à ce titre à M. [C] les sommes de 27 681 euros outre 2 768 euros au titre des congés payés afférents, son évaluation étant conforme aux dispositions conventionnelles sur la durée du préavis et aux données contractuelles sur la rémunération du salarié.

Sur l'indemnité de licenciement :

M. [C] sollicite la condamnation de l'employeur à lui verser une somme de 14 047 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement et l'infirmation du jugement en ce qu'il a limité le quantum de la condamnation à la somme de 4 713 euros.

La société conclut au débouté et à la confirmation du jugement, s'il y a lieu, en faisant valoir que M. [C] fait une interprétation erronnée de la convention collective ne pouvant prétendre aux dispositions dont il revendique l'application dès lors qu'il ne dispose pas de l'ancienneté nécessaire.

L'article 14 de l'avenant ingénieurs et cadres de la convention collective nationale dispose que :

'A partir de 3 années de présence dans l'entreprise, il est alloué aux salariés licenciés, conformément aux dispositions légales, une indemnité de licenciement distincte du préavis, tenant compte de leur ancienneté dans l'entreprise. (1)

2. Le point de départ pour le calcul de l'ancienneté est l'âge d'entrée dans l'entreprise si l'intéressé y est entré après l'âge de 21 ans ou cet âge s'il y est entré antérieurement.

3. Le montant de l'indemnité est calculé de la façon suivante :

a) Si l'intéressé est entré avant 50 ans dans l'entreprise :

A étant l'âge d'entrée (supérieur ou égal à 21 ans) ;

B le nombre d'années d'ancienneté,

Indemnité (en mois) = 15 × B/ (65-A)

b) Pour le salarié entré comme tel à partir de 50 ans, l'indemnité est égale à 1 mois par année de présence.

c) Pour les salariés licenciés après l'âge légal de la retraite, le montant de l'indemnité de licenciement sera celui qu'il aurait acquis à l'âge de 65 ans.

Le calcul de l'indemnité de licenciement est fait au prorata des mois de présence.

4. L'indemnité est due au salarié à son départ de l'entreprise ; toutefois, elle peut être versée avec l'accord de l'intéressé, par mensualités.

Notification des sommes dues et des modalités de règlement est faite par écrit à l'intéressé au moment de son départ de l'entreprise.

Toutefois, en cas de décès du bénéficiaire, le solde de son indemnité est payé à ses héritiers dans un délai maximum de 6 mois.

5. Le salaire pris en considération pour le calcul de l'indemnité est le salaire total du dernier mois de travail normal. En cas de rémunération variable, la partie variable de cette rémunération est calculée sur la moyenne des 12 derniers mois.

(1) Le point 1 de l'article 14 de l'avenant « ingénieurs et cadres » est étendu sous réserve de l'application des dispositions de l'article L. 1234-9 du code du travail.'

M. [C] soutient que dès lors qu'il justifie d'une ancienneté de 8 mois, condition requise par l'article L. 1234-9 du code du travail, les dispositions conventionnelles sont applicables.

La société au contraire soutient que M. [C] qui ne justifie pas de trois années d'ancienneté ne peut prétendre à l'indemnité conventionnelle de licenciement, l'extension du point 1 avec la mention sous réserve des dispositions légales ne visant à l'application des dispositions conventionnelles que si elles s'avèrent plus favorables que le calcul légal, les partenaires sociaux n'ayant pas eu l'intention d'abaisser la condition d'ancienneté.

La cour relève que la condition d'ancienneté pour l'application des dispositions conventionnelles est de trois ans, qu'aucune disposition de la convention collective n'indique que cette mention est anéantie par l'abaissement de la condition d'ancienneté issue de la modification de l'article L. 1234-9 du code du travail et résulterait de l'extension des dispositions conventionnelles.

La cour déboute donc M. [C] de sa demande d'infirmation du jugement de ce chef et le confirme en ce qu'il a condamné la société à verser au saalrié la somme de 4 713 euros.

Sur la demande de dommages-intérêts pour rupture brutale et vexatoire :

M. [C] fait valoir qu'ayant été mis sous pression pour accepter une rupture négociée de son contrat de travail, ce qu'il n'a pas accepté, la société a diligenté un licenciement pour faute grave fondé sur des motifs inexistants de sorte qu'il a été évincé de l'entreprise du jour au lendemain sans indemnité et sans avoir pu dire au revoir à ses collègues et sollicite la confirmation du jugement qui lui a alloué à ce titre une somme de 20'000 euros de dommages intérêts.

La société conclut au débouté en contestant tout caractère brutal et vexatoire au licenciement. La cour considère cependant que le licenciement n'étant pas fondé, la nullité en ayant été prononcé pour discrimination, l'éviction de M. [C] qui était en arrêt de travail à cette période caractérise le caractère brutal et vexatoire de la rupture et la réalité du prejudice allégué et confirme le jugement en ce qu'il lui a alloué une somme de 20'000 euros de dommages-intérêts.

Sur la demande reconventionnelle :

À titre reconventionnel, la société sollicite la condamnation du salarié à lui verser une somme de 13'424,30 euros au titre du remboursement des jours de repos supplémentaires et la confirmation du jugement sur ce chef de demande.

M. [C] conclut au débouté et à l'infirmation du jugement en faisant valoir que la demande n'est pas fondée en son quantum et qu'il ne peut y être fait droit dans son intégralité si sa demande de rappel de salaire n'est pas accordée dans sa totalité. La cour observe que le paiement des jours supplémentaires est la conséquence de l'application de la convention de forfait laquelle a été annulée à la demande du salarié, que dès lors les jours ne sont pas dus qu'il convient en conséquence d'en ordonner le remboursement à hauteur de la somme brute de 13'424,30 euros.

Le jugement est confirmé en ce qu'il a condamné M. [C] à rembourser cette somme à la société.

Sur les autres demandes :

La cour ordonne à la société de remettre à M. [C] une attestation pour pôle emploi, un bulletin de paie récapitulatif, un reçu pour solde de tout compte et un certificat de travail rectifiés conformément à la présente décision sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette décision d'une astreinte la demande en ce sens est rejetée.

Les intérêts au taux légal portant sur les condamnations de nature salariale sont dus à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation et s'agissant des créances indemnitaires, à compter de la décision qui les prononce.

La société partie perdante est condamnée aux dépens de première instance et d'appel, et autorise la selarl LEXAVOUES Paris Versailles à recouvrer contre la partie condamnée ceux des dépens d'appel dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision. Elle doit indemniser M. [C] des frais exposés par lui devant la cour et non compris dans les dépens à hauteur de la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, sa propre demande sur ce même fondement étant rejetée.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant contradictoirement et par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a prononcé la nullité de la convention de forfait, et sur le quantum des condamnations prononcées à l'encontre de la société Laboratoire Urgo au titre du rappel de salaire sur heures supplémentaires et congés payés afférents, de l'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, de l'indemnité de licenciement, des dommages-intérêts pour rupture brutale et vexatoire, et à l'encontre de M. [X] [C] au titre du remboursement des jours de repos supplémentaires, et en ce qu'il a débouté M. [X] [C] de sa demnde d'indemnité pour travail dissimulé,

Statuant de nouveau dans les limites de l'appel et y ajoutant,

Prononce la nullité du licenciement,

Condamne la société Laboratoire Urgo à verser à M. [X] [C] les sommes suivantes :

80'000 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul,

5 000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi pour discrimination en raison de son état de santé,

5 000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi pour violation de l'obligation de sécurité de santé,

Dit que les intérêts au taux légal portant sur les condamnations de nature salariale sont dus à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation et s'agissant des créances indemnitaires, à compter de la décision qui les prononce,

Ordonne à la société Laboratoire Urgo de remettre à M. [X] [C] une attestation pour Pôle emploi, un bulletin de paie récapitulatif, un reçu pour solde de tout compte et un certificat de travail rectifiés conformément à la présente décision,

Déboute M. [X] [C] de sa demande d'astreinte,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société Laboratoire Urgo,

Condamne la société Laboratoire Urgo aux dépens et autorise la SCP LEXAVOUE Paris Versailles à recouvrer contre la partie condamnée ceux des dépens d'appel dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision,

Condamne la société Laboratoire Urgo à verser à M. [X] [C] la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 21/09294
Date de la décision : 27/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-27;21.09294 ?
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