Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 10
ARRET DU 27 JUIN 2024
(n° , 1 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/06514 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CECTE
Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Juin 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de PARIS - RG n° 17/01595
APPELANT
Monsieur [T] [R]
[Adresse 7]
[Adresse 7]
Représenté par Me Eric MANCA, avocat au barreau de PARIS, toque : P0438
INTIMES
Monsieur [G] [ZE] ès-qualité de curateur de la société CG POWER SYSTEMS BELGIUM N.V.
[Adresse 5]
[Adresse 5] (BELGIQUE)
Représenté par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151
Monsieur [KM] [F] ès-qualité de curateur de la société CG POWER SYSTEMS BELGIUM N.V.
[Adresse 4]
[Adresse 4] (BELGIQUE)
Représenté par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151
Monsieur [A] [KY] ès-qualité de curateur de la société CG POWER SYSTEMS BELGIUM N.V.
[Adresse 9]
[Adresse 9] (BELGIQUE)
Représenté par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151
S.C.P. BTSG Prise en la personne de Maître [L] es qualité de mandataire liquidateur de la SA CG SALES Networks France
[Adresse 1]
[Adresse 1]
n'ayant constitué ni avocat ni défenseur syndical bien qu'ayant été assignée par voie d'huissier le 20/01/2022
Organisme AGS [Localité 6] FAILLITES TRANSNATIONALES
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Claude-marc BENOIT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1953
Association AGS CGEA [Localité 6] UNEDIC Délégation AGS CGEA [Localité 6] prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par Me Claude-marc BENOIT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1953
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Carine SONNOIS, Présidente de la chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Madame Mme Carine SONNOIS, Présidente de la chambre
Madame Gwenaëlle LEDOIGT, Présidente de la chambre
Madame Véronique BOST, Conseillère
Greffier : lors des débats : Mme Sonia BERKANE
ARRET :
- réputé contradictoire
- mis à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile prorogé jusqu'à ce jour .
- signé par Madame Mme Carine SONNOIS, Présidente et par Sonia BERKANE, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Le 1er décembre 2014, M. [T] [R] a été engagé par contrat à durée indéterminée par la société CG Sales Networks France, en qualité d' Executive Vice President & President Power Business Unit CG .
La convention collective applicable est la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie.
La société CG Sales Networks France est une filiale de CG Power Systems Belgium, elle-même filiale de CG HOLDINGS BELGIUM. Toutes ces entités font partie du groupe Crompton Greaves Limited (CG).
Par lettre du 20 janvier 2017, M. [R] a été convoqué à un entretien préalable, fixé au 31 janvier 2017 assorti d'une mise à pied à titre conservatoire.
Par lettre du 3 février 2017, M. [R] a été licencié pour faute grave.
Le 3 mars 2017, M. [R] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris de demandes formées à l'encontre de la société CG Sales Networks France et de la société CG Power Systems Belgium NV sur le fondement du coemploi.
Par jugement du 3 février 2020, le tribunal de l'entreprise d'Anvers a déclaré la société CG Power Systems Belgium NV en faillite et désigné Maître [G] [ZE], Maître [KM] [S] et Maître [A] [KY] en qualité de curateurs.
Par jugement du 2 juillet 2020, la société CG Sales Networks France a été placée en liquidation judiciaire et la SCP BTSG en la personne de Maître [M] [L] a été désignée en qualité de liquidateur.
Par jugement rendu le 25 juin 2021, notifié aux parties 25 juin 2021, le conseil de prud'hommes de Paris, en formation de départage, a :
- débouté M. [R] de ses différentes demandes relatives à l'existence d'un coemploi formées à l'encontre de la société CG Power Systems Belgium NV et ordonne la mise hors de cause de Maître [G] [ZE], Maître [KM] [F] et Maître [A] [KY], en leur qualité de curateurs de la société CG Power Systems Belgium NV ;
- fixé la créance de M. [R] au passif de la liquidation judiciaire de la SA CG Sales Networks France aux sommes suivantes :
* 19 300,97 euros à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire, outre 1 9 30,09 euros au titre des congés payés afférents
* 530 366,49 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 53 036,64 euros au titre des congés payés afférents
* 166 696,83 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement
* 1 054 147 euros à titre d'indemnité de rupture
* 550 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
* 29 009,32 euros à titre de rappel sur bonus contractuel au titre de la période comprise entre le 1er décembre 2014 et le 31 mars 2015 outre 2 900,93 euros au titre des congés payés afférents
* 461 783,30 euros à titre de rappel sur bonus contractuel au titre de la période comprise entre le 1er avril 2016 et le 31 janvier 2017 outre 46 178,33 euros au titre des congés payés afférents
* 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- rappelé que les condamnations de nature contractuelle et/ou conventionnelle produisent intérêts à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation et celles de nature indemnitaire à compter de la présente décision
- rappelé que les intérêts au taux légal cessent de produire effet au jour de l'ouverture de la procédure collective
- déclaré le présent jugement opposable à l'AGS CGEA [Localité 6] dont la garantie sera déterminée selon les modalités et limites résultant des dispositions des articles L. 3253-6 et suivants du code du travail
- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision
- débouté les parties du surplus de leurs demandes respectives
- dit que les dépens seront inscrits au passif de la liquidation judiciaire de la SA CG Sales Networks France.
Le 15 juillet 2021, M. [R] a interjeté appel de la décision du conseil de prud'hommes de Paris.
Aux termes de ses dernières conclusions, notifiées le 12 mars 2024, M. [R], appelant, demande à la cour de :
- confirmer le jugement déféré, en ce qu'il a jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse son licenciement pour faute grave par la SA CG Sales Networks France, prise en la personne de son mandataire liquidateur, et condamné cette dernière aux sommes suivantes, fixées au passif de sa liquidation judiciaire :
* 19 300,97 euros à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire, outre 1 930,09 euros au titre des congés payés afférents
* 530 366,49 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 53 036,64 au titre des congés-payés afférents
* 166 696,83 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement
* 1 054 147 euros à titre d'indemnité contractuelle de rupture
* 550 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
* 29 009,32 euros à titre de rappel de salaire sur bonus contractuel au titre de la période comprise entre le 1er décembre 2014 et le 31 mars 2015, outre 2 900,93 euros au titre des congés payés afférents
* 461 783,30 euros à titre de rappel de salaire sur bonus contractuel au titre de la période comprise entre le 1er avril 2016 et le 31 janvier 2017, outre 46 178,33 euros au titre des congés payés afférents
* 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- confirmer le jugement prononcé le 25 juin 2021 par le conseil de prud'hommes de Paris, en ce qu'il a déclaré le jugement opposable à l'AGS CGEA [Localité 6]
Mais :
- infirmer le jugement déféré, en ce qu'il l'a débouté de ses différentes demandes relatives à l'existence d'un coemploi à l'encontre de la Société CG Power Sytems Belgium N.V, et a ordonné la mise hors de cause de Maître [G] [ZE], Maître [KM] [F] et Maître [A] [KY], en leur qualité de curateurs de la Société CG Power Systems Belgium N.V, pour ne fixer sa créance qu'au seul passif de la liquidation judiciaire de la SA CG Sales Networks France
Et, statuant à nouveau :
- juger la Société CG Power Systems Belgium N.V, prise en la personne de ses Curateurs, co-employeur
En conséquence
- condamner in solidum les Sociétés GC Sales Network France SA, prise en la personne de son mandataire liquidateur, et CG Power System Belgium N.V prise en la personne de ses Curateurs, à lui verser les sommes suivantes telles que fixées au titre du jugement :
* 19 300,97 euros à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire, outre 1 930,09 euros au titre des congés payés afférents
* 530 366,49 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 53 036,64 au titre des congés-payés afférents
* 166 696,83 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement
* 1 054 147 euros à titre d'indemnité contractuelle de rupture
* 550 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
* 29 009,32 euros à titre de rappel de salaire sur bonus contractuel au titre de la période comprise entre le 1er décembre 2014 et le 31 mars 2015, outre 2 900,93 euros au titre des congés payés afférents
* 461 783,30 euros à titre de rappel de salaire sur bonus contractuel au titre de la période comprise entre le 1er avril 2016 et le 31 janvier 2017, outre 46 178,33 euros au titre des congés payés afférents
- 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile (devant le conseil de prud'hommes)
- infirmer le jugement prononcé le 25 juin 2021 par le conseil de prud'hommes de Paris, en ce qu'il l'a débouté de sa demande en dommages-intérêts (176 788 euros) pour conditions brutales et vexatoires du licenciement et de sa demande en remboursement des frais exposés (7 000 euros), auprès du Cabinet Exco Paris
Et, statuant à nouveau,
- condamner in solidum les sociétés GC Sales Networks France SA, prise en la personne de son mandataire liquidateur, et CG Power System Belgium N.V, prise en la personne de ses Curateurs, à lui verser les sommes suivantes :
* 176 788 euros à titre de dommages-intérêts pour conditions brutales et vexatoires du licenciement
* 7 000 euros à titre de remboursement des frais exposés, auprès du Cabinet Exco Paris
* 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile (en cause d'appel)
- juger l'arrêt à venir opposable à l'AGS CGEA [Localité 6] et à l'AGS [Localité 6] Faillites Transnationales.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 15 février 2024, la société CG Power Systems Belgium, représentée par Maître [G] [ZE], Maître [KM] [S] et Maître [A] [KY], en qualité de curateurs, intimée, demande à la cour de :
Sur appel principal :
- déclarer les demandes irrecevables en ce qu'elles tendent à la condamnation des sociétés CG Power System Belgium NV et SA CG Sales Network France
- déclarer en tout état de cause l'appel mal fondé
- confirmer le jugement en ce qu'il a :
- débouté M. [R] de ses demandes relatives à l'existence d'un co-emploi formé à l'encontre de la société CG Power System Belgium NV
- ordonné leur mise hors de cause.
A titre subsidiaire, sur appel incident :
Si par impossible la cour devait infirmer le jugement en ce qu'il a mis hors de cause les curateurs de la société CG Power Systems Belgium NV,
- infirmer le jugement en ce qu'il a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse et fixé la créance de M. [R] au passif de la liquidation judiciaire de la SA CG Sales Network France aux sommes suivantes :
* 19 300,97 euros à titre de rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire outre 1 930,09 euros au titre des congés payés afférents
* 530 366,49 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 53 036,64 euros au titre des congés payés afférents
* 166 696,83 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement
* 1 054 147 euros à titre d'indemnité contractuelle de rupture
* 550 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
* 29 009,32 euros à titre de rappel sur bonus contractuel au titre de la période comprise entre le 1er décembre 2014 et le 31 mars 2015 outre 2.900,93 euros au titre des congés payés y afférents
* 461 783,30 euros à titre de rappel sur bonus contractuel au titre de la période comprise entre le 1er avril 2016 et le 31 janvier 2017 outre 46.178,33 euros au titre des congés payés y afférents
* 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Statuant à nouveau :
- dire et juger que le licenciement de M. [R] repose sur une faute grave
- débouter M. [R] de toutes ses demandes de condamnation in solidum à l'encontre des sociétés CG Sales Network France SA, prise en la personne de son mandataire liquidateur et CG Power Systems Belgium NV, prise en la personne de ses curateurs
A titre infiniment subsidiaire :
Si par impossible la cour devait juger que le licenciement ne repose pas sur une faute grave,
- juger que l'indemnité de préavis s'élève à 288 264,78 euros bruts
- juger que l'indemnité de licenciement s'élève à 134 504,88 euros bruts
- juger que l'indemnité prévue à l'article 11 c) du contrat de travail de M. [R] n'est pas applicable si le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse
Ou, à titre subsidiaire,
- déclarer et juger cette clause nulle en ce qu'elle a pour effet de rendre impossible le licenciement,
En conséquence,
- débouter M. [R] de sa demande d'indemnité prévue à l'article 11 c) du contrat de travail d'un montant de 1 054 147 euros brut,
Ou, à titre tout à fait subsidiaire,
- juger que cette clause est une clause pénale et réduire l'indemnité prévue par cette clause sur le fondement de l'article L 1231-5 du code civil,
Ou, à titre infiniment subsidiaire,
- juger que cette clause inclut l'intégralité du dommage lié à la rupture du contrat de travail et inclut donc notamment l'indemnité conventionnelle de licenciement ainsi que l'indemnité éventuellement due au titre de l'article L. 1235-3 du code du travail
- débouter en conséquence M. [R] de sa demande de paiement de 620 000 euros bruts au titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse
- leur donner acte du fait qu'ils reconnaissent devoir la somme de 21 296 euros brut au titre de la prime variable
- débouter M. [R] de toutes ses autres demandes au titre de sa prime variable
- condamner M. [R] à leur payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- le condamner aux entiers frais et dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 26 janvier 2022, l'UNEDIC Délégation AGS CGEA [Localité 6], intimée, demande à la cour de :
A titre principal
- confirmer le jugement sur le rejet de la demande de reconnaissance de co-emploi,
- juger qu'il n'y a pas de situation de co-emploi
- juger que le licenciement de M. [R] repose sur une faute grave
En conséquence,
- réformer le jugement pour le surplus,
- débouter [R] de l'ensemble des demandes afférentes à la rupture
A titre subsidiaire,
- minorer le montant du préavis qui sera calculé sur la base du salaire fixe
- minorer le montant de l'indemnité de licenciement
- débouter M. [R] de sa demande au titre de l'indemnité contractuelle de rupture
- débouter M. [R] de sa demande au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
- débouter M. [R] de ses demandes au titre de la part variable du salaire
- débouter M. [R] de sa demande au titre des frais du cabinet d'expertise comptable
- exclure de la garantie de l'AGS la demande au titre des frais engagés auprès du cabinet d'expertise
- fixer au passif de la liquidation les créances retenues,
- dire le jugement opposable à l'AGS dans les termes et conditions de l'article L 3253-19 du code du travail,
Vu les articles L.3253-6, L.3253-8 et L.3253-17 du code du travail.
Dans la limite d'un des trois plafonds toutes créances brutes confondues,
- exclure de l'opposabilité à l'AGS la créance éventuellement fixée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- exclure de l'opposabilité à l'AGS l'astreinte,
- dire n'y avoir lieu à exécution provisoire en présence de conséquences manifestement excessives,
Vu l'article L 621-48 du code de commerce,
- rejeter la demande d'intérêts légaux,
- dire ce que de droit quant aux dépens sans qu'ils puissent être mis à la charge de l'AGS.
La SCP BTSG, prise en la personne de Maître [M] [L] , en qualité de liquidateur de la société CG Sales Networks France, n'a pas constitué avocat ni conclu en cause d'appel.
Il résulte de l'article 954 dernier alinéa du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas est réputée s'en approprier les motifs.
La cour retient donc que la SCP BTSG, prise en la personne de Maître [M] [L], en qualité de liquidateur de la société CG Sales Networks France, est réputé s'approprier les motifs du jugement.
Conclusions auxquelles la cour se réfère expressément pour un plus ample exposé des faits de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 13 mars 2024.
L'audience de plaidoirie a été fixée au 18 mars 2024.
MOTIFS DE LA DECISION
1- Sur le coemploi
M. [R] soutient qu'un coemploi doit être retenu parce que la société CG Sales Network France SA n'avait aucune autonomie décisionnelle et économique, et que la société CG Power Systems Belgium NV était seule décisionnaire et donneuse d'ordre en ce qu'elle déterminait la politique commerciale dans son ensemble, le volume de personnel nécessaire à sa conduite, les prix et les coûts des produits, l'ensemble des conditions de vente, les aspects techniques et de livraison et la résolution des problèmes avec les clients.
A l'appui de ses affirmations, il produit la convention de prestations commerciales signée le 11 juin 2010 entre la société CG Sales Network France et la société CG Power Systems Belgium (pièce 12), un avenant à cette convention non daté (pièce 17), deux attestations de M. [U], Directeur Administratif et Financier (pièces 37 et 39), deux attestations de M. [I], Président Directeur Général de la société CG Sales Network France entre 2014 et 2017 (pièces 38 et 40).
Les curateurs de la société CG Power Systems Belgium rétorquent qu'il n'existe aucun contrat de travail entre M. [R] et la société CG Power Systems Belgium ni aucun lien de subordination. Ils affirment que les pièces versées ne permettent pas d'établir une perte totale d'autonomie de la société filiale française, laquelle a toujours eu une activité de commercialisation des biens produits par la société belge, en passant puis sans plus passer par la maison-mère.
Si l'ancien DAF et l'ancien président affirment qu'ils devaient rendre des comptes à la Belgique, qu'il y avait un contrôle sur les choix stratégiques et décisions importantes en matière de gestion économique et sociale, les autres décisions devant être avalisées, ils affirment que ce contrôle se situe dans le cadre de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés. Ils relèvent que le second ne cite aucun élément précis illustrant la prétendue perte d'autonomie, tandis que le premier, dans une nouvelle attestation, précise qu'il ne pouvait faire de cession de business unit, souscrire des baux commerciaux, faire des emprunts, prendre des participations dans une autre entreprise ou signer des contrats de travail, sans l'accord de la Belgique.
Les curateurs estiment que ces éléments ne démontrent pas une immixtion permanente de la maison-mère dans chacune des décisions de sa filiale, ni une absence totale d'autonomie et l'immixtion permanente dans chacune des décisions.
L'AGS s'associe aux explications des organes de la procédure et affirme que M. [R] ne rapporte pas la preuve qu'il a été placé dans une situation de co-emploi.
Les premiers juges ont retenu que la seule intervention de la société-mère dans la nomination des instances dirigeantes et du contrôle de leur action ainsi que dans la gestion financière de la filiale par le biais d'une convention d'assistance technique et de gestion de trésorerie n'excédant pas la nécessaire coordination des actions économiques entre deux sociétés appartenant à un même groupe, la centralisation des services supports, des conventions de trésorerie et de compensation, des dettes non réglées à la filiale, des facturations des prestations de services partiellement sans contrepartie pour ladite filiale, la maîtrise de la facturation de celle-ci durant une période limitée dans le temps ne peuvent caractériser une situation de co-emploi.
La cour rappelle qu'une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un co-employeur à l'égard du personnel employé par une autre, hors l'existence d'un lien de subordination, que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière. Il y a immixtion sociale à condition que la direction du personnel et la gestion des ressources humaines soient prises en main par la société mère qui ne permet plus à la filiale de se comporter comme le véritable employeur à l'égard de ses salariés.
Il est constant que la société CG Power Systems Belgium commercialisait en France par l'intermédiaire de la société CG Sales Network France, des transformateurs électriques fabriqués par la société Power Systems Belgium, ce qui plaçait la première dans un état de domination économique vis-à-vis de la seconde.
A l'appui de ses affirmations selon lesquelles il y avait une ingérence permanente de la société-mère dans la gestion économique et sociale de sa filiale française, M. [R] produit des attestations émanant de l'ancien PDG et de l'ancien DAF de la société CG Sales Network France.
Le premier, M. [I], atteste que la maison-mère belge appliquait un contrôle étroit et constant, à tous les niveaux : stratégie, gestion économique, gestion sociale, juridique, que toutes les décisions devaient être avalisées par la maison-mère belge suivant des critères imposés par elle-même, et que l'ingérence dans la gestion économique était totale et guidée par les seuls intérêts de la maison-mère. Il ajoute dans une seconde attestation, que la politique salariale était intégralement pilotée par la maison-mère belge.
De son côté, M. [U] évoque l'absence d'autonomie décisionnelle de la structure française s'agissant des choix stratégiques et décisions importantes en matière de gestion économique et sociale qui étaient pris au niveau de la direction belge, et des autres décisions qui devaient être avalisées et répondre à des critères imposés par la Belgique. Il pointe également une ingérence dans la gestion économique, les choix et orientations économiques étant imposés par la Belgique en fonction de ses seuls intérêts. Il précise dans une seconde attestation que la société française ne pouvait pas embaucher, contracter d'emprunt, prendre des participations dans d'autres sociétés, acquérir ou vendre des sociétés ou business unit, prendre de commande directement en son nom ou signer de bail commercial sans l'autorisation de l'entité belge.
Mais, la cour retient que ces attestations formulées dans des termes plus ou moins généraux, ne sont absolument pas circonstanciées ni confirmées par des éléments objectifs extérieurs, et sont donc insuffisantes pour démontrer la perte complète de la capacité d'action de la société française dans sa gestion économique et sociale, étant par ailleurs souligné qu'aucun des deux attestants n'indique que la gestion du personnel aurait été assurée par la société belge.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [R] de sa demande relative à l'existence d'un co-emploi, et mis hors de cause les curateurs de la société CG Power Systems Belgium.
2- Sur l'irrecevabilité des demandes du salarié
Les intimés font valoir que les demandes de condamnation de la société CG Sales Network France sont irrecevables puisque seule une fixation de la créance au passif peut être prononcée, tout comme les demandes de condamnation de la société CG Power Systems Belgium dès lors que celle-ci n'est plus représentée que par ses curateurs.
La cour ayant écarté l'existence d'un co-emploi, la demande concernant la société CG Power Systems Belgium est sans objet.
S'agissant de la société CG Sales Network France, la cour relève que M. [R] sollicite sa condamnation « prise en la personne de son mandataire liquidateur », lequel a été mis dans la cause dès la première instance.
Par ailleurs, en toute hypothèse, et en application de l'article L. 625-3 du code de commerce, alors que les liquidateurs judiciaires de la société sont dans la cause en cette qualité, il appartient à la cour de se prononcer d'office sur l'existence et le montant des créances alléguées en vue de leur fixation au passif, peu important que les conclusions du salarié aient tendu à une condamnation au paiement.
La demande d'irrecevabilité sera en conséquence écartée.
3- Sur le rappel de salaire sur bonus contractuel au titre de la période comprise entre le 1er décembre 2014 et le 31 mars 2015 et de la période comprise entre le 1er avril 2016 et le 31 janvier 2017
M. [R] fait valoir que sa rémunération était composée d'une partie fixe et d'une partie variable fixée à 300 000 euros sur objectifs remplis à 100%. Les objectifs étaient assis sur la performance de l'entreprise pour 40%, sur la Business Unit pour 40% et sur les performances personnelles de M. [R] pour 20%, sachant qu'une rémunération annuelle Globale de 450 000 euros nets de charges sociales et d'impôt sur le revenu était garantie.
Il ajoute que le contrat de travail prévoyait : « Dans l'hypothèse où la rémunération brute aboutirait à une rémunération nette inférieure en raison des prélèvements sociaux, le montant du bonus sera majoré afin de s'aligner sur la rémunération nette minimum. Cette modification devra intervenir au plus tard le 1er mars 2015 ».
Il soutient que la société ne l'a pas informé de la valorisation de sa rémunération brute, ni ne lui a fourni les informations lui permettant d'apprécier ses droits et que ce n'est qu'en faisant appel au Cabinet comptable Exco qu'il a pu le faire.
Il fait valoir qu'il n'a jamais eu connaissance des objectifs qui lui étaient assignés, contrairement à ce que l'article 3c du contrat de travail prévoit, et que le document était rédigé en anglais, alors que tout document comportant des obligations pour le salarié, ou des dispositions dont la connaissance est nécessaire pour l'exécution de son contrat de travail, doit être rédigé en français.
Il soutient donc qu'un rappel sur bonus lui est dû, à hauteur de 29 009,32 euros sur l'exercice compris entre le 1er décembre 2014 et le 31 mars 2015, et de 461 783, 30 euros sur l'exercice compris entre le 1er avril 2016 et le 30 mars 2017, outre les congés payés afférents.
Les curateurs de la société CG Power Systems Belgium rétorquent que le mode de calcul de la prime variable avait été communiqué à M. [R]. Ils soulignent que dans un mail du 7 juin 2016, M. [H] a indiqué au salarié qu'il n'avait pas rempli ses objectifs mais qu'il lui accordait une prime de 326 000 euros pour l'année 2016, et que sont versés aux débats des tableaux pour la période d'avril 2016 à janvier 2017 qui démontrent que M. [R] n'avait pas rempli ses objectifs.
Ils produisent des courriels des 8, 9 et 10 février 2016 qui démontrent que M. [R] connaissait les objectifs de l'Unité Power puisqu'il avait participé à son élaboration, et pouvait les suivre.
Subsidiairement, les curateurs soutiennent que le salarié ne pourrait prétendre qu'à un rappel de 21 296 euros sur l'exercice du 1er avril 2016 au 30 mars 2017.
L'AGS affirme que les objectifs ont été fixés et s'associe aux explications de la société.
Les premiers juges ont fait droit aux demandes de M. [R].
Aux termes de l'article 3c du contrat de travail, « le salarié est en droit de participer au programme de primes défini par le groupe. Le montant de cette prime peut atteindre 300 000 euros brut par an si 100% des objectifs ont été atteints. Elle est calculée au prorata des objectifs atteints par le salarié, tels que définis dans le système d'évaluation du plan de rémunération variable de la société, son montant dépendant de la réalisation des objectifs de la société et du salarié fixés pour l'année. La prime sera acquise pour la période prenant fin en mars 2015, au prorata temporis de la date d'arrivée effective ».
L'article 3d ajoute que si la société décide de mettre un terme au contrat de travail sans motif majeur/sans invoquer de cause grave, une prime calculée au prorata sera versée au salarié jusqu'à la date de la cessation de son contrat de travail.
Selon l'article 3f, « la rémunération nette de charges sociales et d'impôts sur le revenu, en cas de réalisation de tous les objectifs, ne sera pas inférieure à 450 000 euros. Si les prélèvements aboutissent à une rémunération nette inférieure, la prime sera majorée pour que la rémunération nette atteigne ce montant. Cette modification doit intervenir au plus tard le 1er mars 2015 ».
S'agissant de la période comprise entre le 1er décembre 2014 et le 31 mars 2015, M. [R] sollicite l'application des dispositions de l'article 3f qui lui garantissent un revenu annuel net de charges sociales et d'impôts sur le revenu de 450 000 euros.
Le contrat de travail prévoyant une application de cette clause spéciale « au plus tard le 1er mars 2015 » sans autre précision, il sera retenu que ces dispositions étaient applicables dès le 1er décembre 2014, date à laquelle M. [R] a été embauché.
Il ressort du rapport établi par le cabinet Exco (pièce 15 appelant), dont les conclusions ne sont pas contestées par les intimés, qu'après prise en compte de la situation personnelle et fiscale de M. [R], la rémunération nette de charges sociales et d'impôts sur le revenu, garantie en cas de réalisation de tous les objectifs, de 450 000 euros correspond à une rémunération brute de 1 054 148 euros.
L'article 3c accordant à M. [R] pour la période comprise entre décembre 2014 et mars 2015, la totalité de la prime de 300 000 euros correspondant à la réalisation de 100% des objectifs, il était en droit de percevoir une prime de 100 000 euros brut, au prorata des 4 mois.
Puisqu'il était considéré comme ayant réalisé tous ses objectifs, cette prime, en application de l'article 3f, pouvait être majorée afin de lui garantir, pour ces 4 mois, un revenu net de charges sociales et d'impôts de 150 000 euros net (450 000/3) ou 351 382,66 euros brut (1 054 148/3).
Mais la cour constate que M. [R], qui ne produit pas ses bulletins de paie de décembre 2014 à mars 2015, ne justifie pas de son revenu brut, se contentant d'indiquer qu'il a perçu une prime de 155 704 euros.
Faute de verser aux débats les éléments permettant de comparer son revenu brut avec le revenu brut garanti sur la période considérée, M. [R] sera débouté de sa demande et le jugement entrepris sera infirmé.
S'agissant de la période comprise entre le 1er avril 2016 et le 31 janvier 2017, les intimés prétendant que les objectifs fixés au salarié figurent dans le courriel du 7 juin 2016 adressé par M. [H].
La cour constate que M. [H] a adressé le 3 juin 2016 un courriel à M. [R] ayant pour objet la « révision de votre rémunération annuelle » dans lequel il lui notifiait le montant de sa rémunération variable discrétionnaire, pour l'EF 16, soit 326 000 euros. A la demande du salarié, il rappelait dans un second courriel du 7 juin 2016 les paramètres de calcul puis détaillait la performance de la société (50), la performance de l'unité commerciale (91) et l'évaluation individuelle (100), lesquels aboutissait à un facteur de performance de 76.
Ce dernier courriel ne fixe aucun objectif au salarié pour l'exercice à venir.
Il est de droit que, lorsque la rémunération variable dépend d'objectifs définis par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, à défaut de fixation desdits objectifs, la rémunération variable doit être payée intégralement.
M. [R] est donc en droit de réclamer le paiement intégral de la prime au prorata des 10 mois de présence.
Puisque le salarié est considéré comme ayant réalisé tous ses objectifs, cette prime, en application de l'article 3f, peut être majorée afin de lui garantir un revenu annuel net de charges sociales et d'impôts de 450 000 euros, soit pour cette période de 10 mois, 375 000 euros net (450 000x10/12) ou 878 456,66 euros brut (1 054 148 x10/12).
Or, il ressort des bulletins de paie que M. [R] a perçu entre avril 2016 et janvier 2017, un revenu brut de 962 561,92 euros. Il sera en conséquence débouté de sa demande au titre du rappel de prime.
Le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.
4. Sur le licenciement pour faute grave
Selon l'article L 1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.
Constitue une faute grave un fait ou un ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation de ses obligations d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. Il incombe à 1'employeur d'établir la réalité des griefs qu'il formule.
La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est ainsi rédigée :
« Après avoir reçu de multiples déclarations de plusieurs employés concernant votre comportement non conforme, nous avons démarré une enquête interne pour examiner convenablement ces faits qui ont finalement abouti à une réunion avec vous le 31 janvier 2017, pendant laquelle ces faits vous ont été présentés et ont été discutés avec vous.
Lors de cette réunion, il est devenu évident que pendant les quelques derniers mois, il s'est produit de multiples événements qui démontrent clairement que vous n'avez pas respecté, de manière constante, les procédures internes mise en place au sein de CG Sales Network France SA' Les procédures internes mentionnées s'appliquaient à vous dans votre rôle Global de Vice-Président exécutif et de Président Power Business Unit CG, et vous ne les avez pas suivies ainsi que vous n'avez pas suivi les ordres du Conseil d'administration.
Compte tenu de tous ces faits démontrant votre comportement insubordonné évident concernant les procédures internes,', nous considérons que ces faits constituent une faute grave rendant impossible votre maintien même temporaire dans l'entreprise'
Vous trouverez ci-dessous une chronologie détaillée de tous les faits qui ont mené à cette décision, conformément au droit du travail applicable.
Insubordination et non-conformité répétée concernant des procédures internes et les instructions du Conseil d'administration ' violation du contrat de travail
1.
Le 10 janvier 2017, après plusieurs plaintes formulées et déclarations faites par des anciens employés (par exemple Mme [D] et M. [N]), M. [H], vice-président exécutif et chef Global ressources humaines, a décidé qu'une enquête interne ayant pour but de vérifier ces plaintes, devait être réalisée immédiatement.
Ces anciens employés ont prétendu entre autres que vous leur avez donné pour instruction d'effectuer les préparatifs pour le nouvel acheteur potentiel de certaines parties du groupe Crompton Greaves (par exemple l'établissement d'un nouveau site Internet), bien que cette instruction n'était pas en ligne avec celle émanant de CG Holdings Belgium SA, et que vous avez engagé plusieurs personnes à des postes de direction pour le groupe Crompton Greaves en violation des politiques internes et des décisions du Conseil d'administration. Vous avez fait cela alors que le groupe CG n'avait toujours pas clôturé la vente de son « International Power Business » avec l'acheteur potentiel.
Le 11 janvier 2017, l'enquête interne visant à évaluer plus amplement ces faits a démarré.
2.
Par une déclaration officielle de M. [V] du 19 janvier 2017, qu'il a fait dans le cadre de l'enquête interne, nous avons appris que vous avez initialement engagé M. [V] en tant que directeur général Switchgear (poste de direction) pour CG Electric Systems Hungary Zrt, une filiale de CG Power Systems Belgium SA, par le biais d'un contrat de travail, qui devait commencer le 1er juin 2016.
Cependant, vous étiez bel et bien au courant du fait que CG Electric Systems Hungary allait réduire son cycle de production et n'accepterait pas de nouvelles offres et en conséquence, que le Conseil d'administration n'autorisait pas d'engagement pour des postes de direction. En outre, l'approbation de M. [H] était nécessaire pour les termes et conditions d'emploi de tels individus, comme prescrit dans les Règles de procédure Globale du groupe CG.
Les procès-verbaux du Conseil d'administration émanant de CG Holdings Belgium SA et afférents à la réunion du 19 mai 2016, indiquent clairement que CG Electric Systems Hungary réduirait ses activités et qu'aucune augmentation du coût d'exploitation ne pouvait avoir lieu et donc qu'aucun nouvel employé ne pouvait être engagé :
« Pour améliorer la visibilité financière dans SWHU, le Conseil a proposé de réduire la durée du cycle de production, d'arrêter de prendre d'autres ordres, de suspendre toute augmentation de salaire pour le moment ; les directives des Business Heads doivent être transmises à toutes les personnes concernées avec la mention claire qu'il ne doit y avoir aucune garantie de la maison-mère pour de nouveaux appels d'offres et aucune augmentation dans la structure du coût opérationnel ».
En votre qualité d'administrateur et d'administrateur délégué de CG Holdings Belgium SA, vous avez assisté à cette réunion et vous étiez donc bel et bien au courant de celle-ci.
En outre, les Règles de procédure Globales CG pour le management, auxquelles vous avez assuré vous conformer à tout moment au moyen d'une déclaration écrite, mentionne clairement ce qui suit :
« Pour tous les recrutements au niveau de la direction, le chef RH Global doit être impliqué dans le processus de recrutement. L'évaluation de candidat doit être réalisée par un comité consistant en le chef RH Global et au moins deux membres du comité exécutif. Si le candidat doit rapporter directement au CEO, en plus de ce qui est stipulé ci-dessus, le CEO doit également être impliqué dans le processus de sélection.
Rémunération Globale :
Si toutefois les rémunérations Globales proposées en vue d'être offertes sont dans le top de 20 % des rémunérations Globales du groupe respectif, une telle rémunération Globale ne peut être offerte qu'après l'approbation donnée par le chef RH régional de la région géographie concernée. En pareil cas, pour le niveau d'un poste de direction, l'approbation du chef RH Globale est requise».
Dans le cas d'espèce, M. [H] en tant que chef RH Global n'a jamais été impliqué dans le recrutement de M. [V] et vous avez néanmoins décidé d'offrir un contrat de travail à M. [V] à des termes et conditions qui étaient bien plus élevés qu'auparavant dans la direction hongroise.
Vous avez ensuite décidé de résilier le contrat de travail de M. [V] le premier jour de son emploi. M. [E] [P] (directeur RH Powers business et EMEA) a contacté M. [V] à la demande de M. [JE] [N] afin qu'il se rende directement au bureau de CG holdings Belgium SA situé à [Localité 8]. Là, il a été informé par M. [N] que son contrat de travail vous causait des problèmes (étant donné qu'il n'était pas conforme aux directives de la société).
M. [V] a été informé que son engagement en tant qu'employé n'était en effet pas possible, étant donné que non seulement il n'était pas autorisé par le Conseil d'administration d'engager des personnes à des postes de direction sans l'approbation de la direction indienne, mais aussi qu'il y avait une décision du Conseil d'administration, émanant du groupe Crompton Greaves, selon laquelle la production de la division Switchgear serait réduite et qu'aucun nouvel employé ne pouvait être engagé.
Pour contourner les décisions prises par le Conseil d'administration et les règles de procédure Globales, vous avez offert à M. [V] un contrat de consultance d'une durée fixe initiale de quatre mois (soit jusqu'à la fin du mois de septembre 2016).
Offrir un contrat de consultance après qu'un contrat d'employé était établi constitue non seulement une violation des décisions du Conseil d'administration et des politiques internes, mais cela peut aussi potentiellement exposer la société qui engage (et donc que le groupe Crompton Greaves) à de sérieuses réclamations de requalification du contrat de consultance en contrat de travail.
Cependant, étant donné vous étiez bel et bien conscient que vous ne suiviez pas la procédure décrite et que vous aviez violé toutes les décisions prises par le Conseil d'administration à cet égard, vous avez donné à M. [K], Directeur industriel Global, l'instruction que M. [V] ne pouvait en aucun cas quitter son bureau et qu'il devait se cacher lorsque la direction indienne était présente dans les locaux de l'entreprise. En effet, la direction indienne ne devait pas connaître l'existence/le rôle de M. [V] au sein de la société.
Ce qui précède constitue une grave violation de toutes les procédures internes au sein du groupe Crompton Greaves et une sérieuse violation de votre contrat de travail. Non seulement vous étiez bel et bien conscient que la production de la division Switchgear serait réduite et qu'aucun employé ne pouvait être engagé, mais vous avez agi de votre propre initiative, sans obtenir la moindre approbation préalable, et vous avez même forcé M. [V] à se cacher pour couvrir votre comportement insubordonné, ce qui n'est pas acceptable, en particulier compte tenu de votre position en tant que vice-président exécutif au sein du groupe Crompton Greaves.
3.
En outre, au niveau opérationnel, la division Switchgear de CG Electric Systems Hungary n'était plus autorisée à prendre de quelconques offres fermes, selon les instructions de la direction indienne et du Conseil d'administration (voir la décision ci-dessus la décision émanant du Conseil d'administration du 19 mai 2016), compte tenu de l'intention de vendre la société.
Toutefois, la déclaration de M. [V] du 19 janvier 2017 nous a appris que sur votre instruction et avec une pleine participation de votre part, plusieurs propositions/offres ont été émises à l'intention de clients entre le mois de juin 2016 et le mois de novembre 2016, afin de créer suffisamment de travail pour le nouvel acheteur potentiel de la société, bien que cela n'était pas en ligne avec les instructions des divers organes d'administration de CG, en particulier de CG holdings Belgium SA, dans laquelle vous étiez administrateur et administrateur délégué.
Par exemple, vous avez donné pour instruction à M. [V] de faire une offre qui était au maximum 11 % en dessous du prix (« projet Bursa ») afin de vous assurer que CG Electric Systems Hungary gagne le projet.
Comme vous en étiez bel et bien conscient, CG Electric Systems Hungary Zrt voulait limiter son activité et n'était plus autorisée à prendre de quelconques offres fermes selon les instructions de la direction indienne et du Conseil.
Lorsque le client vous a demandé de confirmer l'offre, vous étiez incapable de la confirmer par écrit, étant donné qu'elle n'avait pas été approuvée par CG holdings Belgium SA. Comme vous avez réalisé qu'une telle confirmation mettrait votre poste en danger, vous avez donné pour instruction à M. [V] de convaincre le client que CG Electric Systems Hungary Zrt commencerait le travail aussi rapidement possible. À cet égard, vous avez également donné pour instruction à M. [V] de préparer les dessins préliminaires et de prendre toutes les mesures nécessaires pour garder le projet en vie.
4.
La déclaration de M. [V], émise le 19 janvier 2017, mentionne en outre que le 20 juin 2016, CG Electric Systems Hungary Zrt a soumissionné pour un autre appel d'offres liées à Scottish Power qui est une grande société de services publics. Bien que non conforme avec les instructions émanant de la direction indienne et du Conseil d'administration, CG Electric Systems Hungary Zrt a soumissionné pour l'appel d'offres et a gagné l'ordre.
Vous avez donné pour instruction à M. [V] de ne pas confirmer cet ordre par écrit, mais de garder le projet en vie jusqu'au 7 décembre 2016, qui était la date prévue pour la vente de la société. Vous avez informé M. [V] qu'après que la vente ait lieu, l'ordre serait confirmé par écrit.
Par ailleurs, vous avez affirmé à plusieurs reprises à M. [V] que vous deviez garder l'usine occupée jusqu'à l'arrivée du nouveau propriétaire, afin de créer suffisamment de travail pour le nouveau propriétaire. À cet égard, vous avez donné pour instruction à M. [V] de commencer des tests sans le moindre financement.
Lors d'une réunion de direction avec l'équipe de la direction hongroise à la fin du mois de novembre 2016, M. [V] vous a demandé quand un financement serait rendu disponible pour ces tests. Non seulement vous êtes visiblement devenu agacé, vous avez commencé à crier sur M. [V] que « vous n'aviez pas l'argent » mais vous lui avez aussi sauté dessus, vous l'avez saisi par les épaules et avez crié qu'il devrait « parler au mur ».
Non seulement vos actions montrent un manque total d'intégrité, mais attaquer verbalement et agresser physiquement une personne (que ce soit un employé ou un consultant de CG Electric Systems Hungary Zrt) est inacceptable. Et ce d'autant plus à la lumière de votre fonction et de vos responsabilités.
5.
Le 7 décembre 2016, la transaction avec l'acheteur potentiel de la société a échoué. M. [V] affirme officiellement que vous lui avez donné pour instruction d'informer les sociétés ci-dessus (entre autres Scottish Power) que CG Electric SystemsHungary Zrt ne pouvait pas procéder aux ordres gagnés.
Cependant, M. [V] n'était pas autorisé à faire cela, étant donné qu'il était un consultant. En outre, vous avez refusé de signer toute documentation officielle pour informer les sociétés de la résiliation des contrats.
Par conséquent, le directeur des ventes a finalement envoyé un e-mail au client pour annuler l'exécution des contrats.
6.
Outre les faits mentionnés ci-dessus, l'enquête interne a clairement illustré que vous avez donné pour instruction :
- d'engager un chef des ventes EMEA (M. [J]) le 28 septembre 2016 en qualité de consultant, sans consulter le chef RH Global (M. [H])
- d'engager un directeur général pour Distribution Transformers Belgium (M. [X]) en tant que consultant le 2 septembre 2016, sans consulter le chef RH Global (M. [H])
- d'engager un Supply Chain director (M. [W] [B]) avec un contrat de travail à durée indéterminée qui a été signé le 2 septembre 2016 et entrait en vigueur en janvier 2017, de nouveau sans l'approbation du chef RH Global (M. [H]).
En outre, il est apparu clairement que tous ces individus ont été engagés à des conditions de rémunération très généreuses, lesquelles étaient substantiellement plus élevées que le salaire normal des employés occupant un poste de direction, par exemple M. [J] avait droit à une allocation mensuelle brute de GBP 32 500 pour ses services de consultance, tandis que M. [W] [B] avait droit à une rémunération Globale annuelle brute de plus de EUR 177 000, avec d'autres conditions d'emploi très généreuses, notamment une clause avantageuse en matière de préavis et d'autres indemnités supplémentaires.
M. [H] s'est initialement rendu compte de ces événements après que M. [N] prétende dans une lettre officielle datée du 10 janvier 2017 qu'il a engagé ces profils en tant que directeur RH EMEA et en coordination avec vous.
Après l'enquête interne qui a démarré le 11 janvier 2017, M. [H] a uniquement appris que ces allégations étaient effectivement exactes le 31 janvier 2017, date à laquelle la réunion avec vous a eu lieu.
Ce comportement constitue de nouveau une violation totale des règles de procédure Globale CG pour le management et montre une méprise dans votre chef des décisions prises par le Conseil d'administration de CG Holdings Belgium SA dont vous êtes un administrateur et administrateur délégué.
En effet, les Règles de procédure Globale CG pour le management, qui sont postées sur l'intranet du groupe et qui sont connues de vous, puisque vous avez également confirmé les avoir reçues et comprises au moment de votre désignation en tant qu'administrateur et administrateur délégué de CG Holdings Belgium SA, indiquent clairement que :
« Pour tous les recrutements au niveau de la direction, le chef RH Global doit être impliqué dans le processus de recrutement. L'évaluation de candidat doit être réalisée par un comité consistant en le chef RH Global et au moins deux membres du comité exécutif. Si le candidat doit rapporter directement au CEO, en plus de ce qui est stipulé ci-dessus, le CO doit également être impliqué dans le processus de sélection.
Rémunération Globale :
Si toutefois les rémunérations Globales proposées en vue d'être offertes sont dans le top de 20 % des rémunérations Globales du groupe respectif, une telle rémunération Globale ne peut être offerte qu'après l'approbation donnée par le chef RH régional de la région géographie concernée. En pareil cas, pour le niveau d'un poste de direction, l'approbation du chef RH Global est requise».
Décider d'engager toute une équipe de personnes à des postes de direction pour lesquels l'implication du chef RH Global est toujours requise, constitue une violation de la politique, étant donné qu'afin d'engager ces individus à un poste de direction, deux approbations sont nécessaires :
- la première pour les recruter à des postes de direction à temps plein
- la seconde pour l'approbation de leurs termes et conditions (rémunération globale)
En outre, le recrutement de consultant pour contourner les règles et la législation qui s'applique aux employés expose la société qui engage (et donc le groupe Crompton Greaves) a de sérieuses réclamations de requalification du contrat de consultance en contrat de travail, risques pour lesquels vous êtes bel et bien conscient étant donné votre qualité de vice-président exécutif.
7.
Au cours de l'enquête, il est également apparu clairement que vous avez donné pour instruction à M. [N] de chercher une personne pour le poste de Systems Indonesia General manager.
Toutefois, pendant le Conseil d'administration HBE qui avait eu lieu le 19 juillet 2016, le Conseil avait expressément décidé ce qui suit :
- pour les ouvriers et les employés, les demandes de remplacement doivent être prises en considération et les recrutements pour de nouveaux postes doivent être suspendus
- la direction locale doit prendre une décision concernant les remplacements des employés à travers toutes les unités
- il a été noté que le poste d'ingénieur en Hongrie était mentionné comme étant un nouveau poste. À cet égard M. [T] a expliqué au Conseil qu'il s'agissait d'un remplacement pour des ressources existantes. Le conseil a noté la même chose et a recommandé que l'introduction de nouveaux personnels et la sortie du personnel (non performant) existant identifié devrait être parallèle (un certain temps de chevauchement serait peut-être requis)
- le poste SYID ne devrait pas faire l'objet d'un recrutement et M. [Z] assumera la responsabilité additionnelle
- le poste de directeur des ventes EMEA doit être rempli, mais cela ne doit pas être considéré comme un remplacement de M. [C] [KB], mais à un niveau inférieur au niveau GM
- le poste de gestionnaire de la chaîne d'approvisionnement doit également être rempli à un niveau inférieur à GM pour diriger la chaîne d'approvisionnement dans le périmètre, et non en tant que remplacement de M. [Y] [O] ».
En tant que membre du conseil, vous étiez bel et bien au courant des décisions prises durant les réunions du Conseil d'administration et de l'obligation de vous y conformer. Non seulement vous n'avez pas impliqué M. [H] dans le processus de recrutement à partir du début du recrutement, mais vous ne vous êtes pas non plus conformé aux instructions du conseil et vous avez trompé M. [H] et le conseil. Après ladite réunion du Conseil d'administration, vous n'avez pas entrepris d'action pour arrêter le recrutement. Au contraire, vous avez été de l'avant et vous les avez engagés à des termes et conditions bien plus élevés que ce que le Conseil d'administration avait décidé.
8.
Le 20 janvier 2017, M. [H] vous a envoyé une convocation pour une réunion le 31 janvier 2017 afin de discuter de toutes les plaintes et de tous les faits qui ont été collectés en ce qui concerne votre comportement. Durant cette réunion, vous n'avez pas réfuté avec conviction les allégations qui ont été faites.
Cela montre une fois de plus un manque total d'intégrité dans votre communication et dans votre comportement.
Durant cette réunion, nous avons donc obtenu suffisamment de certitude concernant tous les faits, ce qui justifie notre décision de résilier votre contrat de travail pour faute grave' ».
Les curateurs de la société CG Power Systems Belgium soutiennent qu'au mépris des décisions prises par le Conseil d'administration les 19 mai 2016 et 19 juillet 2016 (pièces 4 et 5 intimés) et en violation des Règles de procédure interne de management du CG Group (pièce 2 intimés), M. [R] a procédé à l'embauche de plusieurs personnes, à savoir MM. [V], [J], [W] et [X], et engagé une procédure de recrutement d'un Responsable Activité Système Indonésie (SYID) à l'insu de M. [H], Directeur Mondial des Ressources Humaines. Ils ajoutent que, sur la demande de M. [R], des appels d'offres ont été émis par la filiale hongroise, ce qui allait à l'encontre des instructions du Conseil d'Administration de CG Holdings Belgium SA.
M. [R] rétorque que les griefs qui lui sont reprochés sont dépourvus de toute substance.
Il relève que l'ensemble des membres de la Direction Globale avaient tous été licenciés au 13 décembre 2016 et qu'il était le dernier en poste lors de son licenciement, lequel serait la conséquence de la réorganisation intervenue. Il soutient que la procédure aurait dû reposer sur un motif économique. Il prétend ensuite que, durant la phase de transition avant l'éventuel rachat de la société, son employeur et le potentiel acheteur avaient décidé qu'il devait assurer une gestion normale des affaires. Ainsi, concernant les recrutements, il devait consulter l'acheteur potentiel lorsque l'embauche dépassait un certain montant. Il affirme que la société a toujours donné son accord. Concernant le recrutement de M. [V], M. [R] affirme qu'il avait bien avisé le Conseil d'administration et que ce remplacement s'effectuait sans augmentation par rapport au coût opérationnel budgété par la structure. Il réfute avoir donné instruction à celui-ci de remettre des offres aux clients et souligne qu'il n'y a eu aucune prise de commande. Concernant le recrutement de M. [J], M. [R] fait valoir que la société n'était engagée que pour une durée de 3 mois et avait été informée de ce recrutement, tout comme pour M. [W] ou M. [X]. Il soutient enfin que les griefs relatifs aux embauches étaient tous prescrits lors de la mise en 'uvre de la procédure de licenciement.
L'AGS affirme s'en remettre aux explications des organes de la procédure et que le licenciement repose sur une faute grave.
Les premiers juges ont retenu que les griefs de recrutement de plusieurs personnes à des postes de direction à des conditions de rémunération très généreuses sans avoir consulté et/ou obtenu l'approbation du chef RH Global étaient prescrits, et que l'employeur ne justifiait pas suffisamment, ses propres affirmations mises à part, de la réalité et de la matérialité des griefs allégués.
La cour retient les éléments suivants.
- Le seul contrat mis en 'uvre avec M. [V] est un contrat de consultant conclu le 31 mai 2016 avec la société BON Consulting, représentée par celui-ci (pièce 6 intimés). La question de ce recrutement en Hongrie a été abordée lors du Conseil d'administration du 19 juillet 2016 (pièce 5 intimée). Ce grief tenant au non-respect des procédures internes était prescrit lors de l'envoi de la convocation à l'entretien préalable le 20 janvier 2017, puisque la Direction en avait eu connaissance dès juillet 2016.
- Dans son attestation établie le 19 janvier 2017, soit trois jours seulement avant l'envoi de la convocation à l'entretien préalable, M. [V] évoque des violences physiques qui auraient été commises sur sa personne par M. [R] ainsi que des man'uvres destinées à cacher sa présence à la direction indienne présente dans le bureau hongrois. Ces affirmations, qui ne sont corroborées par aucune pièce, sont contredites par M. [J], consultant, (pièce 18 appelant) et M. [K], Directeur des opérations, (pièce 19 appelant). Le doute devant profiter au salarié, ce grief n'est pas caractérisé.
- M. [W] a été recruté le 2 septembre 2016 en qualité de Global Supply Chain Director (pièce 12 intimée), sachant que, lors du Conseil d'administration du 19 juillet 2016, il avait été décidé que ce poste devait être pourvu à un niveau inférieur au poste de DG (pièce 5 intimés). La cour relève que ce recrutement a fait l'objet d'un échange entre M. [H] et M. [N], DRH, le 20 octobre 2016 (pièce 31 appelant). Ce grief était donc prescrit lors de l'engagement de la procédure de licenciement le 20 janvier 2017.
- M. [X] aurait, selon les intimés, été recruté en qualité de Directeur général Distribution Transformers en septembre 2016. Le contrat de travail n'est pas produit et le salarié soutient qu'il n'occupait qu'un poste d'adjoint au DG. La cour relève que dans un courriel du 4 novembre 2016, M. [H] indiquait à M. [N], DRH, qu'il avait appris la veille ce recrutement (pièce 33 appelant). Ce grief était donc prescrit puisque la Direction en était informée dès le 3 novembre 2016.
- M. [J] a été recruté dans le cadre d'un contrat de consultant le 28 septembre 2016, à effet du 5 octobre au 31 décembre, sur un poste de « sales operation and management » (pièce 10 intimée).
Lors du Conseil d'administration du 19 juillet 2016, il avait été décidé que le poste de Directeur des ventes devait être pourvu, non pas en remplacement du poste de M. [KB] mais à un niveau inférieur au poste de DG (pièce 5 intimés). La cour retient que l'emploi de consultant, par sa nature et sa durée, ne peut être considéré comme équivalent à celui d'un Directeur des ventes, que le principe d'un recrutement était acquis et que les intimés ne démontrent pas que les honoraires prévus soit 32 500 livres par mois se situaient dans les 20% les plus élevés de la rémunération du groupe nécessitant l'approbation du DRH mondial, conformément aux Règles de procédure interne de management du CG Group. Ce grief n'est pas caractérisé.
- Le cabinet Spencer Stuart a été missionné le 3 juin 2016 (pièce 13 intimés) dans le cadre du recrutement d'un Responsable activité Système Indonésie (SYID). Lors du Conseil d'administration du 19 juillet 2016, il a été décidé que ce poste ne devait pas être recruté (pièce 5 intimés). Il est reproché à M. [R] de ne pas avoir impliqué M. [H], DRH mondial, dans cette procédure et de ne pas avoir entrepris d'action pour arrêter ce recrutement. La cour relève que le recours à ce cabinet de recrutement, qui est un préalable à la procédure même de recrutement, est antérieur à la décision contraire prise par le Conseil d'administration. M. [R] ne conteste pas ne pas avoir contacté le cabinet de recrutement pour lui faire part de ce qu'il était mis fin à sa mission et il a été procédé au paiement de la troisième et dernière tranche prévue au contrat. La cour relève cependant que la société ne démontre pas que les stipulations du contrat auraient permis, dans de telles circonstances, de ne pas procéder à ce dernier paiement contractuellement prévu. Ce grief n'est pas caractérisé.
- S'agissant enfin des appels d'offres qui, selon M. [V], auraient été émis par la filiale hongroise entre juin et novembre 2016, les intimés soulignent que le Conseil d'administration avait, le 19 mai 2016, « proposé d'arrêter de prendre d'autres commandes » (pièce 3 intimés) et que ces appels d'offres allaient à l'encontre de cette décision. La cour relève que les intimés ne font état ni ne démontrent que des commandes auraient effectivement été passées par la filiale hongroise.
Ce grief n'est pas caractérisé.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu'il a dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
En application des dispositions de l'article L.1235-3 du code du travail, dans sa version applicable au litige, le juge octroie au salarié une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.
Eu égard à l'âge de M. [R] à la date du licenciement, à savoir 59 ans, à son ancienneté de plus de 2 ans dans la société, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il lui a alloué, en réparation de son entier préjudice au titre de la rupture abusive, la somme de 550 000 euros, comme sollicité par l'appelant.
Le salarié peut, également, légitimement prétendre à l'allocation des sommes suivantes, calculées sur la base du salaire brut de 48 044,13 euros :
- 288 264,78 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis (préavis d'une durée de 6 mois selon l'article 11a du contrat de travail en l'absence de cause réelle et sérieuse, )
- 28 826,47 euros au titre des congés payés afférents
- 19 217,65 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire ( du 23 janvier au 3 février 2017 soit 12 jours ), outre 1 921,76 euros au titre des congés payés afférents.
Le jugement sera infirmé sur ces points.
5. Sur l'indemnité contractuelle de rupture
Aux termes de l'article 11c du contrat de travail, si la société décide de mettre un terme au contrat de travail sans motif, elle doit alors verser une indemnisation égale à 12 mois de salaire et 100% de la prime cible pour l'année d'exécution.
Les curateurs de la société CG Power Systems Belgium demandent que cette clause soit déclarée nulle puisque son montant manifestement excessif rendrait le licenciement impossible, ou subsidiairement qu'elle soit qualifiée de clause pénale et réduite en raison de son caractère excessif, ou très subsidiairement qu'il soit dit qu'elle couvre l'intégralité du dommage lié à la rupture du contrat de travail, sans cumul possible avec les autres indemnités.
Les premiers juges ont considéré qu'aucune nullité de cette clause pour montant excessif ne pouvait être retenue et que les circonstances de l'espèce ne commandaient aucunement de réduire le montant de cette clause pénale en l'absence de caractère manifestement excessif de celle-ci.
La cour retient que les intimés ne démontrent pas en quoi cette clause était de nature à faire échec au droit de l'employeur de licencier le salarié, même si son montant pouvait avoir un effet dissuasif, et rejette par conséquent la demande de nullité.
La clause d'indemnité contractuelle de rupture, qui consiste à convenir par avance du versement au salarié, en cas de rupture du contrat de travail, d'une indemnité forfaitaire, s'analyse en une clause pénale qui peut être minorée si elle présente un caractère manifestement excessif, sur le fondement de l'article 1152 du code civil, dans sa version applicable au litige.
En l'espèce, l'application de la clause liant les parties aboutit à un montant dû de :
(12 x 48 044,13) + (326 000 x 2 /12) + (300 000 x10/12) = 880 862,89 euros
soit 12 mois de salaire + prime variable sur 12 mois (326 000 euros au prorata des mois de février et mars 2016 + 300 000 euros au prorata pour la période d'avril 2016 à janvier 2017)
Au regard du doublement de l'indemnité de préavis déjà prévu par le contrat de travail, de la durée de la relation salariale et de la liquidation judiciaire de la société, l'indemnité contractuelle de licenciement présente un caractère manifestement excessif et doit ainsi être diminuée à la somme de 300 000 euros. Le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.
Selon l'article R.1234-5 du code du travail, l'indemnité contractuelle de licenciement, qui, en l'espèce, est la plus avantageuse, ne se cumule pas avec l'indemnité de licenciement conventionnelle telle que prévue par l'article 29 de la convention collective applicable (1/5 mois par année sans pouvoir être inférieure à 2 mois pour un ingénieur ou un cadre âgé d'au moins 55 ans et de moins de 60 ans, ayant 2 ans d'ancienneté).
Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il a alloué à M. [R] la somme de 166 696,83 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement.
6. Sur le licenciement brutal et vexatoire
M. [R] fait valoir que cette procédure de licenciement assortie d'une mise à pied et fondée sur des faits inexistants, a porté atteinte à sa personne et à son honneur.
Les curateurs de la société CG Power Systems Belgium soutiennent que M. [R] ne démontre pas en quoi la société n'a pas respecté les procédures menant à son licenciement.
L'AGS affirme que M. [R] ne justifie pas son préjudice.
Les premiers juges ont dit que le salarié ne justifiait ni du principe ni du quantum du préjudice allégué ni en toute hypothèse de son caractère distinct de ceux déjà réparés et l'ont débouté de sa demande.
La cour retient que M. [R] ne s'explique ni sur les circonstances qualifiées de brutales et vexatoires de son licenciement ni sur la nature et l'étendue du préjudice dont il demande réparation, préjudice distinct de celui déjà réparé par l'allocation de dommages-intérêts ou indemnités.
C'est donc à bon droit que les premiers juges l'ont débouté de sa demande de ce chef.
7. Sur les autres demandes
La cour rappelle que l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de la société CG SALES NETWORKS France, le 2 juillet 2020, a opéré arrêt du cours des intérêts légaux, en application des dispositions de l'article L.621-48 du code de commerce.
La SCP BTSG, prise en la personne de Maître [M] [L], en qualité de mandataire liquidateur de la société CG Sales Networks France, sera condamnée à verser à M. [R] la somme de 9 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, qui prend en compte les frais exposés au titre de l'expertise comptable diligentée aux fins de vérifier les conditions de mise en 'uvre de l'article 3f du contrat de travail.
La SCP BTSG, prise en la personne de Maître [M] [L], en qualité de mandataire liquidateur de la société CG Sales Networks France, supportera les dépens d'appel.
Les curateurs de la société CG Power Systems Belgium seront déboutés de leur demandes à ces deux titres.
L'AGS demande qu'il soit dit n'y avoir lieu à exécution provisoire en présence de conséquences manifestement excessives. L'exécution provisoire de l'arrêt étant de droit, il n'y a pas lieu de statuer sur cette demande sans objet.
PAR CES MOTIFS
La cour,
INFIRME le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a :
- débouté M. [T] [R] de ses demandes au titre du co-emploi, du licenciement brutal et vexatoire et des frais exposés auprès du cabinet Exco
- ordonné la mise hors de cause de Maître [G] [ZE], Maître [KM] [S] et Maître [A] [KY] en qualité de curateurs de la société CG Power Systems Belgium
- dit le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse
- alloué à M. [T] [R] la somme de 550 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
DIT recevables les demandes de M. [T] [R] tendant à la condamnation de la société CG Sales Network France, prise en la personne de son mandataire liquidateur,
FIXE la créance de M. [T] [R] au passif de la liquidation de la société CG Sales Network France, représentée par la SCP BTSG, prise en la personne de Maître [M] [L], en qualité de mandataire liquidateur, aux sommes suivantes :
- 288 264,78 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis
- 28 826,47 euros au titre des congés payés afférents
- 19 217,65 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire
- 1 921,76 euros au titre des congés payés afférents
- 300 000 euros à titre d'indemnité contractuelle de rupture,
DEBOUTE M. [T] [R] de ses demandes au titre du rappel sur bonus contractuel au titre des périodes comprises entre le 1er décembre 2014 et le 31 mars 2015, et entre le 1er avril 2016 et le 31 janvier 2017, ainsi qu'au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,
RAPPELLE que l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de la société CG SALES NETWORKS France, le 2 juillet 2020, a opéré arrêt du cours des intérêts légaux, en application des dispositions de l'article L.621-48 du code de commerce,
DECLARE le présent arrêt opposable à l'AGS-CGEA d'[Localité 6] et à l'AGS [Localité 6] Faillites Transnationales dans les limites de leur garantie légale, laquelle ne comprend pas l'indemnité de procédure, et dit que ces organismes ne devront faire l'avance de la somme représentant les créances garanties que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire,
DEBOUTE Maître [G] [ZE], Maître [KM] [S] et Maître [A] [KY] en qualité de curateurs de la société CG Power Systems Belgium, de leurs demandes au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens,
CONDAMNE la SCP BTSG, prise en la personne de Maître [M] [L], en qualité de mandataire liquidateur de la société CG Sales Networks France, à verser à M. [T] [R] la somme de 9 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la SCP BTSG, prise en la personne de Maître [M] [L], en qualité de mandataire liquidateur de la société CG Sales Networks France, aux dépens d'appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE