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26/06/2024 | FRANCE | N°21/08655

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 26 juin 2024, 21/08655


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRET DU 26 JUIN 2024



(n°2024/ , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/08655 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEQNL



Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Août 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL - RG n° 19/00568



APPELANTE



S.A.S. LE DELAS

[Adresse 4]

[Localité 3]

ReprÃ

©sentée par Me Jean-pierre ARAIZ, avocat au barreau de PARIS, toque : B0982



INTIME



Monsieur [I] [S]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Jérôme PITON, avocat au barr...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRET DU 26 JUIN 2024

(n°2024/ , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/08655 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEQNL

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Août 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL - RG n° 19/00568

APPELANTE

S.A.S. LE DELAS

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Jean-pierre ARAIZ, avocat au barreau de PARIS, toque : B0982

INTIME

Monsieur [I] [S]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Jérôme PITON, avocat au barreau de PARIS, toque : A0762

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 Avril 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Nelly CHRETIENNOT, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Stéphane MEYER, président

Fabrice MORILLO, conseiller

Nelly CHRETIENNOT, conseillère

Greffier, lors des débats : Monsieur Jadot TAMBUE

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Stéphane MEYER, président de chambre et par Monsieur Jadot TAMBUE, greffier, à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Monsieur [I] [S] a été engagé par la société SA BOVENDIS, devenue société LE DELAS, pour une durée indéterminée à compter du 26 juin 2013, en qualité de chauffeur livreur.

La relation de travail était régie par la convention collective de la Boucherie charcuterie et Boucherie Hippophagique.

Par lettre du 12 novembre 2018, Monsieur [S] a été rappelé à l'ordre pour des absences sans autorisation ni justification du 22 au 25 octobre et les 2, 3 et 5 novembre 2018.

Par lettre du 23 novembre 2018, il s'est vu notifier un avertissement pour n'avoir pas remis ses feuilles de tournées journalières dûment complétées à plusieurs reprises en novembre 2018, malgré des alertes de son employeur.

Par courrier du 21 décembre 2018, le salarié a été convoqué pour le 29 décembre 2018 à un entretien préalable à une sanction pouvant aller jusqu'au licenciement.

Par lettre du 26 janvier 2019, son employeur lui a notifié une mise à pied conservatoire pour une durée de trois jours, du 28 au 30 janvier 2019, en raison de ses absences injustifiées répétées, ses retards répétés, son refus d'enregistrer ses heures de prises de poste journalières ainsi que des refus de livrer, qui perturbent le bon fonctionnement du service livraison de l'entreprise.

Par courrier du 28 janvier 2019, l'employeur lui a notifié son licenciement pour faute grave, en raison de ses absences injustifiées répétées, ses retards répétés, son refus d'enregistrer ses heures de prises de poste journalières, ainsi qu'un départ inopiné de l'entreprise le 25 janvier 2019 sans autorisation et malgré instructions de son employeur.

Le 24 avril 2019, Monsieur [S] a saisi le conseil de prud'hommes de Créteil et formé des demandes afférentes à un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement du 27 aout 2021, le conseil de prud'hommes de Créteil a :

- requalifié la rupture du contrat en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la société BOVENDIS à payer à Monsieur [S] les sommes suivantes :

- indemnité compensatrice de préavis : 4.275,10 €,

- congés payés afférents : 427,51 €,

- indemnité légale de licenciement : 3.677,34 €,

- indemnité pour rupture abusive du contrat de travail : 11.000 €,

- frais de procédure : 300 €,

- débouté l'employeur de ses demandes,

- condamné l'employeur aux entiers dépens.

A l'encontre de ce jugement notifié le 17 septembre 2021, la société LE DELAS a interjeté appel en visant expressément les dispositions critiquées, par déclaration du 13 octobre 2021.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 11 mars 2024, la société LE DELAS demande à la cour de :

- Infirmer le jugement,

Statuant à nouveau,

- Dire que la faute grave est établie et le licenciement bien fondé,

- Débouter Monsieur [S] de l'intégralité de ses demandes,

- Le condamner au paiement de la somme de 2.500 € au titre des frais de procédure,

Subsidiairement :

- Dire que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse,

- Débouter Monsieur [S] de sa demande de dommages et intérêts,

Très subsidiairement :

- Limiter les dommages et intérêts au minima du barème de 3 mois, et débouter le salarié du surplus,

- Condamner Monsieur [S] aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 30 décembre 2021, Monsieur [S] demande à la cour de :

- Confirmer le jugement déféré,

- Débouter la société LE DELAS de l'ensemble de ses demandes,

- La condamner à lui verser la somme de 2.000 € au titre des frais de procédure, ainsi qu'aux entiers dépens,

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 19 mars 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions.

MOTIFS

Sur le licenciement

Il résulte des dispositions de l'article L. 1234-1 du code du travail que la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle nécessite le départ immédiat du salarié, sans indemnité.

La preuve de la faute grave incombe à l'employeur, conformément aux dispositions des articles 1353 du code civil et 9 du code de procédure civile.

Si elle ne retient pas la faute grave, il appartient à la juridiction saisie d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs de licenciement invoqués par l'employeur, conformément aux dispositions de l'article L. 1232-1 du code du travail.

Aux termes de l'article L. 1232-1 du code du travail, le licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

Aux termes de l'article L. 1235-1 du code du travail, le juge, pour apprécier le caractère réel et sérieux des motifs de licenciement invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, et au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles, et, si un doute persiste, il profite au salarié.

En l'espèce, la lettre de licenciement du 23 novembre 2018, qui fixe les limites du litige en application des dispositions de l'article L.1232-6 du code du travail, est libellée dans les termes suivants :

" Bien, que vous ne vous soyez pas présenté à l'entretien préalable du 29 décembre 2018, nous vous informons de notre décision de vous licencier pour les motifs suivants qui constituent une violation de vos obligations professionnelles :

- Absences récurrentes sans autorisation préalable et sans justification ;

- Retards répétés sans prévenir de vos retards ;

- Refus d'enregistrer vos heures de prise de poste journalière ;

- nous vous reprochons d'avoir quitté l'entreprise sans autorisation malgré nos instructions, ce qui constitue un abandon de poste. En effet, vous vous êtes présenté avec un retard de 2h30 (08h30 au lieu de 06 heures) le 25 janvier 2019, sans nous prévenir de votre retard.

Les premiers tours de livraison ayant déjà été attribués, nous vous avons demandé d'attendre dans l'entreprise pour un entretien avec le supérieur hiérarchique qui encadre les chauffeurs-livreurs. Or vous avez quitté l'entreprise précipitamment et en catimini sans prévenir de votre

départ, ce qui a perturbé, pour la deuxième fois ce jour-là, l'organisation du service livraison.

En conséquence, compte-tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés et qui constituent une faute grave, votre maintien dans l'entreprise est devenu impossible.

Votre licenciement prend donc effet immédiatement, sans indemnité de préavis ni de licenciement. (') "

La cour relève, ainsi que soulevé par le salarié, qu'une partie des faits reprochés à celui-ci dans la lettre de licenciement du 28 janvier 2019 avait déjà fait l'objet d'une sanction de mise à pied de trois jours notifiée par lettre du 26 janvier 2019, du 28 au 30 janvier 2019.

L'employeur fait valoir qu'il s'agissait d'une mise à pied conservatoire et non d'une sanction. Toutefois, si la lettre du 26 janvier 2019 mentionne que la mise à pied est " conservatoire ", les termes du courrier permettent de retenir qu'il s'agit de la notification d'une sanction dans la mesure où sont visés les fautes reprochées, l'entretien préalable tenu, et le nombre de jours de mise à pied. Il ne s'agit donc pas d'une mise à pied pour la durée de la procédure disciplinaire.

Les griefs :

- d'absences récurrentes sans autorisation préalable et sans justification,

- de retards répétés sans prévenir des retards,

- de refus d'enregistrer les heures de prise de poste journalière,

ne peuvent en conséquence pas servir de fondement au licenciement de Monsieur [S].

S'agissant des faits du 25 janvier 2019, la société LE DELAS ne produit aucune pièce permettant d'établir la réalité du grief, notamment aucun relevé de données relatives aux déplacements pourtant disponibles pour le métier de chauffeur livreur, ni aucune attestation ou autre document venant confirmer la réalité des faits.

A défaut de démontrer la réalité du grief, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, et le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les conséquences du licenciement

A la date de la rupture, Monsieur [S] avait 5 ans et demi d'ancienneté, son salaire mensuel moyen s'élevait à 2.137,55 € bruts, et l'entreprise employait plus de dix salariés.

Il avait plus de deux années d'ancienneté et est donc fondé à percevoir une indemnité compensatrice de préavis égale à deux mois de salaire sur le fondement des articles L. 1234-1 et L. 1234-5 du code du travail, soit la somme de 4.275,10 €, ainsi que l'indemnité de congés payés afférente, soit 427,51 €.

Il est également fondé à percevoir une indemnité de licenciement sur le fondement des dispositions des articles L. 1234-9 et R. 1234-2 du code du travail, à hauteur de 3.677,64 €.

En application des dispositions de l'article L.1235-3 du code du travail, il est fondé à obtenir une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse égale à une somme comprise entre 3 et 6 mois de salaire, soit entre 6.412,65 € et 12.825,30 €.

Au moment de la rupture, il était âgé de 56 ans. Il ne produit aucun élément relatif à sa situation à la suite de la rupture du contrat de travail.

Le conseil de prud'hommes, au vu de ces éléments, a procédé à une exacte appréciation du préjudice du salarié en fixant l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à 11.000 €.

Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de confirmer la décision entreprise sur ces points.

Enfin, sur le fondement de l'article L.1235-4 du code du travail, il convient de condamner l'employeur à rembourser les indemnités de chômage dans la limite de six mois.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Il y a lieu de confirmer la décision du conseil de prud'hommes sur ces points, et y ajoutant, de condamner l'employeur aux dépens de l'appel ainsi qu'à verser à Monsieur [S] la somme de 1.500 € au titre des frais de procédure engagés en cause d'appel.

L'employeur sera débouté de sa demande au titre des frais de procédure.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement déféré,

Y ajoutant,

ORDONNE le remboursement par la société LE DELAS des indemnités de chômage versées à Monsieur [S] dans la limite de six mois d'indemnités,

CONDAMNE la société LE DELAS aux dépens de la procédure d'appel,

CONDAMNE la société LE DELAS à verser à Monsieur [S] la somme de 1.500 € au titre des frais de procédure d'appel,

DÉBOUTE la société LE DELAS de sa demande au titre des frais de procédure.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 21/08655
Date de la décision : 26/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-26;21.08655 ?
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