Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 2
ARRET DU 26 JUIN 2024
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/06838 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDO57
Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Février 2021 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'Evry -RG n° 20/4328
APPELANTE
Madame [T] [W] épouse [D]
née le 07 décembre 1962 à [Localité 6] (Maroc)
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Denise BETCHEN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1413
(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro 2021/012639 du 02/04/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
INTIME
SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES [Adresse 5] représenté par son syndic, la SOCIETE D'ETUDE ET DE REALISATION DE GESTION IMMOBILIERE DE CONSTRUCTION 'SERGIC', SAS immatriculée au RCS de Lille sous le numéro 428 748 909
C/O Société SERGIC
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représenté par Me Jean-Sébastien TESLER de la SELARL AD LITEM JURIS, avocat au barreau de l'ESSONNE
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Avril 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Perrine VERMONT, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre
Madame Perrine VERMONT, Conseillère
Madame Caroline BIANCONI-DULIN, Conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Dominique CARMENT
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre, et par Dominique CARMENT, Greffière présente lors de la mise à disposition.
* * * * * * * * * * *
FAITS & PROCÉDURE
Mme [T] [W] veuve [D], M. [Y] [D], M. [M] [D], M. [B] [D] et M. [S] [D] sont propriétaires des lots 8, 605, 631 et 534 au sein de la Résidence [Adresse 5].
Par exploit d'huissier en date du 24 août 2020, le syndicat des copropriétaires de la [Adresse 5] les a fait assigner devant le tribunal judiciaire d'Evry en paiement d'un arriéré de charges et de diverses sommes.
Mme [T] [W] veuve [D], M. [Y] [D], M. [M] [D], M. [B] [D] et M. [S] [D], bien que régulièrement assignés, n'ont pas constitué avocat.
Par jugement du 5 février 2021, le tribunal judiciaire d'Evry a :
- condamné in solidum les consorts [D] à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 20.679,22 €, au titre des charges impayées arrêtées au 1er juillet 2020, Subvention Collective CD 91 5/6 0008 inclus, avec intérêts au taux légal à compter du 24 août 2020, et ce, jusqu'à parfait paiement,
- ordonné la capitalisation des intérêts,
- condamné in solidum les consorts [D] à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 800 € à titre de dommages et intérêts,
- condamné in solidum les consorts [D] à verser au syndicat des copropriétaires de la [Adresse 5] la somme de 35 € au titre des frais de recouvrement nécessaire,
- condamné les consorts [D] aux dépens, avec distraction au profit de l'avocat qui en a fait la demande,
- condamné les consorts [D] à verser une somme de 1.000 € au syndicat des copropriétaires en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- rappelé que la décision est exécutoire à titre provisoire,
- rejeté les demandes plus amples ou contraires des parties.
Mme [D] a relevé appel de cette décision par déclaration remise au greffe le 8 avril 2021.
La procédure devant la cour a été clôturée le 10 janvier 2024.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Vu les conclusions notifiées le 5 juillet 2021 par lesquelles Mme [D], appelante, invite la cour, au visa des articles 10-1 de la loi du 10 juillet 1965, 1231-6 et 1343-5 du code civil, à :
- infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 5 février 2021,
- juger que le montant de la dette relative aux charges de copropriété est de 9.854,47 € arrêtée à la date du 1er juillet 2020 et non de 20.679,22 € comme retenue dans le jugement du 5 février 2021,
- lui accorder des délais de paiement de 24 mois selon échéancier de 250 € mensuel, et ce, jusqu'à apurement de l'intégralité de la dette,
à titre reconventionnel,
- juger que les sommes d'un montant de 1.249,47 € facturées aux consorts [D] au titre des frais nécessaires de l'article 10 de la loi 1965 ne sont pas justifiées,
- condamner le syndicat des copropriétaires à déduire la somme de 1.249,47 € de la créance réclamée aux consorts [D],
- débouter le syndicat des copropriétaires de toutes ses demandes, fins et conclusions,
en tout état de cause,
- tenir compte de sa situation et ne pas la condamner sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner le syndicat des copropriétaires aux dépens de première instance et d'appel conformément aux dispositions relatives à l'aide juridictionnelle ;
Vu les conclusions notifiées le 2 septembre 2021 par lesquelles le syndicat des copropriétaires de la [Adresse 5], intimé, invite la cour, au visa des articles 562 et 901 du code de procédure civile, à :
- se déclarer non saisie des chefs du jugement non expressément évoqués aux termes de la déclaration d'appel,
- confirmer le jugement rendu le 5 février 2021 par le tribunal judiciaire d'Evry en toutes ses dispositions,
- débouter Mme [D] de l'ensemble de ses prétentions, fins et conclusions,
- si par impossible des délais étaient accordés, juger qu'à défaut de respecter une échéance fixée par l'arrêt à intervenir, ou en cas de non-règlement des charges courantes à échéance, l'intégralité de la dette deviendra immédiatement exigible, sans qu'il soit nécessaire d'adresser une mise en demeure préalable,
- condamner Mme [D] à lui verser la somme de 2.500 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel, ainsi qu'aux dépens de la procédure d'appel ;
SUR CE,
La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel ;
En application de l'article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions ;
Les moyens soutenus par l'appelant ne font que réitérer sans justification complémentaire utile, ceux dont les premiers juges ont connu et auxquels ils ont répondu par des motifs pertinents et exacts que la cour adopte, sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation ;
Il convient seulement de souligner et d'ajouter les points suivants ;
Sur l'effet dévolutif de l'appel
L'article 901 du code de procédure civile dispose que la déclaration d'appel est faite par acte, comportant le cas échéant une annexe, contenant, outre les mentions prescrites par les 2° et 3°de l'article 54 et par le cinquième alinéa de l'article 57, et à peine de nullité : ['] 4° Les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible ;
En vertu de l'article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s'opérant pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible ;
En outre, seul l'acte d'appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement ;
En l'espèce, la déclaration d'appel de Mme [D] enregistrée le 16 avril 2021 porte sur l'infirmation et la réformation du jugement du 5 février 2021 en ce qu'il l'a condamnée in solidum avec les autres co-indivisaires à payer au syndicat des copropriétaires les sommes de 20.679,22 € au titre des charges impayées, 800 € à titre de dommages et intérêts et 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Par conséquent, la cour n'est pas saisie des dispositions du jugement ayant :
- ordonné la capitalisation des intérêts,
- condamné in solidum les consorts [D] à verser au syndicat des copropriétaires de la [Adresse 5] la somme de 35 € au titre des frais de recouvrement nécessaire,
- condamné les consorts [D] aux dépens, avec distraction au profit de l'avocat qui en a fait la demande,
- rappelé que la décision est exécutoire à titre provisoire,
- rejeté les demandes plus amples ou contraires des parties ;
Sur la demande de paiement des charges de copropriété
Aux termes de l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965, les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs, les éléments d'équipements communs en fonction de l'utilité que ces services et éléments présentent à l'égard de chaque lot ainsi qu'aux charges relatives à l'entretien, à l'administration des parties communes proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots, le règlement de copropriété fixant la part afférente à chaque lot dans chacune des catégories de charges ;
En application de l'article 42 de la même loi, lorsque les comptes et le budget prévisionnel ont été approuvés, les copropriétaires qui n'ont pas contesté dans les deux mois de sa notification l'assemblée générale ayant voté cette approbation ne sont plus fondés à refuser de régler leur quote-part de charges ;
Mme [D] fait valoir que l'appel de fonds qu'elle a reçu à l'échéance du 1er juillet 2020 indique un arriéré de charges de 9.854,47 € et non pas de 20.679,22 €, soit un différentiel non expliqué de 10.824,47 €. Elle indique avoir mis en place un virement permanent de 250 € par mois depuis le 24 novembre 2016 ;
Le syndicat des copropriétaires produit au soutien de ses prétentions :
- le justificatif de la qualité de copropriétaire de Mme [D] et ses fils co-indivisaires qui indique les tantièmes représentés par leurs lots dans la copropriété,
- les appels de fonds et relevés individuels de charges 2018 à 2020,
- les procès-verbaux d'approbation des comptes et de vote de budgets prévisionnels et travaux 2017 à 2019,
- un décompte des charges réclamées arrêté au 1er juillet 2020, Subvention Collective CD 91 5/6 0008 inclus, faisant apparaître un solde débiteur de 20.679,22 € ;
- un extrait de compte relatif aux charges générales et un extrait de compte relatif aux travaux ;
Il indique que l'ensemble des règlements effectués par Mme [D] depuis 2016 ont été imputés sur les causes des condamnations antérieures de 2015 et 2018 et précise que le solde restant dû au titre du jugement du 21 décembre 2018 et les frais de recouvrement nécessaires ont bien été expurgés du décompte à zéro produit au soutien de ses prétentions ;
Il ressort des différentes pièces produites par le syndicat des copropriétaires que l'arriéré de charges dû par l'indivision [D] s'élève bien à la somme de 20.679,22 € et que, contrairement à ce que soutient Mme [D], les frais de recouvrement d'un montant de 1.249,47 € ne sont pas réclamés et ne sont pas inclus dans le décompte ;
Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a condamné in solidum les consorts [D] à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 20.679,22 €, au titre des charges impayées arrêtées au 1er juillet 2020, Subvention Collective CD 91 5/6 0008 inclus, avec intérêts au taux légal à compter du 24 août 2020 ;
Sur la demande de dommages et intérêts du syndicat des copropriétaires
Mme [D] fait valoir que le seul fait d'être condamné pour non-paiement de charges ne peut caractériser à lui seul la mauvaise foi du débiteur et que le jugement a, à tort, retenu que l'indivision n'avait effectué aucun versement au titre des charges postérieures à la décision de 2018 puisqu'elle verse 250 € par mois ;
Selon l'alinéa 3 de l'article 1231-6 du code civil, le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance ;
En l'espèce, comme l'a relevé le tribunal, l'indivision a déjà été condamnée par le tribunal d'instance d'Evry par jugement du 5 février 2015, et par le tribunal de grande instance d'Evry par jugement du 21 décembre 2018, à payer au syndicat des copropriétaires les charges 2014 et 2017 ;
C'est à bon droit que le tribunal a retenu que les défendeurs ont continué de ne pas régler leurs charges de copropriété en dépit de ces précédentes condamnations, ce qui caractérise leur mauvaise foi ; le fait qu'ils aient, postérieurement au jugement, procédé à des paiements, lesquels n'ont au demeurant pas été suffisants pour payer les causes de la précédente condamnation et n'ont donc pas été imputés au paiement des charges courantes, est inopérant ;
Les manquements systématiques et répétés de l'indivision à son obligation essentielle à l'égard du syndicat des copropriétaires de régler les charges de copropriété sont constitutifs d'une faute qui cause à la collectivité des copropriétaires, privée de sommes importantes nécessaires à la gestion et à l'entretien de l'immeuble, un préjudice financier, direct et certain, distinct de celui compensé par les intérêts moratoires ;
Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a condamné in solidum les consorts [D] à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 800 € à titre de dommages et intérêts ;
Sur la demande de délais de paiement
L'article 1343-5 du code civil dispose que le juge, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, peut, dans la limite de deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes due ;
En l'espèce Mme [D] sollicite des délais de paiement à hauteur de 250 € par mois, arguant de la modicité de ses ressources, constituées du RSA et d'une pension de réversion, du fait qu'elle a en charge deux de ses fils sans emploi et de la mésentente de l'indivision qui ne lui a pas permis de vendre le logement ;
Le syndicat des copropriétaires soutient que Mme [D] ne justifie pas être en capacité de régler en tout 500 € par mois, soit 250 € d'arriéré et 250 € de charges courantes et expose qu'elle a bénéficié à partir de 2017 d'une procédure de surendettement avec notamment un moratoire de 24 mois pour lui permettre de vendre le bien, ce qu'elle n'a pas fait ;
Mme [D] ne produit aucune pièce justifiant de sa situation actuelle et de celle de ses fils, ni des démarches entreprises au sein de l'indivision pour vendre l'appartement. Dès lors, elle ne démontre pas sa bonne foi et sa demande de délais de paiement doit être rejetée ;
Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile
Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l'application qui y a été équitablement faite de l'article 700 du code de procédure civile ;
Mme [D], partie perdante, doit être condamnée aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer la somme supplémentaire de 1.500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du code de procédure civile formulée par Mme [D] ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,
Confirme le jugement ;
Y ajoutant,
Constate l'absence d'effet dévolutif de l'appel interjeté le 12 décembre 2019 sur les chefs du dispositif du jugement du 5 février 2021 non repris dans la déclaration d'appel ;
Condamne Mme [T] [W] veuve [D] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, ainsi qu'à payer au syndicat des copropriétaires de la [Adresse 5] la somme supplémentaire de 1.500 € par application de l'article 700 du même code en cause d'appel ;
Rejette toute autre demande.
LA GREFFIERE LE PRESIDENT