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26/06/2024 | FRANCE | N°16/10322

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 5, 26 juin 2024, 16/10322


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 5



ARRET DU 26 JUIN 2024



(n° /2024, 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/10322 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BYYN7



Décision déférée à la Cour : jugement du 8 avril 2016 - tribunal de commerce de PARIS RG n° 2014065419







APPELANTE



S.A.S. TMCR prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité

audit siège

[Adresse 7]

[Localité 10]



Représentée par Me Nicolas DUVAL de la SELEURL NOUAL DUVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0493







INTIMEE



S.A. IMMOBILIERE 3F prise ...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5

ARRET DU 26 JUIN 2024

(n° /2024, 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 16/10322 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BYYN7

Décision déférée à la Cour : jugement du 8 avril 2016 - tribunal de commerce de PARIS RG n° 2014065419

APPELANTE

S.A.S. TMCR prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 7]

[Localité 10]

Représentée par Me Nicolas DUVAL de la SELEURL NOUAL DUVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0493

INTIMEE

S.A. IMMOBILIERE 3F prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 8]

Représentée à l'audience par Me Claudine BEAUVAIS, avocat au barreau de PARIS, toque : B0012

PARTIE INTERVENANTE

Maître [O] [D], en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société TMCR, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 9]

Représenté par Me Nicolas DUVAL de la SELEURL NOUAL DUVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0493

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 19 mars 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Ludovic JARIEL, président de chambre

Mme Sylvie DELACOURT, présidente faisant fonction de conseillère

Mme Viviane SZLAMOVICZ, conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme Sylvie Delacourt dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Mme Céline RICHARD

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, délibéré initialement prévu le 12 juin 2024 et prorogé au 26 juin 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Sylvie DELACOURT, présidente faisant fonction de conseillère pour le président empêché et par Manon CARON, greffière, présente lors de la mise à disposition.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Le 15 avril 2011, la société immobilière 3F (ci-après la société 3F) a confié à la société TMCR des travaux de démolition-gros 'uvre-VRD dans le cadre de la construction de logements au [Adresse 4] (95) à [Localité 11] pour un montant de 989 473, 62 euros TTC.

Sont également intervenus aux opérations de construction :

- l'Atelier Mosca en qualité de maître d''uvre,

- le bureau d'étude économiste OTCI qui a notamment établi le CCTP n° 1 " démolition -gros-'uvre-structure-VRD ",

- la société CIP développement, pilote du chantier.

Le 4 janvier 2012, la société TMCR a signé l'ordre de service n°1 relatif au démarrage des travaux.

Le 9 avril 2014, à la requête de la société 3F, un constat d'huissier a été établi en présence du maître d'ouvrage et du pilote de chantier constatant l'absence d'installation de chantier sur celui-ci.

Le 10 avril 2014, par lettre recommandée avec avis de réception, la société 3F a notifié à la société TMCR, la résiliation du marché sur la base du constat d'abandon du 9 avril 2014.

Le 16 avril 2014, un procès-verbal de constat contradictoire a été dressé à la requête de la société 3F.

Le 22 avril 2014, la société 3F a notifié ce procès-verbal à la société TMCR.

Le 28 avril 2014, la société 3F a notifié à la société TMCR qu'elle ne donnait pas suite à l'ordre de service N°5 du 12 mars 2014.

Le 15 octobre 2014, la société TMCR a assigné la société 3F devant le tribunal de commerce de Paris pour obtenir le paiement de diverses factures.

La société TMCR considère que les pénalités appliquées par Immobilière 3F ne sont pas justifiées.

Par jugement du 8 avril 2016, le tribunal de commerce de Paris a statué en ces termes :

Condamne la société Immobilière 3F à payer à la société TMCR la somme de 13 793 euros au titre du compte prorata avec intérêts au taux légal à compter de la dette de chacune des factures ou situations majorée de 5 %

Déboute la société TMCR de ses autres demandes

Déboute la société Immobilière 3F de toutes ses demandes

Déboute les parties de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Ordonne l'exécution provisoire

Condamne la société Immobilière 3F aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 82,44 euros dont 13,52 euros de TVA.

Par déclaration en date du 4 mai 2016, la société TMCR a interjeté appel du jugement, intimant devant la cour la société Immobilière 3F.

Le 4 janvier 2017, une procédure de liquidation a été ouverte à l'encontre de la société TMCR, Me [D] a été désigné en qualité de liquidateur et est intervenu volontairement dans la présente instance en qualité de représentant de la société TMCR par conclusions signifiées le 23 mars 2017.

Par arrêt du 19 juin 2019, la cour d'appel de Paris a statué en ces termes :

Reçoit en son intervention volontaire à l'instance Me [D] en qualité de liquidateur de la société TMCR, comme ayant été désigné à cette fonction par jugement du tribunal de commerce de Pontoise du 4 janvier 2017 ;

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a :

- condamné la société 3 F à payer à la société TMCR une somme de 13 793 euros au titre du compte prorata avec intérêts au taux légal à compter de la date de chacune des factures ou situations majorées de 5 %,

- rejeté la demande de Me [D], liquidateur de la société TMCR, en paiement de droits de voirie, ainsi que celle de pénalités de retard faite par la société Immobilière 3 F,

Infirmant partiellement le jugement du 8 avril 2016,

Y ajoutant,

Dit que la résiliation du marché de la société TMCR prononcée le 10 avril 2014 par la société 3 F, l'est aux torts exclusifs de la société TMCR,

Sursoit à statuer sur les demandes de :

-Me [D] ès qualités, en paiement du solde de son marché et de dommages et intérêts,

-la société 3 F en paiement des réparations des désordres et non-façons ou non-finitions commis par la société TMCR,

-des parties, sur les comptes à faire entre elles et fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

En conséquence, avant-dire droit sur les désordres, non-façons ou non finitions, imputés à la société TMCR selon le procès-verbal contradictoire d'huissier du 16 avril 2016, sur la fixation de son éventuelle créance au passif de la liquidation de la société TMCR, et l'éventuel solde des travaux dû par la société 3 F à la société TMCR, et sur le compte à faire entre les parties :

Ordonne une expertise confiée à M. [K]

Demeurant [Adresse 6],

Téléphone : [XXXXXXXX01] ou [XXXXXXXX02]

Qui aura pour mission, les parties régulièrement convoquées et connaissance prise des documents et pièces par elles produits de :

-entendre les parties, recueillir leurs dires et explications,

-entendre tous sachants, en particulier l'Atelier Mosca, le pilote du chantier la société CIP, et le bureau d'études OTCI, et se faire communiquer tous document qu'il estimera utiles à l'accomplissement de sa mission,

-dresser un bordereau des documents communiqués à l'expert, étudier et analyser ceux en rapport avec le litige,

-visiter si besoin et en ce cas décrire les lieux litigieux situés [Adresse 4] à [Localité 11],

-décrire les désordres, non-façons, et non-finitions imputés à la société TMCR lors de son abandon de chantier début avril 2014,

-donner tous éléments à la cour d'appel pour déterminer l'éventuelle responsabilité de la société TMCR dans ces désordres, non-façons, et non-finitions,

-les chiffrer, principalement par comparaison entre les constatations faites par l'huissier dans son procès-verbal contradictoire du 16 avril 2014, et les devis et factures des travaux réalisés par les entreprises ayant travaillé postérieurement sur le chantier,

-décrire le principe des travaux nécessaires à la reprise de ces désordres et en évaluer le coût hors taxe, le montant de la TVA applicable au moment des opérations d'expertise et le montant TTC, principalement par comparaison entre les constatations faites par l'huissier dans son procès-verbal contradictoire du 16 avril 2014, et les devis et factures des travaux réalisés par les entreprises ayant travaillé postérieurement sur le chantier,

-déterminer l'éventuel solde de travaux dû à la société TMCR par la société 3 F après son abandon de chantier début avril 2014,

-faire le compte entre la société TMCR et la société 3 F,

-fournir toute précision technique et de fait utile à la solution du litige,

-s'expliquer techniquement dans le cadre de ces chefs de missions sur les dires et observations des parties qu'il aura recueillis après leur avoir fait part au moins un mois auparavant de sa note de synthèse qui devra comporter son chiffrage des travaux de reprise et de réfection,

Dit que l'expert se conformera pour l'exécution de son mandat aux dispositions des articles 232 à 248 et 263 à 284 du code de procédure civile, devra faire connaître aux parties qui en feront la demande lors de la première ou au plus tard de la deuxième réunion, le programme de ses investigations et l'évaluation aussi précise que possible du montant prévisionnel de ses frais et honoraires et communiquera directement le rapport de ses opérations à chacune des parties et en déposera deux exemplaires dont l'un si possible sous forme numérique au greffe de la 5ème chambre du Pôle 4 de la cour d'appel de Paris dans le délai de 8 mois suivant la date du versement de la consignation,

Dit que l'expertise aura lieu aux frais avancés de la société Immobilière 3 F qui consignera dans le délai de deux mois suivant la date du présent arrêt la somme de cinq mille euros (5 000 euros) à titre de provision à valoir sur les honoraires de l'expert,

Dit qu'à défaut de consignation dans le délai ci-dessus fixé, la désignation de l'expert sera caduque, à moins que le juge chargé du contrôle des mesures d'instruction, à la demande d'une des parties se prévalant d'un motif légitime, ne décide une prorogation du délai ou un relevé de la caducité,

Dit que s'il estime insuffisante la provision ainsi fixée, l'expert devra au plus tard lors de la deuxième réunion, dresser un programme de ses investigations et évaluer de manière aussi précise et autant que possible le montant prévisible de ses honoraires et de ses débours,

Dit qu'à l'issue de cette réunion, l'expert fera connaître aux parties et au magistrat chargé du contrôle de l'expertise la somme globale qui lui paraît nécessaire pour garantir en totalité le recouvrement de ses honoraires et de ses débours et sollicitera, le cas échéant, le versement d'une consignation complémentaire,

Dit que le dépôt de son rapport par l'expert sera accompagné de sa demande de rémunération, dont il adressera un exemplaire aux parties par tout moyen permettant d'en établir la réception,

Dit que les parties disposeront d'un délai de 15 jours à compter de cette réception pour adresser à l'expert et à la juridiction, ou, le cas échéant, au juge chargé de contrôler les mesures d'instruction, leurs observations écrites sur cette demande de rémunération,

Désigne Mme Tapin en qualité de magistrat du contrôle de l'expertise pour :

-remplacer par ordonnance l'expert empêché ou refusant, soit à la requête de la partie la plus diligente, soit d'office,

-assurer le contrôle de la mesure d'instruction,

-désigner sur demande des parties un médiateur,

Renvoie l'affaire à l'audience de mise en état du 3 décembre 2019 pour nouvelles conclusions éventuelles des parties après dépôt par l'expert de son rapport,

Reserve les dépens de la présente instance.

Le 20 juin 2022, Mme [M], nommée en qualité d'expert judiciaire en lieu et place de M. [K], a déposé son rapport.

EXPOSE DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 15 février 2024, la société TMCR et Me [D], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société TMCR, demandent à la cour de :

Recevoir la société TMCR, représentée par son liquidateur judiciaire Me [D], en ses demandes, fins et conclusions

Y faisant droit,

Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 8 avril 2016 en ce qu'il a débouté la société TMCR de ses autres demandes ;

Et, statuant de nouveau,

En cas de condamnation de la société TMCR, représentée par Me [D] ès qualités de liquidateur judiciaire,

Réduire à la somme de 110 092,64 euros TTC le montant des travaux à retenir pour l'achèvement des travaux et la reprise des désordres ;

Condamner la société 3F à payer à Me [D], es qualités, la somme de :

- 55 565,94 euros avec intérêts au taux légal majoré de 5 % à compter du 30 mars 2014, date de la situation n°17 ;

- 10 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

- 5 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner la société 3F en tous les dépens.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 28 février 2024, la société 3F demande à la cour de :

Statuant sur l'appel de la société TMCR et de Me [D] ès qualités de liquidateur judicaire de la société TMCR et l'appel incident de la société 3F du jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris du 8 avril 2016,

Recevoir la société 3 F en son appel incident et y faisant droit :

Confirmer le jugement en ce qu'il avait débouté Me [D] ès qualités, de ses demandes de dommages intérêts de 10 000 euros et 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Débouter Me [D] ès qualités, de son appel et de toutes ses demandes, fins et conclusions tant en principal, en paiement de travaux, qu'intérêts, dommages-intérêts et article 700 du code de procédure civile ainsi que dépens.

Juger que les créances réciproques de la société 3F et de la société TMCR pour le marché d'Enghien sont connexes.

Juger du caractère vraisemblable des créances de la société 3F sur la base de l'expertise judiciaire pour un montant TTC de : 121 459 euros de travaux pris en charge suite à la défaillance de l'entreprise TMCR et de la résiliation du marché à faute de l'entreprise.

Admettre le principe de la compensation pour ordonner celle-ci à concurrence du montant des créances à fixer en tant que de besoin par le juge commissaire :

- entre les travaux suite à l'abandon du chantier et la résiliation du marché pour le marché d'Enghien pour un montant TTC de : 121 459 euros

- et le solde de ce marché de l'entreprise retenu par l'expert pour 22 607,80 euros TTC au titre de la situation n°16 de la société TMCR.

Fixer la créance de la société 3F au passif de la liquidation de la société TMCR comme suit :

- au titre des travaux de reprise des désordres/malfaçons et de l'achèvement des travaux suite à l'abandon de chantier par la société TMCR et la résiliation du marché à faute de l'entreprise pour un montant de : 121.459,00 euros TTC

Et en tant que de besoin par compensation avec le solde du marché à déduire :

Soit : - 22 607,80 euros TTC = 98 851,20 euros TTC

Au titre de l'article 700 du code de procédure civile : 8 000 euros

Inscrire les entiers dépens tant de première instance que d'appel en ce compris les honoraires de l'expert judiciaire réglés par la société 3F de 15 171,01 euros TTC au passif de la liquidation judiciaire de la société TMCR en frais privilégiés.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 5 mars 2024 et l'affaire a été appelée à l'audience du 19 mars 2024, à l'issue de laquelle elle a été mise en délibéré.

MOTIVATION

Préalable

Les demandes de " juger " ne constituent pas des prétentions mais des moyens et ne saisissent la cour d'aucune demande (Civ. 2ème, 9 janvier 2020, pourvoi n°18-18.778).

Sur les comptes entre les parties

Moyens des parties

La société TMCR réclame le solde dû par la société 3F sur les travaux, somme dont elle a déduit les paiements réalisés au profit de sous-traitants, au motif qu'elle a réalisé ses obligations.

Elle fait valoir que les situations adressées à la société 3F n'ont pas été régulièrement contestées et qu'elle est en droit de demander le paiement de la situation N°17 de 55 565,94 euros TTC, ainsi que l'a retenu l'expert judiciaire.

La société 3F soutient qu'elle a toujours contesté avoir reçu les situations n°16 et 17.

Elle reprend les conclusions du rapport d'expertise judiciaire pour revendiquer le paiement des reprises des défauts d'exécution de la société TMCR et des travaux nécessaires à l'achèvement.

Elle conteste les réductions que veut imputer la société TMCR sur les montants des travaux de reprise.

Elle demande que sa déclaration de créance soit fixée à la somme 121 459 euros.

Elle accepte le chiffrage rectifié par l'expert sur la situation N°16 d'un montant de 25 583,49 euros TTC à compenser avec les sommes imputables à l'entreprise.

Elle conteste la validation de l'expert de la situation n°17 qui correspond aux travaux prévus au marché mais non exécutés par TMCR qui avait abandonné le chantier.

La société 3F justifie avoir dû recourir à des sociétés tierces pour terminer le chantier abandonné par la société TMCR et qu'elle a versé pour achever l'ouvrage la somme de 103 442,16 euros.

Réponse de la cour

Selon l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable en l'occurrence en raison de la date du marché, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et doivent être exécutés de bonne foi.

Aux termes de l'article 1315, devenu 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En application du principe de la réparation intégrale du préjudice sans perte ni profit, les éventuelles malfaçons, ou non-finitions commises par la société TMCR ne la privent pas du droit à ce prix correspondant à la partie exécutée de sa mission.

En l'espèce, l'expert a repris la situation n°16 arrêtée au 30 janvier 2014 et a abouti à un montant de 23 583, 49 euros TTC, incluant le nouveau taux de TVA à compter du 1er janvier 2014 et le solde de TVA dû au 31 décembre 2013, pour un avancement du chantier de 93 %.

La situation n°17 dont le paiement est réclamé par la société TMCR correspond à un taux d'avancement du chantier de 97 % et a été établie au 30 mars 2014.

L'expert judiciaire retient que les retards accumulés ne sont pas à attribuer en totalité à la société TMCR dont l'avancement sur la situation 15 était validé à 92 %.

Malgré les courriers adressés à la société TMCR, la société 3F ne démontre pas à quelle date l'entreprise a quitté le chantier que l'expert situe au mois d'avril 2014.

En conséquence, la cour retient donc la situation n°17 pour un montant de 55 565,14 euros TTC qui correspond à un avancement du chantier de 97 %.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté la demande de la société TMCR au titre du solde du marché fixé à 55 565,14 euros TTC.

Sur les malfaçons et l'absence de finition du marché

Il est établi, qu'avant réception, l'entrepreneur est tenu d'une obligation de résultat envers le maître de l'ouvrage (3e Civ., 17 octobre 1990, pourvoi n° 89-12.940).

Aux termes de l'article 1315, devenu 1353, du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En l'espèce, l'expert judiciaire a examiné en détail d'une part, les travaux nécessaires pour reprendre les défauts d'exécution qu'elle a fixé à 18 018,04 euros TTC soit 15 014,03 HT ; d'autre part, les travaux nécessaires pour achever ceux-ci qu'elle a estimés sur la base des devis Tempere, Hitec, Amed et Etandex à 103 442,16 euros TTC soit 86 201,80 euros HT.

La société TMCR conteste la facturation d'une reprise de la réservation pour les boîtes aux lettres pour 165,10 euros HT et la peinture piolite sur le chapeau de souche de cheminée pour 265 euros HT alors que ces prestations n'étaient pas prévues au CCTP.

Néanmoins, ces prestations étant effectivement non prévues par le CCTP seront déduites du montant des travaux à terminer.

La société TMCR conteste la facturation de prestations figurant au devis de la société Amed et à propos desquelles l'expert a retenu qu'elles relevaient du lot ravalement ainsi que cela figure dans son analyse en page 75 du rapport.

L'expert a effectivement relevé que les prestations relatives d'une part, à l'enduit sur les murs de mitoyenneté avec le pavillon sur les deux faces et pose d'un carreau de couverture pour 4 500 euros HT et d'autre part, l'enduit en soubassement de la façade pignon et de la couverture de la rampe du parking pour 4 069,80 euros HT, relevaient du lot ravalement.

La société TMCR n'étant pas titulaire de ce lot, ces prestations viendront en déduction du montant retenu par l'expert concernant les travaux restant à réaliser.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a rejeté la demande reconventionnelle de la société 3F au titre des travaux de reprise et d'achèvement qui sont fixés à 92 215,93 euros HT soit 110 659,12 euros TTC.

Sur la compensation judiciaire

Aux termes de l'article 1347 du code civil, la compensation est l'extinction simultanée d'obligations réciproques entre deux personnes. Elle s'opère, sous réserve d'être invoquée, à due concurrence, à la date où ses conditions se trouvent réunies.

Aux termes de l'article 1348 du code civil, la compensation peut être prononcée en justice, même si l'une des obligations, quoique certaine, n'est pas encore liquide ou exigible. A moins qu'il n'en soit décidé autrement, la compensation produit alors ses effets à la date de la décision.

La compensation peut être ordonnée lorsque les créances sont connexes (Com., 3 juin 1997, pourvoi n° 95-11.118 ; Com., 27 janvier 2015, pourvoi n° 13-18.656, Bull. 2015, IV, n° 10).

Sont considérées comme connexes les créances réciproques qui découlent d'obligations réciproques dérivant d'un même contrat ou d'un ensemble contractuel unique.

En l'espèce, la société 3F produit sa déclaration de créance à hauteur de 219 981 euros à la liquidation judiciaire de la société TMCR, réceptionnée le 13 mars 2017 par Me [D].

Elle a justifié d'une créance à l'égard de la société TMCR d'un montant fixé par la cour à hauteur de 92 215,93 euros HT soit 110 659,12 euros TTC au titre de la mauvaise exécution et de l'inachèvement de ses prestations contractuelles.

La cour constate le lien de connexité entre les créances des parties pour fixer celle de la société 3F au passif de la liquidation judiciaire de la société TMCR pour le marché d'[Localité 11], en la compensant avec les sommes dues au titre du solde du marché soit 55 093,98 euros TTC.

Sur la demande de dommages et intérêts

Moyens des parties

La société TMCR représentée par Me [D], son liquidateur, sollicitent la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts au motif que c'est de façon injustifiée que la société 3F a refusé d'acquitter le paiement des travaux qu'elle reconnaissait devoir à la société TMCR ; créant un préjudice particulier de trésorerie à l'entreprise.

La société 3F s'oppose à cette demande, le rapport d'expertise avalisant sa position.

Réponse de la cour

En l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et des droits des parties ; il convient en conséquence de confirmer la décision déférée sur ce point.

Sur les frais du procès

Le sens de l'arrêt conduit à infirmer le jugement sur la condamnation aux dépens, incluant les honoraires de l'expert judiciaire, qui seront fixés au passif de la société TMCR.

Le sens de l'arrêt conduit à infirmer le jugement sur le double débouté au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à fixer au passif de la société TMCR la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société 3F les frais irrépétibles de première instance.

En cause d'appel, les dépens suivront le même sort et seront fixés au passif de la liquidation de la société TMCR et le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile sera accordé aux avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre.

En cause d'appel, la société TMCR supportera la charge des frais irrépétibles de la société 3F qui seront fixés au passif de sa liquidation judiciaire à hauteur de 3 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement en ce qu'il a débouté la société TMCR de sa demande en paiement du solde des travaux et la société 3F de sa demande en paiement pour la reprise et l'achèvement des travaux ;

Infirme le jugement en ce qu'il a condamné la société 3F aux dépens et a débouté la société 3F de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Confirme le jugement en ce qu'il a débouté la société TMCR de sa demande de dommages et intérêts,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Fixe à la somme de 55 565,14 euros TTC le solde dû sur le marché par la société 3F à la société TMCR ;

Fixe à la somme de 110 659,12 euros TTC la créance de la société 3F sur la société TMCR au titre des travaux de reprise et de finition ;

Ordonne la compensation des créances ;

Fixe la créance de la société 3F au passif de la liquidation judiciaire de la société TMCR à la somme de 55 093,98 euros TTC en principal ;

Fixe la créance des dépens de première instance et d'appel au passif de la liquidation judiciaire de la société TMCR ;

Admet les avocats qui en ont fait la demande et peuvent y prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Fixe la créance de la société 3F au titre de l'article 700 du code de procédure civile au passif de la liquidation judiciaire de la société TMCR à la somme de 1 500 euros pour la procédure de première instance ;

Fixe la créance de la société 3F au titre de l'article 700 du code de procédure civile au passif de la liquidation judiciaire de la société TMCR à la somme de 3 000 euros pour la procédure de d'appel.

La greffière, La présidente faisant fonction de conseillère pour le président empêché,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 16/10322
Date de la décision : 26/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-26;16.10322 ?
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