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21/06/2024 | FRANCE | N°20/04917

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 12, 21 juin 2024, 20/04917


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12



ARRÊT DU 21 Juin 2024



(n° , 6 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 20/04917 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCFL7



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Juin 2020 par le Pole social du TJ de BOBIGNY RG n° 19/00480



APPELANTE

CPAM 27 - EURE

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Flor

ence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901



INTIMEE

Société [5]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Frédérique BELLET, avocat au barreau de PARIS, toque : C0881



COMPOSITION ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12

ARRÊT DU 21 Juin 2024

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 20/04917 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCFL7

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Juin 2020 par le Pole social du TJ de BOBIGNY RG n° 19/00480

APPELANTE

CPAM 27 - EURE

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901

INTIMEE

Société [5]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Frédérique BELLET, avocat au barreau de PARIS, toque : C0881

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Mai 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Gilles BUFFET, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Odile DEVILLERS, Présidente de chambre

Monsieur Gilles BUFFET, Conseiller

Monsieur Christophe LATIL, Conseiller

Greffier : Madame Agnès ALLARDI, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Monsieur Gilles BUFFET, Conseiller pour Madame Marie-Odile DEVILLERS, Présidente de chambre, légitimement empêchée et par Madame Claire BECCAVIN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par la Caisse primaire d'assurance maladie de l'Eure d'un jugement rendu le 22 juin 2020 par le tribunal judiciaire de Bobigny, dans un litige l'opposant à la société [5] (la société).

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Il est rappelé que, le 25 mai 2018, la société a renseigné une déclaration d'accident du travail concernant son salarié, M. [M] [I] (l'assuré), employé en qualité de chauffeur livreur; que la déclaration mentionne un accident survenu le 24 mai 2018, les circonstances étant les suivantes : "Le salarié livrait des caisses. Le salarié déclare qu'il aurait ressenti une douleur au niveau de la clavicule"; que l'auteur du certificat médical initial établi le 24 mai 2018 mentionne "subluxation sterno-claviculaire droite non compliquée" et prescrit un arrêt de travail jusqu'au 26 mai 2018 ; que, par décision du 18 juillet 2018, la caisse a pris en charge l'accident au titre de la législation sur les risques professionnels ; que l'assuré a fait l'objet de nombreux arrêts de prolongation ; que son état de santé a été déclaré consolidé le 31 août 2023 ; qu'après vaine saisine de la commission de recours amiable de la caisse, la société a porté le litige, le 19 novembre 2018, devant une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale ; que, par jugement du 9 septembre 2019, le tribunal de grande instance de Bobigny a déclaré recevable le recours de la société et avant dire droit ordonné une expertise médicale sur pièces confiée au docteur [J] afin de dire si l'ensemble des arrêts de travail de l'assuré sont en relation directe et certaine avec son accident déclaré le 24 mai 2018, dans la négative, déterminer les lésions et les arrêts de travail directement imputables à l'accident du travail dont l'assuré a été victime, dire s'il existe un état antérieur évoluant pour son propre compte susceptible d'avoir une incidence sur l'arrêt de travail et ses prolongations, dire si d'autres événements postérieurs à l'arrêt de travail initial, sans lien direct et certain avec l'accident du travail, ont pu influer sur l'état de santé de l'assuré et fixer la date de consolidation des lésions imputables à cet accident ; que le docteur [J] a établi son rapport le 12 novembre 2019.

Par jugement du 22 juin 2020, le tribunal judiciaire de Bobigny a :

- entériné les conclusions du rapport d'expertise du docteur [J],

- fixé au 4 juin 2018 la date de consolidation de l'état de santé de l'assuré au titre de son accident du travail du 24 mai 2018,

- dit, en conséquence, que les arrêts de travail et soins prescrits à l'assuré à compter du 5 juin 2018 sont inopposables à la société,

- dit que les frais d'expertise sont à la charge de la caisse,

- condamné la caisse à payer à la société la provision d'un montant de 800 euros avancée par la demanderesse à l'expert,

- condamné la caisse aux dépens.

Le jugement a été notifié le 29 juin 2020 à la caisse qui en a interjeté appel par courrier recommandé avec demande d'accusé de réception du 17 juillet 2020.

Aux termes de ses conclusions soutenues oralement par son conseil, la caisse demande à la cour de:

- infirmer le jugement,

- déclarer toutes les conséquences de l'accident du travail du 24 mai 2018 opposables à la société jusqu'à la date de consolidation,

- débouter la société de toutes ses demandes,

- condamner la société aux entiers dépens, comprenant les frais d'expertise.

La caisse fait valoir que toutes les conséquences de l'accident du travail bénéficient de la présomption d'imputabilité, dès lors qu'un arrêt de travail a été initialement prescrit, jusqu'à la guérison ou la consolidation de l'état de santé du salarié ; que le tribunal ne pouvait donc retenir l'inopposabilité des soins et arrêts à compter du 5 juin 2018 ; que ce n'est pas à la caisse de prouver que les soins et arrêts de travail pris en charge sont exclusivement imputables à l'accident du travail mais à l'employeur de justifier que lesdits soins et arrêts sont exclusivement imputables à une cause totalement étrangère au travail de l'assuré ; qu'en ordonnant une mesure d'expertise, le tribunal a inversé la charge de la preuve ; que les conclusions du rapport d'expertise sont biaisées et ne peuvent en aucun cas permettre de renverser la présomption d'imputabilité, ne permettant pas de caractériser l'existence d'un état pathologique antérieur auquel les prestations sont exclusivement imputables ou d'une cause totalement étrangère au travail ; que la durée de prise en charge des arrêts de travail est cohérente compte tenu de la nature des lésions de l'assuré (subluxation sterno-claviculaire) et de son emploi de chauffeur livreur qui requiert une certaine mobilité et un effort physique ; que l'assuré a subi une intervention chirurgicale le 25 septembre 2019 dont les suites ont été compliquées, cette intervention s'étant avérée un échec, une douleur invalidante ayant persisté ; que, face à l'échec du traitement chirurgical et l'impossibilité de réaliser une seconde intervention, l'assuré a dû être redirigé vers un centre de gestion de la douleur ; que de simples doutes sur la supposée bénignité de la lésion et la longueur de l'arrêt de travail ne peuvent suffire à remettre en cause le bien fondé de la décision de la caisse ; que seul le médecin conseil de la caisse peut fixer la date de consolidation de l'état de santé de l'assuré ; que compte tenu de l'indépendance des rapports caisse-employeur/caisse-assuré; l'inopposabilité des arrêts de travail n'a pas pour effet de modifier la date de consolidation retenue par le médecin conseil; que la nouvelle demande d'expertise de la société ne repose sur aucun élément laissant supposer une cause étrangère au travail.

Aux termes de ses conclusions soutenues oralement par son conseil, la société demande à la cour de:

- la recevoir en ses demandes,

- à titre principal, confirmer le jugement,

- ordonner à la caisse de communiquer à la Carsat compétente l'ensemble des informations nécessaires à la rectification des taux de cotisations AT/MP de la société,

- à titre subsidiaire, la caisse produisant en cause d'appel de nouvelles pièces faisant état d'une intervention chirurgicale sans communiquer de données pré-opératoires pourtant indispensables pour comprendre de quelles lésions il s'agit et si ces lésions peuvent être en lien avec l'accident, ordonner la mise en oeuvre d'une nouvelle expertise confiée au docteur [J] afin de dire s'il y a lieu de modifier la date de consolidation fixée au 4 juin 2018 et, dans l'affirmative, fixer la date de consolidation résultant de l'accident à l'exclusion de tout état pathologique indépendant évoluant pour son propre compte,

- renvoyer l'affaire à une date ultérieure afin qu'il soit débattu du caractère professionnel des lésions, prestations, soins et arrêts en cause, après dépôt du rapport de l'expert judiciaire,

- mettre les frais et honoraires d'expertise à la charge de la caisse,

- donner acte à la société de ce qu'elle n'est pas opposée à avancer les frais d'expertise sous réserve qui lui soit donné acte qu'elle se réserve la possibilité de demander à être remboursée par la caisse de l'avance qu'elle aura faite.

La société fait valoir que la caisse a adressé de nouvelles pièces puisqu'il est fait état, après l'expertise, d'une intervention chirurgicale de ligamentoplastie et que l'état de santé de l'assuré n'a été consolidé que le 31 août 2023 ; que sur la base de ces éléments nouveaux, le docteur [K] a rédigé une nouvelle note médicale, celui-ci déclarant qu'il y a lieu de communiquer à l'expert ces nouvelles pièces afin que celui-ci procède à une nouvelle analyse du dossier ; que les conclusions du docteur [J] sont claires et précises ; que ce médecin a clairement mis en évidence le fait que l'assuré a présenté une douleur sans gravité de la clavicule droite à l'occasion du port de cartons de médicaments, sans traumatisme, ni chute, ni choc direct ; que l'absence d'immobilisation de l'épaule, conjuguée avec la reprise itérative du diagnostic et de son inconsistance descriptive, sont en faveur de l'existence d'une lésion ancienne ; que le mécanisme du geste décrit ne peut provoquer une luxation de la clavicule ; que, par conséquent, l'ensemble des prestations versées après le 4 juin 2018 au titre de l'accident du travail de l'assuré est inopposable à l'employeur ; que, devant l'expert, la caisse n'a pas invoqué une intervention chirurgicale pratiquée le 25 septembre 2019 qui aurait donné lieu à des complications, s'étant contentée de produire les certificats médicaux descriptifs jusqu'au 10 avril 2019 alors que les parties avaient été convoquées pour une réunion d'expertise le 12 novembre 2019 ; qu'à la lecture du rapport d'expertise, la caisse s'en était rapportée à justice ; qu'il résulte de la note médicale du docteur [K] que les pièces communiquées par la caisse sont insuffisantes pour déclarer fondée la décision de prise en charge de l'ensemble des lésions, soins et arrêts de travail jusqu'au 31 août 2023, date de la consolidation de l'état de santé de l'assuré ; qu'en l'absence de communication de donnée post-opératoire pour comprendre de quelles lésions il s'agit et si ces lésions peuvent être en lien avec l'accident, une nouvelle mesure d'expertise est nécessaire.

Pour un exposé plus complet des moyens des parties, et en application du deuxième alinéa de l'article 446-2 et de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie à leurs conclusions écrites visées par le greffe à l'audience du 10 mai 2024.

SUR CE,

Il est observé en premier lieu que le fait, pour une partie, de s'en rapporter à justice sur le mérite d'une demande implique de sa part, non un acquiescement à cette demande, mais la contestation de celle-ci.

Par conséquent, la caisse est en droit de contester en cause d'appel le jugement rendu par le tribunal en ce qu'il a déclaré inopposables à la société les soins et arrêts prescrits à l'assuré ensuite de son arrêt de travail à compter du 5 juin 2018 ainsi que le rapport d'expertise du docteur [J], même si elle s'en était rapportée à justice en première instance sur le bien fondé des demandes de la société ensuite du dépôt du rapport d'expertise.

En second lieu, il résulte de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, que la présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, dès lors qu'un arrêt de travail a été initialement prescrit ou que le certificat médical initial est assorti d'un arrêt de travail, s'étend à toute la durée d'incapacité de travail précédant soit la guérison complète, soit la consolidation de l'état de la victime. Il appartient à l'employeur qui conteste cette présomption d'apporter la preuve contraire, à savoir celle de l'existence d'un état pathologique préexistant évoluant pour son propre compte sans lien avec l'accident ou la maladie ou d'une cause extérieure totalement étrangère, auxquels se rattacheraient exclusivement les soins et arrêts de travail postérieurs (2e Civ., 12 mai 2022, pourvoi n°20-20.655). La cour ne peut, sans inverser la charge de la preuve, demander à la caisse de produire les motifs médicaux ayant justifié de la continuité des soins et arrêts prescrits sur l'ensemble de la période. (2e Civ., 10 novembre 2022, pourvoi n° 21-14.508). Il en résulte que l'employeur ne peut reprocher à la caisse d'avoir pris en charge sur toute la période couverte par la présomption d'imputabilité les conséquences de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle s'il n'apporte pas lui-même la démonstration de l'absence de lien.

Ainsi, la présomption d'imputabilité à l'accident des soins et arrêts subséquents trouve à s'appliquer aux lésions initiales, à leurs complications, à l'état pathologique antérieur aggravé par l'accident, mais également aux lésions nouvelles apparues dans les suites de l'accident (2e Civ., 24 juin 2021, pourvoi n° 19-24.945) et à l'ensemble des arrêts de travail, qu'ils soient continus ou non.

Enfin, la durée de l'arrêt de travail ne permet pas de présumer que celui-ci n'est pas la conséquence de l'accident.

Au cas d'espèce, aux termes de son rapport, le docteur [J] conclut que l'ensemble des arrêts de travail et des soins de l'assuré ne sont pas en relation directe et certaine avec son accident déclaré le 24 mai 2018, que les arrêts de travail et les soins directement imputables à l'accident du travail s'étendent jusqu'au 4 juin 2018, qu'il ne dispose d'aucun élément permettant d'affirmer qu'il existe un état antérieur, qu'il n'existe pas à sa connaissance d'autres événements postérieurs à l'arrêt de travail initial sans lien direct et certain avec l'accident du travail, qui ont pu influer sur l'état de santé de l'assuré et que la date de consolidation des lésions imputables à l'accident du travail du 24 mai 2018 est fixée au 4 juin 2018.

Le docteur [J] fait valoir qu'en l'absence de choc direct, de chute de contusion d'un traumatisme, le patient a présenté une douleur de la clavicule droite à l'occasion du port de cartons de médicaments ; que le mécanisme du geste décrit ne peut pas provoquer une luxation de la clavicule ; que, devant un tableau clinique initial qui a donné lieu à un arrêt de travail de 3 jours, la lésion était bénigne et qu'en l'absence d'une mention d'immobilisation de l'épaule, d'une intervention chirurgicale nécessaire, l'arrêt de travail et les soins en rapport avec le fait accidentel ne sauraient excéder le 4 juin 2018, date à laquelle le médecin traitant précise qu'il s'agit d'une disjonction claviculaire droite avec douleur de l'épaule droite et cervicalgies.

Il est relevé que le docteur [J] procède par généralités, rappelant des données de la littérature médicale, alors qu'aux termes du certificat médical initial, son auteur a constaté, après examen de l'assuré, l'existence d'une subluxation sterno-claviculaire droite. Les certificats médicaux de prolongation du 25 mai 2018 et 4 juin 2018 mentionnent respectivement une luxation de la clavicule droite et une disjonction claviculaire droite, dont la caisse justifie qu'il s'agit d'un terme médical désignant une subluxation, tandis que les certificats de prolongation ultérieurs indiquent une subluxation sterno-claviculaire droite.

Le rapport du docteur [J] ne permet pas de faire échec à la présomption d'imputabilité à l'accident du travail de l'intégralité des soins et arrêts pris en charge par la caisse, ce praticien ne caractérisant pas qu'ils auraient pour origine une cause étrangère au travail ou un état pathologique préexistant ayant évolué pour son propre compte indépendamment du travail, l'expert concluant à cet égard qu'il ne dispose d'aucun élément permettant d'affirmer qu'il existe un état antérieur, tandis qu'il se borne à contester la durée des soins et arrêts de travail, ce qui est inopérant pour écarter la présomption d'imputablité.

Il est enfin rappelé qu'en vertu de cette présomption, il n'incombe pas à la caisse d'établir que les soins et arrêts seraient en lien avec l'accident du travail, le docteur [J] ne pouvant se prévaloir du prétendu caractère bénin de l'accident pour exclure un tel lien, la caisse opposant que la durée de prise en charge des soins et arrêts est cohérente compte tenu de la nature des lésions rendant impossible l'exercice de l'emploi de chauffeur livreur de l'assuré qui nécessite de la mobilité et des efforts physiques, tandis que le certificat médical de prolongation du 25 septembre 2019 mentionne qu'une chirurgie sterno-claviculaire droite était envisagée. Or, malgré cette intervention, l'assuré a présenté des douleurs persistantes et une impotence fonctionnelle, ainsi qu'il est mentionné dans le certificat médical de prolongation du 23 janvier 2020.

La société fait valoir qu'à l'occasion des opérations d'expertise du docteur [J], la caisse n'avait pas produit les certificats médicaux concernant l'intervention chirurgicale et ses suites, et produit une note de son médecin conseil, le docteur [K], du 24 janvier 2024, aux termes duquel ce praticien fait valoir qu'il s'agit d'une luxation antérieure probable, sans mécanisme lésionnel violent, luxation considérée comme bénigne ayant justifié initialement 48 heures d'incapacité totale de travail, qu'aucun élément dans le dossier ne vient conforter une pathologie imputable (pas de compte-rendu de l'IRM, pas de proposition d'immobilisation, pas de compte-renu opératoire ni de notion de complication) et qu'au regard des nouvelles informations parcellaires communiquées par la caisse après expertise, il apparaît légitime de demander à l'expert d'en prendre connaissance et de procéder à une nouvelle analyse des pièces produites.

Mais le docteur [K] ne fait état d'aucun élément en faveur de l'existence d'un état antérieur ayant évolué pour son propre compte ni que les soins et arrêts seraient étrangers au travail, étant rappelé que l'aggravation ou la révélation d'un état antérieur du fait de l'accident doivent être prises en charge au titre de la législation professionnelle.

Au regard de ces éléments, la société échoue à renverser la présomption d'imputabilité à l'accident de l'ensemble des soins et arrêts de travail jusqu'à la date de consolidation fixée au 31 août 2023, la demande d'expertise complémentaire ne reposant sur aucun motif pertinent.

Aussi, le jugement sera infirmé en toutes ses dispositions; les soins et arrêts de travail prescrits ensuite de l'accident du travail du 24 mai 2018 seront déclarés opposables à l'employeur.

La société, qui succombe, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, étant ajouté que les frais d'expertise resteront à sa charge.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

DÉCLARE recevable l'appel de la Caisse primaire d'assurance maladie de l'Eure ;

INFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu le 22 juin 2020 par le tribunal judiciaire de Bobigny,

Statuant à nouveau ;

DÉCLARE opposable à la société [5] l'ensemble des conséquences de l'accident du travail du 24 mai 2018 subi par M. [M] [I],

DÉBOUTE la société [5] de ses demandes,

DIT que les frais d'expertise seront à la charge de la société [5],

CONDAMNE la société [5] aux dépens de première instance et d'appel.

La greffière Pour la présidente empêchée


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 20/04917
Date de la décision : 21/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-21;20.04917 ?
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