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20/06/2024 | FRANCE | N°24/05294

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 20 juin 2024, 24/05294


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 2



ARRÊT DU 20 JUIN 2024



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/05294 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJDR2



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 19 Mars 2024 -Président du TC de PARIS - RG n° 2024016078





APPELANTE



S.A.S. BMF BRINDOS [Localité 4], RCS de Paris sous le n°893

940 205, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]



Représentée par Me Benjamin MOISAN de la SELARL BAECHLIN...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRÊT DU 20 JUIN 2024

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/05294 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJDR2

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 19 Mars 2024 -Président du TC de PARIS - RG n° 2024016078

APPELANTE

S.A.S. BMF BRINDOS [Localité 4], RCS de Paris sous le n°893 940 205, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Benjamin MOISAN de la SELARL BAECHLIN MOISAN Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L34

Ayant pour avocat plaidant Me Jérôme BENYOUNES, de la SELARL VINCI, avocat au barreau de PARIS, toque : L47, substitué par Me Anne-Charlotte BARBEDETTE

INTIMÉE

S.A.R.L. MILLESIME, RCS de Bordeaux sous le n°789 176 187, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Frédéric LALLEMENT de la SELARL BDL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0480

Ayant pour avocats plaidants Me Xavier CLÉDAT et Antoine FONTAINE, de la SELAS LPA-CGR avocats au barreau de PARIS, toque : P238

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 16 Mai 2024, en audience publique, Laurent NAJEM, Conseiller, ayant été entendu en son rapport dans les conditions prévues par l'article 804, 805 et 905 du code de procédure civile, devant la cour composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre,

Michèle CHOPIN, Conseillère,

Laurent NAJEM, Conseiller,

Qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSE DU LITIGE

La société BMF Brindos [Localité 4], propriétaire d'un hôtel classé Cinq étoiles et sis [Adresse 1], suivant contrat de mandat en date du 3 mai 2021, a confié à la société Millesime la gestion de cet établissement.

Suivant lettre recommandée avec avis de réception en date du 5 juin 2023, la société BMF Brindos Anglas a entendu résilier le contrat sur le fondement de son article 8-4 prévoyant cette faculté lorsque « le Résultat Brut d'Exploitation Hôtelier obtenu par l'Hôtel est inférieur au Seuil de Performance applicable à ladite Année d'Exploitation (') ».

Par lettre du 19 juin 2023, la société Millesime a notifié son intention d'exercer son droit de remédiation contractuel, « à savoir [son] intention de compenser par tous moyens le Résultat Brut d'Exploitation afin d'atteindre le Seuil de Performance ».

Par ordonnance contradictoire du 28 décembre 2023, le juge des référés du tribunal de commerce de Paris a ordonné à la société BMF Brindos Anglet de poursuivre l'exécution du contrat de mandat de gestion hôtelière et de licences du 3 mai 2021 la liant à la société Millesime dans l'attente de la signification du jugement à intervenir dans l'affaire pendante devant le tribunal de commerce de Paris enrôlée sous le numéro de RG 2023068038 et si jugement n'a pas été rendu ou signifié, au plus tard jusqu'au 30 avril 2024.

Par acte extra-judiciaire du 20 février 2024, la société BMF Brindos [Localité 4] a fait signifier à la société Millesime une lettre de rupture visant l'échec au Test de Performance et alléguant de l'existence de graves manquements contractuels. Elle précisait que la résiliation était à effet immédiat et qu'elle se réservait le droit de solliciter des dommages et intérêts.

Par acte du 8 mars 2024, la société Millesime a assigné la société BMF Brindos Anglet devant le juge des référés du tribunal de commerce de Paris aux fins à titre principal d'ordonner à la société BMF Brindos Anglet de se conformer sans délai aux dispositions de l'ordonnance de référé rendue le 28 décembre 2023 par le président du tribunal (RG n° 2023073609) et, en conséquence, de poursuivre l'exécution du contrat de mandat de gestion hôtelière et de licences du 3 mai 2021 la liant à la société Millesime et de laisser tout représentant ou personnel de la société Millesime pénétrer dans les locaux, s'y maintenir et y exécuter ses missions telles que contractuellement prévues, sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard à compter de la signification de l'ordonnance à intervenir.

Par ordonnance contradictoire du 19 mars 2024, le juge des référés du tribunal de commerce de Paris, a :

ordonné à la société BMF Brindos [Localité 4] de laisser entrer et pénétrer tout représentant ou personnel de la société Millesime dans les locaux, au besoin avec le concours de la force publique, s'y maintenir et exécuter ses missions telles que contractuellement prévues sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard à compter du 4ème jour suivant la notification de l'ordonnance et ce pour une durée n'excédant pas le 30 avril 2024 ;

ne s'est pas réservé la liquidation de cette astreinte ;

débouté les parties de leurs demandes autres plus amples ou contraires au présent dispositif ;

condamné la société BMF Brindos [Localité 4] à payer à la société Millesime la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné en outre la société BMF Brindos [Localité 4] aux dépens de l'instance, dont ceux recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 41,93 euros TTC dont 6,78 euros de TVA.

Par déclaration du 21 mars 2024, la société BMF Brindos [Localité 4] a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 23 avril 2024, elle demande à la cour, au visa des articles L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire, L. 131-1 du code des procédures civile d'exécution, 488, 491, 872, 873 du code de procédure civile, 1103, 1104, 1224 et suivants, 1984 et suivants du code civil, de :

la juger recevable et bien fondée en son appel, fins et moyens et prétentions ;

En conséquence,

infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé rendue par le président du tribunal de commerce de Paris en date du 19 mars 2024 ;

débouter la société Millesime de l'ensemble de ses demandes, fins, moyens et prétentions ;

En tout état de cause,

condamner la société Millesime à lui payer une somme de 20.000 euros sauf à parfaire sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner enfin la société Millesime aux entiers dépens de la présente instance dont distraction au profit de la SCP Baechlin & Moisan, représentée par Me Moisan avocat pour ceux dont elle aura fait l'avance sans avoir reçu provision dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile.

Elle soutient que dans le cadre de son ordonnance du 28 décembre 2023, le président du tribunal de commerce de Paris lui a enjoint de poursuivre le contrat, sans sanction financière et qu'il ne pouvait assortir cette décision d'une astreinte, dès lors qu'il n'était pas saisi d'une telle demande ; qu'il résulte du dispositif de l'assignation de la société Millesime du 19 février 2024 que seul le juge de l'exécution était compétent.

Elle fait valoir que cette résiliation du 20 février 2024 était légitime et fondée ; que dès le 1er janvier 2024, la société Millesime a de nouveau failli à ses obligations de mandataire ; que les défaillances répétées et hostiles ont gravement obéré la gestion quotidienne de l'hôtel ; que cette résiliation a été opérée légalement pour des motifs postérieurs à la première ordonnance de référé et l'audience de plaidoirie du 20 février 2024 ; que le contrôle judiciaire de la résiliation s'exerce a posteriori et ne peut faire obstacle aux effets immédiats de la résiliation ; que la question de savoir si ladite résiliation se fonde sur des motifs sérieux est une question de fond.

Elle détaille les manquements reprochés à la société Millesime.

Elle soutient que le juge des référés pouvait avec l'évidence requise juger que la résiliation notifiée le 20 février 2024 était fondée et opposable à l'intimée.

S'agissant de l'appel incident de la société Millesime, elle rappelle qu'elle a, par deux fois, fait usage de la faculté de révocation consignée dans le mandat. Elle considère qu'elle a été abusivement entravée dans l'exercice de ce droit par la juridiction consulaire et que la société Millesime ne justifie d'aucun préjudice nécessitant la poursuite du contrat à titre conservatoire dans l'attente de l'instruction au fond de l'affaire.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 16 avril 2024, la société Millesime demande à la cour, au visa des articles 496, 872, 873 du code de procédure civile et L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution, de :

confirmer l'ordonnance de référé du 28 décembre 2023 en toutes ses dispositions ;

confirmer l'ordonnance de référé du 19 mars 2024 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'elle limite la mesure provisoire ordonnée une « durée n'excédant pas le 30 avril 2024 » ;

réformer l'ordonnance du 19 mars 2024 sur ce point ;

Et jugeant de nouveau :

proroger au 30 juin 2024 la durée limite de la mesure provisoire ordonnée par l'ordonnance de référé du 19 mars 2024 ;

débouter la société BMF Brindos [Localité 4] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

En tout état de cause :

condamner la société BMF Brindos [Localité 4] lui verser 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner la société BMF Brindos [Localité 4] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Elle soutient que la société BMF Brindos [Localité 4] continue de la bloquer autant qu'elle peut dans sa gestion et qu'elle tente de la faire passer pour un mauvais gestionnaire, ce qu'elle n'est pas.

Elle fait valoir qu'en prononçant la résiliation unilatérale du contrat de gestion le 20 février 2024, en empêchant la poursuite de la gestion de l'hôtel, la société BMF Brindos [Localité 4] a délibérément violé les disposition précitées de l'ordonnance de référé dont les termes étaient clairs en ce que le contrat doit être maintenu en toutes circonstances ; que les nouveaux motifs de résiliation sont invoqués de manière purement opportune ; que cette nouvelle résiliation est donc sans effet ; que la demande d'injonction sous astreinte était parfaitement fondée.

Elle soutient que les demandes dans le cadre de ce second référé n'avaient pas objet de réformer l'ordonnance du 28 décembre 2023 mais d'obtenir une nouvelle mesure provisoire, intégrant une astreinte et une date limite d'exécution tenant compte de la réouverture des débats prononcée par le juge du fond ; qu'il ne s'agissait pas d'assortir d'une astreinte la mesure provisoire précédemment ordonnée mais d'en ordonner une nouvelle.

Elle fait valoir que les manquements allégués par la société BMF Brindos [Localité 4] sont en débat devant le juge du fond ; qu'ils sont inopérants ; que l'appelante ne fait pas mystère de ce qu'elle n'exécutera pas la présente décision si l'astreinte est levée ou le montant réduit notablement.

Elle allègue que la société BMF Brindos [Localité 4] est responsable de la prorogation du délibéré au fond, par la résiliation « sauvage » du 20 février 2024 ; qu'il peut être raisonnablement considéré que le jugement au fond aura été prononcé le 30 juin 2024.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 mai 2024.

SUR CE,

La société Millesime a notifié des conclusions communes pour deux instances qui n'ont pas été jointes, il en résulte qu'une partie substantielle des moyens et des prétentions concerne l'autre ordonnance entreprise.

La compétence conférée au juge de l'exécution pour assortir d'une astreinte une décision rendue par un autre juge ne fait pas obstacle à ce que celui-ci puisse être saisi en vue d'assortir d'une astreinte la décision qu'il a rendue (2e Civ., 18 février 1999, pourvoi n° 97-13.885).

Il en résulte que le premier juge avait le pouvoir d'assortir l'obligation mise à la charge de la société BMF Brindos [Localité 4] par une précédente décision d'une astreinte.

En outre, la demande formée par la société Millesime dans la seconde instance en référé n'était pas strictement identique en ce qu'elle visait spécifiquement à ce qu'il soit enjoint à la société BMF Brindos [Localité 4] de laisser entrer et pénétrer tout représentant ou personnel dans les locaux, compte tenu de la résistance de cette dernière sur ce point, et non uniquement de poursuivre du contrat comme sollicité par la première instance en référé.

L'article 872 du code de procédure civile dispose que, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence du tribunal, ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

Une contestation sérieuse est caractérisée lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

Selon l'article 873 du code de procédure civile, le président peut, dans les mêmes limites, et même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le dommage imminent s'entend du dommage qui n'est pas encore réalisé, mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer. Le trouble manifestement illicite découle de toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit.

La société BMF Brindos [Localité 4] considère que la révocation du mandat de gestion à effet du 31 décembre 2023 est intervenue dans la stricte conformité des prescriptions conventionnelles, en application de l'article 8-4 « droit de résiliation spécifique du Propriétaire - Test de Performance ». Elle se prévaut de son courrier en ce sens du 5 juin 2023 et du délai de préavis de 6 mois qui y est rappelé.

Le seuil de performance afférent au résultat brut d'exploitation hôtelier a été défini dans une annexe 1 au contrat.

Il est par ailleurs prévu une faculté pour le gestionnaire d'empêcher la résiliation du contrat en notifiant au Propriétaire « son intention de compenser par tous moyens le Résultat Brut d'Exploitation Hôtelier par l'Hôtel afin d'atteindre le Seuil de Performance ». La société Millesime a entendu s'en prévaloir par courrier du 19 juin 2023.

Selon la société BMF Brindos [Localité 4], le montant de cette remédiation s'élevait à la somme de 142.966 euros.

Le contrat stipule que « si le Gestionnaire exerce le Droit de Remédier, la notification de Résiliation du Propriétaire sera considérée comme retirée ».

Dans un courrier du 18 octobre 2023, en réponse à une lettre de la société Millesime qui n'est pas produite, la société BMF Brindos [Localité 4] expose qu'elle refuse la proposition de compensation de la dette de la société Millesime avec deux factures et d'un moratoire de 23 mois pour régler le solde du droit de remédiation.

Cependant, comme l'a relevé le premier juge dans son ordonnance du 28 décembre 2023, le fait que la société Millesime ne pouvait remédier à ses obligations vis-à-vis de l'excédent brut d'exploitation par un paiement en plusieurs échéances ne figurait pas au contrat.

Ce contrat prévoit que l'exercice de ce droit suffit à entraîner le retrait de la notification de la résiliation sur le fondement de cet article.

Il apparaît que la société BMF Brindos [Localité 4] ajoute au contrat, ce qui est de nature à remettre en cause, dans un débat de fond, le caractère effectif de cette résiliation.

La cour observe en outre que la société BMF Brindos [Localité 4] a signifié par acte de commissaire de justice, une « nouvelle » résiliation par acte du 20 février 2024.

Il en résulte implicitement mais nécessairement que la résiliation que le mandant a entendu notifier le 5 juin 2023 à effet du 31 décembre 2023 est susceptible d'être dépourvue d'effet. A l'évidence, une résiliation ne se conçoit que pour un contrat encore en cours au moment où elle est notifiée et non pour un contrat déjà résilié, selon ses propres allégations, depuis près de deux mois lors de la signification de cette lettre.

Il sera relevé que cette seconde notification est intervenue alors que le litige, au fond, était en délibéré sur la question de la résiliation à effet du 31 décembre 2023 et le droit de remédiation. Il en résultait que la société BMF Brindos [Localité 4], sans attendre le délibéré pourtant fixé au 26 février 2024, a entendu notifier une « nouvelle » résiliation, privant la décision à intervenir de toute portée. Dès lors la bonne foi de la société BMF Brindos [Localité 4] dans la signification de cet acte est discutée à juste titre par la société Millesime.

Averti néanmoins de l'existence de l'acte du 20 février 2024, par une note adressée le lendemain et saisi d'une demande de réouverture des débats de la société Millesime à laquelle la société BMF Brindos Anglet a indiqué s'opposer, le tribunal du commerce a relevé que « la résiliation à l'initiative de BMF Brindos entraînait une évolution majeure de la situation contractuelle et opérationnelle entre les parties depuis l'audience depuis l'audience du 19 janvier 2024 et que cette nouvelle situation ne représente plus celle sur laquelle les conclusions étaient basées ». Le tribunal a dès lors ordonné la réouverture des débats le 11 mars 2024 et l'affaire est pendante devant cette autre juridiction, un délibéré devant intervenir en juillet 2024.

Il existe par conséquent un débat sur la validité de cette première résiliation et sur ses effets ainsi que sur l'articulation avec la seconde résiliation, les deux notifications à ce titre, pour des dates différentes, n'étant pas conciliables.

La société Millesime produit un procès-verbal de constat en date du 4 mars 2024 (sa pièce 10) dont il résulte que la grille de l'hôtel est fermée avec une personne chargée manifestement de contrôler l'accès au site.

Une personne rencontrée sur les lieux et ayant confirmé être salariée du groupe BMF, après que l'existence de l'ordonnance de référé entreprise a été rappelée, a refusé au commissaire de justice l'accès en faisant état du courrier du 20 février 2024.

Dans un second constat du 22 mars 2024 (pièce 26- Millesime), le commissaire de justice a notamment relevé l'absence de signalisation Millesime à l'entrée de l'hôtel, ainsi que le fait que le logo de l'intimé avait été occulté sur les cartes du room service et du bar.

Dans un article du journal Sud-Ouest en date du 22 mars 2024 (pièce 13- Millesime), M. [O], au nom du groupe BMF, déclare « le 30 avril, notre contrat avec Millesime s'arrête ». L'article expose : « BMF ne cache pas son intention de faire appel de cette décision en référé, mais n'attend pas qu'une ordonnance soit rendue avant le début du mois d'avril. Soit après l'audience au fond d'une autre procédure engagée devant le tribunal de commerce de Paris, depuis la fin de l'année 2023 ». M. [O] indique qu'il « est temps que tout cela s'arrête (') Je pense avant tout à l'équipe en place à Brindos qui se retrouve prise au milieu de toute cette histoire et qui n'aspire qu'à travailler pour faire vivre Brindos ».

Il en résulte suffisamment une volonté de l'appelante, matérialisée par des actes visant à interdire l'accès à l'établissement au personnel de la société Millesime, de ne pas se conformer à la première décision de référé lui enjoignant de poursuivre l'exécution du contrat de mandat de gestion hôtelière et de licences du 3 mai 2021, ni d'attendre la décision de fond.

Ces agissements caractérisent l'existence d'un dommage imminent résultant de l'impossibilité pour la société Millesime de reprendre son activité si la validité des résiliations est remise en cause.

C'est donc à bon droit, que le premier juge a ordonné à la société BMF Brindos [Localité 4] de laisser entrer et pénétrer tout représentant ou personnel de la société Millesime dans les locaux, au besoin avec le concours de la force publique, s'y maintenir et exécuter ses missions telles que contractuellement prévues.

La décision de fond n'ayant pas été rendue au 30 avril 2024 comme le premier juge l'avait envisagé, il y a lieu de fixer un nouveau terme : le 15 juillet 2024.

La première décision sera infirmée sur ce point uniquement.

Le sens de la décision conduit à confirmer l'ordonnance déférée s'agissant des dépens et des frais irrépétibles.

A hauteur d'appel, la société BMF Brindos [Localité 4] sera condamnée aux dépens ainsi qu'au paiement de la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme l'ordonnance entreprise sauf en ce qui concerne le terme fixé pour la mesure d'astreinte ;

Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant,

Ordonne à la société BMF Brindos [Localité 4] de laisser entrer et pénétrer tout représentant ou personnel de la société Millesime dans les locaux, au besoin avec le concours de la force publique, s'y maintenir et exécuter ses missions telles que contractuellement prévues sous astreinte de 10.000 euros par jour de retard à compter du 4ème jour suivant la notification de l'ordonnance du 19 mars 2024 et ce pour une durée n'excédant pas le 15 juillet 2024 ;

Condamne la société BMF Brindos [Localité 4] à payer à la société Millesime la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code du code de procédure civile ;

Condamne la société BMF Brindos [Localité 4] aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 24/05294
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;24.05294 ?
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