La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/06/2024 | FRANCE | N°23/17835

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 20 juin 2024, 23/17835


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 2



ARRÊT DU 20 JUIN 2024



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/17835 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIPAW



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 18 Octobre 2023 -Tribunal de Commerce de Paris - RG n° 2023047396





APPELANTE



S.A.R.L. AGENCE ANTILLES METROPOLE (AGAM), RCS de Bass

e-Terre sous le n°323 199 828, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4] (GUADELOUPE)



Représentée par Me...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRÊT DU 20 JUIN 2024

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/17835 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIPAW

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 18 Octobre 2023 -Tribunal de Commerce de Paris - RG n° 2023047396

APPELANTE

S.A.R.L. AGENCE ANTILLES METROPOLE (AGAM), RCS de Basse-Terre sous le n°323 199 828, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4] (GUADELOUPE)

Représentée par Me Audrey SCHWAB de la SELARL SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

INTIMÉE

S.A.S. SEEQLE, RCS de Nancy sous le n°809 063 142, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Nikita YAHOUEDEOU, avocat au barreau de PARIS, toque : K0151

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 16 Mai 2024, en audience publique, Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre, ayant été entendue en son rapport dans les conditions prévues par l'article 804, 805 et 905 du code de procédure civile, devant la cour composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre,

Michèle CHOPIN, Conseillère,

Laurent NAJEM, Conseiller,

Qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSE DU LITIGE

La société Agence Antilles Métropole (AGAM) exerce l'activité d'agent immobilier à Basse-Terre en Guadeloupe.

La société Seeqle a pour objet la mise en relation entre particuliers et professionnels, la commercialisation d'espaces publicitaires et de communication sur divers supports, les conseils en communication et management, l'organisation d'événements, la création et l'utilisation de logiciels et plate-formes sociales, la commercialisation de tous produits ou services par l'intermédiaire de tous supports physiques, numériques ou intellectuels.

Se prévalant à l'encontre de la société AGAM d'une facture de prestations impayées (mise à disposition d'une plate-forme adaptée aux recherches de candidats à l'emploi) la société Seeqle a obtenu du tribunal de commerce de Basse-Terre le 19 mai 2023 une ordonnance d'injonction de payer la somme principale de 22.164 euros, montant de cette facture.

La société AGAM a formé opposition à cette ordonnance le 19 juin 2023, se prévalant d'une usurpation d'identité et d'une utilisation frauduleuse de sa dénomination commerciale.

Par courriel en date du 26 juillet 2023, la société Seeqle a déclaré au greffe du tribunal de commerce de Basse-Terre qu'elle se désistait de l'instance suite à l'opposition formée par la société AGAM, entendant porter la procédure devant la juridiction compétente en vertu de la clause attributive de compétence prévue aux conditions générales du contrat signé entre elle et l'AGAM.

Par acte du 9 août 2023, la société Seeqle a assigné la société Agence Antilles Métropole devant le juge des référés du tribunal de commerce de Paris aux fins de voir :

- juger l'obligation de paiement de la société Agence Antilles Métropole envers la société Seeqle non sérieusement contestable ;

- par conséquent, octroyer par provision le paiement à la société Seeqle de la somme de 22.164 euros au titre de la facture n°05D15670-0001 avec intérêts au taux légal à compter de la signification de l'ordonnance à venir, de la somme de 40 euros au titre de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, de la somme de 178 euros de frais de mandataire ;

- condamner la société AGAM à lui payer une indemnité de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

La société AGAM a soulevé une exception de litispendance au profit du tribunal de commerce de Basse-Terre. A titre subsidiaire elle a conclu au débouté, arguant d'une contestation sérieuse.

Par ordonnance contradictoire du 18 octobre 2023, le juge des référés du tribunal de commerce de Paris a :

condamné la société Agence Antilles Métropole à payer à la société Seeqle, à titre de provision, la somme de 22.164 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise à disposition de la présente décision, soit le 18 octobre 2023 ;

condamné la société Agence Antilles Métropole à payer à la société Seeqle, à titre de provision, la somme de 40 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement ;

condamné la société Agence Antilles Métropole à payer à la société Seeqle la somme de 1.500 euros au titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

rejeté toutes demandes plus amples ou contraires des parties ;

condamné en outre la société Agence Antilles Métropole aux dépens de l'instance dont ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 41,93 euros TTC dont 6,78 euros de TVA.

Par déclaration du 6 novembre 2023, la société Agence Antilles Métropole a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 15 décembre 2023 elle demande à la cour, au visa des articles 42, 100, 104, 395 et 873 du code de procédure civile, de :

infirmer l'ordonnance du 18 octobre 2023 en toutes ses dispositions ;

Statuer à nouveau :

In limine litis :

juger que le désistement de la société Seeqle devant le tribunal mixte de commerce de Basse-Terre n'est pas parfait en absence de son acceptation ;

juger que l'exception de litispendance a vocation à s'appliquer ;

déclarer que le tribunal compétent pour juger du présent litige est le tribunal de commerce de Basse-Terre et se dessaisir à son profit en application de l'article 104 du code de procédure civile, ou à défaut au profit de la cour d'appel de Basse-Terre en application de l'article 90 du même code ;

Subsidiairement au fond,

juger que des contestations sérieuses s'opposent à sa condamnation au paiement de la somme de 22.382 euros ;

En conséquence :

se déclarer incompétent pour connaître des demandes de la société Seeqle formulées en référé à son encontre en présence de contestations sérieuses, à défaut déclarer lesdites demandes irrecevables en référé en raison de contestations sérieuses, et subsidiairement, débouter la société Seeqle de ses demandes, fins et conclusions formulées à son encontre :

En tout état de cause :

condamner la société Seeqle à lui payer la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens dont distraction pour ceux la concernant au profit de la SELARL 2h avocats prise en la personne de Me Schwab, et ce conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par ordonnance du 4 avril 2024, le président de la chambre a déclaré irrecevables les conclusions et les pièces de la société Seeqle.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 30 avril 2024.

SUR CE, LA COUR

Sur l'exception de litispendance

La société AGAM soutient que le désistement formé par la société Seeqle devant le tribunal de commerce de Basse-Terre n'est pas parfait dès lors qu'il aurait dû être accepté par la société AGAM qui avait formé une défense au fond par son opposition à l'ordonnance d'injonction de payer ; que deux instances opposant les mêmes parties et ayant le même objet étant ainsi pendantes devant deux juridictions différentes, la cour doit se dessaisir au profit du tribunal de commerce de Basse-Terre, d'autant qu'en saisissant le tribunal de commerce de Basse-Terre la société Seeqle a renoncé à se prévaloir de la clause attributive de compétence prévue au contrat dont elle se prévaut, et donc à la compétence du tribunal de commerce de Paris.

Toutefois, outre que le tribunal de commerce de Basse-Terre s'est déclaré dessaisi suite au désistement d'instance de la société Seeqle et qu'il n'appartient pas à cette cour d'apprécier le bien fondé de cette décision, il n'y a pas de litispendance entre l'instance au fond et une demande de provision devant le juge des référés (2e Civ., 17 mai 1982, pourvoi n° P81-17025), entre une instance au fond et une demande tendant au prononcé de mesures provisoires portées devant le juge des référés (3e Civ., 29 septembre 2009, pourvoi n° P08-17654).

Par ailleurs, la société Seeqle n'a pas renoncé à se prévaloir de la clause attributive de compétence prévue au contrat conclu avec la société AGAM, déclarant précisément dans son courrier de désistement qu'elle entendait se prévaloir de cette clause.

Il y a donc lieu de rejeter l'exception de litispendance, l'ordonnance étant confirmée sur ce point.

Sur le fond du référé

L'article 873 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal de commerce peut, en référé, accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Le montant de la provision en référé n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée.

Une contestation sérieuse est caractérisée lorsque l'un des moyens de défense opposés aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

En l'espèce, pour être incontestable l'obligation de paiement de la société AGAM envers la société Seeqle doit se fonder sur un contrat de prestations de services régulièrement conclu entre les parties.

Or, des éléments produits par la société AGAM il ressort l'existence d'une contestation sérieuse sur le consentement de cette dernière au contrat de prestations de services dont la société Seeqle sollicite l'exécution par sa demande en paiement provisionnel.

La société AGAM justifie en effet avoir déposé une plainte pour usurpation d'identité le 16 février 2023, qu'elle a réitérée le 18 septembre 2023, dans laquelle elle expose s'être aperçue le 23 janvier 2023 que son logo ainsi que sa dénomination commerciale étaient utilisés frauduleusement pour publier des offres d'emploi dont elle n'est pas à l'origine.

Pour accréditer le contenu de sa plainte, la société AGAM justifie avoir sollicité la suppression de ces offres d'emplois auprès des sites concernés (sa pièce 1) et avoir écrit à une personne ayant répondu à l'une de ces offres qu'elle n'en était pas à l'origine (pièce 5).

En outre, le contrat dont se prévaut la société Seeqle porte une simple signature électronique « [P] [U] » qui ne correspond pas à l'identité exacte du dirigeant de la société AGAM qui se prénomme [B], et il ne porte pas le tampon de la société AGAM.

L'échange de courriels versé aux débats par la société Seeqle pour attester de la réalité du contrat conclu (produit par l'appelante) fait état d'une adresse mail ([Courriel 6]) qui n'est pas celle de la société AGAM ([Courriel 5]) telle qu'elle figure sur ses cartes professionnelles, son papier à entête et son site internet (pièces 13,14,15 de l'appelante). Il résulte d'un rapport d'analyse du domaine agenceantillesmetropole.com que ce nom de domaine a été créé le 31 décembre 2022 (pièce 16), alors que la sociétéAGAM a été créée en 1981.

Il doit enfin être relevé que la facture émise par la société Seeqle ne contient aucun détail sur les prestations effectuées.

Au vu de l'ensemble de ces éléments l'obligation de paiement de la société AGAM apparaît sérieusement contestable.

En conséquence, la cour dira n'y avoir lieu à référé par infirmation de l'ordonnance entreprise.

Sur les mesures accessoires

Partie perdante, la société Seeqle sera condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel et à payer à la société AGAM, pour les deux instances, la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'ordonnance étant infirmée de ces chefs.

PAR CES MOTIFS

Infirme l'ordonnance entreprise, sauf en ce qu'elle a rejeté l'exception de litispendance,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de provision de la société Seeqle,

Condamne la société Seeqle aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction pour ceux la concernant au profit de la SELARL 2h avocats prise en la personne de Me Schwab, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Condamne la société Seeqle à payer à la société Agence Antilles Métropole (AGAM) la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute autre demande.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 23/17835
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;23.17835 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award