REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 6
ARRET DU 19 JUIN 2024
(n° , 8 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/11457 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CF7SU
Décision déférée à la Cour : Jugement du 1er Juin 2022 - tribunal de commerce de Paris - 7ème chambre - RG n° 2021010847
APPELANTE
S.A. SOCIETE GENERALE FACTORING
[Adresse 2]
[Localité 4]
N° SIRET : 702 016 312
agissant poursuites et diligences de son directeur général domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Katia CHASSANG de la SELARL CHASSANG & STILINOVIC ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0255, avocat plaidant
INTIMÉE
S.A.S.U. PRO LIVING
[Adresse 1]
[Localité 3]
N° SIRET : 420 213 910
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Sandra OHANA de l'AARPI OHANA ZERHAT CABINET D'AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050
Ayant pour avocat plaidant Me Yann GALLONE de la SELARL BERTHELON GALLONE & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 435
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 07 Mai 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Marc BAILLY, président de chambre
M. Vincent BRAUD, président
Mme Pascale SAPPEY-GUESDON, conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme Pascale SAPPEY-GUESDON dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie THOMAS
ARRET :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marc BAILLY, président de chambre et par Mélanie THOMAS, greffier, présent lors de la mise à disposition.
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PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par déclaration reçue au greffe de la cour le 16 juin 2022, la Société Générale Factoring a interjeté appel du jugement du tribunal de commerce de Paris rendu le 1er juin 2022 dans l'instance l'opposant à la société Pro Living, en ce qu'il l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes formées à l'encontre de cette dernière et condamnée aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
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À l'issue de la procédure d'appel clôturée le 26 mars 2024 les prétentions des parties s'exposent de la manière suivante.
Au dispositif de ses dernières conclusions, communiquées par voie électronique le 6 février 2023, l'appelant
présente, en ces termes, ses demandes à la cour :
'Il est demandé à la Cour d'appel de Paris de :
Vu les dispositions de l'article 1103 du Code civil,
Vu les dispositions des articles 1302-1 du Code civil,
Vu les dispositions des articles 1303 du Code civil,
Vu les dispositions de l'article 1343-2 du Code civil,
Vu les pièces versées aux débats,
Vu les termes du jugement du 1er juin 2022,
DECLARER la SOCIETE GENERALE FACTORING recevable et bien fondée en son appel.
INFIRMER le jugement rendu le 1er juin 2022 (RG 2021010847) par le Tribunal de commerce de Paris en toutes ses dispositions.
CONFIRMER le jugement rendu le 1er juin 2022 (RG 2021010847) en ce que le tribunal de commerce de Paris a débouté la société PRO LIVING de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour résistance abusive.
EN CONSEQUENCE
DEBOUTER la société PRO LIVING de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.
CONDAMNER la société PRO LIVING à régler à la SOCIETE GENERALE FACTORING la somme de 238 982,65 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 26 octobre 2020, date de la mise en demeure.
ORDONNER la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du Code civil.
Y AJOUTANT
CONDAMNER la société PRO LIVING à verser à la SOCIETE GENERALE FACTORING la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
LA CONDAMNER aux entiers dépens de la présente instance conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.'
Au dispositif de ses dernières conclusions, portant appel incident, communiquées par voie électronique le 6 avril 2023, l'intimé
présente, en ces termes, ses demandes à la cour :
'Vu les articles 1103, 1302, 1303 à 1303-4 du Code civil
Réformer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris en date du 1er juin 2022 en ce qu'il a rejeté la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formulée par la société PRO LIVING.
Statuant à nouveau sur ce point, condamner la société SOCIETE GENERALE FACTORING à payer à la société PRO LIVING la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.
Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris en date du 1er juin 2022 dans ses autres dispositions.
Débouter la société SOCIETE GENERALE FACTORING de ses entières demandes.
Condamner la société SOCIETE GENERALE FACTORING à payer à la société PRO LIVING la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Condamner la même aux entiers dépens.'
Par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, à leurs conclusions précitées.
MOTIFS DE LA DECISION
Par acte sous seing privé en date du 5 juillet 2018, la société Pro Living a conclu un contrat d'affacturage avec la société Compagnie Générale d'Affacturage (CGA) - devenue Société Générale Factoring. La société Alinéa n'a pas réglé à leurs échéances, nombre de factures représentant un montant total de 1 433 895,92 euros TTC, soit 1 194 913,27 euros HT, émises sur la société Alinéa par la société Pro Living et que cette dernière avait cédées au factor en vertu du contrat d'affacturage.
Par jugement rendu le 13 mai 2020, le tribunal de commerce de Marseille a ouvert une procédure de redressement judiciaire au profit de la société Alinéa. Par jugement du 8 octobre 2020, le redressement judiciaire a été converti en liquidation judiciaire. La Société Générale Factoring, le 26 octobre 2020, a mis en demeure la société Pro Living de lui restituer la somme de 238 982,65 euros, représentant le montant de la TVA sur ces factures impayées d'un montant total de 1 433 895,92 euros TTC, au motif que cette taxe ne serait pas exigible. Cette mise en demeure du 26 octobre 2020 est demeurée infructueuse, de même que la sommation de payer du 9 décembre 2020. Le 21 juin 2021, le liquidateur judiciaire a établi un certificat d'irrécouvrabilité des créances, y précisant aussi, au visa des dispositions de l'article 272 du code général des impôts, que l'imputation de la TVA réglée au trésor public pouvait être effectuée.
C'est donc en ce sens que la Société Générale Factoring a orienté ses demandes en justice, en première instance puis en appel.
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Sur la demande principale de la Société Générale Factoring
En première instance, la Société Générale Factoring soutenait qu'il découle de l'article 6.3 du contrat d'affacturage, que la Société Générale Factoring est bien fondée à demander le remboursement de la TVA qu'elle a payée à la société Pro Living lors de l'achat des créances cédées et demeurées impayées. Selon elle, et il apparaît que la société Pro Living fait une interprétation erronée des arguments de la Société Générale Factoring pour tenter d'échapper à l'application du contrat, dont il résulte que le factor finance la créance au titre de la prestation et nullement au titre des taxes dues aux services fiscaux.
Ensuite, il résulte de la loi que la demande de la Société Générale Factoring est bien fondée, au visa des dispositions qui régissent l'enrichissement sans cause, dès lors que :
- la Société Générale Factoring n'avait aucune obligation de régler la TVA,
- la société Pro Living s'est enrichie en obtenant le paiement de la TVA à deux reprises, l'une lors du financement des créances TTC et l'autre lors de la restitution de la TVA par les services fiscaux,
- la Société Générale Factoring s'est bien appauvrie puisqu'elIe a versé à la société Pro Living de la TVA que cette dernière a récupérée en raison du caractère irrécouvrable des créances impayées que la Société Générale Factoring prend en charge en HT.
La société Pro Living en réponse faisait valoir que la Société Générale Factoring doit d'abord préciser les conditions dans lesquelles elle a certainement été couverte en vertu de son propre contrat de réassurance qui a dû l'indemniser pour l'impayé qu'elle a subi. Elle soutenait qu'il y a lieu de se reporter au contrat d'affacturage pour déterminer si le factor dispose d'un recours contre l'adhérent concernant le solde non payé d'une créance vendue. Or en l'espèce l'article 4 du contrat d'affacturage exclut tout recours. De même, l'article 6.3 auquel se féfère la Société Générale Factoring ne prévoit pas de droit du factor au remboursement de la TVA et la Société Générale Factoring en fait une mauvaise lecture.
Par suite, la théorie de l'enrichissement sans cause ne s'applique pas au cas présent, car elle se heurte au contrat lui-même, et celui-ci exclut tout recours. De même la répétition de l'indu ne peut pas recevoir application, compte tenu du contrat, puisque c'est en vertu de ce contrat que la Société Générale Factoring a versé la TVA à la société Pro Living.
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1- La Société Générale Factoring spécifiquement en cause d'appel soutient que la transmission de la créance principale entraîne aussi celle des avantages et accessoires de la créance, sauf, conformément à l'article 1346-4 du code civil et de la jurisprudence de la Cour de cassation, des droits et actions exclusivement attachés à la personne du créancier ainsi que les intérêts conventionnels et les clauses d'anatocisme ou d'échelle mobile.
Les créances que la société Pro Living détenait sur la société Alinéa et qu'elle a transférées au factor en vertu du contrat d'affacturage sont entrées dans le patrimoine de la Société Générale Factoring. D'ailleurs la société Pro Living ne conteste pas avoir reçu du factor le paiement au titre de ces créances, qu'elle lui a cédées, dont le montant incluait la TVA. La TVA ayant été réglée par le factor, ce dernier en est devenu propriétaire, et cela que cette TVA soit intrinsèque à la créance même ou qu'elle s'analyse en un accessoire de la créance.
Il s'ensuit que la Société Générale Factoring a bien seule la qualité, au final, pour recevoir la restitution de la TVA, dont elle a acquis la propriété. Certes, au regard de la réglementation fiscale, le factor n'avait pas la faculté de solliciter directement auprès de l'administration fiscale le remboursement de la TVA payée au titre des créances cédées impayées, mais cette règle n'enlève rien au fait que la Société Générale Factoring a la qualité de propriétaire de la créance en ce compris le montant de la TVA. Aussi, le code général des impôts dans son article 269 2 c) et la jurisprudence de la Cour de cassation reconnaissent la qualité de propriétaire du factor au titre de la TVA puisqu'il prévoit qu'en cas de cession de la créance, la TVA doit être payée entre les mains du cessionnaire.
L'intégralité de la créance cédée appartenant au factor, toute somme réglée au titre de cette créance que ce soit HT ou TTC, revient au factor en sa qualité de propriétaire, de sorte que la Société Générale Factoring est bien fondée à solliciter la restitution de la TVA dont elle a fait l'avance.
La société Pro Living souligne que cet argumentaire est nouveau en appel, et qu'il est de plus juridiquement erroné pour quatre raisons :
' Premièrement, le droit d'obtenir la restitution de la TVA n'appartient légalement qu'à l'adhérent, redevable légal de la taxe de sorte que le droit d'obtenir restitution de la TVA auprès de l'administration fiscale n'est donc pas transmis avec la subrogation au factor et n'est pas un accessoire de la créance cédée ;
' Deuxièmement, pour qu'une société d'affacturage puisse demander à son adhérent le reversement à son profit de la taxe ainsi récupérée, il est indispensable que ce soit prévu dans le contrat d'affacturage, de sorte que ce droit n'est pas un accessoire de la créance cédée ;
' Troisièmement, en vertu de l'article 4 du contrat d'affacturage, le factor n'a pas de recours vis-à-vis du fournisseur concernant le solde non payé d'une créance vendue. Dès lors, même s'il devait être considéré qu'une société d'affacturage a par principe le droit de demander à son adhérent le reversement à son profit de la TVA récupérée, au motif que ce droit constituerait un accessoire de la créance cédée, ce droit allégué a été contractuellement exclu ;
' Enfin, contrairement à ce qu'indique la Société Générale Factoring, le factor qui s'acquitte du paiement de la TVA n'en devient pas 'propriétaire' puisqu'il n'a juridiquement pas qualité pour en demander la restitution. L'article du code général des impôts et la jurisprudence invoqués précisent uniquement que le débiteur cédé doit s'acquitter du paiement de la TVA entre les mains du factor. En revanche, le factor n'a pas de 'droit de propriété' à faire valoir dans le cadre d'une récupération de la taxe, de ce sorte que ce droit n'est pas un accessoire de la créance cédée.
2- En outre, comme en première instance, la Société Générale Factoring soutient qu'il ressort de l'article 6.3 du contrat d'affacturage qu'elle est fondée à demander à la société Pro Living le remboursement de la TVA qu'elle lui a payée lors de l'achat des créances cédées et demeurées impayées. En effet, cet article prévoit qu'en cas de difficulté concernant la TVA et de préjudice que la société CGA pourrait subir, elle est en droit d'en solliciter l'indemnisation. Or, au cas présent elle a bien subi un préjudice, puisqu'elle a réglé de la TVA alors même qu'elle n'est plus due, et que cette TVA est un accessoire des créances cédées.
Dans le cas où la Société Générale Factoring se verrait refuser cette restitution, la société Pro Living recevrait au titre de la TVA deux paiements : l'un de la part de la Société Générale Factoring lors du règlement des factures TTC, et l'autre de la part des services fiscaux lors de la restitution de la TVA.
Contrairement à ce qui est soutenu par la partie adverse, il n'existe pas de contradiction entre l'article 4 et l'article 6.3 du contrat car il ressort de l'article 6.1 que le financement devant être effectué sur des créances HT, la garantie du factor se limite au montant HT des créances, de sorte qu'en cas de difficulté sur la TVA, il convient d'appliquer l'article 6.3.
Le fait que le factor règle les créances cédées TTC ne signifie pas qu'il finance et garantisse ces créances TTC. Il ne peut garantir une partie de la créance qui n'est pas due et qui est restituée par l'administration fiscale.
La société Pro Living soutient qu'en vertu du Bulletin Officiel des Finances Publiques et de l'Instruction Fiscale, c'est le contrat d'affacturage qui doit préciser si le factor dispose d'un recours contre l'adhérent ayant pu récupérer de la TVA sur des factures cédées impayées. Or, l'article 4 du contrat d'affacturage prévoit que CGA ne disposera d'aucun recours vis-à-vis du fournisseur concernant le solde non payé d'une créance vendue. Par application de l'article 1103 du code civil ' 'Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits' ' en l'absence de recours prévu par le contrat, la Société Générale Factoring ne peut agir.
Contrairement à ce qu'allègue la Société Générale Factoring, l'article 6.3 ne prévoit pas un droit du factor au remboursement de la TVA, ce qui d'ailleurs serait contradictoire avec l'article 4 du contrat d'affacturage. L'article 6.3 n'a pas le sens que la Société Générale Factoring lui attribue, il ne fait que rappeler qu'il incombe au fournisseur de s'acquitter du paiement de la TVA auprès de l'administration fiscale et que s'il ne le fait pas et que le factor en subit des conséquences pécuniaires à la suite notamment d'un recours de l'administration, le fournisseur devra alors l'indemniser. Cet article 6.3 n'aurait eu vocation à s'appliquer qu'en cas de faute de la société Pro Living dans le paiement de la TVA, causant un préjudice au factor, ce qui ne correspond pas au cas d'espèce.
En outre, contrairement à ce qu'affirme la Société Générale Factoring, l'article 6.1 ne fait que préciser que les formalités relatives à la TVA doivent être accomplies par le cocontractant de la Société Générale Factoring dans le cadre de l'opération pour lesquelles le factor octroie son financement, car en matière d'affacturage, le redevable de la TVA demeure l'adhérent.
Enfin, le factor finance bien contractuellement des créances avec TVA. Le montant hors taxes des factures a été perçu par la société Pro Living, ainsi que le montant de la TVA afférent.
Sur ce,
La Société Générale Factoring se place désormais, principalement, sur le terrain de la subrogation.
L'article 1346-1 du code civil dispose que :
'La subrogtion conventionnelle s'opère à l'initiative du créancier lorsque celui-ci, recevant son paiement d'une tierce personne, la subroge dans ses droits contre le débiteur.
Cette subrogation doit être expresse.
Elle doit être consentie en même temps que le paiement, à moins que dans un acte antérieur, le subrogeant n'ait manifesté la volonté que son cocontractant lui soit subrogé lors du paiement (...)'.
Il résulte du contrat d'affacturage liant la société Pro Living et la Société Générale Factoring anciennement CGA que la subrogation a été expressément prévue par les parties dans les termes suivants : '3 Subrogation : 3-1 En vertu des articles 1346 et suivants du Code Civil, CGA achète et devient propriétaire des Créances, et de tous les droits, actions, garanties et accessoires inhérents à celles-ci,en créditant le compte courant d'affacturage tenu dans ses livres au nom du Fournisseur du montant du Prix d'Achat correspondant'.
La subrogation a pour effet la transmission des droits et actions, en vertu de l'article 1346-4 du code civil qui dispose : 'La subrogation transmet à son bénéficiaire, dans la limite de ce qu'il a payé, la créance et ses accessoires, à l'exception des droits exclusivement attachés à la personne du créancier.'
Aussi, le paiement avec subrogation, s'il a pour effet d'éteindre la créance à l'égard du créancier, la laisse subsister au profit du subrogé qui dispose de toutes les actions qui appartenaient au créancier et qui se rattachaient à cette créance immédiatement avant le paiement.
Ainsi, en l'espèce, par l'effet de la subrogation résultant du contrat d'affacturage signé entre les parties le 5 juillet 2018, la Société Générale Factoring dispose d'un droit d'action à l'encontre de la société Pro Living, quant au montant exact de ce qu'elle a payé.
Or, il est constant qu'il y a eu paiement de la somme de 1 433 895,92 euros TTC, soit 1 194 913,27 euros HT, et que la société Pro Living a récupéré la taxe dont elle s'était acquittée au profit du Trésor Public, d'un montant de 238 982,65 euros.
Dans ces conditions il devait y avoir facture rectificative, puisque la société Pro Living a obtenu restitution de la TVA par l'administration fiscale. Dès lors, la société Pro Living devait informer le factor de cette opération, en lui remettant cette facture rectificative au moins en copie, puique la facture rectifiée était la seule qui dût être payée par le factor.
L'article 4 du contrat d'affacturage stipule que 'CGA ne disposera d'aucun recours vis-à- vis du Fournisseur concernant le solde non payé d'une Créance Vendue, sauf en cas de non respect par le Fournisseur des déclarations et engagements exprimés à l'article 2 (Déclarations et engagements) de l'Annexe 1 (Conditions) du présent Contrat'. Or, le litige en l'espèce ne porte pas sur le 'solde impayé d'une créance vendue'. La discussion menée entre les parties sur les conséquences juridiques d'une absence de recours du factor comme étant contractuellement prévue, est donc surabondante.
Il résulte de tout ce qui précède qu'il doit être fait droit à la demande de remboursement formée par la Société Générale Factoring, contrairement à ce qui a été jugé par le tribunal. Le jugement déféré est donc infirmé de ce chef.
Par suite, la société Pro Living est condamnée à régler à la Société Générale Factoring la somme de 238 982,65 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 26 octobre 2020, date de la mise en demeure.
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Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive
La société Pro Living soulève que la Société Générale Factoring ne saurait tenter de remettre en cause l'efficacité et la force obligatoire des contrats qu'elle impose elle-même à ses cocontractants en se livrant à des interprétations fausses des différentes clauses contractuelles. Selon la société Pro Living, aucun recours n'est prévu au contrat liant les parties, en faveur du factor, et à défaut de celui-ci, toute action est vaine, et dès lors l'action judiciaire intentée par la Société Générale Factoring est abusive.
Le tribunal rappelant, exactement, que l'exercice d'une action en justice est un droit et ne dégénère en abus de droit qu'en cas de mauvaise foi ou d'intention de nuire de la part du demandeur, pour débouter la société Pro Living de sa demande indemnitaire pour procédure abusive a retenu qu'en l'espèce aucune mauvaise foi, ni intention de nuire de la part de la Société Générale Factoring, n'est caractérisée.
Conformément à la solution retenue par le tribunal, la Société Générale Factoring estime s'en être tenue à exprimer une position différente de celle de son adversaire sur l'application qu'il convient de faire de dispositions contractuelles, ce qui ne constitue pas un abus mais résulte du principe même du débat contradictoire.
Sur ce
La Société Générale Factoring n'a fait que rechercher par les voies et moyens de droit dont elle dispose, le recouvrement de sa créance que la procédure collective ne lui a pas permis de réaliser.
L'issue de la présente instance lui est favorable, par suite aucune faute constitutive d'abus de droit ne saurait être caractérisée.
Le jugement déféré est donc confirmé en ce que la société Pro Living a été déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.
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Sur les dépens et les frais irrépétibles
La société Pro Living, partie qui succombe, supportera la charge des dépens et ne peut prétendre à aucune somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. En revanche pour des raisons tenant à l'équité il y a lieu de faire droit à la demande de la Société Générale Factoring formulée sur ce même fondement, mais uniquement dans la limite de la somme de 3 000 euros.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant dans les limites de l'appel,
CONFIRME le jugement déféré en ce que la société Pro Living est déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
INFIRME le jugement déféré en ses autres dispositions ;
Et statuant à nouveau des chefs infirmés :
CONDAMNE la société Pro Living à régler à la Société Générale Factoring la somme de 238 982,65 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 26 octobre 2020, date de la mise en demeure ;
ORDONNE la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;
CONDAMNE la société Pro Living à payer à la Société Générale Factoring la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à raison des frais irrépétibles de l'instance ;
DÉBOUTE la société Pro Living de sa propre demande formulée sur ce même fondement ;
CONDAMNE la société Pro Living aux entiers dépens de l'instance.
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LE GREFFIER LE PRÉSIDENT