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19/06/2024 | FRANCE | N°22/09218

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 19 juin 2024, 22/09218


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6



ARRET DU 19 JUIN 2024



(n° , 24 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/09218 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFZRF



Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Avril 2022 - tribunal judiciaire de Paris - 9ème chambre 2ème section - RG n° 16/06556





APPELANTE



S.A. NATIXIS

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[Adresse 4]

N°SIRET : B 542 044 524

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



Représentée par Me Julien MARTINET, avocat ...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRET DU 19 JUIN 2024

(n° , 24 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/09218 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFZRF

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Avril 2022 - tribunal judiciaire de Paris - 9ème chambre 2ème section - RG n° 16/06556

APPELANTE

S.A. NATIXIS

[Adresse 4]

[Adresse 4]

N°SIRET : B 542 044 524

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Julien MARTINET, avocat au barreau de PARIS, toque : T04, avocat plaidant

INTIMÉS

Monsieur [X] [G]

né le [Date naissance 6] 1980 à [Localité 9]

[Adresse 3]

[Adresse 3] (Suisse)

Madame [O] [R] [G] épouse [I]

née le [Date naissance 1] 1978 à [Localité 9]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Représentés par Me Anne-Gaëlle LE MERLUS de la SCP LUSSAN, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

Monsieur [N] [D] [Z] [W]

né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 8]

[Adresse 7]

[Adresse 7] (Suisse)

Représenté par Me Jean-Philippe AUTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0053

Ayant pour avocat plaidant Me Laurent DIXSAUT de la SELEURL CABINET LAURENT DIXSAUT, avocat au barreau de PARIS, toque : B1139

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Marc BAILLY, président de chambre entendu en son rapport, et MME Pascale SAPPEY-GUESDON, conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Marc BAILLY, président de chambre

MME Pascale SAPPEY-GUESDON, conseillère

MME Laurence CHAINTRON, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie THOMAS

ARRET :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marc BAILLY, président de chambre, et par Mélanie THOMAS, greffier, présent lors de la mise à disposition.

* * * * *

La banque Natexis Banques Populaires a consenti le 2 février 2004 à M. [X] [G], alors sans emploi, et Mme [O] [G], alors étudiante, et âgés respectivement de 24 et 25 ans, un prêt non affecté pour un montant de 5.000.000 €, « destiné à financer leurs besoins personnels dans l'attente de la cession de la SARL OED Finances et/ou des parts de la société anonyme OED, contrôlée à 85% par la SARL OED Finances dont Melle [O] [R] [G] et M. [X] [G] détiennent 100% des part », pour une durée de 7 mois. Ce prêt était garanti par la caution personnelle du père des consorts [G], Monsieur [P] [G], à hauteur de 5.500.000 €, ainsi que par le nantissement des titres d'une société OED Finances à hauteur de deux fois 50 % des parts sociales. Le montant prêté devait être remboursé dans le délai de huit jours à compter de la date de la cession de la SARL OED Finances et/ou de la société OED et au plus tard le 3 septembre 2004.

Par acte du 22 octobre 2004, Natexis Banques Populaires a accepté de reporter l'échéance du prêt au 31 décembre 2004 tout en recueillant, l'engagement de M. [N] [W], ancien banquier entre-temps entré au capital de la SARL OED Finances (à hauteur de 99,62%, les consorts [G] ne détenant plus que le solde à savoir 0,34%) par l'effet d'une augmentation de capital, de donner en gage ses propres titres en garantie du remboursement du crédit. Le 31 décembre 2004, M. [W] a revendu ses titres OED Finances nantis pour un prix de 30 000 000 € à la société Supervox Groupe (devenue Selcodis), le paiement ayant été réalisé suivant un crédit-vendeur.

Le 30 août 2005, aucun remboursement du prêt n'étant intervenu à l'échéance prévue, la banque a mis en demeure les emprunteurs de rembourser le solde du prêt devenu exigible. Le 30 novembre 2005, le conseil d'administration de la société Selcodis a décidé de dissoudre la société OED Finances.

Par acte du 28 décembre 2005, M. [N] [W] a repris la créance par acte de cession pour le prix de 5.433.962,13 euros payable de façon échelonnée. M. [W] ne s'est acquitté que du paiement des deux premières échéances pour un montant total de 153.962,13 euros. La banque lui a adressé une mise en demeure le 15 septembre 2006, et a exigé le remboursement de l'entière créance par lettre du 17 novembre 2006.

Par exploit d'huissier du 12 décembre 2006, la SA Natixis a fait assigner M. [N] [W] devant le tribunal de grande instance de Paris afin de le voir condamner à lui verser la somme de 5.280.000 € majorée des intérêts de droit en paiement du prix de cette cession.

L'affaire a été retirée du rôle à la demande des parties.

Par exploit d'huissier du 28 janvier 2009, les consorts [G] ont fait assigner la SA Natixis et M. [W] devant le tribunal de grande instance de Paris en annulation du prêt et en indemnisation de leur préjudice par le versement d'une somme de 5.000.000 euros.

Ces procédures ont, dans un premier temps été jointes, puis disjointes en raison d'une ordonnance prononçant l'incompétence de la juridiction parisienne sur la demande en paiement formée par Natixis contre M. [W] au profit d'une juridiction Suisse, où réside ce dernier.

Un sursis à statuer a été prononcé dans l'attente de la décision de la Cour de cassation saisie de la décision d'appel rendue sur l'ordonnance d'incompétence territoriale.

Après deux pourvois en cassation, la cour d'appel de Rouen a infirmé définitivement, le 21 décembre 2016, l'ordonnance du 12 mars 2010 et désigné le tribunal de grande instance de Paris pour juger de la demande de la banque Natixis contre M. [W].

L'instance introduite par la société devenue Natixis a été réinscrite au rôle en 2018 et a été jointe à nouveau à l'instance introduite par les consorts [G].

Par un jugement contradictoire du 6 avril 2022 le tribunal judiciaire de Paris a :

-Dit n'y avoir lieu à déclarer une irrecevabilité des parties à se prévaloir des dispositions des règles impératives de la loi du 25 janvier 1985 sur les procédures collectives ;

-Déclare M. [N] [W] irrecevable à se prévaloir de la nullité du contrat de prêt consenti à Mme [O] [G] épouse [I] et M. [X] [G] pour dol ;

-Prononce la nullité du prêt consenti à Mme [O] [G] épouse [I] et M. [X] [G] ;

-Condamne Mme [O] [G] épouse [I] et M. [X] [G] à restituer la somme de 5.000.000 euros à la société Natixis, assortie des intérêts au taux légal à compter du 2 février 2004 ;

-Condamne la société Natixis à payer à Mme [O] [G] épouse [I] et M. [X] [G], ensemble, une somme de 3.500.000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à son devoir de mise en garde et de conseil, assortie des intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;

-Déboute la société Natixis de sa demande indemnitaire au titre des intérêts conventionnels perdus à raison de l'annulation du contrat de prêt ;

-Déclare l'action en paiement de la société Natixis au titre de l'acte de cession de créance au profit de M. [W] recevable ;

-Déboute la société Natixis de sa demande en paiement formée contre M. [N] [W], constatant la nullité de l'acte de cession de créance ;

-Condamne la société Natixis à payer à M. [N] [W] la somme de 153.962,13 euros au titre des restitutions consécutives à la nullité de l'acte de cession, assortie des intérêts au taux légal à compter du 28 décembre 2005 pour la somme de 53.962,13 euros, et à compter du 31 mars 2006 pour la somme de 100.000 euros ;

-Déboute la société Natixis de sa demande en condamnation des autres parties à lui verser une indemnité de 50.000 euros ;

-Déboute l'ensemble des parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

-Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

-Condamne aux dépens Mme [O] [G] épouse [I] et M. [X] [G] à hauteur de 30 % et la société Natixis à hauteur de 70 % ;

Par déclaration remise au greffe de la cour le 9 mai 2022, la SA Natixis a interjeté appel de cette décision contre M. [X] [G], Mme [O] [G] et M. [N] [W].

Par conclusions notifiées par voie électronique le 23 février 2024, la SA Natixis fait valoir :

-Sur la recevabilité de l'action en nullité du prêt litigieux, que cette action doit être déclaré irrecevable car en vertu de l'article 31 du code civil et du monopole des poursuites du mandataire judiciaire prévu par l'article L.622-20 du code de commerce, seul ce dernier a le pouvoir de demander réparation du préjudice subi par les créanciers, comme l'a jugé la Cour de cassation. Les consorts [G] en reprochant à la SA Natixis d'avoir voulu contourner les règles applicables au concours aux entreprises et en demandant l'annulation du contrat de prêt sans restitution par application de la règle selon laquelle nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude sont irrecevables à agir. La distinction entre moyen fondant une demande indemnitaire et argument sur le dol retenu par le tribunal judiciaire est dépourvue de portée puisque l'emprunteur ne peut pas invoquer un soutien abusif pour fonder une quelconque demande, un tel grief étant réservé, selon la jurisprudence au mandataire judiciaire. En outre, il s'agit d'un moyen et non d'un argument puisqu'ils déduisent la nullité du prêt du recours à un stratagème,

- Sur la recevabilité de l'action en nullité de M. [W], que ce dernier ne peut pas agir en nullité car selon l'article 1131 du code civil « Les vices du consentement sont une cause de nullité relative du contrat ». Or la cession de créance ne confère pas la qualité de partie au contrat au cessionnaire qui n'est ainsi pas recevable à agir en nullité du prêt. Ainsi cette action ne peut être intentée que par celui qui se dit victime de la contrainte ou du dol et ces man'uvres et doivent s'apprécier au regard de la personne même qui s'en dit victime pour avoir été convaincue de conclure, comme l'a jugé le tribunal,

- Sur la recevabilité de l'action en paiement de la SA Natixis, que son action est recevable car la clause de conciliation qu'invoque M. [W] n'indique seulement que « Les Parties conviennent, dans l'hypothèse où les Opérations ne seraient pas autorisées par l'Autorité de Marchés Financiers, de se revoir afin d'étudier la possibilité de modifier l'échéancier », de sorte que, comme l'a jugé le tribunal judiciaire « cette clause ne saurait s'analyser en une clause instituant une procédure de conciliation préalable à la saisine d'une instance judiciaire pour des contestations relatives à l'exécution de la convention »,

- que son action en restitution est recevable car la jurisprudence invoquée par M. et Mme [G] n'est pas transposable au cas présent car la prescription de l'action en nullité n'est pas acquise et que l'emprunteur n'a pas sollicité en même temps les restitutions qui doivent normalement en résulter. Or en l'espèce, aucune décision définitive n'a été rendue concernant la validité du contrat de crédit en cause, en sorte que le droit à répétition de la banque n'est pas encore né, d'autant plus que la banque qui a cédé sa créance de remboursement à M. [W] n'a pas de droit à l'égard des emprunteurs tant que la cession de créance subsiste. Selon l'article 2224 du code civil, la prescription ne court qu'à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. Dès lors la SA Natixis était fondée à demander à tout moment de l'instance en annulation à titre reconventionnel la restitution du capital dans l'hypothèse où le contrat de prêt serait annulé sans que la prescription de son droit à restitution, qui n'a pas encore commencé à courir, ne puisse lui être opposée. En tout état de cause, il est de principe que le juge peut ordonner les restitutions d'office en conséquence de la nullité qu'il constate,

- que le moyen tiré de la violation de l'article 9-1 du code civil est infondé car il pose des conditions tenant à la culpabilité et à la publicité. Or les informations mentionnées dans les conclusions ne répondent pas au critère de publicité à défaut d'être exposées dans un lieu public. De plus, les jurisprudences citées par M. [W] ne sont pas transposables car elles concernent l'atteinte à la présomption d'innocence résultant de décisions juridictionnelles ce qui ne correspond pas à des conclusions prises par un partie pour défendre ses droits. Par ailleurs, le casier B3 ne fait état que des condamnations les plus graves. En particulier, dès lors qu'elles sont assorties d'un sursis, celles privatives de liberté n'y figurent pas. Il faut également qu'elles aient un caractère définitif. Or il indique que la décision de condamnation rendue en France serait actuellement frappée d'appel et qu'il invoquerait dans le cadre de celle-ci une ordonnance de classement rendue en Suisse. Sa demande de dommages et intérêts est dépourvue de fondement et est chiffrée de manière arbitraire et exorbitante,

- sur les vices du consentement, que le prêt est valide car le défaut de conseil n'est pas une cause de nullité, que le dol n'est pas constitué, la cause du prêt est licite. La demande en nullité des consorts [G] est fondée notamment sur un prétendu manquement de la banque à son devoir de conseil, en particulier de ne pas les avoir avertis du caractère disproportionné du prêt eu égard à leurs capacités financières. Or un tel manquement, à le supposer fondé, ne se rapporte pas à une condition de formation du contrat mais à une obligation de la banque en sorte que, comme l'a retenu le tribunal judiciaire, la nullité n'est pas encourue. De plus le dol est, selon l'article 1116 du code civil, une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Cela implique des actes positifs et doit émaner du cocontractant. Or en l'espèce, la banque ne détenait, contrairement aux allégations des consorts [G] et comme l'a relevé le tribunal judiciaire, aucune information privilégiée sur la situation financière des emprunteurs et de la société dont ces derniers étaient les seuls actionnaires qu'elle aurait pu d'une quelconque manière leur dissimuler. Les consorts [G] étaient nécessairement au courant de la destination des fonds. Par ailleurs, comme l'a retenu le tribunal judiciaire, l'état de forte dépendance affective et financière des consorts [G] envers leur père étant parfaitement étranger au comportement de la banque, celui-ci ne saurait caractériser une man'uvre dolosive de celle-ci envers eux et l'article 1114 du code civil, dans sa version en vigueur lors de l'octroi du crédit dispose que « La seule crainte révérencielle envers le père, la mère, ou autre ascendant, sans qu'il y ait eu de violence exercée, ne suffit point pour annuler le contrat »,

- Sur l'inopposabilité et l'absence d'effet du contrat de prêt du 2 février 2004 à l'encontre des consorts [G], que la simulation n'est pas établie. De plus la Cour de cassation a rejeté un tel moyen dès lors que « le prêt n'était pas fictif et que les modalités de remboursement ne procédaient que des engagements librement et explicitement pris ». Or en l'espèce, le prêt n'est pas fictif, les fonds ayant été versés sur le compte expressément désigné par les consorts [G] qui se sont personnellement et librement engagés à le rembourser dans les 8 jours à compter de la cession de la société OED Finances et/ou de la société anonyme OED. Il n'est pas démontré que les consorts [G] ne seraient intervenus dans l'opération qu'en qualité de simples mandataires occultes du groupe Arbel et non d'emprunteurs,

- que la cause du prêt est licite car les mobiles n'ont pas à être pris en compte dans les contrats de prêt. Dans un contrat de prêt, la cause réside dans la remise de la chose prêtée, le fait que les fonds prêtés à un particulier dans le cadre d'un prêt personnel soient destinés à financer une société ou une activité professionnelle est indifférent. Cette solution est applicable au recours d'un prêt personnel pour contourner les règles sur le soutien abusif. Ainsi, en l'espèce, la circonstance que les fonds n'aient pas transités sur les comptes des emprunteurs est indifférente car ils ont donné instruction à la banque de virer les fonds au profit de M. [P] [G] qui a lui-même transmis un ordre au profit de la société Chenard & Walcker, maison mère de la société Arbel. La circonstance selon laquelle la banque est défaillante à prouver l'authenticité de l'ordre est indifférente dès lors qu'il n'est pas contesté que ce sont bien les consorts [G] qui, après avoir repris, complété, mis en forme et daté le projet, y ont chacun apposé leur signature et la mention manuscrite « Bon pour virement de la somme de 5.000.000 € sur le compte de M. [P] [G] » ce qui vaut accord de leur part, ceux-ci étant majeurs et non frappés d'incapacité. Ce n'est que dans le cas où l'écriture et la signature sont contestées qu'il y a lieu de recourir à une vérification et une simple comparaison avec le contrat de prêt permet de constater que lesdites signatures et écritures correspondent à celles de leur auteur. Par ailleurs, la banque s'est conformée aux instructions de sa cliente, conformément à son devoir d'exécution des ordres de virement et son devoir de non immixtion. A aucun moment il n'est précisé, ni dans les actes, ni dans les échanges intervenus à l'occasion de leur signature, que le prêt aurait été destiné, même indirectement, à servir de « soutien financier au groupe Arbel ». Les consorts [G] n'apportent pas la preuve que c'est la banque qui se serait « chargée d'organiser [ce] montage » ni qu'elle aurait été à l'origine d'une décision de financer le groupe Arbel. Au contraire, la note interne préalable à la mise en place du crédit, datée du 21 janvier 2004, indique que la mise en place du crédit relais personnel aux enfants de M. [G] a été proposée par M. [G] lui-même. Enfin, il n'y a pas de fraude car les conditions du soutien abusif ne sont pas réunies, puisque pour caractériser une fraude une recherche objective doit dans un premier temps démontrer qu'une règle était « obligatoire » eu égard aux circonstances et éléments de fait entourant les agissements du fraudeur, ce qui suppose rapporter la preuve d'une situation irrémédiablement compromise ou du caractère ruineux du crédit, mais également de démontrer que le fournisseur de crédit a eu des informations sur les capacités de remboursement de l'emprunteur ou sur les risques de l'opération financée que par suite de circonstances exceptionnelles, l'emprunteur lui-même ignorait. La charge de la preuve pèse sur l'emprunteur. Or en l'espèce la situation du groupe Arbel n'était pas irrémédiablement compromise, puisqu'il suffit en fait que soit établie une possibilité de redressement pour que le crédit consenti ne soit pas abusif, de plus la cessation des paiements a été fixée à une date sensiblement postérieure au prêt litigieux et la preuve ne résulte pas du fait pour le banquier d'avoir écrit à une société que sa situation financière était dégradée et obérée. Ni les consorts [G], ni M. [W] ne prouvent que la situation de la société Chenard & Walcker ou du groupe Arbel aurait été compromise lors de l'octroi du prêt litigieux en février 2004. Lors de la conclusion du contrat, la banque avait seulement à sa disposition les éléments relatifs aux deux exercices précédents qui montraient une amélioration de la situation du groupe Arbel. Par ailleurs, dans le cadre de la note interne, le dépôt de bilan est envisagé comme une possibilité et non une certitude, démontrant que la banque considérait que le groupe Arbel avait des chances de poursuivre son activité. En outre, il s'est écoulé quasiment 6 années entre le moment où le prêt a été consenti et celui où est intervenu le jugement d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, un tel écart, particulièrement long, étant selon la jurisprudence de nature à écarter la qualification de soutien abusif. Par ailleurs, il n'est pas établi ou allégué que la SA Natixis aurait détenu des informations sur la situation financière des sociétés du groupe Arbel que celles-ci auraient ignorées, dès lors la responsabilité pour octroi abusif ne peut pas être retenue. Enfin la suppression du dispositif prétorien de soutien abusif par le législateur en 2006 s'oppose à toute illicéité puisqu'il convient, en raison de la hiérarchie des sources de droit que les conditions fixées par le législateur soient prises en considération de préférence au droit prétorien pour apprécier la licéité de la cause du contrat quand bien même celui-ci aurait été conclu antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi, de tenir compter des disposition de l'article L.650-1 du code de commerce. le fait d'avoir dissimulé le financement d'une société en accordant un prêt personnel n'est pas frauduleux puisqu'il s'agit précisément d'assurer le financement de l'entreprise, la banque bénéficie donc de l'immunité. Cette circonstance fait perdre à la fraude alléguée son élément matériel,

- que la banque qui accorde un crédit a l'obligation de vérifier s'il est adapté aux capacités financières de l'emprunteur et, si ce n'est pas le cas, de le mettre en garde contre un risque d'endettement excessif. La disproportion de son engagement avec ses revenus et ses biens invoquée par l'emprunteur doit être prouvée par lui. La responsabilité du banquier est écartée en cas de déloyauté de l'emprunteur, de nature à altérer l'appréciation du risque du crédit. Tel est le cas si celui-ci a menti sur son patrimoine, ses revenus ou sa qualité. Le banquier fautif doit indemniser le préjudice découlant de la perte d'une chance d'éviter le risque réalisé, la réalisation de ce dernier supposant que l'emprunteur ne soit pas en mesure de faire face au paiement des sommes exigibles au titre du prêt. En l'espèce, les consorts [G] ne rapportent pas la preuve d'une disproportion, car ils n'étaient pas deux simples étudiants sans ressources mais étaient actionnaires à 100 % d'une société OED Finances dont ils devaient céder les parts, et qui, à cette occasion, devait leur verser un « acompte sur dividendes d'un montant minimum de 5 000 000 d'euros » ainsi qu'ils l'avaient solennellement déclaré à la banque le jour de la signature des actes d'engagement de cette dernière du 2 février 2004. De plus Mme [G] était, lors de la signature du prêt étudiante en quatrième année d'école de commerce ce qui lui permettait d'avoir une connaissance assez précise du monde des affaires. De plus, une somme équivalente figure sur l'acte de délégation au travers d'un acompte sur dividendes, la banque a ainsi tenu compte de la surface financière des emprunteurs et ne saurait dès lors être regardée comme leur ayant consenti un crédit excessif. Par ailleurs, la banque n'avait pas à vérifier la véracité du chiffrage fourni par les emprunteurs, supposés être de bonne foi et avoir une connaissance de la situation financière de la société OED Finances dont ils détenaient 100 % des titres à l'époque de la souscription du prêt. L'estimation de la perte de chance retenue par le tribunal judiciaire est ainsi critiquable dans son principe, mais son montant est également critiquable car les emprunteurs ont contracté en pleine conscience des risques. En tout état de cause, à supposer que la banque ait manqué à son devoir de mise en garde, les consorts [G], ne produise aucun élément sur leurs revenus et la consistance de leur patrimoine actuel prouvant qu'ils seraient dans l'incapacité de rembourser leur prêt en sorte que leur demande devra de ce seul fait être rejetée comme manquant en fait,

- sur la stipulation d'intérêts dans le contrat de prêt, que l'article 3 relatif au « Taux effectif global » mentionne que la base annuelle est de « 365/365 » et non une année lombarde. Les développements sur l'année lombarde sont théorique car les emprunteurs n'ont à ce jour remboursé ni capital ni intérêts, de sorte que cette demande est infondée,

- que dès l'instant où le cessionnaire a connu, lors de la cession, les aléas auxquels la créance était exposée, il doit être présumé avoir acquis à ses risques et périls et est privé du droit à restitution du prix, or en l'espèce M. [W] avait connaissance des risques attachés à la créance de remboursement du prêt ainsi que cela ressort de l'acte de cession, cette cession de créance s'inscrit dans le cadre du rachat par M. [W] des titres de la société OED Finances dont il est indiqué que la cession entraînera dans les huit jours l'exigibilité des sommes prêtées et qu'ils sont nantis au profit de la banque et le 22 octobre 2004, M. [W] s'est porté caution pour le remboursement du prêt en donnant en nantissement lesdits titres et que le 31 décembre 2004, il les a vendus à la société Selcodis pour 30 000 000 € et qu'il a été décidé, le 30 novembre 2005, de dissoudre la société OED Finances. Il n'était donc pas privé « de toute perspective de remboursement » du fait de la dissolution de la société OED Finances et est de mauvaise foi quand il invoque un prétendu dépôt de bilan de cette société qui a fait l'objet d'une fusion. Sa résistance abusive a causé à Natixis un préjudice distinct du simple retard estimé à 50 000 euros. Cette demande figurait dans le dispositif des conclusions de première instance,

- sur les restitutions en cas d'annulation du contrat de prêt et ou de la cession de créance, que les fonds devront être restitués à Natixis. En effet, en cas d'annulation du prêt, il doit être tenu compte de la caducité dans la mise en 'uvre des restitutions réciproques résultant de l'annulation du contrat de prêt. Le contrat annulé étant réputé n'avoir jamais existé chaque partie devant restituer ce qu'elle a reçu en exécution de celui-ci car cette réception se trouve devenue sans cause du fait de l'annulation. Ainsi en cas d'annulation du prêt, les Consorts [G] devront reverser les sommes qu'ils ont reçues directement à la banque. Par ailleurs, en cas d'annulation de la cession de créance, celle-ci réintègre rétroactivement le patrimoine du cédant dont elle est réputée n'avoir pas cessé de faire partie sans que celui-ci puisse se voir opposer son inertie pendant la période où le droit d'agir appartenait au cessionnaire. Dès lors, la SA Natixis redeviendrait titulaire de la créance de remboursement de prêt qu'elle détenait contre les Consorts [G] qui comprend le capital mis à disposition pour un montant de 5 millions d'euros et les intérêts conventionnels stipulés. En outre, la règle Nemo Auditur est inopposable car, comme l'a retenu le tribunal judicaire et conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, l'illicéité d'une convention ne faisait pas obstacle aux restitutions. De plus, la turpitude ne résulte pas d'une simple illicéité. De plus, en reprochant à Natixis d'avoir prétendument participé à un soutien abusif, les consorts [G] en viennent à déclarer, par les pièces qu'ils versent aux débats, que c'est à leur demande que les financements auraient été mis en place et sur la suggestion éclairée de leur avocat tout comme lorsqu'ils reprochent de n'avoir pas tenu compte de leur surface financière prétendument insuffisante, ce n'est pas sans reconnaitre avoir fait des déclarations inexactes en soutenant le contraire lors de l'octroi du crédit,

- sur la perte des intérêts conventionnels en cas d'anéantissement du contrat de prêt que la perte des intérêts conventionnels résultant de l'anéantissement du contrat de prêt est susceptible de constituer un préjudice réparable pour l'établissement prêteur. Or les consorts [G] sont à l'origine du montage allégué et ont fourni des informations inexactes au sujet de leur surface financière, de sorte qu'ils devront être condamnés à prendre en charge l'intégralité des intérêts conventionnels dont la banque serait privée en cas d'annulation du prêt qui doit être majorée des intérêts de retard. Contrairement aux allégations des Consorts [G], ces derniers ont été mis en demeure de régler le solde du prêt par lettre du 30 août 2005. Par ailleurs, c'est de mauvaise foi que M. [W] met en cause aujourd'hui la validité de l'acte de prêt en raison de l'impécuniosité supposée des emprunteurs et méconnait son engagement de ne pas opposer cette situation au cédant, de sorte qu'il sera condamné à titre de dommages et intérêts à payer les intérêts conventionnels solidairement avec les emprunteurs sans pouvoir prétendre de son côté à aucune restitution au titre des sommes qu'il a versées en exécution de l'acte de cession de créance, de sorte qu'elle demande à la cour :

A titre principal

-Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé M. [X] [G], [R] [G] épouse [I] et M. [N] [W] recevables à agir en nullité du contrat de prêt du 2 février 2004 ou de la cession de créance du 28 décembre 2005 pour violation des règles sur le concours aux entreprises,

Et, statuant à nouveau :

-Déclarer M. [X] [G], [R] [G] épouse [I] et M. [N] [W] irrecevables à agir en nullité du contrat de prêt du 2 février 2004 ou de la cession de créance du 28 décembre 2005.

-Condamner M. [N] [W] à payer à Natixis la somme de 5.198.522,28 € majorée des intérêts au taux légal à compter du 28 décembre 2006 et jusqu'à complet paiement.

Subsidiairement

-Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- Annulé le contrat de prêt consenti le 2 février 2004 à Mme [O] [G] épouse [I] et M. [X] [G] ;

-Débouté Natixis de sa demande en paiement formée contre M. [N] [W], constatant la nullité de l'acte de cession de créance ;

-Condamné Natixis à payer à M. [N] [W] la somme de 153.962,13 euros au titre des restitutions consécutives à la nullité de l'acte de cession assortie de l'intérêt légal,

Et, statuant à nouveau :

-Condamner M. [N] [W] à payer à Natixis la somme de 5.198.522,28 € majorée des intérêts au taux légal à compter du 28 décembre 2006 et jusqu'à complet paiement.

Plus subsidiairement, à supposer que les annulations du prêt du 2 février 2004 et de la cession de créance soient confirmées :

-Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

-Débouté Natixis de sa demande indemnitaire à l'encontre de Mme [O] [G] épouse [I], M. [X] [G] et M. [N] [W] au titre des intérêts conventionnels perdus à raison de l'annulation du contrat de prêt ;

-Condamné Natixis à payer à M. [N] [W] la somme de 153.962,13 euros au titre des restitutions consécutives à la nullité de l'acte de cession assortie de l'intérêt légal,

Et, statuant à nouveau :

-Condamner Mme [O] [G] épouse [I] et M. [X] [G] à restituer à Natixis la somme de 5 millions d'euros qu'ils ont reçue en exécution dudit prêt.

-Condamner solidairement Mme [O] [G] épouse [I], M. [X] [G] et M. [N] [W] à verser, en outre, à Natixis la somme de 433.962,13 €, à majorer des intérêts légaux à compter du 31 décembre 2004, au titre du préjudice lié à la perte des intérêts conventionnels stipulés.

En tout état de cause

-Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

-Condamné Natixis à payer à Mme [O] [G] épouse [I] et M. [X] [G], ensemble, une somme de 3.500.000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à son devoir de mise en garde et de conseil ;

-Débouté Natixis de sa demande en condamnation des autres parties à lui verser une indemnité de 50.000 euros.

Et statuant à nouveau

-Débouter M. [X] [G], Mme [O] [R] [G] épouse [I] et M. [N] [W] de leurs demandes à toutes fins qu'elles comportent.

-Condamner M. [N] [W] à payer à Natixis la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts.

-Condamner solidairement M. [N] [W], M. [X] [G] et Mme [O] [R] [G] au paiement d'une indemnité de 20.000 € par application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 27 février 2024, M. [W] expose :

-sur les fins de non-recevoir, que l'invocation d'une fraude à la loi visant à contourner les dispositions de la loi gouvernant le soutien abusif s'inscrit, comme l'a relevé le tribunal, dans le cadre d'un moyen et non d'une prétention. De plus, la jurisprudence invoquée ne présente aucune analogie avec l'espèce. Il ne s'agit pas d'un arrêt de principe ou qui poserait une règle quelconque aux termes de laquelle seul le liquidateur pourrait agir, quel que soit le fondement juridique ou le destinataire de son action, sur l'invocation d'une fraude reposant sur la volonté d'éluder les règles relatives au soutien abusif. M. [W] possède intérêt et qualité à exciper d'une fraude ayant conduit à lui faire acquérir une créance irrecouvrable d'un montant de 5.000.000 d'euros. Il possède également intérêt et qualité à invoquer tous moyens de défense relatifs à l'action engagée à son encontre par la Banque Natixis, et notamment celui relatif à la fraude commise par la Banque visant à éluder les règles relatives au soutien abusif. De plus, il n'est pas créancier de la société Chenard & Walcker au titre du prêt litigieux de sorte que l'article L. 622-20 du code de commerce organisant le monopole d'action du liquidateur ne trouve pas à s'appliquer. En outre la société Chenard & Walcker n'est pas dans la cause et aucune demande n'est formée à son encontre ni en son intérêt, outre qu'aucune des parties en la cause n'est en liquidation judiciaire, de sorte qu'aucune action ne saurait ici être réservée à un quelconque liquidateur par application de l'article L. 622-20 du code de commerce. Par ailleurs, M. [W] n'est pas le bénéficiaire du prêt litigieux, au titre duquel il est créancier et non débiteur,

-qu'il invoquait également en première instance la cause illicite au titre de l'annulation du prêt et le tribunal n'a répondu que sur les vices du consentement issus de la contrainte et du dol, mais n'a pas répondu sur la cause illicite. Or le contrat affecté d'une cause illicite est affecté, selon la jurisprudence de la Cour de cassation d'une nullité absolue. Dans ce cadre, il est reconnu que l'intérêt à agir en prononcé de la nullité au titre de la règle d'intérêt général est ouvert à toute personne intéressée au titre d'un intérêt pécuniaire ou moral. Or en l'espèce, M. [W] est d'une part partie au contrat de prêt pour être le cessionnaire de la créance issue du prêt au titre de l'acte conclu avec la Banque Natixis en date du 28 décembre 2005 et possède à ce titre intérêt et qualité à en solliciter l'annulation pour cause illicite ; mais d'autre part en sa qualité de cessionnaire de ladite créance, il possède un intérêt direct et actuel à voir prononcer l'annulation du prêt pour cause illicite, l'acte ayant été accompli en fraude à la loi d'une part et ayant été conclu avec des débiteurs manifestement illicites. Par ailleurs, s'agissant du dol, il s'agit d'une nullité relative que M. [W] est bien fondé à invoquer car la jurisprudence accorde à un tiers au contrat initial la possibilité d'agir, même s'agissant d'une nullité relative, à un tiers investi d'un intérêt En outre, la cession de créance entraîne transmission de l'ensemble des droits et actions dévolus au créancier, tel que les actions en nullité, notamment pour dol, sauf stipulation contraire de l'acte. En l'espèce M. [W] est d'une part partie au contrat de prêt pour être le cessionnaire de la créance issue du prêt au titre de l'acte conclu avec Natixis en date du 28 décembre 2005 et d'autre part possède, en sa qualité de cessionnaire de la créance, un intérêt direct et actuel à voir prononcer l'annulation du prêt, l'acte ayant été accompli en méconnaissance des droits des emprunteurs. Enfin, M. [W] est étranger aux agissements dolosifs imputés à la banque, de sorte qu'aucun grief ne saurait être invoqué à son encontre de ce chef.

- que la fin de non-recevoir tirée de la prescription doit être écartée car la charge de la preuve repose sur les consorts [G] concernant le bien-fondé de la fin de non-recevoir invoquée. Or ceux-ci ne produisent aucun élément. De plus les demandes formulées par M. [W] à l'encontre des consorts [G] devant le tribunal judiciaire l'ont été notamment par voie de conclusions régularisées en date des 15 décembre 2010 et 1er décembre 2011.

- sur le contenu et les pièces produites par la société Natixis dans le cadre de ses conclusions, que les coupures de presses produites, ainsi que la mention de la culpabilité de M. [W] pour des faits de détournements de fonds et son association avec un prétendu « délinquant d'habitude qui enchaîne les condamnations » porte atteinte à la présomption d'innocence de M. [W] protégé par l'article 9-1 du code civil et est contraire aux accords de Schengen et à l'article 6§2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme. Or le casier judiciaire de M. [W] est vierge, il a fait l'objet d'une décision valant acquittement définitif par le Parquet Suisse ayant la valeur d'un acquittement formant décision définitive, il n'entretient plus de relations avec M. [P] [G] depuis plus de dix ans et la décision rendue en France en violation du principe ne bis in idem évoquée par la société Natixis étant par ailleurs frappée d'appel, de sorte qu'aucune condamnation définitive n'est intervenue, la procédure étant en cours. De plus, contrairement aux affirmations de la banque, les peines privatives de liberté de plus de deux ans assorties du sursis figurent sur l'extrait de casier judiciaire B3, tout comme l'interdiction de gérer ou diriger une entreprise non assortie du sursis. Par ailleurs, Natixis fait également l'objet de multiples amendes, condamnations et procédures, de sorte qu'elle est pour le moins mal placée afin de tenter de délivrer des certificats d'honorabilité.

- que, selon la jurisprudence, l'opération de prêt d'argent visant à contourner la règlementation applicable, même au profit de l'emprunteur, s'analyse en un comportement frauduleux rendant illicite la cause de l'acte de prêt. Si le prêt d'argent est un moyen intrinsèquement licite, c'est de l'usage qui sera fait de l'argent que dépendra la licéité ou l'illicéité de sa cause. L'interposition frauduleuse de personnes conduit à l'illicéité de l'objet et à l'annulation du contrat. Or l'acte de prêt était d'une nature frauduleuse en ce qu'il vise par interposition de personne à contourner les dispositions impératives de la réglementation sur le soutien abusif en substituant à la société Arbel les enfants, alors étudiants et sans revenus, du dirigeant de cette société M. [G]. L'interposition de personne frauduleuse est également démontrée par la circonstance que le versement des fonds a en réalité profité à la société Chenard & Walcker, maison mère de la société Arbel. En outre, la volonté de contourner une disposition impérative gouvernant le soutien abusif par interposition de personne constitue un agissement frauduleux faisant dégénérer la cause de l'acte de prêt en cause illicite. Il est indifférent que l'ouverture d'une procédure collective à l'égard des sociétés du groupe Arbel soit en définitive intervenue plus de cinq années après l'octroi du prêt, dès lors que l'intention au jour de l'octroi du prêt demeurait celle d'échapper à une sanction.

-sur les demandes en résolution du prêt, à titre subsidiaire, que les manquements graves de la SA Natixis, et le manquement à son obligation de contracter de bonne foi justifient que soit prononcée aux torts exclusifs de la SA Natixis la résolution judiciaire du prêt. Sa déloyauté contractuelle sera également constatée à travers la constatation de l'assignation de M. [W] en paiement du prix de la cession de créance et parallèlement en faisait supprimer l'ensemble des crédits des sociétés détenues directement ou indirectement par M. [W], dont certaines étaient acculées à la faillite et conduira à un litige toujours en cours devant le tribunal de commerce de Paris.

- sur l'acte de cession de créance et sur le dol, que l'article 1116 du code civil sanctionne le dol par la nullité de la convention. Le banquier est tenu à un devoir de discernement se manifestant lorsqu'il accorde un crédit inapproprié dans le cadre d'une entreprise dont la situation est obérée, peu important qu'il ait mal apprécié la situation ou ait été imprudent. Le banquier est responsable dès lors qu'il pouvait connaître la situation d'un emprunteur. Or la SA Natixis a dissimulé lors de la signature de l'acte de cession de créance l'ensemble des circonstances litigieuses ayant gouverné la conclusion du prêt. La clause de l'acte de cession indiquant la connaissance des termes et conditions de l'acte de prêt ne couvrait pas les man'uvres occultes de la banque antérieurement et postérieurement à sa signature. En outre M. [W] n'a pas été informé des motifs réels de l'opération ainsi que son caractère atypique et risqué, tel que décrit dans le courrier du 21 janvier 2004. Ainsi, à la date de la conclusion de l'acte de cession de créance, les garanties assortissant le prêt avaient été dépouillées de toute efficacité, puisque la société OED Finance avait été dissoute le 1er décembre 2005. Natixis, banque habituelle du groupe, n'ignorait nullement la situation de ces sociétés qu'elle avait analysée, puisque d'ailleurs elle sollicitait à titre de garantie que les parts de la société OED Finances lui soient attribuées en nantissement. De plus, la clause concernant le versement de dividendes ne mentionnant pas la somme de 5 000 000 d'euros et le versement d'un acompte sur dividendes à l'occasion d'une prochaine cession de titres apparaît dénué de sens puisqu' une cession de titre ne donne nullement droit à versement de dividendes mais seulement à un éventuel acompte sur le versement du prix de cession des actions concernées. De plus, c'est la société OED qui devait être cédée par OED Finances et non OED Finances elle-même et aucune vente de titres n'est intervenue. Aucun autre mécanisme permettant le transfert des dividendes n'était contractuellement prévu. Par ailleurs, la banque a manqué à toute analyse de la solvabilité de la société OED Finance et à tout conseil sérieux en direction des emprunteurs. Enfin un prêt de ce montant ne pouvait être consenti que sous couvert de documents justificatifs préalables à son octroi, or aucune des pièces exigées en interne par la banque n'est produite ou n'a été communiqué lors de la signature de l'acte de cession. La banque a dissimulé sciemment et en parfait connaissance ces informations. Enfin ce dol est déterminant car en connaissance de ces informations, M. [W] n'aurait pas contracté,

- sur l'illéciété de la cause et de l'objet de l'acte de cession que, selon la jurisprudence, l'opération de prêt d'argent visant à contourner la règlementation applicable, même au profit de l'emprunteur, s'analyse en un comportement frauduleux rendant illicite la cause de l'acte de prêt. Si le prêt d'argent est un moyen intrinsèquement licite, c''est de l'usage qui sera fait de l'argent que dépendra la licéité ou l'illicéité de sa cause. L'interposition frauduleuse de personnes conduit à l'illicéité de l'objet et à l'annulation du contrat. Or en l'espèce, le prêt litigieux ayant en réalité été souscrit avec pour éviter à la banque d'entrer les prévisions d'une hypothèse de soutien abusif au groupe Arbel. Or la règle issue du soutien abusif constitue en effet une règle impérative issue de la responsabilité gouvernée par l'article 1382 du Code civil dans sa version applicable en l'espèce. Si, comme l'affirme la SA Natixis, la société Arbel n'était pas en difficulté financière à la date de conclusion du prêt, la mise en place de ce montage n'avait pas lieu d'être. Or la lecture de la situation du groupe font état d'une situation dégradée et dangereuse pour ses créanciers. L'hypothèse d'une cessation des paiements était pleinement évoquée par la banque dans le cadre de la négociation du prêt litigieux, ce qui démontre bien sa conscience du caractère litigieux du montage opéré. Le fait que l'état de cessation de paiement n'est été constaté que six an plus tard est compréhensible au regard des crédits accordés d'une part et d'autre part, il est reproché à la banque d'avoir voulu contourner le droit et non d'avoir accordé un soutien abusif. L'argument selon lequel la société Arbel détenait les mêmes informations que la banque est inopérant car il importe peu que le soutien abusif soit caractérisé, le grief formulé étant relatif à l'artifice frauduleux ayant conduit le prêt à être consenti frauduleusement à des débiteurs insolvables et étrangers à l'opération réellement menée. Enfin il convient de déterminer, au regard du caractère illicite ou frauduleux de l'opération à la date de sa conclusion, de sorte que l'évolution législative ne vient pas conjurer cette illicéité, d'autant que le nouvel article L.650-1 réserve le cas de fraude. La participation active de la banque ne s'est pas limitée à suivre les « instructions données pas ses clients », la banque n'étant pas au demeurant capable d'indiquer qui étaient ses clients en l'occurrence, les consorts [G] ou les sociétés du « groupe Arbel ». La volonté de contourner ces dispositions impératives résulte des propres écrits de la banque. De surcroit, l'interposition frauduleuse de personnes conduit à l'illicéité de l'objet et à l'annulation du contrat. Or en l'espèce, l'objet du contrat avait manifestement un caractère frauduleux du fait de l'interposition de personne qui avait présidé à sa conclusion. L'objet de l'acte de cession de créance s'avère également illicite puisqu'il a acquis une créance sur les consorts [G] alors que ceux-ci n'étaient pas les véritables destinataires de l'acte de prêt, et donc pas les véritables débiteurs de la société Natixis et ce ni à la date de la conclusion du prêt, ni à la date de la conclusion de l'acte de cession de créance, et n'avaient pas été destinataires des fonds prêtés. La cause de l'acte de cession de créance n'est pas moins illicite puisque l'intention de la banque en faisant acquérir par M. [W] la créance issue de l'acte de prêt conclu en apparence avec les consorts [G] était de transférer le risque, tant interne qu'externe, issu du caractère frauduleux de celui-ci sur un tiers. Il s'agissait également de transférer le risque de crédit depuis des débiteurs manifestement insolvables, les consorts [G], vers M. [W], lequel en revanche s'avérait solvable,

Sur le caractère incessible de l'acte de prêt, qu'un contrat conclu au mépris d'une clause d'inaliénabilité est entaché d'une nullité relative. En outre, l'acte investi d'une cause illicite encourt une nullité absolue. Or il était indiqué à l'acte de prêt que celui-ci n'était cessible qu'à un établissement de crédit ou à une banque, ce que n'est pas M. [W]. L'objet du contrat n'est pas davantage rattachable à une activité professionnelle habituelle et rémunérée qui serait la sienne, et une telle activité n'est pas visée ou alléguée à l'acte de cession de créances. De plus cette cession est intervenue en violation de la loi pénale réprimant l'exercice illégal de la profession de banquier et de l'article L. 511-5 du code monétaire et financier. Or Monsieur [W] n'est nullement titulaire des agréments requis, et n'est pas même immatriculé au registre du commerce et des sociétés. La circonstance que le contrat concerné est une cession de créance est sans incidence : il convient de prendre en considération l'objet de ce contrat, qui est de faire de Monsieur [W] le créancier au titre d'une opération bancaire illicite,

-sur la responsabilité de la banque à l'occasion de la cession de créance, très subsidiairement, que la banque a engagé sa responsabilité à l'égard de M. [W] en ne l'alertant pas de la situation des emprunteurs et des risques du crédit avant que celui-ci ne signe son engagement en qualité de cessionnaire de créance et en ne l'informant pas de la situation réelle du destinataire du prêt. M. [W] est ainsi titulaire d'une créance sur les consorts [G], qui sont insolvables, alors que le véritable destinataire du prêt était leur père ainsi que la société Chenard & Walcker et subit donc un préjudice direct. A la date de la cession de créance litigieuse, la banque n'a pas alerté M. [W] sur la situation d'insolvabilité desdits emprunteurs et ne l'a pas informé des circonstances frauduleuses de la conclusion de l'acte de prêt ni de la valse des virements bancaires ayant présidé à son exécution. En vertu de l'adage « fraus omnia corrumpit », la fraude commise par la Banque fait obstacle à tout moyen de défense de sa part et lui interdit d'invoquer une quelconque prétendue négligence ou mauvaise foi de la part de M. [W] concernant la question de la solvabilité des débiteurs. La banque a donc engagé sa responsabilité sur le fondement de son devoir d'information et de conseil ainsi que sur son devoir de loyauté contractuelle. De plus, il ressort de l'acte de prêt que celui-ci n'était cessible qu'à un établissement de crédit ou à une banque, ce que n'est pas M. [W], qui n'a même pas la qualité de commerçant. Cette violation des stipulations contractuelles liant la banque NATIXIS aux consorts [G] peut être invoquée par Monsieur [W] sur le fondement de la responsabilité délictuelle. En outre, la disproportion entre les montants prêtés et le patrimoine personnel des consorts [G] engage de plein droit la responsabilité de la Banque NATIXIS, dont Monsieur [W] est également en droit de se prévaloir sur le fondement de la faute civile sur le fondement de la responsabilité délictuelle, étant un tiers intéressé au contrat. De plus la déloyauté contractuelle sera également constatée à travers la constatation de l'assignation de M. [W] en paiement du prix de la cession de créance et parallèlement en faisait supprimer l'ensemble des crédits des sociétés détenues directement ou indirectement par M. [W], dont certaines étaient acculées à la faillite et conduira à un litige toujours en cours devant le tribunal de commerce de Paris. Enfin, l'acte de cession de créance a été imposé dans sa rédaction à M. [W]. A titre infiniment subsidiaire, et pour le cas où la cession de créance litigieuse ne serait pas annulée ou résolue, la responsabilité de la Banque serait engagée pour avoir manqué à faire rédiger une stipulation d'intérêt conforme aux exigences légales, montant dont a été privé M. [W] au regard des emprunteurs,

- qu'en application de la règle « nemo auditur propriam turpitudinem allegans », la banque est entièrement responsable du concert frauduleux de sorte que M. [W] ne saurait être tenu à restitution,

- sur les demandes de M. [W] à l'encontre des Consorts [G], à titre infiniment subsidiaire que si l'acte de prêt, ainsi que l'acte de cession de créances étaient validés, alors M. [W] a acquis une créance sur les Consorts [G] d'un montant actualisé de 5 198 522,18 euros, sauf à parfaire, outre intérêt de droit et capitalisation de ceux-ci, de sorte qu'il demande à la cour de :

-Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

-Dit n'y avoir lieu à déclarer une irrecevabilité des parties à se prévaloir des dispositions des règles impératives de la loi du 25 janvier 1985 sur les procédures collectives ;

-Prononcé la nullité du prêt consenti à Madame [O] [G] épouse [I] et Monsieur [X] [G] ;

-Débouté la société Natixis de sa demande en paiement formée contre Monsieur [N] [W], constatant la nullité de l'acte de cession de créance ;

-Condamné la société Natixis à payer à M. [N] [W] la somme de 153.962,13 euros au titre des restitutions consécutives à la nullité de l'acte de cession, assortie des intérêts au taux légal à compter du 28 décembre 2005 pour la somme de 53.962,13 euros, et à compter du 31 mars 2006 pour la somme de 100.000 euros ;

-Débouté la société Natixis de sa demande en condamnation des autres parties à lui verser une indemnité de 50.000 euros ;

-Débouté Madame [O] [G] épouse [I], Monsieur [X] [G] et de la société Natixis de leurs demandes plus amples ou contraires à l'encontre de Monsieur [N] [W] ;

-Débouté Madame [O] [G] épouse [I], Monsieur [X] [G] et la société Natixis de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

-Condamné aux dépens Mme [O] [G] épouse [I] et M. [X] [G] et la société Natixis ;

-L'infirmer en ce qu'il a :

-Déclaré Monsieur [N] [W] irrecevable à se prévaloir de la nullité du contrat de prêt consenti à Madame [O] [G] épouse [I] et Monsieur [X] [G] pour dol ;

-Déclaré l'action en paiement de la société Natixis au titre de l'acte de cession de créance au profit de Monsieur [W] recevable ;

-Débouté Monsieur [W] de ses demandes plus amples ou contraires à l'encontre de Madame [O] [G] épouse [I], de Monsieur [X] [G] et de la société Natixis ;

-Débouté l'ensemble des parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Et, statuant de nouveau :

-Déclarer irrecevable l'action engagée par la société Natixis, ensemble ses demandes, fins et conclusions,

-Condamner la société Natixis à verser à Monsieur [N] [W] la somme de 50.000 € à titre de dommages-intérêts pour violation de la présomption d'innocence,

-Débouter Madame [O] [G] épouse [I] et Monsieur [X] [G] et la société Natixis de leurs demandes à l'encontre de Monsieur [N] [W] ;

Subsidiairement :

-Sur le fond :

-Annuler l'acte de prêt du 2 février 2014 consenti par la société Natexis Banque Populaire aux droits de laquelle vient la société Natixis à Madame [O] [G] épouse [I] et Monsieur [X] [G] ;

-Annuler l'acte cession de créance du 28 décembre 2005 conclu entre la société Natexis Banque Populaire aux droits de laquelle vient la société Natixis et Monsieur [N] [W],

-Dire inopposable à Monsieur [W] l'acte cession de créance du 28 décembre 2005, avec telles conséquences que de droit,

-Condamner la Banque Natixis à rembourser à Monsieur [W] la somme de 153.962,13 €, assortie des intérêts au taux légal à compter du 28 décembre 2005 et capitalisation,

-Débouter la Banque Natixis de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

Très subsidiairement :

-Prononcer la caducité de l'acte cession de créance du 28 décembre 2005, ce aux torts exclusifs de la Banque Natixis,

-Prononcer la résolution judiciaire de l'acte cession de créance du 28 décembre 2005, ce aux torts exclusifs de la Banque Natixis,

-Condamner la Banque Natixis à verser à Monsieur [W] la somme de 153.962,13 €, assortie des intérêts au taux légal à compter du 28 décembre 2005 et capitalisation,

-Débouter la Banque Natixis de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

A titre plus subsidiaire encore :

-Condamner la banque Natixis à verser à Monsieur [W] à titre de dommages-intérêts la somme de 5.198.522,18 €uros outre montant des frais et accessoires tels qu'ils figurent à cet acte de prêt,

-Condamner la Banque Natixis à verser à Monsieur [W] à titre de dommages-intérêts le montant correspondant à stipulation d'intérêt prévue à l'acte de prêt du 2 février 2004 diminué des intérêts légaux, ce en cas d'annulation de cette stipulation,

-Ordonner en tant que de besoin la compensation entre toutes créances connexes et croisées qui seraient constatées entre Monsieur [N] [W] et la Banque Natixis,

A titre infiniment subsidiaire :

-Condamner Madame [O] [G] épouse [I], de Monsieur [X] [G] à verser à Monsieur [N] [W] la somme de 5.198.522,18 €uros, outre montant des frais et accessoires tels qu'ils figurent à cet acte de prêt, et capitalisation,

En toute hypothèse :

-Ordonner la suppression des paragraphes contenus dans les écritures de la société Natixis (p. 4 in fine commençant par « Il est précisé dans la presse que M. [N] [W]' » jusqu'à p. 5 § 3 se terminant par « honorabilité des cocontractants de la banque »),

-Condamner la Banque Natixis, Madame [O] [G] épouse [I] et Monsieur [X] [G] à verser à Monsieur [W] la somme de 50.000 € sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile,

-Condamner la société Natixis Madame [O] [G] épouse [I] et Monsieur [X] [G] aux entiers dépens, lesquels seront recouvrés par Maître Jean-Philippe Autier conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de procédure civile.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 26 février 2024, Mme [R] [G] et M. [X] [G] font valoir :

-sur les fins de non-recevoir, que l'action en nullité intentée à titre subsidiaire, n'a pas vocation à protéger, ou reconstruire le gage commun des créanciers des sociétés OED ou OED Finances ; elle n'est pas dirigée à l'encontre de ces sociétés en qualité de débitrices, et le produit qu'ils en attendent ne viendrait en aucun cas reconstituer leur patrimoine, comme l'a retenu le tribunal judiciaire. La simulation orchestrée par Natixis pour tenter d'échapper à un risque de sanction constitue la raison de fait, au sens générique pour solliciter l'inopposabilité, et à titre subsidiaire la nullité, du prêt du 2 février 2004. Ils fondent leurs prétentions sur le montage construit par Natixis, mais n'agissent pas directement en sanction du soutien abusif,

-que selon la jurisprudence « les restitutions consécutives à une annulation ne relèvent pas de la répétition de l'indu mais seulement des règles de la nullité ». Cette demande est encadrée dans le délai quinquennal de l'ancien article 1304 du code civil. Or en l'espèce les consorts [G] ont sollicité la nullité du contrat de prêt du 2 février 2004 par assignation délivrée à l'encontre de la société Natixis le 28 janvier 2009. Or, la banque n'a formulé de demandes reconventionnelles en restitution du capital que par conclusions du 5 mai 2021. Elle n'était cependant plus recevable à le faire depuis le 28 janvier 2014, et ne justifie d'aucune cause interruptive avant cette date. L'argument invoqué selon lequel « aucune décision définitive n'a été rendue concernant la validité du contrat de crédit en cause, en sorte que le droit à répétition de la banque n'est pas encore né, d'autant plus que la banque qui a cédé sa créance de remboursement à M. [W] n'a pas de droit à l'égard des emprunteurs tant que la cession de créance subsiste » signifierait que la banque est dépourvue d'intérêt à agir,

- sur la recevabilité des demandes formulées à titre infiniment subsidiaire par M. [W] à l'encontre des consorts [G], que M. [W] ne justifie pas qu'il ait formulé une demande de remboursement du prêt par les consorts [G] antérieurement à l'écoulement du délai de prescription de 10 ans, ramené ensuite à 5 ans par la loi du 17 juin 2008, qui court depuis le 3 septembre 2004, soit la date d'exigibilité du prêt. Contrairement à ce qu'affirme M. [W], la charge de la preuve de l'absence d'acte interruptif de prescription ne peut en aucun cas reposer sur les consorts [G], s'agissant d'une preuve négative impossible ; seul M. [W] peut justifier avoir accompli des diligences de nature à justifier une telle interruption,

- sur l'inopposabilité et l'absence d'effet du contrat de prêt du 2 février 2004 à l'encontre des consorts [G], que le contrat de prêt du 2 février 2004 leur est innoposable et ne produit pas d'effet car ils n'ont fait office que de prête-nom à l'occasion de ce contrat et ne sont donc pas les véritables emprunteurs. La simulation par interposition de personne, au moyen d'une convention de prête-nom, se prouve par tous moyens. Selon la jurisprudence de la Cour de cassation, une banque, qui a « sciemment participé » à une simulation, ne peut valablement « se prévaloir de l'acte ostensible contre les personnes ayant agi en qualité de prête-nom », en l'occurrence les personnes qui figurent en qualité d'emprunteurs mais qui ne l'ont pas été réellement. La SA Natixis invoque une jurisprudence dont les raisons ne sont pas transposables au présent cas d'espèce. En l'espèce, malgré ses apparences, le prêt litigieux du 2 février 2004 de 5 millions d'euros a été consenti non pas au profit de [O] [R] et [X] [G], mais du Groupe Arbel. La somme de 5.000.000 € n'est jamais entrée dans le patrimoine des enfants [G] ; les fonds ont été libérés au profit de Monsieur [P] [G], qui les a immédiatement reversés à la société Chenard & Walcker, qui les a elle-même immédiatement reversés à la société Arbel, ce qui était prévu dès l'origine. Il importe peu de savoir si la situation financière de ce dernier était véritablement compromise, et si un prêt directement accordé à son bénéfice aurait été sanctionné au regard des règles alors applicables. La banque invoque l'objet affiché du prêt or le résultat de la simulation est d'afficher formellement un objet au prêt, qui ne correspond pas à la réalité de l'acte occulte. De surcroît, cette référence aux « besoins personnels » des emprunteurs est totalement fantaisiste, eu égard notamment à leur situation financière et au montant en jeu. Les enfants [G] n'avaient aucune participation active dans les sociétés OED Finances et OED, dirigées en réalité par leur père, qui était l'unique interlocuteur de Natixis. La note de la banque du 21 janvier 2004, qui rend compte des décisions prises lors d'une réunion du 19 janvier 2004, qui s'est tenue en l'absence des enfants [G] mais au cours de laquelle le montage financier a été imaginé. La SA Natixis tente de se dédouaner en attribuant la responsabilité à M. [G] et son conseil, mais ne justifie pas cette affirmation, de plus cette circonstance n'impliquerait pas plus les enfants dans les discussions ou la mise en place du prêt relai qui en est résulté. Natixis ayant sciemment participé et orchestré, cette simulation, elle ne peut valablement s'en prévaloir contre les enfants [G], bien qu'ils apparaissent ostensibles dans l'acte,

- que conformément aux articles 1109 et 1116 du code civil, le dol est une cause de nullité. Les man'uvres constituant le dol peuvent être, selon la jurisprudence, un mensonge ou la réticence. En tant que délit civil, le dol repose sur une faute intentionnelle, caractérisée dès lors que l'auteur des man'uvres, du mensonge ou de la réticence, a agi « intentionnellement pour tromper le contractant » en suscitant l'erreur ou en profitant de celle-ci. Du côté de la victime du dol, ce dernier suppose qu'elle ait, en conséquence de ce dol, commis une erreur, dont la jurisprudence vérifie qu'elle ait été « déterminante ». Le manquement à une obligation précontractuelle d'information caractérise le dol par réticence dès lors que s'y ajoute la constatation du caractère intentionnel de ce manquement et d'une erreur déterminante provoquée par celui-ci et l'erreur provoqué par le dol n'a pas à présenter un caractère excusable. Or en l'espèce, au moment de leur signature, les Consorts [G] n'avaient reçu aucune information sur aucun des sujets qui leur ont été révélés depuis. Ils ont été convaincus par la SA Natixis qu'ils pouvaient signer sans que cela n'emporte aucun réel engagement pour eux, ni aucune conséquence. Le délai très court mis en avant les avaient notamment entretenus dans cette erreur. Si l'état de forte dépendance affective et financière des enfants [G] envers leur père ne caractérise pas en lui-même une man'uvre dolosive de la banque, il explique que les consorts [G] aient consenti à apposer leurs signatures en toute confiance. Dès lors que la réticence dolosive de la banque a été établie, il ne peut être reproché aux consorts [G] une erreur prétendument inexcusable. Il y a donc un dol, sanctionné par la nullité du prêt,

- qu'en vertu des articles 1131 et 1133 du code civil applicable au litige, l'obligation sur une cause illicite ne peut avoir aucun effet. A la date à laquelle le prêt litigieux a été envisagé puis consenti, la responsabilité des établissements bancaires étaient très régulièrement retenue lorsqu'il était établi qu'ils accordaient un financement fautif, ayant pour effet de retarder artificiellement l'état de cessation de paiement de leur client. Or en l'espèce, il résulte de la note de service du 21 janvier 2004 que le prêt a été accordé de façon parfaitement artificielle aux enfants de M. [G], et qu'il s'agissait en réalité de prêter un concours financier au « pôle Arbel » à une période où celui-ci connaissait des difficultés financières dont la banque avait parfaitement connaissance, ce qui lui faisait craindre qu'en cas de dépôt de bilan « le cheminement du financement soit mis en évidence ». La véritable cause de ce prêt étant prohibée par la loi sur le soutien abusif, elle ne peut être qu'être déclarée illicite,

-sur la responsabilité de la banque à l'occasion du contrat de prêt, que la responsabilité de Natixis est engagée en raison d'une faute intentionnelle grave de sa part en concevant et en mettant en 'uvre le montage frauduleux et en tout état de cause en manquant à ses obligations de conseil et de mise en garde. En effet, la note de service démontre l'attitude et la volonté de la banque dans la mise en place de ce montage pour accorder un concours financier au pôle Arbel à une période où celui-ci connaissait des difficultés financières, et auquel la banque ne pouvait donc accorder de nouveaux crédits inconsidérés sans craindre que sa responsabilité soit mise en cause pour soutien abusif. La banque elle-même non seulement a reconnu expressément les risques de mises en évidence du financement réel, mais également elle a fait état du possible dépôt de bilan du groupe Arbel, dont elle connaissait les difficultés financières ; elle n'a pourtant pas remis en cause son intention de la soutenir malgré ces conditions. De même, la mention portée à l'article premier du prêt, suivant laquelle celui-ci était « destiné à financer les besoins personnels » des enfants [G], et plus généralement l'acte de prêt lui-même, est le résultat d'un montage consistant à maquiller le concours financier accordé à un groupe en difficulté financière, et de contourner le risque de voir qualifier ce financement en soutien abusif. Ce comportement frauduleux de Natixis caractérise à tout le moins une faute intentionnelle grave engageant sa responsabilité. En tout état de cause, la SA Natixis a manqué au devoir de conseil et de mise en garde auquel il est tenu. L'exercice de cette obligation emporte pour l'établissement de crédit un devoir préalable de renseignement : l'établissement doit recueillir des informations sur le patrimoine, les revenus, les charges du candidat emprunteur pour apprécier sa capacité financière. Or la SA Natixis n'a jamais justifié avoir sollicité effectivement ses documents et apprécié les capacités financières de chacun des consorts [G]. En tout état de cause, le prêt litigieux recelait d'anomalies apparentes, à la fois intrinsèques, et extrinsèques, qui auraient dû la conduire à refuser le prêt. De plus, la banque a consenti aux Consorts [G] un prêt d'un montant en principal de 5.000.000 d'euros tout en sachant qu'ils étaient sans revenus, non professionnels et sans expérience des affaires, non imposables, et que les fonds ne leur étaient pas destinés. La disproportion entre le montant du prêt et les facultés de remboursement des consorts [G] est manifeste et leur état de dépendance et de vulnérabilité faisait peser sur eux une très forte pression, ce que savait pertinemment la banque. En n'alertant pas les consorts [G] sur les risques d'endettement excessif liés au crédit, au regard notamment de leurs propres capacités financières ' et peu important celles de leur père ', la banque a manifestement manqué à son devoir de conseil et de mise en garde. De surcroit, la banque ne saurait échapper à sa responsabilité au motif que l'opération était garantie par une délégation de la créance de dividende de 5 000 000 d'euros de la société OED Finances, dont les emprunteurs déclaraient dans l'acte de prêt attendre le versement concomitamment à la cession de leurs parts puisqu'elle savait que la société OED Finances était en réalité dans l'incapacité de distribuer un tel montant, car elle affichait un résultat financier négatif de 60 055 euros l'année précédente. Peu importait que la banque ait, ou non, détenu des « informations privilégiées » sur la situation de la société OED Finance ; elle devait analyser les risques du crédit et en informer les emprunteurs profanes, ce qu'elle n'a pas fait. En manquant à toute analyse même sommaire et en n'alertant pas les consorts [G] sur les risques du crédit, la banque a manifestement manqué à son devoir d'information, de conseil et de mise en garde. Ces fautes de la banque ont causé un préjudice qui ne consiste pas en une simple perte de chance, qui suppose l'existence d'un aléa. Au contraire, si la banque n'avait pas organisé le montage frauduleux dans le cadre duquel ils ont été instrumentalisés, ils n'auraient évidemment pas signé le prêt ostensible du 2 février 2004. Cette faute intentionnelle de Natixis est massive, prépondérante, et exonératoire de toute autre responsabilité dans la réalisation du préjudice subi par les Consorts [G]. De plus, en ne les informant pas de la disproportion de leur engagement et des risques d'endettement, la banque ne leur a pas permis d'en prendre la mesure comme elle y était tenue ; dans le cas inverse, ils ne se seraient pas engagés,

- que s'il est de principe, en cas de nullité d'un contrat, que des restitutions puissent être ordonnées pour permettre un retour au statu quo ante, ce principe est limité par la règle selon laquelle « nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude ». Contrairement à ce qu'affirme la SA Natixis, il est artificiel de distinguer la cause immorale d'un contrat de sa cause illicite au moment d'envisager les restitutions consécutives à une nullité, puisqu'au contraire, en la matière, la loi les confond. L'avant-projet Catala avait proposé de consacrer cette règle Nemo auditur empêchant les restitutions et d'en étendre explicitement le champ d'application en faisant obstacle aux restitutions envers ceux qui contreviennent sciemment non seulement aux bonnes m'urs, mais également à l'ordre public ou à une règle impérative et une partie de la doctrine le préconise. De plus, le jeu des restitutions peut également être atténué par l'application d'un autre principe selon lequel l'action en restitution cesse lorsque, dans la cause, les turpitudes de chacune des parties sont équivalentes. Dans ce cas, le juge apprécie alors le degré respectif d'implication de chacun des cocontractants : si le demandeur en restitution est au moins aussi coupable que le défendeur, il ne pourra demander la restitution de la chose. En outre, l'analyse des décisions en la matière montre que la jurisprudence recherche les solutions les plus équitables et équilibrées, pour permettre que la décision exerce une fonction dissuasive, c'est-à-dire qu'elle décourage la fraude. Par ailleurs, s'agissant précisément de l'anéantissement d'un contrat de prêt, la Cour de cassation rappelle régulièrement que l'annulation d'un crédit lié entraîne par principe une obligation de restitution des sommes versées, il en va différemment lorsque le prêteur a commis une faute lors du déblocage des fonds ; cette faute du prêteur déchargeant, en tout ou en partie, l'emprunteur de son obligation de restitution. Cette solution doit être étendue, au-delà des crédits affectés, à l'ensemble des hypothèses dans laquelle la banque a commis une faute. En l'espèce, si c'est non pas son inopposabilité qui devait être retenue, mais la nullité du contrat de prêt, il y aurait lieu à ne pas ordonner la restitution, à Natixis, du capital prêté puisque la banque ne saurait la solliciter valablement, alors que la nullité du contrat résulte de sa propre turpitude, et qu'elle ne saurait donc s'en prévaloir pour obtenir une restitution à son bénéfice. Si par extraordinaire, il était retenu que les consorts [G] ont participé à la fraude, la turpitude de la banque resterait bien plus importante que la leur, de sorte qu'elle ne peut demander la restitution de la chose.

- que la majoration des intérêts ne fait l'objet d'aucune motivation de la part du tribunal judiciaire. Or, le montant total de ces intérêts est exorbitant, notamment quand on se souvient que même les intérêts contractuels du prêt n'auraient jamais pu atteindre ces niveaux, dès lors qu'ils étaient calculés sur le taux de l'EURIBOR majoré de 1% l'an, pour une période très courte. De plus, ces restitutions, assorties de leurs intérêts, ne remettent nullement les parties dans l'état dans lequel elles se seraient trouvées ci le contrat n'avait pas existé : il en coûterait au contraire près de 2 400 000 supplémentaires aux consorts [G], en sus du capital qui ne leur a jamais profité. De plus, la société NATIXIS n'a pas formulé de demande de restitution ni de demande d'intérêts moratoires sur ces restitutions avant ses conclusions du 20 janvier 2021. Or faute de mise en demeure préalable au sens de l'article 1231-6 du code civil, il n'est pas possible de faire remonter une majoration d'intérêts au taux légal au-delà de cette date, et en tout cas jusqu'au 2 février 2004,

-sur les demandes de M. [W] à l'encontre des Consorts [G], que au cas où la prescription des demandes de M. [W] ne serait pas acquise, que ces demandes sont irrecevables et en tous cas mal fondé au regard des explication de M. [W] qui conduisent à l'anéantissement du prêt et de sa cession litigieuse et demandent, en conséquence, à la cour de :

A titre principal

-Infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 6 avril 2022 en l'intégralité de ses dispositions, sauf en ce qu'il a :

-Dit n'y avoir lieu à déclarer une irrecevabilité des parties à se prévaloir des dispositions des règles impératives de la loi du 25 janvier 1985 sur les procédures collectives ;

-Débouté la société Natixis de sa demande indemnitaire au titre des intérêts conventionnels perdus à raison de l'annulation du contrat de prêt ;

-Débouté la société Natixis de sa demande en condamnation des autres parties à lui verser une indemnité de 50.000 € ;

-Débouté la société Natixis de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Et statuant à nouveau :

-Déclarer l'acte de prêt du 2 février 2004 inopposable, et en tout cas sans aucun effet à l'encontre de Madame [O] [R] [G] épouse [I] et Monsieur [X] [G] ;

A titre subsidiaire

-Confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 6 avril 2022 en ce qu'il a prononcé la nullité du prêt consenti à Madame [O] [R] [G] épouse [I] et Monsieur [X] [G] par la société Natixis le 2 février 2004 ;

Mais :

-Infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 6 avril 2022 en ce qu'il a condamné Madame [O] [R] [G] épouse [I] et Monsieur [X] [G] à restituer à la société Natixis, en conséquence de la nullité du prêt du 2 février 2004, la somme de 5.000.000 €, assortie des intérêts au taux légal à compter du 2 février 2004 ;

Et statuant à nouveau :

-Déclarer la société Natixis irrecevable, en en tout cas mal fondée, en son action en restitution ;

-Débouter la société Natixis de sa demande en restitution formulée à hauteur de 5.000.000 € à l'encontre de Madame [O] [R] [G] épouse [I] et Monsieur [X] [G], et en tout cas de toute majoration d'intérêts au taux légal ;

A titre très subsidiaire

-Infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 6 avril 2022 en ce qu'il a limité à 3.500.000 € le montant des dommages et intérêts que la société Natixis a été condamnée à payer à Madame [O] [R] [G] épouse [I] et Monsieur [X] [G], ensemble, pour manquement à son devoir de mise en garde et de conseil, assortie des intérêts au taux légal à compter du 6 avril 2022, date du jugement ;

Et statuant à nouveau :

-Condamner la société Natixis à verser à Madame [O] [R] [G] épouse [I] et Monsieur [X] [G], unis d'intérêt, à titre de dommages et intérêts, une somme exactement équivalente à celle qui serait par extraordinaire mise à leur charge au bénéfice de la société Natixis, éventuels intérêts compris ;

-Ordonner la compensation entre les condamnations par extraordinaire mise à la charge de Madame [O] [R] [G] épouse [I] et Monsieur [X] [G], et celles prononcées à l'encontre de la société Natixis ;

-S'agissant des demandes de Monsieur [N] [W] à l'encontre des consorts [G] :

-À titre principal, déclarer Monsieur [N] [W] irrecevable en ses demandes à l'encontre de Madame [O] [R] [G] épouse [I] et Monsieur [X] [G] ;

-À titre subsidiaire, débouter Monsieur [N] [W] de l'intégralité de ses prétentions, fins, moyens et conclusions, à l'encontre de Madame [O] [R] [G] épouse [I] et Monsieur [X] [G] :

En tout état de cause

-Débouter la société Natixis de l'intégralité de ses prétentions, fins, moyens et conclusions ;

-Confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 6 avril 2022 en ce qu'il a

-Dit n'y avoir lieu à déclarer une irrecevabilité des parties à se prévaloir des dispositions des règles impératives de la loi du 25 janvier 1985 sur les procédures collectives ;

-Débouté la société Natixis de sa demande indemnitaire au titre des intérêts conventionnels perdus à raison de l'annulation du contrat de prêt ;

-Débouté la société Natixis de sa demande en condamnation des autres parties à lui verser une indemnité de 50.000 € ;

-Débouté la société Natixis de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

-Condamner in solidum la société Natixis et Monsieur [N] [W] à verser à Madame [O] [R] [G] épouse [I] et Monsieur [X] [G] la somme de 10.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

-Condamner in solidum la société Natixis et Monsieur [N] [W] aux entiers dépens, lesquels seront recouvrés par Maître Anne-Gaëlle Le Merlus, de la SCP Lussan/Société d'avocats, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 27 février 2024 et l'affaire, plaidée à l'audience du 11 mars 2024 a été mise en délibéré au 15 mai 2024, prorogé au 19 juin 2024.

MOTIFS

Sur les demandes annexes

C'est à juste titre que la société Natixis fait valoir que la constatation d'une atteinte à la présomption d'innocence prévue par l'article 9-1 du code civil est subordonnée à la publicité donnée aux propos litigieux, ce qui n'est pas le cas de ses conclusions étant observé que M. [W] ne justifie pas avoir poursuivi les organes de presse cités par la banque.

Dès lors que les faits relatés dans les articles de presse cités son sans rapport avec la présente cause et que ne peuvent donner lieu à action les écrits produits devant les tribunaux judiciaires, il appartenait à M. [W], en vertu de l'article 41 dernier alinéa de la loi du 29 juillet 1881 qui dispose que 'pourront toutefois les faits diffamatoires étrangers à la cause donner ouverture, soit à l'action publique, soit à l'action civile des parties, lorsque ces actions leur auront été réservées par les tribunaux' de faire ainsi réserver son action.

Sur le contrat de prêt et de cession du contrat de prêt

Il résulte des pièces produites et des explications des parties notamment :

- que le prêt d'une somme de 5 millions d'euros aux consorts [G] du 2 février 2004 était stipulé 'destiné à financer leurs besoins personnels dans l'attente de la cession de la s.à.r.l. OED Finances et/ou de la société anonyme OED contrôlée à 85 % par la s.à.r.l. OED Finances dont' les emprunteurs détiennent 100 % des parts, que lesdites parts sont données en nantissement à la banque,

- que dans une lettre à la banque du 29 janvier 2024 sollicitant ledit prêt, les consorts [G] exposaient que 'le prêt est un crédit relais dans l'attente de la cession des titres de la société OED Finances', les offres d'acquisition étant transmises à la banque et que si la vente n'intervenait pas avant le 30 juin 2004, ils s'engageaient à confier à la banque un mandat de vente et qu'il 'est bien entendu que ce prêt sera remboursé par priorité sur le prix de cession des titres d'OED Finances',

- que la somme prêtée de 5 millions d'euros est venue créditer le compte de Mme [O] [G] dans les livres du Crédit Lyonnais, la banque Natexis demandant elle-même à Mme [G] de compléter l'avis d'opéré à destination de sa banque, qu'elle a été immédiatement virée à la demande des consorts [G] 'par dérogation expresse aux instructions de versements prévues à l'article 1 du contrat de prêt' sur le compte de M. [P] [G] dans les livres de Natexis puis, à la demande de ce dernier sur le compte de la société civile Chenard & Walker dont il est exposé qu'elle est la maison mère du groupe Arbel puis sur le compte de cette dernière, toujours dans les livres de Natixis, le 5 février 2004,

- qu' à la suite d'une ordonnance du juge de la mise en état de première instance du 10 juillet 2019 a été produite une pièce datée du 21 janvier 2004 à l'en-tête de la banque Natexis retraçant un réunion préparatoire à la souscription du prêt du 19 janvier précédent où étaient présents M. [P] [G], M. [B] et Maître Lantourne, avocat de M. [G], dont les passages suivants doivent être ici reproduits :

'Nous nous référons à la réunion du 19/01/2004 avec MM. [G], [B] et Maître LANTOURNE destinée entre autre à mettre en place un financement de 5ME sur le Pôle ARBEL.

Maître LANTOURNE a exposé la proposition du client qui consiste à mettre en place un crédit relais personnel aux enfants de M. [G] en tant qu'associés de la S.À.R.L. OED FINANCE au capital de 7.500 euros (OED n'ayant aucun lien capitalistique avec le groupe ARBEL) avec pour unique garantie un nantissement en premier rang et sans concurrence des parts sociales de ladite S.À.R.L. Aucune garantie complémentaire ne serait donnée par les personnes physiques emprunteuses (hypothèque sur immeuble, gage de compte d'instruments financiers etc'). Malgré la mise en place d'un prêt personnel, nous ne pouvons pas exclure dans l'hypothèse d'un dépôt de bilan que le cheminement du financement soit mis en évidence.

Ce crédit serait octroyé aux associés de la S.À.R.L. dans l'attente de la cession des parts sociales de la société OED FINANCE nanties en notre faveur. Merci de confirmer qu'il s'agit bien de OED FINANCE et non pas de sa filiale OED, dans ce dernier cas le montage proposé ne permettrait pas à NATEXIS d'appréhender le prix de cession et remettrait en cause le remboursement du crédit et la valeur du nantissement des parts sociales OED FINANCE.

Par ailleurs, il est clair que pour prêter 5 ME à des personnes physiques, ces dernières doivent justifier d'un patrimoine personnel suffisant pour que la responsabilité de la Banque ne soit pas engagée en cas de disproportion entre le patrimoine des intéressés, leurs revenus, et le montant qui leur est prêté par la Banque. En cas de surface patrimoniale insuffisante des emprunteurs nous exprimons bien entendu toute réserve sur la faisabilité du montage.', de sorte que la banque demandait notamment la communication d'une 'note exhaustive relatant le patrimoine des enfants [G] avec copie de' leurs dernières déclarations fiscales et 'justification de la créance de [P] [G] sur ses enfants avec copie des documents correspondant -copie de l'acte de cession des parts de la s.à.r.l. OED FINANCE aux enfants [G]'.

M. [W] - à l'encontre duquel la banque a formé la demande introductive du présent litige par l'assignation du 12 décembre 2006 - ne motive plus l'irrecevabilité des demandes de celle-ci qui figure cependant toujours au dispositif de ses conclusions et c'est à bon droit que le tribunal a jugé que la clause de l'acte de cession de créance qui était invoquée à son soutien ne s'analyse pas en l'instauration d'une conciliation préalable à un contentieux - susceptible de fonder une fin de non recevoir à défaut de mise en oeuvre -mais se limitait à prévoir la nécessité d'une renégociation dans le seul cas où l'AMF s'opposerait à la convention, ce qui n'est pas advenu.

Pour s'opposer à la demande en paiement formée par la banque à son encontre en sa qualité de cessionnaire de la créance, M. [W] fait notamment valoir que la cession par la banque de la créance sur les consorts [G] est nulle à raison de l'irrégularité ou de la nullité du prêt consenti à ces derniers, notamment en ce que la cession d'un contrat nul ou irrégulier l'est elle-même par voie de conséquence.

Dès lors que les consorts [G] font valoir eux-mêmes, principalement, que le contrat de prêt leur est inopposable, subsidiairement qu'il est nul pour cause ou objet illicite, il y a lieu en conséquence de statuer sur le mérite de ces demandes avant que d'examiner, le cas échéant, si cette inopposabilité ou cette nullité entraîne celle de la cession de créance à M. [W] sans qu'il soit nécessairement besoin de statuer sur la recevabilité des demandes en nullité du contrat de prêt directement formées par M. [W] lui-même.

Avant de soutenir, à tire subsidiaire, la nullité du contrat de prêt pour dol ou pour fausse cause ou cause illicite, les consorts [G] font d'abord valoir, à titre principal, que le prêt leur est inopposable comme étant l'acte apparent d'une simulation par interposition de personnes.

Même si aucune fin de non-recevoir n'est soutenue par la banque à l'endroit de cette prétention puisque seules les demandes en prononcé de la nullité du prêt sont contestées en leur recevabilité, il doit être précisé que les consorts [G], qui voient tant la banque que M. [W] demander leur condamnation, à titre subsidiaire, à honorer les causes du prêt ont intérêt à faire valoir son inopposabilité, cette prétention étant sans rapport avec la procédure collective dont fera l'objet la société Arbel (redressement judiciaire le 24 novembre 2009 et liquidation judiciaire le 28 janvier 2010) et l'office ou le monopole du liquidateur judiciaire.

Or, il résulte à la fois du compte rendu de la réunion rapportée ci-dessus, établi par la banque elle-même, et de sa participation active au cheminement des sommes prêtées jusqu'à la société Arbel qu'elle acceptait explicitement de financer, que tant la banque que M. [P] [G] et ses enfants - qui, pas plus que la société Natexis, ne peuvent prétendre de bonne foi avoir été bénéficiaires d'un prêt de 5 millions d'euros pour satisfaire des besoins personnels alors qu'ils étaient étudiants âgés respectivement de 25 et 23 ans - avaient une parfaite conscience de ce que le prêt n'était pas sincère au sens où les sommes ne devaient pas revenir aux consorts [G], artificiellement instaurés emprunteurs, mais à la société Arbel selon les dires de M. [P] [G], l'ensemble des parties au contrat ainsi que ce dernier ayant participé à la simulation.

A la différence des circonstances ayant donné lieu à la jurisprudence invoquée par la banque (Civ 1ère, 20 septembre 2017, 16-20.994) - celle d'une associée d'une société et de son époux qui empruntent une somme pour abonder explicitement leur compte courant dans cette dernière - le présent prêt est véritablement fictif en ce sens que ce ne sont pas les consorts [G], dont il n'est pas établi qu'ils avaient des intérêts dans la société Arbel, qui ont consenti à un usage des sommes distinct de celui énoncé dans l'acte et qu'il résulte à la fois du compte rendu de réunion et des virements des sommes, qu'ils ont manifestement servis de prête-noms, leurs qualités non seulement d'emprunteurs véritables mais aussi de bénéficiaires, directs ou indirects, de la somme prêtée ne pouvant être sérieusement soutenues.

Il en ressort également, de manière manifeste comme l'a relevé le tribunal, que l'utilisation des consorts [G] en qualité de prête-noms était motivée, sur la suggestion de leur père exprimée par le biais de son conseil au cours de la réunion préparatoire, par la volonté de la banque d'éviter que le 'cheminement de son financement' en faveur de la société Arbel, en cas de 'dépôt de bilan' soit mis en évidence, risque subsistant malgré tout 'même en cas de prêt personnel', et ce, aux fins d'éviter le risque de se voir reprocher un soutien abusif de crédit, la réalité ou la réalisation dudit risque étant indifférentes à la simulation ainsi mise en évidence.

En conséquence, c'est à juste titre que les consorts [G] font valoir que la banque, qui ne s'est pas contentée d'être seulement informée de la convention de prête-nom mais a sciemment participé à la simulation des énonciations du prêt dans son intérêt personnel, ne peut se prévaloir de cet acte ostensible à leur encontre. (Civ 3ème, 9 juillet 1992 90-12.452).

La banque n'invoquant aucune contre lettre qui pourrait avoir effet entre les parties contractantes, le prêt doit être déclaré inopposable aux consorts [G].

En sa qualité de cessionnaire de la créance de la banque sur les consorts [G] auquel il est demandé l'exécution du contrat, M. [W] a intérêt à contester la régularité de la cession qui lui en a été faite.

M. [W] ne pourrait se voir opposer valablement, en sa qualité de cessionnaire, le contrat de prêt ostensible contenant une simulation par interposition de personnes qu'à la condition qu'il soit démontré qu'il connaissait cette dernière au moment de la cession.

Or, il est insuffisamment objectivé par les pièces produites que M. [W] ait été dûment informé des conditions exactes dans lesquelles le prêt a été consenti aux consorts [G] au moment où elle lui a cédé.

En effet, si la chronologie et la teneur des actes successifs (mention dans le prêt de ce que les consorts [G] sont détenteurs de parts de la société OED Finance, acquisition des parts dans la société OED Finance par M. [W], nantissement des dites parts acquises au profit de la banque puis finalement cession du contrat de prêt à M. [W]) montrent que la proposition de rachat du prêt par M. [W] était liée au sort des parts données initialement en délégation imparfaite puis en nantissement qu'il a ensuite acquise, il est insuffisamment objectivé qu'il avait connaissance des modalités du prêt et de la destination réelle des sommes prêtées étant observé qu'il n'était pas partie à l'acte de délégation imparfaite sous seing privé du 2 février 2004, selon lequel'il est envisagé de réaliser concomitamment à la cession - envisagé alors à des tiers - une distribution aux associés Melle [O] [G] et M. [X] [G] d'un acompte sur dividendes d'un montant minimum de 5 millions d'euros', cette mention n'étant ultérieurement pas reprise.

De même, ses liens d'affaire allégués avec M. [P] [G] et la circonstance que dans l'acte de cession, il affirme être informé de la situation des consorts [G] avec lesquels il déclare 'avoir des attaches' est insuffisant à démontrer sa pleine connaissance de la situation de simulation contenue dans l'acte de prêt.

En conséquence, la cession du contrat de prêt par la banque à M. [W] est nulle puisque la banque ne pouvait valablement céder à un tiers un contrat qu'elle ne pouvait opposer à ses débiteurs initiaux, de sorte que la banque doit être déboutée de toutes ses prétentions à son encontre et qu'il n'est pas besoins d'examiner les demandes subsidiaires de M. [W] à l'égard des consorts [G].

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a ordonné la restitution des sommes versées par M. [W] à la banque en exécution du prêt.

Compte tenu de la participation de la banque à la simulation, elle doit être déboutée de sa demande indemnitaire tendant à voir réparée la perte des intérêts conventionnels du prêt ainsi que de sa demande de dommages-intérêts à hauteur de la somme de 50 000 euros non spécialement motivée.

La société Natixis doit être condamnée aux entiers dépens mais l'équité commande de ne pas prononcer de condamnation au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

DÉBOUTE M. [N] [W] de sa demande de dommages-intérêts fondée sur l'article 9-1 du code civil et de sa demande de suppression de passages des conclusions de la société Natixis ;

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a :

-dit n'y avoir lieu de déclarer une irrecevabilité des parties à se prévaloir des dispositions des règles impératives de la loi du 25 janvier 1985 sur les procédures collectives

- débouté la société Natixis de sa demande de dommages-intérêts à hauteur de la somme de 50 000 euros ;

- condamné la société Natixis à restituer à M. [N] [W] les sommes de 53 962,13 euros avec intérêts au taux légal à compter du 28 décembre 2005 et de 100 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 31 mars 2006 ;

- débouté les parties de leurs demandes au titre des frais irrépétibles ;

Le RÉFORME pour le surplus et, statuant à nouveau,

REJETTE la fin de non recevoir opposée par M. [N] [W] à la société Natixis tirée d'une clause compromissoire ;

DÉCLARE Mme [O] [G] épouse [I] et de M. [X] [G] recevables à contester l'opposabilité du contrat de prêt du 2 février 2004 par la société Natixis ;

REJETTE la fin de non recevoir opposée par la société Natixis à la contestation par M. [N] [W] de la validité de la cession du contrat de prêt en date du 28 décembre 2005 ;

DÉCLARE la société Natixis privée de se prévaloir du contrat de prêt du 2 février 2004 à l'égard de Mme [O] [G] épouse [I] et de M. [X] [G] ;

DÉCLARE nulle la cession du contrat de prêt du 2 février 2004 par la société Natixis à M. [W] par acte en date du 28 décembre 2005 ;

En conséquence, DÉBOUTE la société Natixis de toutes ses demandes à l'égard de Mme [O] [G] épouse [I], de M. [X] [G] et de M. [N] [W] ;

DIT n'y avoir lieu au prononcé d'une condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Natixis aux entiers dépens qui seront recouvrés par Maître Jean-Philippe Autier et Maître Anne-Gaelle Le Merlus en application de l'article 699 du code de procédure civile.

* * * * *

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 22/09218
Date de la décision : 19/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-19;22.09218 ?
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