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18/06/2024 | FRANCE | N°24/00335

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 12, 18 juin 2024, 24/00335


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS





Pôle 1 - Chambre 12





SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT





ORDONNANCE DU 18 JUIN 2024



(n°335, 3 pages)







N° du répertoire général : N° RG 24/00335 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJRPW



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 10 Juin 2024 -Tribunal Judiciaire de MEAUX (Juge des Libertés et de la Détention) - RG n° 24/00309



L'audience a

été prise au siège de la juridiction, en audience publique, le 17 Juin 2024



Décision réputée contradictoire



COMPOSITION



Elise THEVENIN-SCOTT, conseiller à la cour d'appel, agissant sur délégation d...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 12

SOINS PSYCHIATRIQUES SANS CONSENTEMENT

ORDONNANCE DU 18 JUIN 2024

(n°335, 3 pages)

N° du répertoire général : N° RG 24/00335 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJRPW

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 10 Juin 2024 -Tribunal Judiciaire de MEAUX (Juge des Libertés et de la Détention) - RG n° 24/00309

L'audience a été prise au siège de la juridiction, en audience publique, le 17 Juin 2024

Décision réputée contradictoire

COMPOSITION

Elise THEVENIN-SCOTT, conseiller à la cour d'appel, agissant sur délégation du Premier Président de la cour d'appel de Paris,

assisté de Roxane AUBIN, greffier lors des débats et de la mise à disposition de la décision

APPELANT

Monsieur [D] [H] (Personne faisant l'objet de soins)

né le 29/09/1988 à INCONNU

demeurant SDC

Actuellement hospitalisé au [Adresse 3]

comparant en personne, assisté de Me Jean Kiwallo, avocat commis d'office au barreau de Paris,

INTIMÉ

M. LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER DE MARNE LA VALLÉE

demeurant [Adresse 2]

non comparant, non représenté,

TIERS

M. [L] [H]

demeurant [Adresse 1]

non comparant, non représenté,

MINISTÈRE PUBLIC

Représenté par Mme Martine TRAPERO, avocate générale,

Comparante,

DÉCISION

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE,

Monsieur [D] [H] a été admis en soins psychiatriques sans consentement dans le cadre d'une procédure d'hospitalisation à la demande d'un tiers en urgence le 2 juin 2024.

Cette mesure a été maintenue par décision du juge des libertés et de la détention de Meaux en date du 10 juin 2024.

Monsieur [D] [H] a saisi la cour d'appel le 12 juin 2024.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 17 juin 2024, laquelle s'est tenue publiquement au siège de la juridiction

Monsieur [D] [H] a indiqué souhaiter la levée de la mesure parce que la cohabitation avec les autres patients n'est pas aisée ; qu'il n'a jamais eu le moindre suivi en 35 ans ; que l'hospitalisation sous contrainte ne lui apporte rien si ce n'est la prise de médicaments et un état de fatigue ; et qu'il n'a jamais été agressif. Il ajoute que ses seules difficultés sont le harcèlement dont il est l'objet de la part, notamment, de voisins et l'agression qu'il a subie en début d'année et pour laquelle l'enquête ne progresse pas. Enfin, il indique que les relations avec son frère, à l'origine de la demande, ne sont pas saines et qu'il n'a pas autorité sur lui.

Par des conclusions orales à l'audience, le conseil de Monsieur [D] [H] soulève une irrégularité tenant aux relations tendues entre Monsieur [D] [H] et son frère. Pour le surplus, il considère qu'au regard de l'absence d'antécédents de son client et de l'évolution positive pointée par le dernier certificat médical, une levée peut être envisagée, avec éventuellement un programme de soins.

L'avocate générale a requis oralement la confirmation de l'ordonnance compte-tenu de la régularité de la procédure et de la teneur du dernier certificat médical de situation, et le rejet du moyen soulevé.

Le directeur de l'hôpital n'a pas comparu et ne s'est pas fait représenter.

SUR CE,

Sur le tiers demandeur aux soins

Il résulte de l'article L. 3212-1 du code de la santé publique que :

« I.-Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° de l'article L. 3211-2-1.

II.-Le directeur de l'établissement prononce la décision d'admission :

1° Soit lorsqu'il a été saisi d'une demande présentée par un membre de la famille du malade ou par une personne justifiant de l'existence de relations avec le malade antérieures à la demande de soins et lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celui-ci, à l'exclusion des personnels soignants exerçant dans l'établissement prenant en charge la personne malade. Lorsqu'il remplit les conditions prévues au présent alinéa, le tuteur ou le curateur d'un majeur protégé peut faire une demande de soins pour celui-ci.

La forme et le contenu de cette demande sont fixés par décret en Conseil d'Etat.

La décision d'admission est accompagnée de deux certificats médicaux circonstanciés datant de moins de quinze jours, attestant que les conditions prévues aux 1° et 2° du I du présent article sont réunies.

Le premier certificat médical ne peut être établi que par un médecin n'exerçant pas dans l'établissement accueillant le malade ; il constate l'état mental de la personne malade, indique les caractéristiques de sa maladie et la nécessité de recevoir des soins. Il doit être confirmé par un certificat d'un second médecin qui peut exercer dans l'établissement accueillant le malade. Les deux médecins ne peuvent être parents ou alliés, au quatrième degré inclusivement, ni entre eux, ni du directeur de l'établissement mentionné à l'article L. 3222-1 qui prononce la décision d'admission, ni de la personne ayant demandé les soins ou de la personne faisant l'objet de ces soins ;

2° Soit lorsqu'il s'avère impossible d'obtenir une demande dans les conditions prévues au 1° du présent II et qu'il existe, à la date d'admission, un péril imminent pour la santé de la personne, dûment constaté par un certificat médical établi dans les conditions prévues au troisième alinéa du même 1°. Ce certificat constate l'état mental de la personne malade, indique les caractéristiques de sa maladie et la nécessité de recevoir des soins. Le médecin qui établit ce certificat ne peut exercer dans l'établissement accueillant la personne malade ; il ne peut en outre être parent ou allié, jusqu'au quatrième degré inclusivement, ni avec le directeur de cet établissement ni avec la personne malade.

Dans ce cas, le directeur de l'établissement d'accueil informe, dans un délai de vingt-quatre heures sauf difficultés particulières, la famille de la personne qui fait l'objet de soins et, le cas échéant, la personne chargée de la protection juridique de l'intéressé ou, à défaut, toute personne justifiant de l'existence de relations avec la personne malade antérieures à l'admission en soins et lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celle-ci.

Lorsque l'admission a été prononcée en application du présent 2°, les certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 3211-2-2 sont établis par deux psychiatres distincts. »

Il résulte de ce texte que la demande est régulière dès lors qu'il n'est pas contesté qu'elle émane d'un membre de la famille du patient, lequel n'a pas à établir qu'il agit dans l'intérêt du patient, le texte ne l'exigeant que pour les personnes extérieures au cercle familial. Il doit être ajouté que la demande n'est pas suffisante à elle seule à une hospitalisation sous contrainte, laquelle se fonde sur un certificat médical, et est décidée par le directeur de l'hôpital psychiatrique. Enfin, si Monsieur [D] [H] dit que les relations avec son frère ne sont pas « saines », il ne dit pas qu'elles sont mauvaises, ou que ce dernier agirait contrairement à son intérêt, étant précisé qu'il admet lui-même être hébergé régulièrement par lui.

Ce moyen sera donc écarté.

Sur le fond

Le maintien de la mesure de soins sans consentement obéit aux conditions générales de l'article L. 3212-1, I, du même code et impose seulement la constatation de l'existence de troubles mentaux qui rendent impossible son consentement et qui nécessitent des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante requérant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière permettant une prise en charge sous forme d'un programme de soins (1re Civ., 6 décembre 2023, pourvoi n° 22-17.091).

Il n'appartient pas au juge de substituer son avis à celui des psychiatres, consignés dans les certificats et avis médicaux circonstanciés prescrivant la poursuite des soins selon des modalités thérapeutiques déterminées. (Cass. 1ère Civ., 26 octobre 2022 n°21-13.084 et Cass. 1ère Civ., 27 septembre 2017, n° 16-22.544)

L'appréciation du consentement aux soins est un élément médical.

Or, en l'espèce, le certificat médical en date du 17 juin 2024 établi par le Docteur [C] indique que Monsieur [D] [H] est de contact froid mais calme à l'hôpital. Il ne présente pas de troubles du comportement ni de désorganisation psycho-comportementale. Il présente, en revanche, un délire paranoïaque évoluant depuis quatre ans, avec conviction inébranlable que des individus le harcèlent à travers les ondes radio dans le but de lui nuire, ainsi qu'une altération du fonctionnement dans ce contexte (n'utilise pas le GPS parce qu'il pense avoir été piraté). Le médecin note la disparition des hallucinations grâce au traitement, mais la persistance d'un délire de complot et de persécution centré sur plusieurs individus (voisins, collègues, famille) ; un rationalisme morbide, une absence totale de critique, une opposition aux soins et aucune reconnaissance des troubles psychiques.

Ce faisant le certificat médical décrit suffisamment l'absence de consentement et la nécessité de poursuivre des soins dans le cadre d'une hospitalisation complète.

Au regard de ce dernier certificat médical, il convient de confirmer la décision du juge des libertés et de la détention ayant ordonné le maintien de la mesure.

PAR CES MOTIFS,

Le magistrat délégataire du premier président de la cour d'appel, statuant publiquement, après débats en audience publique, par décision réputée contradictoire,

DÉCLARE l'appel recevable,

REJETTE le moyen d'irrégularité soulevé,

CONFIRME l'ordonnance du juge des libertés et de la détention,

LAISSE les dépens à la charge de l'État.

Ordonnance rendue le 18 JUIN 2024 par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DÉLÉGATAIRE

Une copie certifiée conforme notifiée le 18/06/2024 par fax / courriel à :

X patient à l'hôpital

ou/et ' par LRAR à son domicile

X avocat du patient

X directeur de l'hôpital

X tiers par LS

' préfet de police

' avocat du préfet

' tuteur / curateur par LRAR

X Parquet près la cour d'appel de Paris


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 24/00335
Date de la décision : 18/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-18;24.00335 ?
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