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18/06/2024 | FRANCE | N°23/19189

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 3, 18 juin 2024, 23/19189


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 3



ARRÊT DU 18 JUIN 2024



(n° 248 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/19189 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CITIQ



Décision déférée à la cour : ordonnance du 18 septembre 2023 - JCP du TJ de Paris - RG n°23/04111





APPELANTE



Mme [Z] [O] [K]

[Adresse 3]

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INTIME



M. [N] [V]

[Adresse 2]

[Localité 1] - SUISSE



Représenté...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 3

ARRÊT DU 18 JUIN 2024

(n° 248 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/19189 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CITIQ

Décision déférée à la cour : ordonnance du 18 septembre 2023 - JCP du TJ de Paris - RG n°23/04111

APPELANTE

Mme [Z] [O] [K]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Claire MASETTY et Marine BOUTIER de l'AARPI CABINET BOURSICAN, avocats au barreau de PARIS, toque : R181

INTIME

M. [N] [V]

[Adresse 2]

[Localité 1] - SUISSE

Représenté par Me Anne-Claire JOSEPH, avocat au barreau de PARIS, toque : B0926

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 07 mai 2024, en audience publique, rapport ayant été fait par Anne-Gaël BLANC, conseillère, conformément aux articles 804, 805 et 905 du CPC, les avocats ne s'y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Jean-Christophe CHAZALETTE, président de chambre

Anne-Gaël BLANC, conseillère

Valérie GEORGET, conseillère

Greffier lors des débats : Jeanne PAMBO

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-Christophe CHAZALETTE, président de chambre et par Jeanne PAMBO, greffier, présent lors de la mise à disposition.

Par ordonnance de non-conciliation du 29 octobre 2019, Mme [K] s'est vu attribuer la jouissance à titre gratuit d'un appartement de 180 mètres carrés situé [Adresse 3] a à [Localité 4], bien propre de son époux, M. [V].

Par arrêt du 13 juillet 2022, la cour d'appel de Paris a infirmé la décision de ce chef et, statuant à nouveau, dit n'y avoir lieu à attribution de la jouissance gratuite de ce logement. La pension alimentaire de Mme [K] était augmentée de 3 000 euros compte tenu de la nécessité dans laquelle elle se trouvait ainsi mise de se reloger.

Le 21 décembre 2022, M. [V] a fait délivrer à son épouse une sommation de quitter les lieux qu'elle continuait d'occuper avec leurs deux filles.

Par acte extrajudiciaire du 27 avril 2023, il a assigné celle-ci devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris pour obtenir son expulsion sous astreinte de 500 euros par jour de retard et le paiement, à compter du 13 juillet 2022, d'une indemnité d'occupation mensuelle de 15 000 euros payable à terme échu, outre 5 000 euros au titre des frais irrépétibles.

Par ordonnance du 18 septembre 2023, le juge des contentieux de la protection de Paris statuant en référé a :

constaté que Mme [K] est occupante sans droit ni titre du logement situé [Adresse 3] à [Localité 4] depuis le 13 juillet 2022 ;

autorisé Mme [K] à se maintenir dans les lieux tant que M. [V] n'aura pas procédé au règlement intégral de l'arriéré au titre du devoir de secours, soit la somme mensuelle de 11 000 euros, et ce dans la limite de trois années à compter du prononcé de l'ordonnance ;

dit qu'à défaut pour Mme [K] d'avoir volontairement libéré les lieux et restitué les clés dans ce délai, M. [V] pourra, deux mois après la signification d'un commandement de quitter les lieux et à l'issue de la trêve hivernale faire procéder à son expulsion ainsi qu'à celle de tous occupants de son chef, y compris le cas échéant avec le concours d'un serrurier et de la force publique ;

dit n'y avoir lieu au prononce d'une astreinte ;

rappelé que le sort du mobilier garnissant le logement est prévu par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

condamné Mme [K] à verser à M. [V] une indemnité provisionnelle mensuelle d'occupation d'un montant de 15 000 euros à compter du 13 juillet 2022 et jusqu'à la date de la libération effective et définitive des lieux (volontaire ou en suite de l'expulsion) ;

rejeté les demandes plus amples ou contraires des parties ;

débouté M. [V] de sa demande en application de l'article 700 du code de procédure civile;

condamné Mme [K] aux dépens.

Par déclaration du 30 novembre 2023, Mme [K] a relevé appel de cette décision en critiquant l'ensemble des chefs de son dispositif.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 26 janvier 2024, elle demande à la cour de :

la recevoir en son appel et l'y déclarée bien fondée,

en conséquence,

infirmer l'ordonnance de référé du 18 septembre 2023 en ce qu'elle :

- la condamne à verser à M. [V] une indemnité provisionnelle mensuelle d'occupation d'un montant de 15 000 euros à compter du 13 juillet 2022 et jusqu'à la date de la libération effective et définitive des lieux (volontaire ou en suite d'expulsion),

- rejette les demandes plus amples ou contraires des parties,

- condamne Mme [K] aux dépens,

Et, statuant à nouveau :

à titre principal,

se déclarer incompétente pour statuer sur la demande d'indemnité d'occupation formée par M. [V] à son encontre et renvoyer M. [V] à se pourvoir de ce chef devant le juge aux affaires familiales de Paris ;

à titre subsidiaire, si la cour devait, par extraordinaire, se déclarer compétente :

fixer l'indemnité d'occupation due par elle pour l'occupation du bien sis [Adresse 3] à [Localité 4] à la somme de 2 400 euros par mois, à compter du 13 juillet 2022 ;

à titre infiniment subsidiaire,

fixer l'indemnité d'occupation due par elle pour l'occupation du bien sis [Adresse 3] à [Localité 4] à la somme de 4 924,80 euros par mois, à compter du 13 juillet 2022

en tout état de cause,

partager les dépens de première instance et d'appel par moitié entre les parties.

M. [V] a constitué avocat mais n'a pas conclu.

Il a indiqué, par message 3 avril 2024, qu'un accord était intervenu entre les parties et que Mme [K] allait se désister. Cependant, Mme [K] n'a pas adressé à la cour de conclusions de désistement.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 mai 2024.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

Sur ce,

A titre liminaire, il convient de relever que, si Mme [K] sollicite l'infirmation de l'ensemble des chefs de la décision querellée, elle ne formule aucune critique de celle-ci en ce qu'elle autorise son expulsion, ses demandes se limitant uniquement à la compétence du premier juge concernant la fixation de l'indemnité d'occupation et, si la cour retenait sa compétence, à la réduction du montant de celle-ci.

Sur la compétence du premier juge

Aux termes de l'article L. 213-3, 2°, du code de l'organisation judiciaire, le juge aux affaires familiales connaît du divorce, de la séparation de corps et de leurs conséquences, de la liquidation et du partage des intérêts patrimoniaux des époux.

Il est constant que les intérêts patrimoniaux des époux comme ceux des concubins s'entendent de tous leurs rapports pécuniaires (Civ.1re, 13 mai 2020, pourvoi n° 19-11.308 ; Civ. 1re, 5 avr. 2023, n° 21-25.044), y compris ceux nés de l'occupation par un des époux ou un des concubins d'un bien appartenant en propre à l'autre lorsque cette occupation est née de la rupture de leur union.

Il convient dès lors d'infirmer la décision du premier juge qui a retenu sa compétence alors que, celle-ci était contestée devant lui et que la condamnation au paiement d'une indemnité provisionnelle d'occupation relevait du juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Paris statuant en référé.

Aux termes de l'article 90 du code de procédure civile, lorsque le juge s'est déclaré compétent et a statué sur le fond du litige dans un même jugement rendu en premier ressort, celui-ci peut être frappé d'appel dans l'ensemble de ses dispositions. Lorsque la cour infirme du chef de la compétence, elle statue néanmoins sur le fond du litige si la cour est juridiction d'appel relativement à la juridiction qu'elle estime compétente.

Au cas présent, le premier juge s'est déclaré compétent et a statué sur le fond du litige dans un même jugement rendu en premier ressort. La cour, qui dispose d'une plénitude de juridiction, est juridiction d'appel du juge aux familiales du tribunal judiciaire de Paris de telle sorte qu'il sera statué sur la demande d'indemnité d'occupation.

Sur le montant de l'indemnité d'occupation provisionnelle

L'article 1073 du code de procédure civile prévoit notamment que le juge aux affaires familiales exerce les fonctions de juge des référés.

L'article 835, alinéa 2, du même code dispose que le président du tribunal judiciaire peut, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier.

Si l'obligation ne présente un tel caractère que partiellement, le juge ne doit accorder une provision qu'à hauteur du montant non sérieusement contestable.

Une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

Au cas présent, Mme [K] ne conteste pas le principe de l'indemnité d'occupation mais uniquement son montant.

Pour faire droit à la demande de M. [V] de voir fixer ce montant à 15 000 euros, le premier juge a retenu que cette somme correspondait à la valeur locative de l'appartement telle qu'estimée par Mme [K] elle-même au soutien de sa demande d'augmentation de la pension alimentaire payée par son mari pour se reloger dans un appartement de même standing.

Cependant, le seul fait que Mme [K] ait sollicité, dans une autre instance, une augmentation de 15 000 euros de sa pension alimentaire pour lui permettre de se reloger dans des conditions comparables à celles offertes par l'appartement occupé ne permet pas d'établir que cette somme corresponde avec certitude à la valeur locative objective du bien.

Pour voir principalement fixer le montant de l'indemnité d'occupation mensuelle à la somme de 2 400 euros, Mme [K] fait valoir que, si elle demandait effectivement 15 000 euros pour se reloger dans des conditions similaires grâce à l'augmentation de sa pension alimentaire, la cour n'a alloué que 3 000 euros à ce titre, somme à laquelle il convient d'appliquer le coefficient de précarité d'usage de 20% pour fixer le montant non sérieusement contestable dû par elle.

Cependant, alors qu'aux termes de la décision invoquée l'augmentation de la pension a été limitée à 3 000 euros au motif express que Mme [K] n'avait pas besoin d'un appartement de 180 mètres carrés pour se reloger avec ses filles, cette somme ne peut correspondre à une juste évaluation de la valeur locative du bien litigieux.

Pour voir fixer, subsidiairement, le montant de l'indemnité provisionnelle à 4 924,80 euros par mois, Mme [K] soutient qu'il convient de prendre en considération le coût moyen du mètre carré et d'appliquer, comme il est d'usage, un coefficient de précarité de 20%.

Dans ce cadre, alors que Mme [K] justifie devant la cour que de la valeur moyenne du mètre carré dans son quartier et que son occupation est plus précaire que si elle était locataire, il convient de considérer que le montant de l'indemnité d'occupation n'est pas sérieusement contestable à hauteur uniquement de 4 924,80 euros par mois.

Mme [K] sera condamnée au paiement d'une indemnité provisionnelle de ce montant.

La décision sera dès lors infirmée sur le montant alloué.

Elle sera en revanche confirmée sur les dépens.

En cause d'appel, chacune des parties supportera la charge de ses propres dépens.

PAR CES MOTIFS

Confirme l'ordonnance entreprise dans ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'elle rejette l'exception d'incompétence au profit du juge aux affaires familiales et condamne Mme [K] à verser à M. [V] une indemnité provisionnelle mensuelle d'occupation d'un montant de 15 000 euros à compter du 13 juillet 2022 et jusqu'à la date de la libération effective et définitive des lieux (volontaire ou en suite de l'expulsion) ;

Infirme l'ordonnance entreprise de ces chefs ;

Statuant à nouveau et y ajoutant ;

Fait droit à l'exception d'incompétence soulevée par Mme [K] ;

Vu l'article 90 du code de procédure civile,

Condamne Mme [K] à verser à M. [V] une indemnité provisionnelle mensuelle d'occupation d'un montant de 4 924,80 euros par mois à compter du 13 juillet 2022 et jusqu'à la date de la libération effective et définitive des lieux ;

Dit que chacune des parties conservera la charge de ses dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 23/19189
Date de la décision : 18/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-18;23.19189 ?
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