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14/06/2024 | FRANCE | N°20/07976

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 12, 14 juin 2024, 20/07976


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12



ARRÊT DU 14 Juin 2024



(n° , 5 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 20/07976 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCWWY



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 13 Octobre 2020 par le Pole social du TJ d'EVRY RG n° 19/00893



APPELANTE

S.A.S. [5]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Djamila AIMEUR, avocat au ba

rreau de PARIS, toque : D2006



INTIMEE

URSSAF ILE-DE-FRANCE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Madame [S] [L] en vertu d'un pouvoir général



COMPOSITION DE LA COUR :

...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12

ARRÊT DU 14 Juin 2024

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 20/07976 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCWWY

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 13 Octobre 2020 par le Pole social du TJ d'EVRY RG n° 19/00893

APPELANTE

S.A.S. [5]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me Djamila AIMEUR, avocat au barreau de PARIS, toque : D2006

INTIMEE

URSSAF ILE-DE-FRANCE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Madame [S] [L] en vertu d'un pouvoir général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Février 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Christophe LATIL, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Odile DEVILLERS, Présidente de chambre

Monsieur Gilles BUFFET, Conseiller

Monsieur Christophe LATIL, Conseiller

Greffier : Madame Claire BECCAVIN, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, initialement prévu le 10 mai 2024, prorogé au 31 mai 2024 puis au 14 juin 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Madame Marie-Odile DEVILLERS, Présidente de chambre et par Madame Claire BECCAVIN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par la société [5] d'un jugement prononcé le 13 octobre 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire d'Evry dans un litige l'opposant à l'Urssaf d'Ile-de-France.

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler qu'à l'issue d'une opération de contrôle de l'application de la législation sociale des cotisations et contributions par la société [5] (la société), sur la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2016, l'Urssaf d'Ile-de-France a adressé une lettre d'observations du 15 octobre 2018 relevant plusieurs manquements et omissions aux règles de la sécurité sociale.

Après avoir contesté en vain les chefs de redressements n°1 et n°4 dans le cadre de la procédure contradictoire par courrier du 14 novembre 2018, l'inspecteur ayant maintenu l'ensemble de ses constatations et chiffrages dans sa réponse du 05 décembre 2018, la société a été mise en demeure le 08 janvier 2019 d'avoir à payer la somme de 23 507 euros de cotisations, augmentée de 2 591 euros de majorations de retard provisoires.

Par décision intervenue le 08 avril 2019, la commission de recours amiable a rejeté la requête formée par la société le 06 mars 2019 en contestation portant sur le seul chef de redressement n°1, concernant les acomptes et avances ou prêts non récupérés.

Saisi par la société le 11 juin 2019, le pôle social du tribunal de grande instance d'Evry, devenu le tribunal judiciaire d'Evry le 1er janvier 2020, a par jugement du 13 octobre 2020 :

- débouté la société de l'ensemble de ses prétentions,

- condamné la société aux dépens.

Le jugement a été notifié par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception remise le 30 octobre 2020 à la société qui en a interjeté appel par lettre recommandée adressée au greffe le 27 novembre 2020.

L'affaire a alors été fixée à l'audience du 14 février 2024 pour être plaidée et lors de laquelle les parties ont développé oralement leurs conclusions écrites déposées au dossier.

La société demande à la cour de :

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement du pôle social du tribunal judiciaire d'Evry en date du 13 octobre 2020,

- constater l'acquisition de la prescription à l'égard des avances sur salaires versées en 2012 et 2013,

En conséquence,

- débouter l'Urssaf de sa demande en paiement de la somme de 13 928 euros au titre des cotisations et contributions sur les avances sur salaires versées en 2012 et 2013, ainsi que de sa demande de majorations de retard y afférente,

- condamner l'Urssaf à lui payer la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner l'Urssaf aux entiers dépens.

A titre principal la société considère que le tribunal a méconnu les dispositions des articles L. 242-1, L. 244-3 alinéa 1 et R. 243-6 du code de la sécurité sociale en admettant la réintégration des acomptes sur salaires payés en 2012 et en 2013 et non régularisée par l'employeur, dans l'assiette des cotisations sociales à la date de leur inscription au compte"charges exceptionnelles" au bilan des années 2015 et 2016 et lui reproche de ne pas avoir retenu en conséquence leur prescription en 2018.

Elle fait valoir que le fait générateur des cotisations est le versement des rémunérations en application de l'article R. 243-6 et qu'en l'espèce les acomptes litigieux ont été versés en 2012 et 2013 et le fait d'inscrire les sommes dans le poste "charges exceptionnelles", alors que le versement effectif desdites sommes est antérieur à la période contrôlée ne modifie en rien la date d'exigibilité des cotisations contrairement à ce qu'a retenu le tribunal.

La caisse demande à la cour de :

- déclarer la société recevable mais mal fondée en son appel,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire d'Evry le 13 octobre 2020,

- accueillir la requête en omission de statuer déposée par l'Urssaf,

- y faisant droit, condamner la société au paiement de la somme de 13 928 euros de cotisations et de 2 510 euros de majorations de retard provisoires,

A titre subsidiaire,

- dire et juger que le redressement opéré du chef des avances et prêts non récupérés a été opéré à juste titre,

- dire et juger qu'il n'existe aucune prescription de l'assiette des cotisations redressées,

- accueillir la requête en omission de statuer déposée par l'Urssaf,

- y faisant droit, condamner la société au paiement de la somme de 13 928 euros de cotisations et de 2 510 euros de majorations de retard provisoires,

- condamner la société à lui verser une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouter la société au surplus de ses demandes, fins et conclusions.

La caisse indique que si le fait générateur des cotisations est bien constitué par le versements des rémunérations, l'inscription au débit d'un compte "acomptes", "avances" ou "prêts" s'analyse comme la constatation d'une dette d'un salarié envers la société, l'avance sur salaire correspondant à un prêt consenti.

Elle souligne qu'en règle générale l'acompte sur salaire est régularisé dès la liquidation de la paie qui suit, le net à payer étant diminué des avances consenties au débit d'un compte de charges et en l'absence de régularisation ces sommes constituent alors un avantage servi au salarié en sus de la rémunération habituelle et doit être soumis à cotisations lors de leur inscription au débit d'un compte de charges.

Elle fait valoir que les acomptes ou avances ne sont pas soumis ab initio aux charges sociales et qu'il ne peut y avoir de double paiement de cotisations et le fait que ces sommes aient été versées sur une période antérieure au contrôle est sans incidence et aucune prescription d'assiette ne peut lui être opposée.

Enfin, elle rappelle que le tribunal à omis de statuer sur sa demande reconventionnelle en paiement des cotisations redressées et des majorations de retard.

En application de l'article 455 du code procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties déposées à l'audience pour l'exposé complet des moyens développés et soutenus à l'audience.

SUR CE, LA COUR

Sur le chef de redressement n°1

L'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale dispose que :

"I.-Les cotisations de sécurité sociale dues au titre de l'affiliation au régime général des personnes mentionnées aux articles L. 311-2 et L. 311-3 sont assises sur les revenus d'activité tels qu'ils sont pris en compte pour la détermination de l'assiette définie à l'article L. 136-1-1. Elles sont dues pour les périodes au titre desquelles ces revenus sont attribués.".

L'article R. 243-6 du même code précise que :

"I. ' Pour chaque établissement, les employeurs déclarent et versent les cotisations sociales aux organismes de recouvrement dont ces établissements et leurs salariés relèvent au sens des dispositions de l'article R. 130-2.

Les unions de recouvrement et les caisses générales de sécurité sociale assurent sur ce périmètre l'ensemble des missions mentionnées à l'article L. 213-1.

II. ' Le versement prévu au I est effectué le mois suivant la période de travail au titre de laquelle les rémunérations sont dues, au plus tard aux échéances suivantes :

1° Le 5 de ce mois pour les employeurs dont l'effectif est d'au moins cinquante salariés et dont la paie est effectuée au cours du même mois que la période de travail ;

2° Le 15 de ce mois dans les autres cas.".

En l'espèce il est établi et non contesté que la société a octroyé des avances sur salaires à plusieurs de ses employés pour un montant total de 26 528 euros avant la période contrôlée, selon elle en 2012 et 2013, et qui ont ensuite fait l'objet d'une inscription en "charges exceptionnelles" d'un montant de 20 544 euros en 2015 et de 5 984 euros en 2016, années concernées par le contrôle litigieux effectué en 2018.

La société n'affirme ni ne prouve que ces avances sur salaires aient été assujetties aux cotisations sociales exigibles avant les opérations de contrôle, n'ayant dès lors pas respecté les délais de versement prévus par le paragraphe II de l'article R. 243-6 cité ci-dessus.

Elle n'affirme, ni ne prouve que ces avances aient été régularisées lors de la paie qui a suivi leur versement.

Au contraire en inscrivant ces sommes dans les "charges exceptionnelles" la société reconnaît parfaitement ne pas les avoir récupérées auprès des salariés concernés. Ces derniers ont donc bénéficié d'un supplément de rémunération qui n'a pas été soumis à cotisations sociales.

Ainsi que l'a justement relevé le tribunal, c'est à la date à laquelle ces sommes ont été inscrites dans les "charges exceptionnelles" en 2015 et 2016 qu'elles doivent être considérées comme ayant été définitivement versées aux salariés, lorsque elles ont été converties en rémunération supplémentaire, ayant été décidé qu'elles ne seraient finalement pas remboursées par les salariés.

En outre, comme l'a ensuite souligné le tribunal, le fait pour un employeur de ne pas régulariser les avances ou acomptes sur salaire sur la paie suivante, ou dans un délai raisonnable, ferait irrégulièrement échapper une partie des rémunérations à l'assiette des cotisations en jouant sur les règles de prescription triennale.

Il n'y a donc pas lieu de retenir la prescription soulevée par la société et il convient de confirmer les décisions de l'Urssaf en date du 05 décembre 2018 et de la commission de recours amiable du 08 avril 2019.

Le jugement entrepris sera dès lors confirmé.

Sur la demande reconventionnelle en paiement des cotisations découlant du chef de redressement n°1

En produisant la copie de ses conclusions écrites adressées au tribunal le 23 octobre 2019 par courrier recommandé, ainsi que la preuve de leur transmission à la société par courrier recommandé du 21 octobre 2019, reçu le 28 octobre 2019 avant l'audience du 1er septembre 2020, l'Urssaf prouve qu'elle avait régulièrement saisi la juridiction d'une demande en paiement des sommes de 13 928 euros de cotisations et de 2 510 euros de majorations de retard au titre de la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2016.

Le tribunal n'a pas présenté en détail dans son jugement les demandes formées par les parties et n'a pas statué sur cette demande en paiement qui n'est pas évoquée dans les motifs et le dispositif du jugement dont appel.

La société n'a formé aucune observation sur ce point.

Il ne s'agit donc pas d'une nouvelle demande formée en appel et l'Urssaf est dès lors recevable à solliciter qu'il soit statuer sur cette omission de statuer en application des dispositions de l'article 462 du code de procédure civile.

Le présent arrêt ayant confirmé la décision de l'Urssaf en date du 05 décembre 2018 et celle de la commission de recours amiable du 08 avril 2019, l'Urssaf est légitime à solliciter le paiement des cotisations redressées au titre de la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2016 à l'encontre de la société.

Partie succombante, la société sera tenue aux dépens et à payer à l'Urssaf, ainsi que le commande l'équité, la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement (RG n° 19/00893) prononcé le 13 octobre 2020 par le pôle social du tribunal judiciaire d'Evry ;

Y ajoutant,

CONFIRME les décisions de l'Urssaf en date du 05 décembre 2018 et de la commission de recours amiable en date du 08 avril 2019 ;

CONDAMNE la société [5] à payer à l'Urssaf d'Ile-de-France les sommes de 13 928 euros de cotisations et de 2 510 euros de majorations de retard provisoires au titre de la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2016 ;

CONDAMNE la société [5] à verser à l'Urssaf d'Ile-de-France la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société [5] aux dépens.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 20/07976
Date de la décision : 14/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-14;20.07976 ?
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