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14/06/2024 | FRANCE | N°19/11185

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 14 juin 2024, 19/11185


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 14 Juin 2024



(n° , 7 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 19/11185 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA5PK



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Octobre 2019 par le Tribunal de Grande Instance de Bobigny RG n° 19/01006



APPELANTE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SEINE SAINT DENIS

[Adresse 1]

[Locali

té 3]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901



INTIME

Monsieur [O] [R]

[Adresse 2]

[Localité 4]

comparant en personne, assisté de Me Laure ON...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 14 Juin 2024

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 19/11185 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA5PK

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Octobre 2019 par le Tribunal de Grande Instance de Bobigny RG n° 19/01006

APPELANTE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SEINE SAINT DENIS

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901

INTIME

Monsieur [O] [R]

[Adresse 2]

[Localité 4]

comparant en personne, assisté de Me Laure ONESTI, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : 429 substitué par Me Sandrine DOS SANTOS, avocat au barreau de PARIS, toque : E1723

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Avril 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Raoul CARBONARO, président de chambre

Madame Carine TASMADJIAN, présidente de chambre

Monsieur Christophe LATIL, Conseiller

Greffier : Madame Agnès ALLARDI, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Monsieur Raoul CARBONARO, président de chambre et par Madame Fatma DEVECI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis (la caisse) d'un jugement rendu le 7 octobre 2019 par le tribunal de grande instance de Bobigny dans un litige l'opposant à M. [O] [R] (l'assuré).

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que le 28 août 2006, M. [O] [R], agent de maintenance depuis mai 2005 au sein de la société [5] a été victime d'une chute de 4,80 m de hauteur avec réception sur le dos ; que la Caisse primaire d'assurance maladie a pris en charge l'accident au titre de la législation professionnelle et a retenu un taux d'incapacité permanente partielle de 100 % avec une date de consolidation au 31 janvier 2009 ; que par arrêt du 19 mai 2016, la cour d'appel de Versailles a reconnu la faute inexcusable de l'employeur ; que cet arrêt a été partiellement cassé le 15 février 2018 seulement en ce qu'il avait fixé le préjudice au titre de l'assistance tierce personne post consolidation à compter du 1er mars 2013 à une somme équivalente à la prestation complémentaire pour recours à tierce personne et avait arrêté la somme de 64 134,07 euros au titre des arriérés ; que le 14 mars 2018, la Caisse primaire d'assurance maladie a notifié à l'intimé un indu de 35 719,36 euros pour la période du 15 mai 2016 au 28 février 2018 au titre ce poste de préjudice ; que le 20 mars 2018, M. [R] saisissait la commission de recours amiable ; que le 22 mars 2018, la Caisse notifiait un indu de 64 134,07 euros au titre de l'assistance tierce personne post consolidation à compter du 1er mars 2013 ; que la commission de recours amiable a décidé le 29 janvier 2019 de rejeter le recours ; que M. [O] [R] a alors saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de son recours.

Le dossier a été transféré le 1er janvier 2019 au tribunal de grande instance de Bobigny.

Par jugement en date du 7 octobre 2019, le tribunal a dit non fondé les indus et condamné la caisse au paiement de la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal a indiqué que l'interprétation de l'arrêt de la cour de cassation pouvait être faite par lui-même. Il a estimé que la cour de cassation a consacré la créance au titre de la majoration tierce personne sur le fondement de l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale tout en censurant la cour d'appel sur la prestation complémentaire pour recours à tierce personne sur le fondement de l'article L. 452-3 du même code.

Le jugement a été notifié par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception remise le 15 octobre 2019 à la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine Saint Denis qui en a interjeté appel par déclaration formée par voie électronique le 12 novembre 2019.

Par conclusions écrites visées et développées oralement à l'audience par son avocat, la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine Saint Denis demande à la cour de :

infirmer le jugement du 7 octobre 2019 en toutes ses dispositions ;

en conséquence.

déclarer irrecevables les contestations de M. [O] [R] relatives à la notification d'indu du 22 mars 2018 ;

débouter M. [O] [R] de l'ensemble de ses demandes ;

condamner M. [O] [R] à verser à la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine Saint Denis la somme de 99 853,43 euros ;

condamner M. [O] [R] en tous les dépens.

La Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine Saint Denis expose que la Cour d'appel de Versailles saisie du litige relatif à la faute inexcusable de l'employeur, par arrêt en date du 19 mai 2016, a fixé le préjudice de M. [O] [R] au titre de l'assistance tierce personne post-consolidation à compter du 1er mars 2013 à une somme équivalente à la prestation complémentaire pour recours à tierce personne post-consolidation sur la base mensuelle de 1 623,65 euros, dit que les arriérés s'élèvent à la somme de 64 134,07 euros arrêtés au 15 mai 2016, et condamné la Société [5] au paiement de la somme de 64 134,07 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, laquelle sera avancée et réglée, par la Caisse primaire d'assurance-maladie de [Localité 3] ; que lors de l'évaluation du poste de préjudice d'assistance tierce personne après consolidation, la Cour d'appel de Versailles a considéré que l'assuré avait droit à une prestation complémentaire pour recours à tierce personne sur la base mensuelle de 1 623,65 euros, à compter de la date d'entrée en vigueur du dispositif le 1er mars 2013, et évalué le montant des arriérés à la somme de 64 134,07 euros ; que la Cour a en outre précisé qu'il n'y avait pas lieu d'indemniser l'assuré comme il le demandait sous forme de capital dans la mesure où le législateur avait prévu le versement viager et mensuel de cette prestation ainsi que sa revalorisation ; qu'au regard de cette décision, elle a versé à l'assuré la somme de 64  134,07 euros en capital, puis lui a versé des arrérages d'un montant de 1 623,65 euros à compter du 15 mai 2016 ; que parallèlement, un pourvoi en cassation a été formé et par arrêt en date du 15 février 2018, la Cour de cassation a rappelé que le besoin d'assistance tierce personne après consolidation est un dommage couvert par le Livre IV du code de la sécurité sociale, considéré qu'en accordant une indemnisation à ce titre à M. [O] [R], la Cour avait violé les articles L. 434-2 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale ; que la Caisse ayant procédé à l'exécution de l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Versailles le 19 mai 2016, il en est résulté un indu suite l'arrêt de cassation rendu par la Cour de cassation le 15 février 2018 ; que par courrier en date du 14 mars 2018, elle a notifié à l'assuré un indu d'un montant de 35 719,36 euros, correspondant à l'indemnisation de l'assistance tierce personne post-consolidation allouée sur la base mensuelle de 1 623,65 euros par la Cour d'appel de Versailles à la manière de la prestation complémentaire pour recours à tierce personne permettant de majorer la rente ; que par courrier en date du 22 mars 2018, elle a notifié à M. [O] [R] un second indu d'un montant de 64 134,07 euros correspondant aux arriérés alloué au titre du préjudice relatif à l'assistance tierce personne du 1 er mars 2013 au 15 mai 2016 ;

Que l'assuré n'a saisi la commission de recours amiable d'un recours que sur le premier indu ; qu'il est donc irrecevable à contester le second ;

Que l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles n'a statué que sur la liquidation des préjudices ; qu'il a octroyé une indemnisation équivalente à la rente assistance tierce personne en précisant qu'elle estimait que l'assuré n'y avait pas droit ; qu'elle a ensuite fixé le préjudice à ce titre ; que la Cour de cassation, dans son arrêt du 15 février 2018, rappelle que le besoin d'assistance par une tierce personne après consolidation, indemnisé par les conditions prévues par l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale, est un dommage couvert par le Livre IV du code de la sécurité sociale, de sorte que la Cour d'appel de Versailles ne pouvait pas l'indemniser au titre de la faute inexcusable ; qu'elle a en outre estimé qu'il n'y avait pas lieu à renvoi, ce qui signifie qu'exclusion faite des dispositions annulées, l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Versailles se suffit à lui-même sans qu'il n'y ait lieu à interprétation ou trancher quoi que ce soit ; qu'en conséquence, les condamnations prononcées au titre de l'assistance tierce personne post-consolidation par la Cour d'appel de Versailles tombent de facto mais demeure dans le dispositif de l'arrêt la mention de ce que l'assuré ne peut prétendre à la majoration tierce personne post-consolidation, laquelle n'a pas été cassée par la Cour de cassation ; que ni le tribunal des affaires de sécurité sociale de Pontoise, ni la Cour d'appel de Versailles, ni même la Cour de cassation n'ont été saisis d'une demande d'attribution de la majoration de rente pour tierce personne mais uniquement de la question de la faute inexcusable de l'employeur et de ses conséquences sur l'indemnisation des préjudices ; que la position adoptée et la « compensation » opérée par les premiers juges apparaît d'autant plus contestable que l'assuré n'a jamais justifié avoir sollicité l'allocation d'une majoration de sa rente pour tierce personne auprès d'elle.

Par conclusions écrites visées, développées et complétées oralement à l'audience par son avocat, M. [O] [R] demande à la cour de :

confirmer le jugement du 7 octobre 2019 en toutes ses dispositions

en conséquence,

constater le bien-fondé de la créance de M. [O] [R] au titre de l'article L. 434-2 al 3 du code de la sécurité sociale ;

débouter la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine Saint Denis de sa demande de paiement des sommes de 35 719,36 euros et 64 134,07 euros ;

débouter la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine Saint Denis de l'ensemble de ses demandes ;

condamner la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine Saint Denis à lui payer des dommages et intérêts pour résistance abusive ;

condamner la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine Saint Denis au paiement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

condamner la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine Saint Denis aux entiers dépens.

M. [O] [R] expose que l'article L. 434-2 alinéa 3 du code de la sécurité sociale précise que « La victime titulaire d'une rente, dont l'incapacité permanente est égale ou supérieure à un taux minimum, a droit à une prestation complémentaire pour recours à tierce personne lorsqu'elle est dans l'incapacité d'accomplir seule les actes ordinaires de la vie. Le barème de cette prestation est fixé en fonction des besoins d'assistance par une tierce personne de la victime, évalués selon des modalités précisées par décret. Elle est revalorisée au 1er avril de chaque année par application du coefficient mentionné à l'article L. 161-25 » ; que le Conseil Constitutionnel a rendu une décision le 18 juin 2010 dans laquelle il précise qu' « en application des dispositions du titre II du livre IV du code de la sécurité sociale, les prestations en nature nécessaires aux victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles sont totalement prises en charge et payées par la caisse d'assurance maladie » ; qu'il a conclu en précisant qu' « indépendamment de cette majoration, la victime ou, en cas de décès, ses ayants droit peuvent, devant la juridiction de sécurité sociale, demander à l'employeur la réparation de certains chefs de préjudice énumérés par l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale ; qu'en présence d'une faute inexcusable de l'employeur, les dispositions de ce texte ne sauraient toutefois, sans porter une atteinte disproportionnée au droit des victimes d'actes fautifs, faire obstacle à ce que ces mêmes personnes, devant les mêmes juridictions, puissent demander à l'employeur réparation de l'ensemble des dommages non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale » ; que la Cour de cassation a jugé « que le besoin d'assistance par une tierce personne après consolidation est indemnisé dans les conditions prévues à l'article L 434-2 du code de la sécurité sociale, de sorte que ce préjudice est couvert, même de manière restrictive par le livre IV du code de la sécurité sociale. Il en est déduit que ce préjudice d'assistance en tierce personne ne peut donner lieu à indemnisation sur le fondement de l'article L 452-3 » ; qu'en application de l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale, cette victime dispose bien d'une créance à l'encontre de la caisse primaire d'assurance maladie. laquelle doit servir la prestation. au besoin majorée en considération du taux d'incapacité de la victime ; que la Cour de cassation n'a censuré les juges du fond qu'en ce qu'ils ont prononcé la condamnation à la charge de la société [5] sur les fondements de l'article L. 452 -2 et suivants ; que la cour ne casse en aucun cas l'arrêt d'appel en ce qu'il a consacré sa créance sur le fondement de l'article L. 434-2 ; que dès lors que la prestation complémentaire pour recours à tierce personne doit être totalement prises en charge et pavées par la caisse d'assurance maladie, cette dernière est mal-fondée à solliciter de lui qu'il restitue les sommes de 35 719,36 euros et 64 134, 07 euros ; que dès lors que la prestation complémentaire pour recours à tierce personne est due par la caisse en application du livre IV, la créance qu'elle invoque n'est pas certaine, liquide et exigible.

SUR CE

- sur la recevabilité de la contestation de l'indu notifié le 22 mars 2018 :

Aux termes des dispositions de l'article R. 142-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue du décret n° 2016- 941 8 juillet 2016, applicable au litige,

« Les réclamations relevant de l'article L. 142-1 formées contre les décisions prises par les organismes de sécurité sociale et de mutualité sociale agricole de salariés ou de non-salariés sont soumises à une commission de recours amiable composée et constituée au sein du conseil d'administration de chaque organisme.

« Cette commission doit être saisie dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision contre laquelle les intéressés entendent former une réclamation. La forclusion ne peut être opposée aux intéressés que si cette notification porte mention de ce délai ».

En l'espèce, la notification d'indu du 22 mars 2018 a été reçue par l'assuré le 28 mars 2018. Elle invite ce dernier a réglé la somme de 64 134,07 euros correspondant à la créance fixée par la cour d'appel de Versailles. Si la notification est irrégulière pour ne pas préciser les modalités de recours, il n'en demeure pas moins que l'assuré n'a pas saisi la commission de recours amiable à son sujet antérieurement à la saisine du tribunal.

Le recours à l'encontre de la notification d'indu du 14 mars 2018 pour la somme de 35 719, 36 euros correspondant aux arrérages versés du 15 mai 2016 au 28 février 2018 à la suite de l'arrêt la cour d'appel de Versailles a été formée le 20 mars 2018, soit antérieurement à la notification du second indu, de telle sorte qu'il ne saurait englober cette notification postérieure.

En conséquence, la demande d'annulation de l'indu de 64 134,07 euros doit être déclaré irrecevable.

- sur le fond du droit :

Le litige opposant un salarié à son employeur dans le cadre de la reconnaissance d'une faute inexcusable a pour partie jointe la caisse. Il en résulte en application des dispositions des articles L. 452-2 et suivants du code de la sécurité sociale que le jugement rendu doit lui être déclaré opposable afin d'une part que les majorations des prestations qu'elle sert soient servies à l'assuré, générant une majoration de cotisations calculées par la Carsat, et d'autre part qu'elle fasse l'avance à l'assuré du montant des indemnités définitivement dues par l'employeur et qu'elle recouvre dans le cadre de son action récursoire. Il en résulte que ce litige n'a pas pour objet de déterminer les prestations que la caisse doit servir à l'assuré qui fait l'objet d'un éventuel contentieux opposant l'assuré à sa caisse de rattachement en dehors de la présence de l'employeur.

Dans le cadre de l'indemnisation des conséquences dommageables d'une faute inexcusable, le besoin d'assistance par une tierce personne après consolidation est indemnisé dans les conditions prévues à l'article L 434-2 du code de la sécurité sociale, de sorte que ce préjudice est couvert, même de manière restrictive par le livre IV du code de la sécurité sociale. Il en est déduit que ce préjudice d'assistance en tierce personne ne peut donner lieu à indemnisation sur le fondement de l'article L 452-3.

L'arrêt de la cour d'appel de Versailles du 19 mai 2016 statuant sur la demande d'indemnisation au titre de l'aide à la tierce personne postérieurement à la consolidation rappelle qu'à la date de la liquidation de la rente, aucune majoration n'était due pour tierce personne. Il rappelle que la demande formée par l'assuré présente un caractère indemnitaire et la défense tant de l'employeur que de la caisse opposant que ce poste de préjudice est indemnisé par le Livre IV. Il constate que depuis l'entrée en vigueur le 1er mars 2013 les dispositions nouvelles de l'article L 434-2 troisième alinéa du code de la sécurité sociale, la victime peut prétendre à une prestation complémentaire pour recours à une tierce personne et fixe une indemnisation calculée sur le montant du droit à prestation complémentaire pour recours à tierce personne sur une base mensuelle de 1 623, 65 euros à compter de la date d'entrée en vigueur du dispositif.

Dans le dispositif de son arrêt, la cour :

« Dit que l'assuré ne peut prétendre à la majoration de la rente pour tierce personne post consolidation sur le fondement de l'article L. 452-2 du code de la sécurité sociale ;

« Fixe son préjudice au titre de l'assistance tierce personne post consolidation à compter du 1er mars 2013 à une somme équivalente à la prestation complémentaire pour recours à tierce personne post consolidation sur la base mensuelle 2623, 65 euros et dits que les arriérés s'élèvent à 64 134, 07 euros arrêtés au 15 mai 2016 ;

« Condamne la société [5] au paiement de la somme de 64 134,07 euros avec intérêt au taux légal à compter du présent arrêt, laquelle sera avancée et réglée, par la caisse primaire d'assurance-maladie de la Seine-Saint-Denis ; ».

Contrairement à ce que l'assuré soutient, cet arrêt n'ordonne pas à la caisse de lui verser la majoration de rente pour tierce personne, dès lors qu'il affirme qu'il ne peut y prétendre. La lecture du dispositif rappelle tout particulièrement que la cour a entendu l'indemniser par une somme équivalente à la prestation le préjudice d'assistance tierce personne post consolidation dans le cadre du versement de dommages et intérêts et condamne l'employeur à la verser. S'agissant d'un préjudice personnel, car indemnisé dans le cadre de la faute inexcusable, l'action récursoire de la caisse l'incluait, comme le précise le dispositif.

Cet arrêt a donc, dans son principe, respecté le fait que la caisse n'intervient que comme partie jointe et n'a tranché aucun litige entre la caisse et l'assuré sur les prestations qui lui sont dues.

La Cour de cassation a cassé partiellement l'arrêt en ces deux dernières dispositions, laissant ainsi subsister au dispositif le fait que l'assuré n'a pas le droit à la majoration de rente pour assistance post consolidation par une tierce personne. La cassation a été prononcée au visa des dispositions des articles L. 434-2 et L 452-3 du code de la sécurité sociale, la cour rappelant que le besoin d'assistance par une tierce personne après consolidation, indemnisé dans les conditions prévues par le premier de ces textes, est un dommage couvert par le livre IV du code de la sécurité sociale.

L'article R. 434-34-1 du code de la sécurité sociale qui prévoit la possibilité de verser la prestation complémentaire pour recours à une tierce personne exclut toute possibilité de percevoir automatiquement la prestation en cause sans examen. Celle-ci ne peut être calculée que dans des cas limitatifs :'à l'occasion de l'attribution de la rente, or celle-ci a été calculée avant l'entrée en vigueur du texte ; à l'occasion de la modification du taux d'incapacité permanente partielle, or il est de 100 % ; sur initiative de la caisse ou de l'assuré, « III Lorsque, par suite d'un réexamen de la victime, à l'initiative de celle-ci ou de la caisse, il est constaté une modification de sa capacité à accomplir les actes ordinaires de la vie justifiant une révision du montant de la prestation (').

En outre, pour les personnes dont la rente a été liquidée avant l'entrée en vigueur du texte, il existe une réserve d'éligibilité en application de l'article 85 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012, modifiant l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale et de l'article 3 du décret n° 2013-276 du 2 avril 2013 permettant le remplacement de la majoration de rente pour tierce personne par une prestation complémentaire pour recours à tierce personne. Toutefois, la Cour d'appel de Versailles a dit dans la partie de son arrêt présentant un caractère définitif que l'assuré n'y avait pas droit.

Le fait que la caisse ait versé ces sommes au titre de la prestation complémentaire pour recours à tierce personne à compter du 15 mai 2016, alors qu'il n'est justifié d'aucune demande de l'assuré, d'aucune décision explicite d'acceptation ni refus de la caisse, ni d'une évaluation faite en fonction de dispositions réglementaires d'application et qu'il est bien précisé dans l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles que l'assuré n'avait pas droit à la majoration de rente, ce qui excluait toute conversion, correspond à l'exécution de celui-ci qui a arrêté la somme due précédemment depuis le 1er mars 2013 au 15 mai 2016, la concordance des dates le confirmant.

Il en résulte que, la caisse qui avait payé les sommes dues exclusivement à raison de l'exécution de l'arrêt la cour d'appel de Versailles justifie de l'existence d'un indu, dont le montant est certain, liquide et exigible pour les sommes payées antérieurement au 15 mai 2016 puis celles versées depuis cette date jusqu'au 28 février 2018.

Il s'en déduit en outre que M. [O] [R] ne justifie d'aucune créance à l'encontre de la caisse et ne saurait exciper d'une compensation. La caisse n'a donc commis aucune résistance fautive. Les demandes de M. [O] [R] seront donc rejetées.

Le jugement déféré sera donc infirmé et M. [O] [R] sera condamné à payer à la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine Saint Denis la somme de 99 853,43 euros.

M. [O] [R], qui succombe, sera condamné aux dépens, la demande de la caisse au titre des frais irrépétibles étant rejetée.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

DÉCLARE recevable l'appel de la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine Saint Denis ;

INFIRME le jugement rendu le 7 octobre 2019 par le tribunal de grande instance de Bobigny ;

STATUANT À NOUVEAU :

DÉCLARE irrecevable le recours de M. [O] [R] concernant l'indu de 64 134,07 euros notifié le 22 mars 2018 ;

CONDAMNE M. [O] [R] à payer à la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine Saint Denis la somme de 99 853,43 euros ;

DÉBOUTE M. [O] [R] de ses demandes ;

DÉBOUTE la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine Saint Denis de sa demande formée en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [O] [R] aux dépens.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 19/11185
Date de la décision : 14/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-14;19.11185 ?
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