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12/06/2024 | FRANCE | N°21/10167

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 5, 12 juin 2024, 21/10167


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 5



ARRET DU 12 JUIN 2024



(n° /2024 , 18 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/10167 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDYRQ



Décision déférée à la cour : jugement du 5 mars 2021 - tribunal judiciaire de Créteil





APPELANTE



SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DU [Adresse 2], représenté par son syndic, la SA CABINET MASSON, domicilié en cett

e qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 6]



Représentée par Me Anne-marie MAUPAS OUDINOT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0653

Ayant pour avocat plaidant à l'audience Me F...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5

ARRET DU 12 JUIN 2024

(n° /2024 , 18 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/10167 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDYRQ

Décision déférée à la cour : jugement du 5 mars 2021 - tribunal judiciaire de Créteil

APPELANTE

SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES DU [Adresse 2], représenté par son syndic, la SA CABINET MASSON, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Anne-marie MAUPAS OUDINOT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0653

Ayant pour avocat plaidant à l'audience Me François-Marie IORIO, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

Maître [H] [I] en sa qualité de mandataire ad'hoc de la SCI ROSES [Localité 13], domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 10]

[Localité 9]

Représenté par Me Nathalie PEYRON de la SELARL DELSOL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0513

Monsieur [P] [B]

[Adresse 1]

[Localité 11]

Représenté par Me Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2090

Compagnie d'assurance SMABTP, en sa qualité d'assureur des sociétés ECIDE et MATS, prise en la personne de son président du conseil d'administration, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 8]

[Localité 7]

Représentée par Me Audrey SCHWAB de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Compagnie d'assurance XL INSURANCE COMPANY SE agissant par l'intermédiaire de sa succursale française, venant aux droits de la société AXA CORPORATE SOLUTIONS ASSURANCE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentée à l'audience par Me Marc HALFON, avocat au barreau de PARIS, toque : D1211

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 février 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Ludovic JARIEL, président de chambre

Mme Sylvie DELACOURT, présidente faisant fonction de conseillère Mme Viviane SZLAMOVICZ, conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme Sylvie DELACOURT dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Mme Amel MANSOURI

ARRET :

- contradictoire.

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, délibéré initialement prévu le 15 mai 2024 et prorogé au 12 juin 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Ludovic JARIEL, président de chambre, et par Manon CARON, greffière, présente lors de la mise à disposition.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

En 2002, la société civile immobilière (SCI) Roses [Localité 13] a fait édifier, en qualité de maître d'ouvrage, sur un terrain lui appartenant au [Adresse 2]), un ensemble immobilier dénommé résidence [12], composé de deux bâtiments à usage d'habitation, de trois étages sur un sous-sol de caves et parkings, aux fins de vente en l'état futur d'achèvement.

Une police d'assurance dommages-ouvrage (DO) et de responsabilité de constructeur non réalisateur (CNR) été souscrite auprès de la société Axa corporate solutions aux droits de laquelle est venue la société XL insurance company se (la société XL insurance).

Ont notamment participé à la construction :

- M. [B], architecte, chargé d'une mission complète de maîtrise d''uvre,

- la société Ecide, titulaire du lot gros 'uvre, liquidée, assurée auprès de la SMABTP,

- la société Etandex, titulaire du lot cuvelage,

- la société Mats, titulaire des lots couverture, charpente, plomberie, VMC, liquidée, assurée auprès de la SMABTP.

Le 19 octobre 2004, la réception des travaux a été prononcée.

Le 13 mars 2015, après plusieurs déclarations de sinistre du syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2] (le syndicat) qui se plaignait de désordres, l'assureur dommages-ouvrage a dénié sa garantie.

Le 30 octobre 2015, sur saisine du syndicat, le juge des référés a désigné M. [U] en qualité d'expert judiciaire au contradictoire des sociétés Roses [Localité 13], Axa corporate solutions, SMABTP en qualité d'assureur des sociétés Ecide et Mats et de M. [B].

Le 5 juillet 2016, l'ordonnance a été rendue commune à Me [I] en qualité de mandataire ad hoc de la société Roses [Localité 13].

Le 18 juin 2019, l'expert a déposé son rapport.

Les 29 et 31 juillet et 5 août 2019, le syndicat représenté par son syndic le cabinet Masson, a fait assigner devant le tribunal judiciaire de Créteil, Me [I], ès qualités, la société Axa corporate solutions, M. [B], la SMABTP, ès qualités.

La société XL insurance est intervenue volontairement à l'instance.

Par jugement du 5 mars 2021, le tribunal judiciaire de Créteil a statué en ces termes :

Donne acte à la société XL insurance qu'elle intervient volontairement comme venant aux droits de la société Axa corporate solutions.

Condamne in solidum la société XL insurance venant aux droits de la société Axa corporate solutions, en qualité d'assureur dommages-ouvrage et d'assureur constructeur non réalisateur garantissant la responsabilité décennale de la société Roses [Localité 13] représentée par son mandataire ad hoc, Me [I], M. [B] et la SMABTP en qualité d'assureur de la société Ecide, à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2]) représenté par son syndic le cabinet Masson, les sommes de :

- quatorze mille neuf cent quarante-neuf euros TTC (14 949 euros TTC) au titre de la reprise du désordre en sous-sol,

- deux mille deux cent soixante-huit euros TTC (2 268 euros TTC) en remboursement des honoraires de conseil versés à M. [E],

Déboute le syndicat des copropriétaires des demandes au titre des bandeaux, des balcons, des lucarnes, de la couverture, des peintures du sous-sol et de la rampe d'accès au parking et du devoir de conseil de M. [B] ;

Dit que la responsabilité du désordre en sous-sol incombe à :

- la société Ecide dans la proportion de 90 %

- M. [B] dans la proportion de 10 %

Condamne in solidum M. [B] et la SMABTP en qualité d'assureur de la société Ecide à garantir la société XL insurance venant aux droits de la société Axa corporate solutions des condamnations prononcées à son encontre en qualité d'assureur dommages-ouvrage et constructeur non réalisateur ;

Fait droit, sur la base et dans les limites de ce partage de responsabilités, aux appels en garantie réciproques de M. [B] et la SMABTP en qualité d'assureur de la société Ecide, pour la condamnation prononcée à leur encontre.

Rejette les demandes de condamnations à garantir formulées à l'encontre de la société Roses [Localité 13] et de son assureur.

Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement.

Condamne in solidum la société XL insurance venant aux droits de la société Axa corporate solutions, en qualité d'assureur dommages-ouvrage et d'assureur de responsabilité décennale de la société Roses [Localité 13] représentée par son mandataire ad hoc, Me [I], M. [B] et la SMABTP en qualité d'assureur de la société Ecide à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2]) représenté par son syndic le cabinet Masson la somme de cinq mille euros (5 000 euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne in solidum la société XL insurance venant aux droits de la société Axa corporate solutions, en qualité d'assureur dommages-ouvrage et d'assureur de responsabilité décennale de la société Roses [Localité 13] représenté par son mandataire ad hoc, Me [I], M. [B] et la SMABTP en qualité d'assureur de la société Ecide aux dépens comprenant les frais d'expertise judiciaire.

Dit que la charge finale de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens sera supportée dans les proportions suivantes :

- la SMABTP dans la proportion de 90 %,

- M. [B] dans la proportion de 10 %.

Condamne in solidum M. [B] et la SMABTP à garantir la société XL insurance venant aux droits de la société Axa corporate solutions des condamnations prononcées au titre des frais irrépétibles et des dépens.

Fait droit, sur la base et dans les limites de ce partage, aux appels en garantie réciproques de M. [B] et la SMABTP au titre des condamnations prononcées au titre des frais irrépétibles et des dépens.

Accorde aux avocats qui en ont fait la demande, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Rejette toutes les autres demandes, plus amples ou contraires, des parties.

Par déclaration en date du 31 mai 2021, le syndicat a interjeté appel du jugement, intimant devant la cour :

- la SMABTP,

- M. [I], ès qualités,

- M. [B],

- la société XL insurance.

EXPOSE DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 22 décembre 2022, le syndicat demande à la cour de :

Recevoir le syndicat en son appel et l'y déclarer bien fondé,

Sur le fondement de l'article 954 du code de procédure civile ;

Débouter M. [B] de sa demande tendant à voir rejeter les demandes du syndicat au motif que la cour n'aurait pas été saisie d'une demande expresse d'infirmation des chefs du jugement correspondant ;

A titre principal, sur le fondement des dispositions des articles 1792 et suivants du code civil ;

A titre subsidiaire et en tout état de cause, sur le fondement des dispositions de l'ancien article 1147 du code civil, nouvellement 1231-1, concernant la théorie des dommages intermédiaires ;

Sur le fondement des dispositions de l'article L 124-3 du code des assurances concernant l'action directe du syndicat envers la société XL insurance prise en sa qualité d'assureur CNR de la société Roses [Localité 13], et de la SMABTP prise en sa qualité d'assureur des sociétés Ecide et Mats ;

Dire et juger qu'il échet de reconnaître la responsabilité de la société Roses [Localité 13], de M. [B] et des sociétés Ecide et Mats sur le fondement des dispositions des articles 1792 et suivants du code civil,

A titre subsidiaire, sur la théorie des dommages intermédiaires,

Constater que la société Roses [Localité 13], M. [B] ainsi que les sociétés Ecide et Mats, ont commis des fautes clairement explicitées par l'expert judiciaire, fautes qui ont directement provoqué les désordres subis par le syndicat.

La Cour, dans sa sagesse, et sur les fondements précités :

Infirmera le jugement entrepris en ce qu'il a débouté le syndicat de ses demandes au titre des bandeaux, des balcons, des lucarnes, de la couverture, des peintures du sous-sol et de la rampe d'accès au parking ainsi que du devoir de conseil de M. [B]

Et, statuant à nouveau :

Condamnera in solidum la société XL insurance compagny tant en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage que d'assureur CNR de la société Roses [Localité 13], M. [B], architecte, ainsi que la SMABTP ès qualités d'assureur de la société Ecide, à verser au syndicat les sommes suivantes :

- 170 890,45 euros au titre de la réparation des désordres concernant les bandeaux de façade et les balcons,

- 50 759,23 euros au titre de la mutualisation de la mise en place des échafaudages.

En cas de non reconnaissance des désordres affectant les lucarnes et la couverture, la cour portera le montant des condamnations pour la mise en place des échafaudages à la somme de 101 518,46 euros.

Condamnera in solidum M. [B], architecte, la SMABTP ès qualités d'assureur des deux sociétés Ecide et Mats, ainsi que la société XL insurance, tant en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage qu'en sa qualité d'assureur en responsabilité décennale de la société Roses [Localité 13], à verser au syndicat les sommes suivantes :

- 143 557,85 euros au titre de la réparation des désordres affectant les lucarnes et la couverture,

- 50 759,22 euros au titre de la participation pour les frais d'échafaudage.

Condamnera in solidum M. [B], architecte, la SMABTP, es qualités d'assureur de la société Ecide, ainsi que la société XL insurance, tant en sa qualité d'assureur dommages ouvrage qu'en sa qualité d'assureur CNR de la société Roses [Localité 13], à verser au syndicat la somme de :

- 56 716,17 euros correspondant à la reprise du sol des parkings et des caves.

Condamnera in solidum la société XL insurance, tant en sa qualité d'assurance dommages ouvrage qu'en sa qualité d'assureur CNR de la société Roses [Localité 13], M. [B], architecte, et la SMABTP ès qualités d'assureur de la société Ecide, à verser au syndicat la somme de 297 912,05 euros TTC correspondant à la remise en état conforme aux normes applicables de la rampe d'accès au parking.

Con'rmera la condamnation in solidum de M. [B], architecte, de la SMABTP, es qualités d'assureur de la société Ecide, ainsi que la société XL insurance, tant en sa qualité d'assureur dommages ouvrage qu'en sa qualité d'assureur CNR de la société Roses [Localité 13], à verser au syndicat la somme de :

- 14 949 euros correspondant à la reprise des désordres affectant le sous-sol.

Il conviendra également de condamner solidairement les parties succombantes à verser au syndicat les sommes suivantes :

- 2 268 euros TTC au titre des honoraires de conseil versés à Monsieur [E] ;

- 21 171 euros correspondant aux frais d'expertise avancés par ses soins,

- 36 675 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 26 septembre 2022, la société XL insurance demande à la cour de :

Confirmer le jugement en toutes ses dispositions, sinon au titre des condamnations accessoires,

Confirmer le jugement en ce qu'il a écarté toute responsabilité de la société [Localité 13] Bandeaux et balcons :

Confirmer le jugement en ce qu'il a retenu que les désordres affectant les bandeaux et les balcons ne sont pas de nature décennale.

En conséquence, rejeter la demande.

Subsidiairement

Condamner in solidum, M. [B] et la SMABTP, assureur de la société Egide à garantir la société XL insurance venant aux droits de la société Axa corporate solutions, tant en sa qualité d'assureur constructeur non réalisateur, qu'en qualité d'assureur dommages-ouvrage, de toute condamnation pouvant être prononcée à son encontre au titre des bandeaux et balcons.

Lucarnes et ardoises :

Confirmer le jugement en ce qu'il a retenu que les désordres affectant les lucarnes et les ardoises ne sont pas de nature décennale.

En conséquence, rejeter la demande.

Subsidiairement

Condamner in solidum, M. [B] et la SMABTP, assureur de la société Egide et de la société Mats à garantir la société XL insurance venant aux droits de la société Axa corporate solutions, tant en sa qualité d'assureur constructeur non réalisateur, qu'en qualité d'assureur dommages-ouvrage, de toute condamnation pouvant être prononcée à son encontre au titre des bandeaux et balcons.

Peintures des parkings :

Rejeter la demande formulée en appel au titre de la reprise des peintures du parking, et confirmer le jugement.

Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné in solidum, M. [B] et la SMABTP assureur de la société Egide à garantir la société XL insurance venant aux droits de la société Axa corporate solutions, tant en sa qualité d'assureur constructeur non réalisateur, qu'en qualité d'assureur dommages ouvrage, de la toute condamnation prononcée à son encontre au titre des désordres affectant les parkings.

Le cas échéant, condamner in solidum, M. [B] et la SMABTP assureur de la société Egide à garantir la société XL insurance venant aux droits de la société Axa corporate solutions, tant en sa qualité d'assureur constructeur non réalisateur, qu'en qualité d'assureur dommages ouvrage, de la toute condamnation complémentaire qui pourrait être prononcée à son encontre au titre des désordres affectant les parkings.

Rampe d'accès au sous-sol :

Confirmer le jugement en ce qu'il a retenu que les désordres affectant la rampe d'accès au sous-sol ne sont pas de nature décennale.

En conséquence, rejeter la demande.

Subsidiairement condamner in solidum, M. [B] et la SMABTP assureur de la société Egide à garantir la société XL insurance venant aux droits de la société Axa corporate solutions, tant en sa qualité d'assureur constructeur non réalisateur, qu'en qualité d'assureur dommages ouvrage, de la toute condamnation pouvant être prononcée à son encontre au titre de l'accès au sous-sol.

Confirmer le jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité pleine et entière des constructeurs et de leurs assureurs.

Honoraires du conseil technique, de l'expert et article 700 :

Infirmer le jugement.

Rejeter la demande au titre des honoraires du conseil technique, de l'expert et de l'article 700.

Subsidiairement,

Dire qu'une partie d'au moins 70 % restera à la charge du demandeur.

Condamner in solidum, M. [B] et la SMABTP assureur de la société Egide à garantir la société XL insurance venant aux droits de la société Axa corporate solutions, tant en sa qualité d'assureur constructeur non réalisateur, qu'en qualité d'assureur dommages ouvrage, de la toute condamnation pouvant être prononcée à son encontre.

Condamner in solidum, M. [B] et la SMABTP assureur de la société Egide à garantir la société XL insurance venant aux droits de la société Axa corporate solutions, tant en sa qualité d'assureur constructeur non réalisateur, qu'en qualité d'assureur dommages ouvrage, à 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner tout succombant aux dépens, dire qu'ils pourront être recouvrés par Me Halfon conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 9 mars 2022, M. [B] demande à la cour de :

Rejeter les demandes d'infirmation du jugement formées par le syndicat au titre des chefs du jugement pour lesquels la cour d'appel n'a pas été expressément saisie d'une demande d'infirmation par le dispositif des conclusions d'appel du syndicat ;

En conséquence,

Rejeter les demandes au titre des chefs des chefs de jugement suivants pour lesquels le tribunal a prononcé le rejet des demandes du syndicat :

- bandeaux et balcons

- lucarnes

- couverture en ardoises

- rampe d'accès au parking

- peintures de sol en parking

Confirmer le jugement sur tous les points pour lesquels il a débouté le syndicat.

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les demandes du syndicat.

Infirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. [B] à payer 14 949 euros TTC au titre des travaux liés aux infiltrations en sous-sol, 2 268 euros TTC au titre des honoraires de conseil technique versés à M. [E], 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens y compris les frais d'expertise.

Statuant à nouveau, mettre hors de cause M. [B].

Rejeter toutes les demandes formées contre M. [B].

Subsidiairement, condamner la SMABTP en sa qualité d'assureur de la société Ecide, et de la société Mats, sur le fondement de l'article 1382 du code civil devenu 1240 nouveau du code civil, L 124-3 du code des assurances et 334 du code de procédure civile à garantir M. [B] de toutes condamnations qui pourraient être prononcées contre lui.

La condamner in solidum avec la société Roses [Localité 13] représentée par Me [I] son mandataire ad hoc, in solidum avec son assureur la société XL insurance venant aux droits de la société Axa corporate solutions assurance à garantir M. [B] de toutes condamnations qui pourraient être prononcées contre lui au titre des bandeaux et balcons sur le fondement de l'article 1147 du code civil devenu 1231-1 et de l'article 334 code de procédure civile.

Condamner le syndicat et tout succombant à payer à M. [B] une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile.

Subsidiairement,

Laisser une part des frais d'expertise qui ne saurait être inférieure à 80 % à la charge du syndicat.

Condamner le syndicat et tout succombant aux entiers dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 22 février 2022, la SMABTP, ès qualités, demande à la cour de :

A titre principal :

Confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Créteil en ce qu'il a rejeté les demandes formulées par le syndicat au titre des désordres affectant les bandeaux, les balcons, les lucarnes et la couverture ;

Infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Créteil en ce qu'il a jugé que le désordre relatif à la présence d'eau au sous-sol serait de nature décennale ;

Infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SMABTP au titre de la reprise du désordre en sous-sol, du remboursement des honoraires de conseil versés à M. [E], de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens, et, plus généralement, de toute condamnation prononcée à l'encontre de la concluante, sur quelque fondement que ce soit, et au profit de quelque partie à la procédure,

En conséquence,

Juger que l'activité " couverture " n'a pas été déclarée par la société Mats ;

Débouter le syndicat, ou toute autre partie, de l'intégralité de ses demandes à l'encontre de la SMABTP, ès qualités d'assureur de la société Mats ;

Juger que les désordres allégués ne remettent en cause ni la solidité, ni la destination de l'ouvrage ;

Débouter le syndicat, ou toute autre partie, de l'intégralité de ses demandes formulées à l'encontre de la SMABTP, ès qualités d'assureur des sociétés Ecide et Mats ;

Ordonner la mise hors de cause de la SMABTP en sa qualité d'assureur des sociétés Ecide et Mats.

A titre subsidiaire :

Si par extraordinaire la cour d'appel devait considérer que les sociétés Ecide et Mats engageaient leur responsabilité :

Infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Créteil en ce qu'il a rejeté les demandes de condamnations à garantir formulées à l'encontre de la société Roses [Localité 13] et son assureur ;

Infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Créteil en ce qu'il a retenu une part de responsabilité à l'encontre de la société Ecide à hauteur de 90 % concernant le désordre du sous-sol ;

Entériner les termes du rapport d'expertise de M. [U] au titre des désordres constatés, des parts de responsabilité et des montants retenus ;

Juger que l'activité " couverture " n'a pas été déclarée par la société Mats ;

Débouter le syndicat, ou toute autre partie, de l'intégralité de ses demandes à l'encontre de la SMABTP, ès qualités d'assureur de la société Mats ;

Condamner in solidum la société Roses [Localité 13], prise en la personne de son mandataire ad hoc, Me [I], son assureur, la société XL insurance, et M. [B], à garantir la SMABTP, en qualité d'assureur des sociétés Ecide et Mats, intégralement ou dans les proportions qui seront fixées dans l'arrêt d'appel à intervenir sur la base du rapport de M. [U] ;

Rejeter toute demande de garantie qui serait formulée à l'endroit de la SMABTP.

En tout état de cause :

Juger que la garantie de la SMABTP interviendra, le cas échéant, pour la seule quote part de responsabilité qui serait retenue à l'encontre de ses assurés, sans solidarité et sous déduction de ses franchises et plafonds opposables erga omnes ;

Rejeter la demande du syndicat au titre de la prise en charge de ses frais d'assistance-conseil ;

Condamner le syndicat ou tout succombant à verser à la SMABTP la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens dont distraction, pour ceux la concernant au profit de Me Hardouin et ce, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 11 février 2022, Me [I], ès qualités, demande à la cour :

A titre principal, il est demandé la confirmation du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Créteil le 5 mars 2021

Constater que la SMABTP ne démontre pas une quelconque faute délictuelle de la société Roses [Localité 13] à son égard, en lien de causalité avec son préjudice pour justifier l'appel en garantie formé à l'encontre de Me [I], ès qualité de mandataire ad hoc de la société Roses [Localité 13] ;

Constater que M. [B] ne démontre pas une quelconque faute délictuelle de la société Roses [Localité 13] à son égard, en lien de causalité avec son préjudice pour justifier l'appel en garantie formé à l'encontre de Me [I], ès qualité de mandataire ad hoc de la société Roses [Localité 13] ;

Constater que l'assignation de Me [I], ès qualité de mandataire ad hoc de la société Roses [Localité 13] est intervenu le 21 avril 2016, soit plus de 18 mois après la livraison de l'immeuble au syndicat ;

Constater que le syndicat ne présente aucune demande principale à l'encontre de Me [I], ès qualité de mandataire ad hoc de la société Roses [Localité 13] ;

En conséquence,

Débouter la SMABTP, le syndicat du [Adresse 2], ainsi que tout autre partie, des demandes présentées à l'encontre de Me [I], ès qualité de mandataire ad hoc de la société Roses [Localité 13],

Dire prescrite toute action du syndicat fondée sur les articles 1792 et suivants du code civil ;

A titre subsidiaire, et dans l'hypothèse où la cour réformerait le jugement entrepris

Constater que les désordres affectant les bandeaux et les balcons relèvent de défaut d'exécution qui ne peuvent être retenus à l'encontre de la société Roses [Localité 13], maître d'ouvrage ;

Constater que la société Ecide a manqué à son obligation de résultat de réaliser un ouvrage conforme aux prescriptions contractuelles ;

Constater que M. [B] a manqué à son obligation de surveillance des ouvrages réalisés en qualité de maître d''uvre en charge du suivi d'exécution ;

En conséquence,

Entériner le rapport d'expertise de M. [U] sur les désordres relatifs aux lucarnes et couvertures, au sous-sol et à la rampe d'accès au parking ;

Exclure une quelconque responsabilité de la société Roses [Localité 13] au titre des désordres affectant les bandeaux et les balcons ;

Retenir pour le désordre affectant les bandeaux et les balcons le partage de responsabilité suivant :

- 70 % à la charge de la société Ecide ;

- 30% à la charge de M. [B] ;

Débouter la SMABTP, ainsi que toute autre partie, de toute demande présentée à l'encontre de la société Roses [Localité 13] au titre des désordres affectant les bandeaux et les balcons ;

En tout état de cause

Débouter M. [B] de son appel en garantie formulée à l'encontre de la société Roses [Localité 13], et de tout autre partie ;

Condamner le syndicat de l'immeuble, ou toute autre partie succombante, à verser à Me [I], ès qualité de mandataire ad hoc de la société Roses [Localité 13] la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction directe au profit de Me Peyron, membre de la société Delsol avocats, avocat au barreau de Paris conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 6 février et l'affaire a été appelée à l'audience du 20 février, à l'issue de laquelle elle a été mise en délibéré.

MOTIVATION

A titre liminaire

Les demandes de " constater ", " dire " et " juger " ne constituent pas des prétentions mais des moyens et ne saisissent la cour d'aucune demande (2e Civ., 9 janvier 2020, pourvoi n° 18-18.778).

Conformément aux termes de l'article 246 du code de procédure civile, le juge n'est pas lié par les constatations ou les conclusions du technicien.

Sur la saisine de la cour

Moyens des parties

M. [B], maître d''uvre, prétend que le syndicat a demandé l'infirmation du jugement sans viser les chefs qu'il critique expressément.

Il s'appuie sur les dispositions 562, 901 et 954 du code de procédure civile et cite la jurisprudence de la Cour de cassation (2e Civ., 17 septembre 2020, pourvoi n° 18-23.626 ; 2e Civ., 1er Juillet 2021, pourvoi n° 20-10.694, 2e Civ., 30 septembre 2021, pourvoi n° 20-16.746) pour demander à la cour de constater qu'elle n'a pas été saisie dans le délai de trois mois par le dispositif des conclusions de l'appelant des chefs de jugement suivants : bandeaux et balcons, lucarnes, couverture en ardoises, rampe d'accès au parking, peinture de sols en parking.

Le syndicat répond sur ce point en indiquant qu'il a sollicité l'infirmation du jugement dans sa déclaration d'appel et dans ses conclusions d'appelant du 31 août 2021 et que l'appelant qui ne se borne pas dans son dispositif à demander une simple réformation mais formule plusieurs prétentions n'est pas tenu de reprendre dans celui-ci les chefs du jugement dont il demande l'infirmation (2ème Cv., 3 mars 2022, pourvoi n° 20-20.017).

Réponse de la cour

Selon les dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, les conclusions d'appel doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée et elles comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions.

La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Il en résulte, d'une part, que l'appelant n'est pas tenu de reprendre, dans le dispositif de ses conclusions, les chefs de dispositif du jugement dont il demande l'infirmation (2e Civ., 3 mars 2022, pourvoi n° 20-20.017, publié au Bulletin), d'autre part, que lorsque l'appelant se borne, dans le dispositif de ses conclusions, à conclure à l'infirmation d'un jugement, sans formuler de prétention sur les demandes tranchées dans ce jugement, la cour d'appel, qui n'est pas saisie de prétention relative à ces demandes, ne peut que confirmer le jugement (2e Civ., 5 décembre 2013, pourvoi n° 12-23.611, Bull. 2013, II, n° 230 ; 2e Civ., 30 septembre 2021, pourvoi n° 19-12.244, publié au Bulletin).

Dans ses premières conclusions, signifiées le 31 août 2021, à l'appui de sa demande d'infirmation, le syndicat a formulé des prétentions concernant les désordres des bandeaux en façade et des balcons, des lucarnes, de la couverture, de la reprise du sol des parkings et des caves ainsi que de la rampe de parking.

S'agissant de la reprise du sol des parkings, il faut entendre la demande de remise en peinture du sous-sol, sollicitée à hauteur de 56 1716,17 euros devant les premiers juges par le syndicat et à laquelle il n'a pas été fait droit.

Ces demandes ont été reprises dans les dernières conclusions.

En conséquence, la cour est bien saisie des demandes de l'appelant principal relatives aux désordres des bandeaux en façade et des balcons, des lucarnes, de la couverture et de la remise en peinture du sous-sol.

Elle est saisie des désordres en sous-sol au titre de l'appel incident de l'architecte et de la SMABTP.

Sur la nature des désordres et les responsabilités

Moyens des parties

Le syndicat soutient que les désordres, à l'exception de ceux concernant la couverture, sont de nature décennale et que même qualifiés d'esthétiques, ils peuvent dans certains cas, révéler un vice plus grave de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou porter atteinte à sa destination.

Il fait valoir encore que la garantie décennale s'applique en cas d'évolution inéluctable du désordre et de désordre futur.

Devant la cour, le syndicat invoque la responsabilité contractuelle des constructeurs à titre principal, concernant les désordres de la couverture et à titre subsidiaire, pour tous les autres désordres.

M. [B] demande sa mise hors de cause concernant les désordres en sous-sols pour lesquels il a été condamné par le premier juge qui a considéré que ce désordre était de nature décennale et que l'étanchéité du sous-sol rentrait dans sa mission complète de maîtrise d''uvre de conception et de réalisation.

Il fait valoir qu'aucun désordre au niveau des lucarnes ne s'est révélé pendant la période de la garantie décennale.

Il retient que la couverture assure sa fonction d'étanchéité et que le défaut du matériau ne peut pas lui être imputé.

Il s'appuie sur les conclusions de l'expert judiciaire pour faire valoir qu'il a conçu un ouvrage non défectueux au niveau des bandeaux et des balcons.

Il sollicite le rejet de la demande concernant la rampe de parking et de la remise en peinture des sous-sols en l'absence d'impropriété à destination.

Il conteste sa responsabilité y compris au titre de son devoir de conseil.

La SMABTP conteste le caractère décennal des désordres et elle soutient que le syndicat n'apporte pas la preuve des fautes des sociétés Ecide et Mats, lesquelles n'ont aucune responsabilité dans les désordres constatés.

Elle précise qu'elle n'est pas l'assureur en responsabilité civile professionnelle de ces sociétés et que sa garantie ne peut pas être recherchée au titre des désordres intermédiaires si ceux-ci sont retenus.

La société XL insurance conteste le caractère décennal des désordres et elle fait valoir que le maître d'ouvrage a requis la compétence de professionnels pour la réalisation de l'ouvrage et n'a aucune responsabilité dans les désordres constatés.

Réponse de la cour

Sur les demandes du syndicat au titre de la garantie décennale

La garantie décennale crée un régime de responsabilité de plein droit qui profite aux bénéficiaires de cette garantie dans les conditions fixées notamment par les articles 17921 et 1792-1 du code civil.

Cette garantie est encourue lorsque la solidité de l'ouvrage est compromise ou qu'il est rendu impropre à sa destination normale.

Il doit être en outre rappelé que la mise en 'uvre des dispositions de l'article 1792 du code civil suppose que soit établie une certitude dans la survenance des désordres portant atteinte à la solidité de l'ouvrage ou le rendant impropre à sa destination de sorte qu'un risque hypothétique et futur ne permet pas de mobiliser une telle garantie. En revanche, si l'aggravation apparaît inéluctable, il suffit que les désordres concernés soient apparus dans le délai d'épreuve de dix ans pour qu'il puisse être fait application de cette garantie légale.

La réception sans réserve couvre les désordres apparents (3ème Civ.,8 décembre 2016, pourvoi n° 15-17.022).

Dès le mois de mars 2005, les premiers acquéreurs se sont manifestés auprès du syndic pour déplorer le sous-dimensionnement de la rampe d'accès au parking qui rend difficile un braquage central des véhicules et a ainsi provoqué de nombreux contacts des voitures avec les parois.

Cette configuration, visible pour un profane, était donc apparente à la réception pour la société Roses Villecremes.

Par suite, le désordre tenant au sous-dimensionnement de la rampe d'accès a été purgé par la réception sans réserve, de sorte qu'il ne peut être retenu comme un dommage de nature décennal ni intermédiaire.

Concernant les bandeaux, des balcons, des lucarnes, l'expert n'a relevé aucune atteinte actuelle à la solidité ou à la destination de l'ouvrage en ce que ces désordres ne sont pas à l'origine d'infiltrations.

Le risque évoqué par l'expert a été qualifié d'éventuel et pouvant porter sur des petits linéaires, ce risque purement hypothétique ne s'est pas réalisé.

S'agissant de la couverture, le désordre qui provient de la pyrite affectant environ 30 % des ardoises ne porte pas atteinte à la pérennité de la toiture et ne provoque pas d'infiltrations.

En ce qui concerne le désordre en sous-sol, l'expert relève qu'il est admis que les sous-sols à usage de parking puissent être inondés et que seules les caves étaient impropres à leur destination durant les périodes d'inondation.

Ce désordre affecte néanmoins l'étanchéité du sous-sol et particulièrement des caves destinées à l'entreposage au sec de biens meubles les rendant ainsi impropres à leur destination en cas d'intempéries.

C'est à juste titre que le tribunal a retenu que ce désordre était de nature décennale.

Le désordre affectant les peintures en sous-sol est la conséquence des infiltrations répétées dans le sous-sol provenant des grilles de ventilation basse car l'expert judiciaire a précisé que même si les peintures sont anciennes, elles sont dégradées par la présence d'eau régulière.

Il ne s'agit pas d'un désordre décennal et la reprise des peintures doit être intégrée dans l'indemnisation du syndicat au titre des travaux réparatoires concernant le sous-sol.

Sur la mobilisation des assurances DO et CNR

Aux termes, du premier alinéa, de l'article L. 242-1 du code des assurances, toute personne physique ou morale qui, agissant en qualité de propriétaire de l'ouvrage, de vendeur ou de mandataire du propriétaire de l'ouvrage, fait réaliser des travaux de construction, doit souscrire avant l'ouverture du chantier, pour son compte ou pour celui des propriétaires successifs, une assurance garantissant, en dehors de toute recherche des responsabilités, le paiement de la totalité des travaux de réparation des dommages de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens de l'article 1792-1, les fabricants et importateurs ou le contrôleur technique sur le fondement de l'article 1792 du code civil.

Aux termes de l'article L. 241-2 du même code, celui qui fait réaliser pour le compte d'autrui des travaux de construction doit être couvert par une assurance de responsabilité garantissant les dommages visés aux articles 1792 et 1792-2 du code civil et résultant de son fait. Il en est de même lorsque les travaux de construction sont réalisés en vue de la vente.

En l'espèce, le désordre invoqué par le syndicat concernant le sous-sol est de nature décennale, par suite, les assurances DO et CNR sont mobilisables.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la responsabilité contractuelle des constructeurs

Aux termes de l'article 1147 du code civil, applicable en la cause, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait eu aucune mauvaise foi de sa part.

Les désordres, non apparents à la réception, qui ne compromettent pas la solidité de l'ouvrage et ne le rendent pas impropre à sa destination ne peuvent être réparés que sur le fondement de la responsabilité contractuelle pour faute prouvée des constructeurs (3ème Civ., 9 mars 1988, pourvoi n° 87-10.945 Bull n° 52 ; 3ème Civ., 4 novembre 2010, pourvoi n° 09-70.235 Bull n° 198).

- Sur la responsabilité du maître d''uvre

L'architecte est débiteur d'une obligation de conseil à l'égard du maître d'ouvrage et il est également tenu à son égard d'un devoir de conseil et d'assistance (3ème Civ., 30 novembre 2011, pourvoi n° 10-21.273).

Il incombe à l'architecte, débiteur de l'obligation, de prouver qu'il a respecté cette dernière (3ème Civ., 12 janvier 2011, pourvoi n° 09-70.262).

S'appuyant sur le rapport de l'expert judiciaire, le syndicat soutient que M. [B] s'est montré défaillant, tant au regard de son obligation de conseil en choisissant la société Mats alors qu'elle n'était pas assurée, qu'au regard de son contrôle des travaux.

Même si le contrôle des travaux n'impose pas à l'architecte d'être présent sur le chantier de manière permanente, deux des malfaçons relevées par l'expert concernent le défaut de mise 'uvre de ses préconisations.

M. [B] avait effectivement prévu une couvertine pour les bandeaux et les balcons qui n'a pas été mise en place par l'entreprise, sans qu'il justifie avoir émis des observations ou des réserves sur cette mise en 'uvre.

L'architecte n'a pas plus émis de réserve sur l'exécution des balcons par la société Ecide par coulage successif de la dalle et de l'allège, au lieu du coulage des balcons en place avec la dalle ainsi qu'il l'avait préconisé.

Concernant ces réalisations par la société Ecide, l'architecte était le plus à même d'apprécier le respect de ses projets dans le cadre du contrôle des travaux.

Il n'apporte aucun élément pour l'exonérer de son obligation à ce titre bien qu'il revendique la décision économique du maître d'ouvrage.

M. [B] n'a pas non plus émis de réserves ou d'observation sur l'exécution des lucarnes par la société Mats, pourtant jugée approximative et négligée par l'expert judiciaire.

Le syndicat échoue à démontrer la faute du maître d''uvre et de la société Mats dans la détection de la pyrite à la réception des ardoises et au cours de leur mise en 'uvre, d'autant plus que, ainsi que le retient l'expert, cette présence est aléatoire et indétectable avant la mise en situation de la couverture.

Enfin, en choisissant la société Mats pour effectuer la mise en 'uvre de la couverture alors que ladite société n'aurait pas été assurée au titre de ces prestations, M. [B] a engagé sa responsabilité à l'égard du maître d'ouvrage dès lors que celui-ci justifie d'un préjudice et d'un lien de causalité entre son préjudice et le choix fautif de l'architecte (3ème Civ., 11 avril 2012, pourvoi n° 10-28.325).

- La responsabilité de la société Ecide

L'expertise judiciaire, sur laquelle s'appuie le syndicat, a suffisamment identifié les désordres concernant les bandeaux et les balcons résultant d'un défaut de mise en 'uvre des préconisations de l'architecte, sans réserve ni observation et sans qu'il soit possible d'en imputer la décision au maître d'ouvrage.

La responsabilité contractuelle de la société Ecide est donc engagée concernant les désordres affectant les bandeaux et les balcons.

- La responsabilité de la société Mats

L'expertise judiciaire sur laquelle s'appuie le syndicat, a relevé une exécution approximative et négligée des lucarnes établissant que l'entreprise n'a pas apporté tout le soin nécessaire à l'exécution de ses travaux dans les règles de l'art.

La responsabilité contractuelle de la société Mats est donc engagée concernant les désordres affectant les lucarnes.

Sur la garantie de la SMABTP

Moyens des parties

Le syndicat fait valoir que la SMABTP ne produit pas les polices d'assurances souscrites auprès d'elle par les sociétés Ecide et Mats et que les pièces d'assurance communiquées n'excluent pas les désordres intermédiaires car la garantie est due " en cas de dommage à l'ouvrage après réception " sans plus de précision.

Il soutient que les désordres intermédiaires invoqués constituent bien stricto sensu des désordres sur l'ouvrage réalisés par les assurés et qu'en l'absence de clause excluant expressément les désordres intermédiaires de la catégorie des désordres touchant l'ouvrage, il n'y aucune raison de procéder à cette exclusion.

La SMABTP soutient que l'engagement de sa garantie ne peut intervenir qu'en présence de désordres de nature décennale.

Elle affirme qu'elle assure la société Mats exclusivement pour les travaux de génie climatique, plomberie et installations sanitaires et qu'elle ne garantit aucune des sociétés au titre de leur responsabilité civile professionnelle.

M. [B] prétend que la garantie de la SMABTP peut être engagée au titre des désordres intermédiaires conformément aux dispositions des conditions particulières.

La société XL insurance ne répond pas spécifiquement sur ce point.

Réponse de la cour

Les faits garantis par l'assurance sont ceux définis par le contrat d'assurance.

A l'égard de la société Mats

Les conditions particulières du contrat sont opposables au tiers bénéficiaire de la garantie (3e Civ., 30 juin 2016, pourvoi n° 15-18.206, Bull. 2016, III, n° 84).

S'agissant de la garantie due à la société Mats, la SMABTP produit les conditions particulières en date du 24 janvier 2002 du contrat Cap 2000 de la société Mats ayant pris effet au 1er janvier 2002.

Ces conditions particulières mentionnent dans l'article 3 au titre des activités garanties : génie climatique-plomberie, installations sanitaires.

En conséquence, elles ne couvrent pas la société Mats pour l'activité toiture, charpente ou menuiseries, la SMABTP est donc fondée à opposer une non-garantie au syndicat.

A l'égard de la société Ecide

La preuve de ce que les conditions de la garantie sont réunies incombe à l'assuré qui sollicite la prise en charge du sinistre (2e Civ., 17 mars 2011, pourvoi n° 10-18.120).

En l'espèce, le syndicat ne rapporte pas la preuve de l'existence de la garantie d'assurance responsabilité civile professionnelle de la société Ecide par la SMABTP.

La demande du syndicat de garantie de la société Ecide par la SMABTP au titre des désordres intermédiaires affectant les bandeaux et les balcons sera donc rejetée.

Sur le préjudice du syndicat

Moyens des parties

Les parties ne contestent pas les devis de réparations validés par l'expert mais outre le montant des devis réparatoires, le syndicat demande la condamnation solidaire des intimées à lui payer les honoraires de conseil de M. [E] de 2 268 euros TTC et les frais d'expertise avancés par ses soins de 21 171 euros.

M. [B] conteste la demande concernant les frais de conseil technique en ce qu'ils n'ont pas été utiles à l'expertise. Il rajoute que la seule investigation utile concerne l'examen des trainasses, laquelle n'a causé aucun frais pour le syndicat.

Il conteste le montant des frais d'expertise qui ne se justifie pas compte tenu du nombre de réunions limité à 5, même si l'expertise a été longue.

La société XL insurance fait valoir que l'essentiel du travail de l'architecte conseil a porté sur des désordres non indemnisables et que les demandes du syndicat doivent être rejetées.

La SMABTP soutient que les frais de l'architecte conseil du syndicat doivent rester à sa charge dès lorsqu'il résulte d'un choix d'opportunité et que les frais d'expertise doivent être inclus dans les dépens.

Réponse de la cour

Les dommages et intérêts alloués à une victime doivent réparer le préjudice subi sans qu'il en résulte pour elle ni perte ni profit (2ème Civ. ; 23 janv. 2003, n° 01-00.200, Bull. 2003 II, n° 20).

Il est établi que, pour être réparable, le préjudice doit être direct, actuel et certain (2e Civ., 12 novembre 1986, pourvoi n° 85-14.486, Bull n° 164 ; 1re Civ., 9 décembre 1997, pourvoi n° 95-18.192, Bull n° 361 ; 1re Civ., 4 juin 2014, pourvoi n° 13-19.669).

Sur les préjudices matériels du syndicat

S'agissant du désordre de nature décennale en sous-sol, l'appréciation des premiers juges est retenue mais la cour y ajoute le montant de la reprise de peinture en sous-sol.

La réparation du désordre décennal en sous-sol est donc fixée à 14 949 euros TTC et 56 716,17 euros de reprise de peinture subséquente.

La cour retiendra, au titre de la réparation des désordres, les évaluations faites par l'expert, à l'exception de celle relative aux lucarnes.

Par suite, il sera fait droit aux demandes du syndicat concernant :

- La réparation des bandeaux et les balcons pour 170 890,45 euros TTC. La garantie de la SMABTP en sa qualité d'assureur responsabilité professionnelle de la société Ecide n'est pas mobilisable, la demande formée contre elle au titre de ce désordre par le syndicat sera rejetée.

- La réparation des lucarnes pour 51 138,20 euros TTC correspondant aux chefs de poste retenus pour la réfection des lucarnes dans le devis [M] du 10 mai 2019, validé par l'expert, excluant leur couverture et incluant les frais d'installation et de repli du chantier.

La garantie de la SMABTP en sa qualité d'assureur de la société Mats n'est pas mobilisable, la demande formée contre elle au titre de ce désordre par le syndicat sera rejetée.

S'agissant des échafaudages nécessaires à la réparation des désordres intermédiaires retenus, il sera alloué au syndicat la somme de 50 796 euros HT correspondant au montant du devis de la société FPR.C, hors le montant des échafaudages nécessaires pour la reprise de la couverture.

Sur les frais exposés par le syndicat

Les frais de l'expertise judiciaire sont inclus dans les dépens sans qu'il soit nécessaire d'en laisser une charge partielle au syndicat.

Les dépenses de M. [E] relèvent d'une mission d'assistance et elles seront incluses dans les frais irrépétibles dont le remboursement est prévu à l'article 700 du code de procédure civile ; le jugement est infirmé sur ce point.

Sur la contribution à la dette des parties condamnées et les recours

Aux termes de l'article 1213 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, l'obligation contractée solidairement envers le créancier se divise de plein droit entre les débiteurs, qui n'en sont tenus entre eux que chacun pour sa part et portion.

Le recours d'un constructeur contre un autre constructeur ou son assureur n'est pas fondé sur la garantie décennale, mais est de nature contractuelle si ces constructeurs sont contractuellement liés, et de nature quasi-délictuelle s'ils ne le sont pas (3ème Civ., 30 avril 2002, pourvoi n° 00-15-645, III, n° 86 ; 3ème Civ., 8 février 2012, pourvoi n° 11-11.417, Bull.2012, III, n° 23).

Il suppose la preuve d'une faute en lien de causalité avec le dommage (3ème Civ., 25 novembre 1998, pourvoi n° 97-11-408, Bull.1998, n° 221).

Aux termes de l'article 1382 du code civil dans sa version applicable à l'espèce, tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Selon l'article L.124-3 du code des assurances, le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable.

S'agissant du désordre en sous-sol, à défaut d'élément nouveau soumis à la cour, c'est à juste titre que les premiers juges ont fixé le partage de responsabilité entre les parties condamnées et accueilli les recours en garantie dans ces proportions.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

S'agissant des désordres affectant les bandeaux et les balcons : la demande du syndicat à l'encontre de la SMABTP en qualité d'assureur responsabilité civile professionnelle de la société Ecide étant rejetée, M. [B] sera seul condamné à réparer le préjudice du syndicat au titre de ces désordres.

S'agissant des désordres affectant les lucarnes, il ne peut y avoir de répartition puisque la SMABTP n'assure pas la société Mats pour ces prestations, aussi M. [B] sera seul condamné à réparer le préjudice du syndicat au titre de ces désordres.

Sur les frais du procès

Le sens de l'arrêt conduit à confirmer le jugement sur la condamnation aux dépens et sur celle au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En cause d'appel, la société XL insurance et M. [B] seront condamnés in solidum aux dépens et à payer au titre des frais irrépétibles la somme de 5 000 euros au syndicat.

Les autres demandes seront rejetées.

Le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile sera accordé aux avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour, sauf en ce qu'il :

- Condamne in solidum la société XL insurance venant aux droits de la société Axa corporate solutions, en qualité d'assureur dommages-ouvrage et d'assureur constructeur non réalisateur garantissant la responsabilité décennale de la société Roses [Localité 13] représentée par son mandataire ad hoc, Me [I], M. [B] et la SMABTP en qualité d'assureur de la société Ecide, à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2]) représenté par son syndic le cabinet Masson, deux mille deux cent soixante-huit euros TTC (2 268 euros TTC) en remboursement des honoraires de conseil versés à M. [E] ;

- Déboute le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2] de ses demandes au titre des bandeaux, des balcons, des lucarnes, des peintures du sous-sol ;

L'infirme sur ces points et statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne in solidum la société XL insurance company venant aux droits de la société Axa corporate solutions, en qualité d'assureur dommages-ouvrage et d'assureur constructeur non réalisateur garantissant la responsabilité décennale de la société Roses [Localité 13] représentée par son mandataire ad hoc, Me [I], M. [B] et la SMABTP, en qualité d'assureur décennal de la société Ecide, à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2], la somme de 56 716, 17 euros TTC au titre de la reprise de peinture en sous-sol ;

Rejette les demandes du syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2] en condamnation de la SMABTP, en sa qualité d'assureur responsabilité professionnelle des sociétés Ecide et Mats ;

Condamne M. [B] à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 2] la somme de 170 890,45 euros au titre de la réparation des désordres concernant les bandeaux et les balcons ;

Condamne M. [B] à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] la somme de 51 138,20 euros TTC au titre de la réparation des désordres concernant les lucarnes ;

Condamne M. [B] à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] la somme de 50 796 euros HT au titre de la mise en place des échafaudages pour permettre la réparation des désordres concernant les bandeaux, les balcons et les lucarnes ;

Condamne M. [B] aux dépens d'appel ;

Admet les avocats qui en ont fait la demande et peuvent y prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel, condamne in solidum, la société XL insurance company se et M. [B] à payer au titre des frais irrépétibles au syndicat du [Adresse 2] la somme de 5 000 euros ; Rejette les autres demandes ;

Condamne in solidum M. [B] à garantir la société XL insurance company se, au titre des dépens et de la condamnation prononcée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffière, Le président de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 21/10167
Date de la décision : 12/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-12;21.10167 ?
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