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11/06/2024 | FRANCE | N°23/16563

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 3, 11 juin 2024, 23/16563


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 3



ARRÊT DU 11 JUIN 2024



(n° 240 , 12 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/16563 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CILL6



Décision déférée à la cour : ordonnance du 27 septembre 2023 - président du TJ de Meaux - RG n° 23/00649





APPELANTE



S.N.C. SERRIS-LE VILLAGE-IDF, prise en la personne de son rep

résentant légal domicilié audit siège

[Adresse 11]

[Adresse 11]



Représentée par Me Benjamin MOISAN de la SELARL BAECHLIN MOISAN Associés, avocat au barreau de PARIS, toque...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 3

ARRÊT DU 11 JUIN 2024

(n° 240 , 12 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/16563 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CILL6

Décision déférée à la cour : ordonnance du 27 septembre 2023 - président du TJ de Meaux - RG n° 23/00649

APPELANTE

S.N.C. SERRIS-LE VILLAGE-IDF, prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège

[Adresse 11]

[Adresse 11]

Représentée par Me Benjamin MOISAN de la SELARL BAECHLIN MOISAN Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L34

Ayant pour avocat plaidant Me Xavier Tercq de la SARL LAMBERT & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

M. [OK] [P]

[Adresse 10]

[Localité 25]

Mme [S] [X]

[Adresse 8]

[Adresse 8]

M. [O] [G]

[Adresse 9]

[Adresse 9]

M. [GV] [DU]

[Adresse 9]

[Adresse 9]

M. [H] [T]

[Adresse 20]

[Adresse 20]

Mme [YN] [ZM]

[Adresse 20]

[Adresse 20]

M. [F] [U]

[Adresse 23]

[Adresse 23]

M. [AM] [UG]

[Adresse 2]

[Localité 25]

Mme [W] [LR]

[Adresse 2]

[Localité 25]

M. [O] [IP]

[Adresse 5]

[Localité 25]

Mme [LY] [OS]

[Adresse 5]

[Localité 25]

M. [A] [NE]

[Adresse 22]

[Adresse 22]

Mme [D] [WT]

[Adresse 22]

[Adresse 22]

M. [IB] [RF]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Mme [TZ] [II]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

M. [HC] [XH]

[Adresse 12]

[Adresse 12]

Mme [KD] [V]

[Adresse 12]

[Adresse 12]

M. [TA] [LJ]

[Adresse 6]

[Localité 25]

Mme [LC] [YV]

[Adresse 6]

[Localité 25]

Mme [JW] [FH]

[Adresse 4].

[Localité 25]

M. [OZ] [YG]

[Adresse 17]

[Adresse 17]

Mme [M] [Y]

[Adresse 17]

[Adresse 17]

M. [VU] [MP]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

Mme [N] [B]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

M. [ST] [MX]

[Adresse 14]

[Localité 25]

M. [RM] [FW]

[Adresse 19]

[Localité 24]

Mme [EI] [IX]

[Adresse 19]

[Localité 24]

M. [HR] [NL]

[Adresse 26]

[Adresse 26]

Mme [Z] [SE]

[Adresse 26]

[Adresse 26]

M. [PY] [EB]

[Adresse 27]

[Localité 24]

Mme [L] [BN]

[Adresse 27]

[Localité 24]

Mme [WB] [AR]

[Adresse 14]

[Localité 25]

S.C.I. SEAL, RCS de Meaux n°850180928, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 16]

[Adresse 16]

Représentés par Me Corinne ARDOUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : A0549

INTERVENANTS VOLONTAIRES

M. [FO] [E]

[Adresse 18]

[Adresse 18]

Mme [I] [C]

[Adresse 18]

[Adresse 18]

Mme [AV] [VF]

[Adresse 21]

[Localité 25]

M. [OD] [XO]

[Adresse 21]

[Localité 25]

M. [R] [VM]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

M. [AM] [KK]

[Adresse 15]

[Adresse 15]

Mme [XA] [SL] épouse [KK]

[Adresse 15]

[Adresse 15]

M. [HJ] [ZC]

[Adresse 13]

[Adresse 13]

Mme [CV] [K] épouse [ZC]

[Adresse 13]

[Adresse 13]

Représentés par Me Corinne ARDOUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : A0549

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 02 avril 2024, en audience publique, rapport ayant été fait par Anne-Gaël BLANC, conseillère, conformément aux articles 804, 805 et 905 du CPC, les avocats ne s'y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Jean-Christophe CHAZALETTE, président de chambre

Anne-Gaël BLANC, conseillère

Valérie GEORGET, conseillère

Greffier lors des débats : Jeanne PAMBO

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Valérie GEORGET, conseillère, le président de chambre empêché, et par Jeanne PAMBO, greffier, présent lors de la mise à disposition.

********

Entre 2019 et 2021, la société Serris le village IDF a vendu en l'état futur d'achèvement différents lots dépendant d'un immeuble dénommé [Adresse 28].

La date de livraison stipulée au contrat était fixée au plus tard le 30 septembre 2021 pour les uns et au 30 juin 2022 pour les autres.

Par actes extrajudiciaires, M. [P], Mme [X], M. [G] et M. [DU], M. [T] et Mme [ZM], M. [U], M. [UG] et Mme [LR], M0 [IP] et Mme [OS], M. [NE] et Mme [WT], M. [RF] et Mme [II], M. [XH] et Mme [V], Mme [YV] et M. [LJ], Mme [FH], M. [YG] et Mme [Y], M. [MP] et Mme [B] et M. [MX] et Mme [AR] ont assigné la société Serris le village IDF devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Meaux aux fins de voir :

condamner la société Serris le village IDF à achever l'immeuble sous astreinte de 1/3000 du prix de vente par jour de retard à compter d'un délai de deux mois suivant la signification de l'ordonnance à intervenir ;

condamner la société Serris le village IDF au paiement d'une provision d'un montant de 10 000 euros par requérant au titre du retard de livraison ;

désigner tel expert qu'il plaira en lui attribuant la mission indiquée ;

condamner la société Serris le village IDF au paiement d'une provision pour frais d'expertise d'un montant de 10 000 euros.

M. [FW] et Mme [IX], M. [NL] et Mme [SE], M. [EB] et Mme [BN] ainsi que la SCI Seal sont ensuite intervenus volontairement à l'instance.

Par ordonnance contradictoire du 27 septembre 2023, le juge des référés du tribunal judiciaire de Meaux a :

déclaré recevable l'intervention volontaire de MM. [FW], [NL] et [EB] et de Mmes [IX], [SE] et [BN] ainsi que de la société SCI Seal ;

condamné la société Serris le village IDF à achever l'immeuble dans un délai de trois mois à compter de la signification de la présente ordonnance et, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 1/3000ème du prix de vente des lots acquis par chaque demandeur pendant trois mois ;

condamné la société Serris le village IDF à payer à chacun des vingt demandeurs dont l'identité figure en tête de l'ordonnance une provision de 5 000 euros au titre du retard de livraison ;

ordonné une mesure d'expertise ;

dit n'y avoir lieu à référé sur la demande des demandeurs dont l'identité figure en tête de l'ordonnance de condamnation de la société Serris le village IDF à leur payer une provision de 10 000 euros pour frais d'expertise ;

condamné la société Serris le village IDF aux dépens ;

condamné la société Serris le village IDF à verser à chacun des vingt demandeurs la somme de 100 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 11 octobre 2023, la société Serris le village IDF a relevé appel de cette décision en ce qu'elle :

condamne la société Serris le village IDF à achever l'immeuble dans un délai de trois mois à compter de la signification de la présente ordonnance et, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 1/3 000ème du prix de vente des lots acquis par chaque demandeur pendant trois mois ;

condamne la société Serris le village IDF à payer à chacun des vingt demandeurs dont l'identité figure en tête de la présente ordonnance une provision de 5 000 euros au titre du retard de livraison ;

condamne la société Serris le village IDF aux dépens ;

condamne la société Serris le village IDF à verser à chacun des vingt demandeurs la somme de 100 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 28 février 2024, la société Serris le village IDF demande à la cour de :

à titre liminaire :

juger que M. [ZC] et Mme [K] n'ont pas qualité ni intérêt à intervenir à la présente procédure ;

en conséquence,

déclarer irrecevable la demande d'intervention volontaire formée par M. [ZC] et Mme [K] ;

sur l'ordonnance contestée :

juger que la juridiction des référés n'est pas compétente pour se prononcer sur le bien-fondé des clauses légitimes de report du délai de livraison ni de leur caractère légitime ;

juger que les demandes formées par MM. [P], [G], [DU], [T], [U], [UG], [IP], [NE], [RF], [XH], [LJ], [YG], [MP], [MX], [XO], [E], [KK], [VM] et Mmes [X], [ZM], [LR], [OS], [WT], [II], [V], [YV], [FH], [Y], [B], [VF], [C], [KK], ainsi que toute autre partie, au titre de la condamnation sous astreinte d'achever l'immeuble et des prétendus préjudices subis du fait des retards de livraison sont sérieusement contestables ;

en conséquence,

infirmer l'ordonnance rendue par le Président du tribunal judiciaire de Meaux en ce qu'elle l'a condamnée à :

achever l'immeuble dans un délai de trois mois à compter de la signification de l'ordonnance et, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 1/3000ème du prix de vente des lots acquis par chaque demandeur pendant trois mois ;

payer à chacun des demandeurs une provision de 5 000 euros au titre des retards de livraison ;

rejeter la demande de provision formée par MM. [XO], [E], [KK], [VM] et Mmes [VF], [C], [KK] ainsi que toute autre partie, au titre du retard de livraison ;

rejeter la demande de provision supplémentaire formée par MM. [P], [G], [DU], [T], [U], [UG], [IP], [NE], [RF], [XH], [LJ], [YG], [MP], [MX], [FW], [NL], [SE], [EB], [XO], [E], [KK], [VM] et Mmes [X], [ZM], [LR], [OS], [WT], [II], [V], [YV], [FH], [Y], [B], [AR], [IX], [BN], [LR], [VF], [C], [KK] et la SCI Seal, ainsi que toute autre partie, au titre du décalage de livraison à la fin du premier trimestre 2024 ;

condamner in solidum MM. [P], [G], [DU], [T], [U], [UG], [IP], [NE], [RF], [XH], [LJ], [YG], [MP], [MX], [FW], [NL], [SE], [EB], [XO], [E], [KK], [VM] et Mmes [X], [ZM], [LR], [OS], [WT], [II], [V], [YV], [FH], [Y], [B], [AR], [IX], [BN], [LR], [VF], [C], [KK] et la SCI Seal, ainsi que toute autre partie, à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner in solidum MM. [P], [G], [DU], [T], [U], [UG], [IP], [NE], [RF], [XH], [LJ], [YG], [MP], [MX], [FW], [NL], [SE], [EB], [XO], [E], [KK], [VM] et Mmes [X], [ZM], [LR], [OS], [WT], [II], [V], [YV], [FH], [Y], [B], [AR], [IX], [BN], [LR], [VF], [C], [KK] et la SCI Seal aux entiers dépens.

Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées le 28 février 2024, M. [P], Mme [X], M. [G] et M. [DU], M. [T] et Mme [ZM], M. [U], M. [UG] et Mme [LR], M. [IP] et Mme [OS], M. [NE] et Mme [WT], M. [RF] et Mme [II], M. [XH] et Mme [V], Mme [YV] et M. [LJ], Mme [FH], M. [YG] et Mme [Y], M. [MP] et Mme [B], M. [MX] et Mme [AR], M. [FW] et Mme [IX], M. [NL] et Mme [SE], M. [EB] et Mme [BN], la SCI Seal, Mme [VF] et M. [XO], M. [E] et Mme [C], M. [VM], M. [KK] et Mme [SL] et M. [ZC] et Mme [K] demandent à la cour de :

déclarer recevable et bien fondée l'intervention volontaire de MM. [XO], [E], [VM], [KK], [ZC] et de Mmes [VF], [C], [SL], [K] ;

rejeter la demande en irrecevabilité de l'appelante à l'égard de M. [ZC] et Mme [K] ;

confirmer l'ordonnance de référé du président du tribunal judiciaire de Meaux du 27 septembre 2023 en ce qu'elle a :

déclaré recevable l'intervention volontaire de MM. [FW], [NL], [EB] et Mmes [IX], [SE], [BN] ainsi que la société SCI Seal ;

condamné la société Serris le village IDF à achever l'immeuble dans un délai de trois mois à compter de la signification de la présente ordonnance et, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 1/3 000e du prix de vente des lots acquis par chaque demandeur pendant trois mois ;

condamné la société Serris le village IDF à payer à chacun des demandeurs dont l'identité figure en tête de la présente ordonnance une provision de 5 000 euros au titre du retard de livraison ;

ordonné une mesure d'expertise et désigné M. [J] pour y procéder ;

condamné la société Serris le village IDF aux dépens ;

condamné la société Serris le village IDF à verser à chacun des vingt demandeurs la somme de cent euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

y ajoutant :

condamner la société Serris le village IDF à payer à Mmes [VF] et [C] et MM. [XO], [E] une provision de 5 000 euros au titre du retard de livraison ;

compte tenu du nouveau report de livraison au 31 mars 2024, condamner la société Serris le village IDF à payer à chacun des 21 demandeurs une provision complémentaire de 5 000 euros au titre du nouveau retard de livraison ;

condamner la société Serris le village IDF au paiement d'une somme de 1 000 euros à chaque demandeur au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 mars 2024.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

Sur ce,

A titre liminaire, il convient de rappeler que la cour n'est pas saisie par l'effet dévolutif de l'appel principal ni par celui d'un appel incident des chefs de la décision entreprise concernant la recevabilité des interventions volontaires et l'expertise.

Sur la recevabilité de l'intervention volontaire

L'article 329 du code de procédure civile dispose que l'intervention est principale lorsqu'elle élève une prétention au profit de celui qui la forme. Elle n'est recevable que si son auteur a le droit d'agir relativement à cette prétention.

Par ailleurs, l'article 554 du code de procédure civile prévoit que peuvent intervenir en cause d'appel dès lors qu'elles y ont intérêt les personnes qui n'ont été ni parties ni représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité.

L'article 122 du même code prévoit que constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

Au cas présent, contrairement à ce que soutient l'appelant, M. [ZC] et Mme [K] produisent aux débats leur titre de propriété (pièce n° 33 des intimés) de sorte qu'ils ont intérêt et qualité à agir dans le cadre de la présente procédure

Il est acquis par ailleurs que Mme [VF] et M. [XO], M. [E] et Mme [C], M. [VM] et M. [KK] et Mme [SL] sont acquéreurs en vente en l'état futur d'achèvement du programme immobilier litigieux.

Dès lors, tous ces demandeurs seront déclarés recevables en leur intervention volontaire.

Sur la demande de condamnation de la société Serris le Village à achever l'immeuble dans un délai de trois mois à compter de la signification de l'ordonnance et, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 1/3000 ème du prix de vente des lots acquis par chaque demandeur pendant trois mois

Selon l'article 835, alinéa 2, du code de procédure civile, dans les cas où l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire peut ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Une contestation sérieuse survient lorsqu'un moyen de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

Par ailleurs, l'article 1 103 du code civil prévoit que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

En outre, l'article 1601-1 du même code dispose que la vente d'immeuble à construire est celle par laquelle le vendeur s'oblige à édifier un immeuble dans un délai déterminé par le contrat. Elle peut être conclue à terme ou en l'état futur d'achèvement.

En l'espèce, il est acquis que les contrats de vente en l'état futur d'achèvement litigieux stipulent que la société Serris le village IDF s'engage à ce que les biens soient achevés pour être livrés au plus tard à la fin du troisième trimestre 2021 pour une partie d'entre eux et à la fin du deuxième trimestre 2022 pour les autres et ce, sauf survenance d'un cas de force majeure ou d'une autre cause légitime de suspension de délai.

Les contrats prévoient en outre aux termes de leur article 15-3.2 que peuvent constituer des causes exonératoires :

les journées d'intempéries,

la grève générale ou partielle affectant le chantier, les entreprises ou les fournisseurs,

le retard consécutif aux sauvegardes, au redressement judiciaire, à la liquidation judiciaire des ou de l'une des entreprises,

le retard provenant de la défaillance d'une entreprise (la justification de la défaillance pouvant être fournie par la société venderesse à l'acquéreur, au moyen de la production du double de la lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée par le maître d''uvre du chantier à l'entrepreneur défaillant),

les retards entraînés par la recherche et la désignation d'une nouvelle entreprise se substituant à une entreprise défaillante et à l'approvisionnement du chantier par celle-ci,

les retards provenant de vices du sol et/ou anomalies du sous-sol,

les injonctions administratives ou judiciaires de suspendre ou d'arrêter les travaux,

les troubles résultant d'hostilités, cataclysmes, accidents de chantier, explosions, incendies, inondations, terrorisme,

les retards imputables aux compagnies concessionnaires ou fermières (électricité, gaz, téléphone, eau, assainissement etc),

les retards de paiement de l'acquéreur,

la délivrance tardive de l'autorisation de monter la grue,

les retards causés par les délais supplémentaires nécessaires à l'exécution de travaux modificatifs demandés par l'acquéreur,

les retards causés par l'acquéreur dans la confirmation de ses choix de revêtement,

Par ailleurs, le contrat stipule que 'Pour l'appréciation des événements ci-dessus évoqués les parties d'un commun accord déclarent s'en rapporter dès à présent à un certificat établi sous sa propre responsabilité par le maître d''uvre ou l'architecte ayant la direction des travaux'.

Il n'est pas contesté, en l'espèce, que la société Serris le village IDF n'a pas livré les immeubles dans les délais convenus puisque ceux-ci n'étaient pas encore achevés à la date de l'audience.

Pour s'opposer à sa condamnation et obtenir l'infirmation de l'ordonnance de ce chef, la société appelante soutient que la demande se heurte à des contestations sérieuses.

Elle fait valoir en premier lieu qu'elle ne saurait être contrainte à achever des travaux dont elle n'a pas la responsabilité personnelle s'agissant d'une obligation impossible.

Cependant, la condamnation demandée doit nécessairement s'entendre comme celle tendant à faire achever l'immeuble et à le livrer. Or, l'appelante s'est personnellement engagée aux termes des stipulations contractuelles à faire achever et livrer l'immeuble aux dates convenues. Il lui appartenait ainsi en sa qualité de vendeur de prendre les mesures nécessaires pour que l'immeuble soit achevé dans des délais qui lui permettent de respecter ses obligations contractuelles à l'égard des acquéreurs. Ce moyen ne saurait dès lors caractériser une contestation sérieuse.

La société Serris le village IDF se prévaut en deuxième lieu de causes d'exonération de responsabilité en indiquant que le juge des référés n'aurait pas le pouvoir d'apprécier si ces causes sont caractérisées et dès lors de lui enjoindre d'achever les travaux. Cependant, il appartient au juge des référés qui est fondé à ordonner l'exécution d'une obligation de faire d'apprécier si la cause d'exonération invoquée pour s'y opposer constitue une contestation sérieuse, de sorte que ce moyen n'est pas fondé.

Elle ajoute en troisième lieu que son retard est justifié par les motifs suivants :

un arrêt de chantier compte tenu des intempéries, pour 65 jours,

un arrêt de chantier compte tenu d'une fouille archéologique préventive pour 270 jours,

un ralentissement du chantier compte tenu des répercussions de pandémies ou épidémies et des mesures mises en 'uvre pour y répondre, tant par les autorités publiques que par le maître d'ouvrage et ses entreprises et fournisseurs, rendant impossible la poursuite du chantier dans des conditions normales du fait notamment des restrictions d'activités et/ou de circulations et/ou d'approvisionnement, pour 81 jours,

un ralentissement du chantier lié à la guerre en Ukraine qui impacte directement la production de tuiles du fait de l'augmentation du prix du gaz pour 198 jours,

un ralentissement de chantier provenant de la défaillance d'une entreprise pour 578 jours,

un ralentissement de chantier provenant de la défaillance d'une entreprise pour 90 jours.

Aux termes de la clause contractuelle susmentionnée, claire et précise, les parties sont expressément convenues de s'en rapporter à un certificat établi par le maître d''uvre ou l'architecte ayant la direction des travaux pour apprécier si les événements invoqués par le vendeur constituent des causes d'exonération prévues contractuellement.

Or, seuls 146 jours de retard sont justifiés par des attestations du maître d'oeuvre (65 jours du fait d'intempéries et 81 jours du fait de la crise sanitaire).

En intégrant ces 146 jours de retard justifiés, les biens auraient dû être livrés au plus tard le 24 février 2022 pour le premier et le 24 novembre suivant pour le second, ce qui n'a pas été le cas.

Concernant les autres causes invoquées, à savoir le retard de 270 jours lié à des fouilles archéologiques, celui de 198 jours lié à la guerre en Ukraine, celui de 578 jours liés à la défaillance d'une première entreprise et les 90 autres liés à celle d'une seconde, aucune attestation du maître d'oeuvre ou de l'architecte n'est produite.

Par ailleurs, alors que le vendeur ne peut se prévaloir d'une cause de suspension déjà existante à la signature des actes de vente, la cause tenant à l'existence de fouilles archéologiques préventives qui préexistait à la signature ne peut utilement être invoquée.

En outre, alors que l'article susmentionné prévoit que la justification de la défaillance peut être fournie au moyen de la production du double de la lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée par le maître d''uvre du chantier à l'entrepreneur défaillant, les seuls courriers produits, dont il n'est pas établi qu'ils ont été adressés par le maître d'oeuvre, ne permettent pas de retenir le caractère sérieux de la contestation liée à cette cause de retard. Par ailleurs, rien ne permet de chiffrer son impact en termes de jours de retard.

L'appelante ne produit aucune pièce supplémentaire au soutien de ses allégations concernant la justification de son retard.

Dès lors, elle ne justifie pas de l'intégralité du retard de livraison par des causes d'exonération constituant des contestations sérieuses.

Il en ressort qu'elle ne saurait être exonérée de son obligation de livraison du bien de telle sorte que la décision sera confirmée en ce qu'elle lui enjoint d'achever l'immeuble dans un délai de trois mois à compter de la signification de l'ordonnance sous astreinte, cette obligation devant nécessairement s'entendre comme celle de faire achever le bien pour le livrer.

Sur les demandes de provision

En application de l'article 835, alinéa 2, du code de commerce, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal de commerce peut accorder une provision au créancier.

Si l'obligation ne présente un tel caractère que partiellement, le juge ne doit accorder une provision qu'à hauteur du montant non sérieusement contestable.

Par ailleurs, l'article 1 103 du code civil prévoit que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

En outre, l'article 1601-1 du même code dispose que la vente d'immeuble à construire est celle par laquelle le vendeur s'oblige à édifier un immeuble dans un délai déterminé par le contrat. Elle peut être conclue à terme ou en l'état futur d'achèvement.

L'article 1217 dispose que la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut notamment demander réparation des conséquences de l'inexécution.

Il en résulte que, la date de livraison étant un élément essentiel du contrat de vente en l'état futur d'achèvement, le manquement au respect de celle-ci, sans cause sérieuse d'exonération, emporte obligation pour la société Serris d'indemniser les acquéreurs des conséquences de ce retard.

Dès lors que ces derniers n'ont pu prendre possession des logements dans les délais prévus, leur préjudice résulte, pour les uns, de l'absence de possibilité de s'y loger et, pour les autres, de l'impossibilité de donner le logement en location et de percevoir les loyers, ainsi que de l'incertitude sur l'aboutissement du projet.

Au regard du tableau produit par les intimés et des justificatifs joints, le principe et le montant des préjudices subis par les acquéreurs en raison de ces retards ne se heurtent à aucune contestation sérieuse.

Les montants justifiés par les propriétaires sont tous supérieurs à celui du montant des provisions demandées pour chacun des lots concernés.

En conséquence, les sommes allouées à titre provisionnel par le premier juge sont justifiées et l'ordonnance sera confirmée sur ce point

Au regard de leur intervention volontaire devant la cour, il convient de compléter l'ordonnance en condamnant également la société Serris le village IDF à payer à Mme [VF] et M. [XO], à M. [E] et Mme [C], à M. [VM], à M. [KK] et Mme [SL] et à M. [ZC] et Mme [K] une provision de 5 000 euros au titre du retard de livraison à la date de l'audience de première instance.

Au vu de l'évolution du litige compte tenu du nouveau report de livraison au 31 mars 2024 et des préjudices qui en sont nécessairement la conséquence, il convient également de condamner la société Serris le village IDF à payer aux propriétaires de chaque lot une provision complémentaire de 10 000 euros.

Sur les demandes accessoires

Au regard du sens de la présente décision, l'ordonnance sera confirmée sur les dépens et les frais irrépétibles.

La société Serris le village IDF sera condamnée aux dépens de l'appel ainsi qu'au paiement de 500 euros aux propriétaires de chacun des lots en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Rejette l'exception d'irrecevabilité des demandes de M. [ZC] et Mme [K] ;

Déclare recevables les interventions volontaires de Mme [VF] et M. [XO], de M. [E] et Mme [C], de M. [VM], de M. [KK] et Mme [SL] et de M. [ZC] et Mme [K] ;

Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions soumises à la cour étant précisé que la condamnation à achever l'immeuble doit nécessairement s'entendre comme étant une condamnation à les faire achever et à les livrer ;

Y ajoutant ;

Condamne la société Serris le village IDF à payer à Mme [VF] et M. [XO], à M. [E] et Mme [C], à M. [VM], à M. [KK] et Mme [SL] et à M. [ZC] et Mme [K] la somme de 5 000 euros à titre de provision ;

Condamne la société Serris le village IDF à payer à M. [P], à Mme [X], à M. [G] et M. [DU], à M. [T] et Mme [ZM], à M. [U], à M. [UG] et Mme [LR], à M. [IP] et Mme [OS], à M. [NE] et Mme [WT], à M. [RF] et Mme [II], à M. [XH] et Mme [V], à Mme [YV] et M. [LJ], à Mme [FH], à M. [YG] et Mme [Y], à M. [MP] et Mme [B], à M. [MX] et Mme [AR], à M. [FW] et Mme [IX], à M. [NL] et Mme [SE], à M. [EB] et Mme [BN], à la SCI Seal, à Mme [VF] et M. [XO], à M. [E] et Mme [C], à M. [VM], à M. [KK] et Mme [SL] et à M. [ZC] et Mme [K] la somme de 10 000 euros à titre de provision complémentaire du fait du nouveau retard ;

Condamne la société Serris le village IDF à payer à M. [P], à Mme [X], à M. [G] et M. [DU], à M. [T] et Mme [ZM], à M. [U], à M. [UG] et Mme [LR], à M. [IP] et Mme [OS], à M. [NE] et Mme [WT], à M. [RF] et Mme [II], à M. [XH] et Mme [V], à Mme [YV] et M. [LJ], à Mme [FH], à M. [YG] et Mme [Y], à M. [MP] et Mme [B], à M. [MX] et Mme [AR], à M. [FW] et Mme [IX], à M. [NL] et Mme [SE], à M. [EB] et Mme [BN], à la SCI Seal, à Mme [VF] et M. [XO], à M. [E] et Mme [C], à M. [VM], à M. [KK] et Mme [SL] et à M. [ZC] et Mme [K] une somme de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la société Serris le village IDF aux dépens de l'appel.

LE GREFFIER LE CONSEILLER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 23/16563
Date de la décision : 11/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-11;23.16563 ?
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