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11/06/2024 | FRANCE | N°23/16493

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 3, 11 juin 2024, 23/16493


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 3



ARRÊT DU 11 JUIN 2024



(n° 239 , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/16493 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CILGU



Décision déférée à la cour : ordonnance du 21 février 2023 - président du TJ de Fontainebleau - RG n° 22/00154





APPELANTE



SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE LA RESIDENCE LE PA RC D

U CHATEAU, [Adresse 1], représenté par son syndic en exercice, la SAS L'IMMOBILIER EXPERT, prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège

[Adresse 3]

[Lo...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 3

ARRÊT DU 11 JUIN 2024

(n° 239 , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/16493 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CILGU

Décision déférée à la cour : ordonnance du 21 février 2023 - président du TJ de Fontainebleau - RG n° 22/00154

APPELANTE

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE LA RESIDENCE LE PA RC DU CHATEAU, [Adresse 1], représenté par son syndic en exercice, la SAS L'IMMOBILIER EXPERT, prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par Me Bernard DUMONT, avocat au barreau de FONTAINEBLEAU

INTIMEE

S.A.S. PROJIM, prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me David BILLARD de la SELARL Maras Billard Avocats, avocats au barreau de PARIS, toque : Z07

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 02 avril 2024, en audience publique, rapport ayant été fait par Anne-Gaël BLANC, conseillère, conformément aux articles 804, 805 et 905 du CPC, les avocats ne s'y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Jean-Christophe CHAZALETTE, président de chambre

Anne-Gaël BLANC, conseillère

Valérie GEORGET, conseillère

Greffier lors des débats : Jeanne PAMBO

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Valérie GEORGET, conseillère, le président de chambre empêché,et par Jeanne PAMBO, greffier, présent lors de la mise à disposition.

La société civile ayant pour objet la construction d'immeubles en vue de leur vente (SCCV) Le Parc du château, dont la société Projim détenait 999 parts sur 1 000, s'est vu confier des travaux de rénovation d'un immeuble existant situé [Adresse 1] consistant notamment en la création de onze appartements dans le bâtiment B.

Les appartements ainsi créés ont été vendus et le syndicat des copropriétaires a été constitué.

Le 11 juin 2019, une entreprise chargée de l'entretien annuel des gouttières constatait un état dégradé de la toiture de l'immeuble et en informait le syndicat des copropriétaires.

Sur demande de ce dernier, par ordonnance du 15 juin 2021, le tribunal judiciaire de Fontainebleau a désigné un expert pour examiner les désordres.

L'expert a remis son rapport le 22 juillet 2022.

La société Le Parc du château ayant été dissoute, par acte extrajudiciaire du 22 septembre 2022, le syndicat des copropriétaires a assigné la société Projim, son associée à hauteur de 99,9%, devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Fontainebleau aux fins de la voir condamner à lui payer la somme de 171 000 euros à titre provisionnel.

Par actes extrajudiciaires des 27 et 28 octobre 2022, la société Projim a assigné la société en charge du contrôle technique, le maître d'oeuvre et la société en charge des lots charpente et couverture aux fins de les voir condamnées à la garantir de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre.

Les deux instances ont été jointes par ordonnance du 15 novembre 2022.

Par ordonnance contradictoire du 21 février 2023, le juge des référés du tribunal judiciaire de Fontainebleau a :

débouté le syndicat des copropriétaires de la résidence Le Parc du château de ses demandes ;

rejeté les demandes en garantie de la société Projim ;

rejeté les demandes au titre des frais irrépétibles ;

rejeté les demandes plus amples ou contraires ;

condamné le syndicat des copropriétaires de la résidence Le Parc du château aux entiers dépens ;

rappelé que l'exécution provisoire était de droit.

Par déclaration du 9 octobre 2023, le syndicat des copropriétaires a relevé appel de cette décision en ce qu'elle le déboute de ses prétentions, rejette sa demande au titre des frais irrépétibles et le condamne aux dépens.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 28 février 2024, il demande à la cour de :

le recevoir en son appel et le dire bien fondé ;

Vu la responsabilité non sérieusement contestable de la société Projim, pour avoir, en connaissance de l'état défectueux de la couverture, en sa qualité de professionnel de la construction et malgré les invitations des divers intervenants et la nécessité d'une réfection totale, refusé de donner suite au devis qui lui avait été remis et trompé les acquéreurs en leur cachant non seulement cet état mais en les rassurant par de fausses indications de la notice descriptive ;

infirmer l'ordonnance de référé rendue par le juge des référés du tribunal judiciaire de Fontainebleau le 17 janvier 2023 en ce qu'elle l'a débouté de ses demandes et l'a condamné aux dépens ;

condamner la société Projim à lui payer la somme de 171 000 euros à titre provisionnel, outre 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner la société Projim aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'aux frais d'expertise.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 1er décembre 2023, la société Projim demande à la cour de :

in limine litis :

prononcer la caducité de la déclaration d'appel du syndicat des propriétaires, par l'effet de la nullité de l'acte de signification de ladite déclaration d'appel ;

à défaut et à titre principal :

confirmer l'ordonnance attaquée, en toutes ses dispositions ;

rejeter les conclusions du syndicat des copropriétaires en ce qu'elles se heurtent à des contestations sérieuses ;

à titre subsidiaire :

dans l'hypothèse d'une annulation ou d'une réformation de l'ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal judiciaire de Fontainebleau le 17 janvier 2023, avec octroi d'une provision au syndicat des copropriétaires, renvoyer l'affaire devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Fontainebleau, afin que ce dernier statue sur les demandes en garantie formulées en première instance par elle, visant la condamnation des sociétés Dekra Industrial, Cunha bâtiment et cabinet d'architecture Alibert à la garantir de l'intégralité des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre ;

en tout état de cause :

condamner le syndicat des copropriétaires à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 mars 2024.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

SUR CE,

Sur la caducité de la déclaration d'appel

L'article 905-1 du code de procédure civile dans sa version applicable au litige dispose que :

'Lorsque l'affaire est fixée à bref délai par le président de la chambre, l'appelant signifie la déclaration d'appel dans les dix jours de la réception de l'avis de fixation qui lui est adressé par le greffe à peine de caducité de la déclaration d'appel relevée d'office par le président de la chambre ou le magistrat désigné par le premier président ; cependant, si, entre-temps, l'intimé a constitué avocat avant signification de la déclaration d'appel, il est procédé par voie de notification à son avocat.

A peine de nullité, l'acte de signification indique à l'intimé que, faute pour lui de constituer avocat dans un délai de quinze jours à compter de celle-ci, il s'expose à ce qu'un arrêt soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire et que, faute de conclure dans le délai mentionné l'article 905-2, il s'expose à ce que ses écritures soient déclarées d'office irrecevables.'

L'article 905-2 ancien du code de procédure civile prévoit notamment que l'intimé dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office par ordonnance du président de la chambre saisie ou du magistrat désigné par le premier président, d'un délai d'un mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant pour remettre ses conclusions au greffe et former, le cas échéant, appel incident ou appel provoqué.

L'article 114 du même code prévoit qu'aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public. La nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public.

Au cas présent, l'avis de fixation à bref délai a été adressé à l'appelant le 31 octobre 2023. Ce dernier a signifié sa déclaration d'appel à l'intimée le 3 novembre suivant.

Cet acte de signification visait les articles 902 et 909 en lieu et place des articles 905-1 et 905-2 anciens du code de procédure civile de telle sorte qu'il était indiqué que l'intimé disposait d'un délai de trois mois pour conclure.

Si elle souligne à raison que cette indication est erronée, le délai de l'article 905-2 ancien étant d'un mois, l'intimée, qui a remis ses conclusions au greffe de la cour le 1er décembre 2023, soit dans le délai ainsi prévu, ne démontre aucun grief causé par l'irrégularité qu'elle dénonce.

Dès lors, il n'y a pas lieu d'annuler la signification litigieuse ni de déclarer l'appel caduc.

La demande à ce titre sera donc rejetée.

Sur la provision

L'article 835, alinéa 2, du code de procédure civile prévoit que le président du tribunal judiciaire peut, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, accorder une provision au créancier.

La charge de la preuve de l'existence même de l'obligation incombe à celui qui s'en prévaut, celle de la contestation sérieuse à la partie qui l'invoque. Une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

Par ailleurs, en vertu de l'article 14 de la loi du 10 juillet 1965, le syndicat des copropriétaires a pour objet la conservation de l'immeuble et l'administration des parties communes et, en application de l'article 15 de la même loi, il a qualité pour agir en justice, notamment et conjointement ou non avec un ou plusieurs copropriétaires, en vue de la sauvegarde des droits afférents à l'immeuble.

Au cas présent, le syndicat des copropriétaires entend engager la responsabilité de la société Projim du fait des désordres affectant la toiture et la charpente de l'immeuble en sa double qualité, d'une part, de maître de l'ouvrage délégué et, d'autre part, d'associée principale de la société venderesse dont elle est, compte tenu de sa liquidation, la débitrice subsidiaire à hauteur de ses parts, soit 99,9%.

Cependant, le syndicat des copropriétaires n'apporte aucun élément permettant d'établir l'étendue de la mission de maître de l'ouvrage délégué de la société intimée. Il ne développe par ailleurs aucun moyen sérieux de nature à établir sa responsabilité de ce chef. Sa demande provisionnelle ne pourra dès lors prospérer sur ce fondement.

Concernant la responsabilité de la société Projim en qualité d'associée principale de la société venderesse désormais dissoute, l'appelante se prévaut notamment de sa responsabilité du fait des vices cachés.

Ainsi, il vise l'article 1641 du code civil qui dispose que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus. Il rappelle par ailleurs que, en cas de vente après rénovation, le syndicat des copropriétaires a qualité pour exercer contre le vendeur des lots l'action en réparation du préjudice subi du fait des vices cachés affectant les parties communes de l'immeuble vendu.

Cependant, alors qu'il incombe à l'acheteur de rapporter la preuve de l'existence du vice caché et de ses différents caractères, il n'allègue pas en l'espèce ni, dès lors, ne démontre que ceux-ci sont réunis.

Sa demande de provision ne pourra donc davantage prospérer sur ce fondement.

Le syndicat se prévaut par ailleurs, au visa de l'article 1382 du code civil, de la responsabilité délictuelle de la société intimée.

Il fait ainsi valoir qu'une faute a nécessairement été commise dans l'exécution du contrat qui prévoyait la remise en état de la toiture après contrôle par un bureau d'étude alors que ce contrôle et la remise en état subséquente n'ont pas été réalisés comme l'a constaté l'expert.

Cependant, le syndicat des copropriétaires, qui tient de la loi sa qualité pour agir en justice en vue de la sauvegarde des droits afférents à l'immeuble, ne saurait être considéré comme un tiers au contrat de vente. La demande de l'appelant ne saurait dès lors davantage prospérer sur le fondement de la responsabilité délictuelle de l'intimée.

Par ailleurs, si le vendeur de l'immeuble à construire est tenu à l'égard des propriétaires successifs de l'immeuble, d'une responsabilité contractuelle de droit commun pour faute prouvée, son seul manquement à son obligation de délivrance ne suffit pas à caractériser sa faute s'agissant des désordres intermédiaires (3e Civ., 13 février 2013, n°11-28.376, Bull n°21) pour lesquels il convient de démontrer qu'il a commis une faute personnelle (3e Civ. , 6 octobre 2010, n°09-66.521, Bull. n 78 ; 3e Civ.,14 mai 2020, n°19-10.434).

En l'espèce, le syndicat se prévaut d'une tromperie délibérée du vendeur tenant à son choix de ne pas faire les travaux nécessaires dans un souci d'économie, en écartant volontairement les préconisations des constructeurs.

Au soutien de ses affirmations, il produit les conclusions de première instance des sociétés Dekra et Cunha bâtiment qui évoquent, pour les premières, un 'choix volontaire et assumé du maître de l'ouvrage, dûment averti et avisé' et qui font état, pour les secondes, de 'la parfaite connaissance par la maîtrise d'ouvrage de l'état de la couverture'.

La société Projim oppose qu'elle n'a jamais été informée de l'existence de ces désordres dans la mesure où l'absence de remplacement intégral de la toiture n'a jamais été remise en cause par le maître d'oeuvre ou par les autres entreprises intervenues sur l'opération de rénovation.

Elle verse aux débats le rapport du cabinet de géomètre qu'elle a mandaté qui relevait simplement l'aspect usé de certaines tuiles et l'existence de tuiles cassées, sans préciser que ces dernières n'étaient plus en mesure de remplir leur office et le cahier des clauses techniques et particulières établi sur cette base par le maître d''uvre qui prévoyait seulement l'examen de la charpente existante et les remplacements ou renforcements nécessaires pour garantir la sécurité des biens et personnes, outre le remplacement à l'identique de certaines tuiles.

Or, il n'est pas contesté que ce cahier des clauses techniques et particulières a été respecté.

Par ailleurs, au regard de ce qui précède, alors que les écritures des sociétés qui étaient parties au litige de première instance, ne constituent pas des données objectives mais uniquement, à ce stade, des allégations au soutien de leur défense puisqu'elles étaient appelées en garantie par la société Projim, elles ne sauraient suffire à établir avec certitude la tromperie délibérée invoquée par le syndicat.

Il en résulte qu'un doute subsiste sur l'existence d'une faute personnelle prouvée du vendeur et, dès lors, sur la décision que pourrait prendre le juge du fond sur le principe même de sa responsabilité, et partant sur l'obligation de son associée, la société Projim. Au regard de l'existence d'une contestation sérieuse, il n'y a pas lieu à référé sur la demande de provision du syndicat des copropriétaires.

La décision du premier juge sera dès lors confirmée de ce chef.

Sur les demandes accessoires

Le syndicat des copropriétaires supportera la charge des entiers dépens, la décision étant confirmée de ce chef.

Il sera condamné au paiement d'une somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Rejette la demande de voir déclarer l'appel caduc ;

Confirme la décision entreprise en ses dispositions soumises à la cour ;

Y ajoutant :

Condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence du Parc du château située [Adresse 1] à payer à la société Projim la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence du Parc du château aux dépens.

LE GREFFIER LE CONSEILLER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 23/16493
Date de la décision : 11/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-11;23.16493 ?
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