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10/06/2024 | FRANCE | N°22/08831

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 10, 10 juin 2024, 22/08831


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 10



ARRÊT DU 10 JUIN 2024



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général :22/08831- N° Portalis 35L7-V-B7G-CFYPZ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Avril 2022 - TJ de CRETEIL RG n° 20 / 02627



APPELANTE



Madame [M], [J], [Z] [Y] Vve [O]

[Adresse 2]

[Localité 5]

née le [Date naissance 3] 1929 à [Localité 6]

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Représentée par Me Sandra OHANA de l'AARPI OHANA ZERHAT CABINET D'AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050

Représentée par Me Guy PARLANTI de la SELARL GOZLAN & PARLANTI ASSOCIES, avocat au b...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10

ARRÊT DU 10 JUIN 2024

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :22/08831- N° Portalis 35L7-V-B7G-CFYPZ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Avril 2022 - TJ de CRETEIL RG n° 20 / 02627

APPELANTE

Madame [M], [J], [Z] [Y] Vve [O]

[Adresse 2]

[Localité 5]

née le [Date naissance 3] 1929 à [Localité 6]

Représentée par Me Sandra OHANA de l'AARPI OHANA ZERHAT CABINET D'AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050

Représentée par Me Guy PARLANTI de la SELARL GOZLAN & PARLANTI ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

INTIME

Monsieur LE DIRECTEUR RÉGIONAL DES FINANCES PUBLIQUES D'ILE DE FRANCE

Le Directeur Régional des Finances Publiques d'Ile de France et du département de Paris

en ses bureaux du Pôle Fiscal Parisien

1, Pôle Juridictionnel Judiciaire,

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Guillaume MIGAUD de la SELARL ABM DROIT ET CONSEIL AVOCATS E.BOCCALINI & MIGAUD, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC129

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 11 Mars 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Xavier BLANC, Président

Mme Sylvie CASTERMANS, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Monsieur Edouard LOOS, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur Edouard LOOS, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MOLLÉ

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Xavier BLANC, Président et par Sylvie MOLLÉ, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

FAITS ET PROCEDURE

Mme [M] [Y] a effectué des donations en faveur de son fils, M. [C] [O], provenant d'avoirs autrefois détenus par son défunt mari sur un compte bancaire suisse.

Dans le cadre d'une procédure portant régularisation en matière d'impôt sur le revenu et d'impôt de solidarité sur la fortune dudit compte bancaire, M. [C] [O] a déclaré un don manuel de 434 913 euros au service de traitement des déclarations rectificatives (STDR) le 28 novembre 2014. Le montant des droits de donation régularisés sur cette déclaration de don manuel est de 88.932 euros.

Le 26 février 2016, M. et Mme [O] ont conclu une transaction avec la Direction générale des finances publiques mentionnant en objet les impôts sur le revenu, les contributions sociales, sur l'impôt et la contribution exceptionnelle sur la fortune. Il a été convenu de limiter le montant des majorations et des amendes encourues à la somme de 19.615,00 euros, contre engagement de leur part des contribuables de reconnaître le bien-fondé de ces impositions et de payer les sommes à leur charge dès réception des avis de mise en recouvrement.

Le 31 mai 2016, l'administration fiscale a adressé à Mme [M] [Y], en sa qualité de donateur solidaire à l'acte, une proposition de rectification n°2120 des droits de mutation dus à hauteur de 191.014 euros pour l'ensemble des donations soumises au rapport fiscal, selon les dispositions de l'article 784 du code général des impôts.

Mme [M] [Y] a formé des observations par courrier du 28 juillet 2016, auxquelles l'administration a répondu défavorablement le 20 janvier 2017.

Le 7 juin 2017, l'administration a émis à l'encontre de Mme [Y] un avis de mise en recouvrement (AMR) n°170500015 pour un montant total de 204.003 euros (dont 12.089 euros d'intérêts de retard), que celle-ci a contesté par courrier du 22 juin 2017.

L'administration fiscale a maintenu sa position dans une décision de rejet notifiée à Mme [M] [Y] par lettre recommandée avec avis de réception du 19 février 2020.

Par exploit d'huissier du 23 mars 2020, Mme [M] [Y] a fait assigner la Direction départementale des Finances publiques du Val-de-Marne (DDFIP) devant le tribunal judiciaire de Créteil.

* * *

Vu le jugement prononcé le 5 avril 2022 par le tribunal judiciaire de Créteil qui a statué comme suit :

Déclare l'avis de mise en recouvrement n°170500015 du 7 mai 2017 régulier sur le fond et en la forme ;

Constate que l'administration consent à exclure du calcul de la masse taxable calculée le don manuel de 76.225 euros réalisé en février 1999, qui conduit à un dégrèvement en droits 19.819 euros ;

Confirme la décision de rejet du 19 février 2020 pour le surplus ;

Déboute Mme [M] [Y] de l'intégralité de ses demandes ;

Rappelle qu'en vertu de l'article R207-1 du livre des procédures fiscales, il n'y a pas lieu à dépens ;

Rappelle que la décision est exécutoire à titre provisoire.

Vu l'appel déclaré par Mme [M] [Y] le 2 mai 2022,

Vu les dernières conclusions signifiées 29 novembre 2022 par Mme [M] [Y],

Vu les dernières conclusions signifiées le 17 octobre 2022 par le directeur régional des finances publiques d'Ile de France et de Paris,

Mme [Y] demande à la cour de statuer comme suit :

Vu les articles 2044 et 2052 du code civil (version en vigueur avant le 20 novembre 2016) et l'ancien article 2058 du code civil, les articles 1705 et 1965 H du CGI, les articles L57, L64, L 247 et L 251 du LPF,

Infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Créteil daté du 5 avril 2022 ;

Prononcer l'irrégularité de la procédure de rectification des droits de donation ;

Prononcer la décharge totale des droits de donation supplémentaires mis à la charge de Madame [M] [Y] veuve [O] ;

Prononcer la condamnation de l'Etat au paiement de la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le directeur régional des finances publiques d'Ile de France et de Paris demande à la cour de statuer comme suit :

Confirmer le jugement du tribunal de Créteil du 5 avril 2022 ;

Confirmer les rappels d'impôts et de pénalités effectués par l'administration restant à la charge de Madame [Y]-[O] ;

Débouter Madame [Y]-[O] de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

Condamner Madame [Y]-[O] au versement d'une somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du CPC ;

Condamner Madame [Y]-[O] aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 15 janvier 2024.

SUR CE, LA COUR

Sur la régularité de la procédure

Mme [Y] soutient, au visa de l'article 1705 du CGI et de la jurisprudence de la Cour de cassation, que le contribuable bien que destinataire de tous les actes le concernant, est en droit d'invoquer la nullité de la procédure d'imposition au motif que l'administration fiscale a méconnu le principe de loyauté des débats et du principe du contradictoire en omettant de transmettre à son codébiteur solidaire des actes similaires ou une copie de tous les courriers qu'elle a adressés au cours de la procédure y compris durant la phase contentieuse de cette procédure. M. [C] [O] a été informé des actes de procédure émis par l'administration fiscale et a reçu les actes de procédure. Or, le respect du contradictoire et la loyauté des débats doivent également être respectés pendant la phase contentieuse. Ainsi, l'administration fiscale aurait dû en tout état de cause attraire Monsieur [C] [O] à la cause devant le tribunal judiciaire de Créteil. Ces omissions constituent une entrave au respect du principe du contradictoire et de la loyauté des débats.

L'administration fiscale réplique qu'elle s'est adressée à M. [C] [O] qui, en sa

qualitéde donataire solidaire, a bien été informé des actes de la procédure émis par l'administration fiscale, notamment dans :

- l'avis de mise en recouvrement, le 13/06/2017.

- la décision de rejet, le 20/02/2020.

- le courrier n°3740 SD relatif à la constitution de garantie, le 23/06/2017.

M. [C] [O] avait notamment la possibilité de saisir lui-même le juge judiciaire à la suite de la décision de rejet contentieux qui lui a été adressé le 19 février 2020.

Ceci étant exposé, l'administration fiscale justifie que, par courrier recommandé réceptionné le 13 juin 2017, M. [C] [O] a été destinataire de l'avis de mise en recouvrement émis à son encontre le 7 juin 2017. Le conseil de M. [O] a par ailleurs adressé le 22 juin 2017 à l'administration fiscale une réclamation contentieuse avec demande de sursis de paiement relative à cet AMR. Le 23 juin 2017, l'administration fiscale lui à demandé la constitution de garanties et une décision de rejet lui a ensuite été adressée le 19 février 2020 par courrier recommandé réceptionné le 20 février 2020.

M. [C] [O] a ainsi été associé à la procédure contentieuse de recouvrement de la dette solidaire qui, contrairement à ce que soutient Madame [Y], a respecté les principes du contradictoire et de loyauté des débats .

Lors de la procédure judiciaire engagée par Madame [Y], il lui appartenait d'y attraire M. [O] si elle l'estimait nécessaire. Mme [Y] est mal fondée à reprocher à l'administration fiscale une telle absence alors qu'elle est à l'origine de la procédure.

La demande tendant à déclarer la procédure irrégulière doit être rejetée.

Sur l'opposabilité de la transaction et l'inclusion des droits de donation dans celle-ci

Mme [Y] soutient, en s'appuyant sur les anciens articles 2044 et 2055 du code civil, que chaque transaction conclue avant le 20 novembre 2016 est un contrat portant autorité de la chose jugée et qui ne peut être attaqué pour cause d'erreur de droit ni pour cause de lésion. Mme [Y] considère, au visa des articles L.251 du LPF et 1965 H du CGI, que lorsqu'une transaction est devenue définitive, aucune procédure contentieuse ne peut plus être engagée ou reprise pour remettre en cause les pénalités qui ont fait l'objet de la transaction ou les droits eux-mêmes. Ainsi, l'imposition établie et comprise dans la transaction signée et exécutée par les parties devient irrévocable.

L'administration fiscale réplique que la liquidation des droits dus sur la donation déclarée le 28 novembre 2014 a été basée sur une déclaration de don manuel. M. [C] [O] a omis de mentionner à l'administration l'ensemble des donations antérieures de moins de quinze ans reçus de sa mère. Selon l'article 784 du CGI, ces donations antérieures de moins de quinze ans auraient dû être déclarées. Or, en l'espèce, dans le courrier n°751-SD que le STDR a adressé à Monsieur [C] [O] le 04 février 2016 pour établir à hauteur de 88 932 € les droits dus à l'occasion du dépôt de la déclaration de don manuel, sur la base uniquement des éléments que les parties ont déclarés, la mention « Sous réserve de l'exactitude des informations communiquées par vos soins, notamment en ce qui concerne l'absence de déclaration de donation antérieure » apparaît expressément. Cette réserve justifie le contrôle à posteriori et la correction du service.

Ceci étant exposé, la transaction signée le 26 février 2016 entre M. et Mme [O], non parties à l'instance, et la directrice nationale des vérifications des situations fiscales (DNVSF) relève des dispositions antérieures à la loi du 18 novembre 2016 notamment des articles 2044 et suivants du code civil dans leur rédaction ancienne.

La transaction, ainsi qu'elle le mentionne, a porté sur « les impôts sur le revenu, les contributions sociales, sur l'impôt et la contribution exceptionnelle sur la fortune ». S'il y est mentionné que la transaction pourra être déclarée caduque si les déclarations ne portent pas « sur l'intégralité des avoirs détenus à l'étranger (') » détenus par les signataires, cette mention n'a pas d'incidence sur l'assiette de la transaction et il ne s'en déduit pas, notamment, que celle-ci aurait porté sur des droits de mutation à titre gratuit, dés lors que la détention d'avoirs à l'étranger est susceptible d'avoir une incidence sur l'impôt sur le revenu comme sur l'ISF expressément visés par la transaction.

La pièce n°12 versé par l'administration fiscale comporte le détail des sommes ayant fait l'objet de la transaction,qui portent exclusivement sur l'impôt sur le revenu, l'ISF, la contribution exceptionnelle sur la fortune et les amendes sans qu'il y soit fait mention de droits de mutation à titre gratuit dus au titre de donations d'avoirs détenus à l'étranger.

Les premiers juges ont ainsi justement retenu que la transaction qui ne portait pas sur les dons manuels ne pouvait pas être utilement opposée par cette dernière dans le cadre de la présente procédure.

L'administration fiscale admet que de la masse taxable doit être exclue un don manuel d'un montant de 76 225 euros réalisé en février 1999 donc au-delà du délai de 15 années prévu à l'article 784 alinéa 2 du code général des impôts.

En l'absence d'autres contestations, le jugement déféré doit être confirmé en toutes ses dispositions.

Sur les frais irrépétibles

Mme [Y], condamnée aux dépens, devra verser une indemnisation à l'intimé sur ce fondement.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement déféré ;

Condamne Mme [M] [Y] aux dépens de première instance et d'appel ;

Condamne Mme [M] [Y] à verser au directeur régional des finances publiques d'Ile de France et de Paris la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toutes autres demandes.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

S.MOLLÉ X.BLANC


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 22/08831
Date de la décision : 10/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-10;22.08831 ?
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