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07/06/2024 | FRANCE | N°23/07417

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 6, 07 juin 2024, 23/07417


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 6



ARRET DU 7 JUIN 2024



(n° /2024, 23 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/07417 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CHP6A



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 21 mars 2023 - Juge de la mise en état du tribunal judiciaire de PARIS RG n° 21/09066





APPELANTE



S.C.I. DES SERVICES DE L'AUTOMOBILE ET DE LA MOBILITÉ anciennement déno

mmée SCI LA GARENNE DE SEVRES, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 23]

[Localité 37]



Représentée par Me Bruno REGNIER d...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 6

ARRET DU 7 JUIN 2024

(n° /2024, 23 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/07417 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CHP6A

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 21 mars 2023 - Juge de la mise en état du tribunal judiciaire de PARIS RG n° 21/09066

APPELANTE

S.C.I. DES SERVICES DE L'AUTOMOBILE ET DE LA MOBILITÉ anciennement dénommée SCI LA GARENNE DE SEVRES, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 23]

[Localité 37]

Représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP CAROLINE REGNIER AUBERT - BRUNO REGNIER, AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050

Ayant pour avocat plaidant à l'audience Me Caroline CHEVAUCHERIE, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

Monsieur [E] [B]

[Adresse 13]

[Localité 16]

Représenté par Me Benjamin MOISAN de la SELARL BAECHLIN MOISAN Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L34

S.A. MMA IARD venant aux droits de COVEA RISKS, en sa qualité d'assureur de Monsieur [B], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 8]

[Localité 28]

Représentée par Me Benjamin MOISAN de la SELARL BAECHLIN MOISAN Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L34

Société MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES venant aux droits de COVEA RISKS, en sa qualité d'assureur de Monsieur [B], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 8]

[Localité 28]

Représentée par Me Benjamin MOISAN de la SELARL BAECHLIN MOISAN Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L34

S.A.S. THERMATIC prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 11]

[Localité 3]

Représentée par Me Martine LEBOUCQ BERNARD de la SCP Société Civile Professionnelle d'avocats HUVELIN & associés, avocat au barreau de PARIS, toque : R285

Ayant pour avocat plaidant à l'audience Me Cécile GUILLARD, avocat au barreau de TOULOUSE

Mutuelle SMABTP en sa qualité d'assureur de la société PG3 INGENIERIE et la société BAREAU, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 34]

[Localité 32]

Représentée par Me Audrey SCHWAB de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Ayant pour avocat plaidant Me Lucien LACROIX, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué à l'audience par Me Alice FADY, avocat au barreau de MARSEILLE

S.A.S.U. PG3 INGENIERIE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 41]

[Localité 20]

Représentée par Me Audrey SCHWAB de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Ayant pour avocat plaidant Me Lucien LACROIX, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué à l'audience par Me Alice FADY, avocat au barreau de MARSEILLE

S.A.S. TRAVAUX DU MIDI VAR venant aux droits de la société TRAVAUX DU MIDI VAR, venant elle-même aux droits de la société VERDINO CONSTRUCTIONS, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Audrey SCHWAB de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Ayant pour avocat plaidant Me Lucien LACROIX, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué à l'audience par Me Alice FADY, avocat au barreau de MARSEILLE

S.A.S.U. EUROVIA PROVENCE ALPES COTE D'AZUR prise en la personne de se représentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 9]

[Localité 6]

Représentée par Me Audrey SCHWAB de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Ayant pour avocat plaidant Me Lucien LACROIX, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué à l'audience par Me Alice FADY, avocat au barreau de MARSEILLE

S.A. SMA anciennement dénommée SAGENA, en sa qualité d'assureur des sociétés TRAVAUX DU MIDI VAR et INEO MIDI PYRENNEES LANGUEDOC ROUSSILLON, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 34]

[Localité 32]

Représentée par Me Audrey SCHWAB de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Ayant pour avocat plaidant Me Lucien LACROIX, avocat au barreau de MARSEILLE, substitué à l'audience par Me Alice FADY, avocat au barreau de MARSEILLE

S.N.C. INEO MIDI PYRENNEES LANGUEDOC ROUSSILLON prise en la personne de ses repésentants légaux en exercice domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 10]

[Localité 17]

Représentée par Me Audrey SCHWAB de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

S.A.S. CMBC METAL anciennement BOUISSE CMBC, prise en la personne de son président en exercice, la SAS ATHAQUE, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 21]

[Localité 36]

Représentée par Me Caroline LAVERDET, avocat au barreau de PARIS, toque : C1355

Société AUXILIAIRE, société d'assurance mutuelle à cotisations variables, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 24]

[Localité 26]

Représentée par Me François TEYTAUD de l'AARPI TEYTAUD-SALEH, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

Ayant pour avocat plaidant Me Marie-Charlotte MARTY, avocat au barreau de PARIS, substituée à l'audience par Me Stéphanie LEPERLIER, avocat au barreau de PARIS

S.A.S.U. CHAUDRONNERIE BRIGNOLAISE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 15]

[Localité 35]

Représentée par Me Sandrine NELSOM, avocat au barreau de PARIS, toque : B0966

S.A. ABEILLE IARD & SANTE anciennement dénommée AVIVA ASSURANCES, en sa qualité d'assureur de la société CHAUDRONNERIE BRIGOLAISE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 38]

Représentée par Me Naïma AHMED-AMMAR, avocat au barreau de PARIS, toque : R050

S.A. AIG EUROPE anciennement AIG EUROPE LIMITED, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 40]

Représentée par Me Valentine JUTTNER de la SCP ASSUS-JUTTNER, avocat au barreau de PARIS

S.A. SWISSLIFE ASSURANCES DE BIENS en sa qualité d'assureur de la société THERMATIC, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 27]

[Localité 39]

Représentée par Me Benjamin MOISAN de la SELARL BAECHLIN MOISAN Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L34

S.A. SWISSLIFE FRANCE, recherchée en qualité d'assureur de la société THERMATIC prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette

qualité audit siège

[Adresse 27]

[Localité 39]

Représentée par Me Benjamin MOISAN de la SELARL BAECHLIN MOISAN Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L34

MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES en sa qualité d'assureur de la société THERMATIC, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 8]

[Localité 29]

Représentée par Me Guillaume AKSIL de la SCP LINCOLN AVOCATS CONSEIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0293, substitué à l'audience par Me Rudy KHALIL

Mutuelle MMA IARD en sa qualité d'assureur de la société THERMATIC, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 8]

[Localité 29]

Représentée par Me Guillaume AKSIL de la SCP LINCOLN AVOCATS CONSEIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0293, substitué à l'audience par Me Rudy KHALIL

S.A.R.L. NBJ ARCHITECTES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 22]

[Localité 18]

Représentée par Me Anne-Marie MAUPAS OUDINOT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0653

S.A.R.L. SDI prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 25]

[Localité 19]

Représentée par Me Anne-Marie MAUPAS OUDINOT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0653

MUTUELLE DES ARCHITECTES FRANÇAIS société d'assurance mutuelle à cotisations variables, entreprise régie par le code des assurances, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 12]

[Localité 31]

Représentée par Me Anne-Marie MAUPAS OUDINOT, avocat au barreau de PARIS

Société BUREAU ALPES CONTROLES - BAC, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 14]

[Localité 30]

Représentée par Me Anne-Marie MAUPAS OUDINOT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0653

S.A. EUROMAF - ASSURANCE DES INGENIEURS ET ARCHITECTES EUROPEENS prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 12]

[Localité 33]

Représentée par Me Anne-Marie MAUPAS OUDINOT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0653

S.A.S. BAREAU

[Adresse 42]

[Localité 7]

N'a pas constitué avocat - assignation le 12 juin 2023 à personne morale

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 14 mars 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Valérie GUILLAUDIER, conseillère faisant fonction de présidente

Mme Laura TARDY, conseillère

Mme Viviane SZLAMOVICZ, conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme Valérie GUILLAUDIER, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Madame Manon CARON

ARRET :

- réputé contardictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, délibéré initialement prévu le 31 mai 2024, prorogé au 7 juin 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Valérie GUILLAUDIER, conseillère faisant fonction de présidente et par Céline RICHARD, greffière, présente lors de la mise à disposition.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

La société La Garenne de Sèvres, devenue la société des Services de l'Automobile et de la Mobilité (la société SAM), a, en qualité de maître de l'ouvrage, entrepris la construction et l'aménagement d'un centre de formation professionnelle à [Localité 35].

Sont notamment intervenus à l'opération :

- La société d'architecture Arnaud Woiret,

- La société NBJ architectes,

- Les bureaux d'études P3 ingénierie, [E] [B], SDI,

- Le bureau Alpes contrôles,

- Les sociétés Eurovia Provence Alpes Côte d'Azur, Verdino constructions, aux droits de laquelle vient la société Travaux du midi Var, Bouisse CMBC, devenue CMBC Métal, Bareau, Chaudronnerie brignolaise, Inéo MPLR et Thermatic, en charge des différents travaux.

Par acte du 15 avril 2009, la société Bouisse CMBC a assigné la société SAM devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Draguignan en paiement du solde du marché.

Par ordonnance du 15 juillet 2009, le juge des référés a ordonné une expertise, l'expert désigné ayant été remplacé par ordonnance du 11 septembre 2009.

Par actes délivrés en janvier, février et mars 2010, la société SAM a assigné les intervenants à l'opération de construction aux fins que les opérations d'expertise leur soient rendues communes et que la mission soit étendue aux désordres et dommages mentionnés dans l'assignation.

Par acte du 26 février 2010, la société SAM a également assigné la MAIF, assureur dommages-ouvrage, devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Draguignan.

Par actes des 12 mai et 17 juin 2010, la société SAM a assigné la MAF, en qualité d'assureur des architectes et de la société SDI, la société Euromaf, en qualité d'assureur de la société Bureau Alpes contrôles, la société Covéa Risks, aux droits de laquelle viennent les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles, en qualité d'assureur de M. [B], la société Sagena, désormais la SMA, en qualité d'assureur des sociétés Eurovia, Verdino construction et Inéo, la société AIG Europe, en qualité d'assureur de la société Inéo, la SMABTP, en qualité d'assureur de la société Bareau, la société Aviva assurances, devenue la société Abeilles IARD et santé, en qualité d'assureur de la société Chaudronnerie brignolaise, la société Swisslife, en qualité d'assureur de la société Thermatic, aux fins que leur soient rendues communes les ordonnances du 15 juillet 2009 et 11 septembre 2009 et que la mission soit étendue aux désordres et dommages mentionnés dans les assignations.

Par ordonnance du 2 juillet 2010, le juge des référés a déclaré communes et opposables aux intervenants à l'opération de construction et à leurs assureurs les ordonnances de référé du 15 juillet 2009 et du 11 septembre 2009 et étendu la mission de l'expert à l'examen des désordres allégués par le maître de l'ouvrage dans ses assignations des 8, 11, 12, 13, 14, 20 et 29 janvier, 25 et 26 février, 1er et 2 mars 2010, 26 février 2010,12 mai 2010 et 17 juin 2010 et aux rapports contractuels liant le maître de l'ouvrage aux entreprises appelées dans la cause.

Par actes des 6, 9, 10 et 12 septembre 2013, la société SAM a assigné les locateurs d'ouvrage et leur assureurs afin que la mission de l'expert soit étendue à de nouveaux désordres.

Par ordonnance du 23 octobre 2013, le juge des référés du tribunal de grande instance de Draguignan a étendu la mission de l'expert à ces nouveaux désordres.

Par ordonnance du 24 décembre 2013, le juge des référés du tribunal de grande instance de Draguignan a déclaré communes et opposables à la SELARL Saint Rapt et Bertholet et à maître [T], en qualités de commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde et de mandataire judiciaire de la société Bouisse CMBC, l'ordonnance du 15 juillet 2019 et les ordonnances subséquentes.

Par actes de février 2016, la société SAM a assigné les intervenants à l'opération de construction et leurs assureurs afin que les opérations soient étendues à de nouveaux désordres.

Par ordonnance du 6 avril 2016, le juge des référés du tribunal de grande instance de Draguignan a étendu la mission de l'expert à ces nouveaux désordres.

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 1er décembre 2016.

Par actes des 24, 28, 29, 30 juin et 5 juillet 2021, la société SAM a assigné les intervenants à l'opération de construction et leurs assureurs ayant été attraits aux opérations d'expertise devant le tribunal judiciaire de Paris en réparation de son préjudice.

Par acte du 2 novembre 2021, la société Thermatic a appelé en garantie les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles.

Les sociétés P3G ingénierie, SMA, SMABTP, Travaux du Midi Var, NBJ Architectes et la MAF, SDI, CMBC Métal, Thermatic, Chaudronnerie brignolaise, AIG en sa qualité d'assureur de la société Ineo, L'Auxiliaire en sa qualité d'assureur de la société CMBC Métal, M. [B] et ses assureurs les sociétés MMA IARD et MMA IARD Assurances Mutuelles, Swisslife, Abeille IARD et santé ont demandé au juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris qu'il déclare l'action de la société SAM forclose pour les désordres visés dans les ordonnances de référé du 15 juillet 2009 et 2 juillet 2010.

La société Inéo a également demandé que l'action de la société SAM en indemnisation des désordres d'électricité et au titre du solde du marché soit déclarée prescrite.

La société Swisslife a soulevé le défaut de qualité et d'intérêt à agir du maître de l'ouvrage à son encontre en qualité d'assureur de la société Thermatic.

La société Abeille IARD et santé, en sa qualité d'assureur de la société Chaudronnerie brignolaise, a également soulevé le défaut d'intérêt à agir du maître de l'ouvrage au titre des désordres déjà indemnisés.

Enfin, les sociétés MMA IARD ont demandé que l'action en garantie de la société Thermatic soit déclarée prescrite à leur égard.

Par ordonnance en date du 21 mars 2023, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris a statué en ces termes :

Déclare irrecevables les demandes formées par la société SAM à l'encontre des sociétés P3G Ingénierie, SMA, SMABTP, Travaux du Midi Var, NBJ Architectes et la MAF, SDI, CMBC Métal, Thermatic, Chaudronnerie brignolaise, AIG en sa qualité d'assureur de la société Ineo, L'Auxiliaire en sa qualité d'assureur de la société CMBC Métal, Swisslife en sa qualité d'assureur de la société Thermatic, Abeille IARD et santé (anciennement Aviva assurances) en sa qualité d'assureur de la société Chaudronnerie brignolaise, M. [B] et ses assureurs, les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles, venues aux droits de la société Covéa Risks au titre des désordres visés dans les assignations en référé ayant donné lieu aux ordonnances de référé du 15 juillet 2009 et 2 juillet 2010 et rappelés dans les motifs de la présente décision ;

Rejette les autres fins de non-recevoir soulevées par la société Swisslife France et la société Abeille IARD et santé ;

Déclare irrecevables les demandes de la société Thermatic à l'égard de son assureur les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles ;

Rejette les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Réserve les dépens en fin d'instance,

Renvoie l'examen de l'affaire à l'audience de mise en état du 4 septembre 2023 à 13h40 pour conclusions au fond des défendeurs.

Par déclaration en date du 20 avril 2023, la société SAM a interjeté appel de l'ordonnance, intimant devant la cour d'appel de Paris la société NBJ Architectes, la société SDI, la MAF, la société Bureau Alpes Contrôles, la société Euromaf, M. [B], les sociétés MMA IARD, en qualité d'assureurs de M. [B], la société P3G Ingénierie, la SMABTP, la société CMBC Métal, la société L'Auxiliaire, la société Travaux du Midi Var, la société Eurovia, la SMA, la société Bareau, la société Chaudronnerie brignolaise, la société Abeille IARD et santé, la société Ineo Midi Pyrénées Languedoc Roussillon, la société AIG Europe, la société Thermatic, les sociétés MMA IARD, en qualité d'assureurs de la société Thermatic et la société Swisslife assurances.

Par déclaration en date 6 juin 2023, la société Thermatic a interjeté appel de l'ordonnance, intimant devant la cour d'appel de Paris la société SAM, les sociétés MMA IARD, en qualité d'assureurs de la société Thermatic, la société Euromaf, la société Bureau Alpes Contrôles, M. [B], les sociétés MMA IARD en qualité d'assureurs de M. [B], la SMA, la SMABTP, la société Travaux du Midi Var, la société P3G Ingénierie, la société CMBC Métal, la société Chaudronnerie brignolaise, la société AIG Europe, la société Eurovia, la société de Saint Rapt et Bertholet, en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société Bouisse CMBC, Maître [Z] [T], en qualité d'administrateur judiciaire de la société Bouisse CMBC, la société NBJ Architectes, la société SDI, la MAF, la SMABTP, en qualité d'assureur de la société P3G Ingénierie, la société Abeille IARD et santé, la société Ineo Midi Pyrénées Languedoc Roussillon, la société Swisslife assurances et la société L'Auxiliaire.

Par ordonnance en date du 14 septembre 2023, les procédures ont été jointes.

EXPOSE DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 13 février 2024, la société SAM demande à la cour de :

Infirmer l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris le 21 mars 2023 en ce qu'elle a :

- déclaré irrecevables les demandes formées par la société SAM à l'encontre des sociétés P3G Ingénierie, SMA, SMABTP, Travaux du Midi Var, NBJ Architectes et la MAF, SDI, CMBC Metal, Thermatic, Chaudronnerie brignolaise, AIG en sa qualité d'assureur de la société Ineo, L'Auxiliaire en sa qualité d'assureur de la société CMBC Métal, Swisslife en sa qualité d'assureur de la société Thermatic, Abeille en sa qualité d'assureur de la société Chaudronnerie Brignolaise, M. [B] et ses assureurs les sociétés MMA venues aux droits de la société Covéa Risks au titre des désordres visés dans les assignations en référé ayant donné lieu aux ordonnances de référé du 15 juillet 2009 et 2 juillet 2010 ;

- déclaré irrecevables les demandes de la société Thermatic à l'égard des sociétés MMA ;

- rejeté la demande de la société SAM au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- réservé les dépens en fin d'instance ;

Statuant à nouveau

Juger que la société SAM n'est aucunement forclose ni prescrite en ses demandes formulées à l'encontre de l'ensemble des défendeurs à la procédure en ouverture de rapport initiée par elle en juin 2021 ;

En conséquence, rejeter les demandes d'irrecevabilité tirées de la forclusion et de la prescription élevées par l'ensemble desdits défendeurs, demandeurs à l'incident ;

Juger recevables les demandes de la société Thermatic à l'encontre des sociétés MMA ;

Confirmer l'ordonnance attaquée pour le surplus ;

Débouter les intimés de leurs appels incidents en ce qu'ils sont mal fondés, à l'exception de la demande formulée à titre subsidiaire par la société Thermatic au titre de son appel incident relatif à l'effet interruptif de prescription et ou de forclusion des extensions de missions ;

Rejeter toutes autres demandes, fins et prétentions formulées par les intimés à l'encontre de la société SAM ;

Condamner chacun des intimés à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner in solidum les intimés aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 30 août 2023, la société Thermatic demande à la cour de :

Infirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du 21 mars 2023 en ce qu'elle a :

- déclaré irrecevables les demandes formées par la société SAM à l'encontre des sociétés P3G Ingénierie, SMA, SMABTP, Travaux du Midi Var, NBJ Architectes et la MAF, SDI, CMBC Métal, Thermatic, Chaudronnerie brignolaise, AIG, en sa qualité d'assureur de la société Ineo, L'Auxiliaire en sa qualité d'assureur de la société CMBC Métal, Swisslife en sa qualité d'assureur de la société Thermatic, Abeille en sa qualité d'assureur de la société Chaudronnerie Brignolaise, M. [B] et ses assureurs les sociétés MMA venues aux droits de la société Covéa Risks au titre des désordres visés dans les assignations en référé ayant donné lieu aux ordonnances de référé du 15 juillet 2009 et 2 juillet 2010 et rappelés dans les motifs de la présente décision,

- déclaré irrecevables les demandes de la société Thermatic à l'égard de son assureur les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles,

- rejeté les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- réservé les dépens en fin d'instance.

Et statuant à nouveau,

Sur l'action de la société SAM :

Déclarer la société SAM irrecevable car forclose en tous points;

A titre subsidiaire, dans l'hypothèse où la société SAM ne serait pas déclarée irrecevable,

Dire que les extensions de mission résultant des ordonnances d'octobre 2013 et 6 avril 2016 ont eu un effet interruptif de prescription à l'égard de tous et pour tous les désordres et la déclarer recevable en toutes ses demandes ;

Sur l'appel en cause des MMA IARD :

Déclarer la prescription biennale posée par l'article L114-1 du code des assurances inopposable à la société Thermatic;

Débouter les sociétés MMA et MMA IARD assurances mutuelles de leur demande tendant à voir déclarer la société Thermatic irrecevable en ses demandes à leur encontre.

En toute hypothèse,

Condamner la partie succombant à payer à la société Thermatic une somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles engagés en première instance et de 3 000 euros en cause d'appel ainsi qu'aux entiers dépens tant de première instance que d'appel.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 26 février 2024, la société Abeille IARD et santé demande à la cour de :

Rejeter l'appel de la société SAM ;

Confirmer l'ordonnance rendue par le juge de la mise en date du 21 mars 2023 en ce qu'elle a déclaré forcloses les demandes de la société SAM à l'encontre de la société Abeille au titre des dommages objet de l'ordonnance de référé des 15 juillet 2009 et 2 juillet 2010 ;

Juger forcloses les demandes formulées par la société SAM à l'encontre de la société Abeille au titre des désordres objets de l'ordonnance de référé rendue le 15 juillet 2009 et le 2 juillet 2010;

En conséquence, déclarer irrecevables les demandes formulées par la société SAM à l'encontre de la société Abeille, assignée en qualité d'assureur de M. [R] [F], exerçant sous l'enseigne Chaudronnerie brignolaise, au titre des désordres objets de l'ordonnance de référé rendue le 2 juillet 2010 à savoir pour les désordres suivants y compris au titre des préjudices immatériels consécutifs à ces désordres :

- infiltrations au niveau des tympans des ateliers,

- défaut d'étanchéité à l'air des portes mémo PF4, PF6 ; PF7, PF8, PF13 (correspondant à des salles de cours ou de réunion),

- défaut d'étanchéité des 6 portes des salles mémo,

- défauts d'étanchéité des 7 portes des locaux techniques,

- traces de rouille,

- défauts de fonctionnement du portail.

En tout état de cause, infirmer l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état le 21 mars 2023 en ce qu'elle a écarté la fin de non-recevoir opposée par la société Abeille ;

Déclarer irrecevables les demandes formulées par la société SAM à l'encontre de la société Abeille, recherchée en qualité d'assureur de M. [R] [F], exerçant sous l'enseigne Chaudronnerie Brignolaise faute d'intérêt à agir ;

Condamner la société SAM à payer à la société Abeille la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

La condamner aux entiers dépens distraits au profit de Maître Naïma Ahmed Ammar, qui affirme y avoir pourvu.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 4 décembre 2023, la SASU Chaudronnerie Brignolaise demande à la cour de :

Recevoir l'intégralité des moyens et prétentions de la société Chaudronnerie Brignolaise;

Confirmer purement et simplement l'ordonnance rendue le 21 mars 2023 en ce qu'elle a déclaré irrecevables les demandes formées par la société SAM notamment à l'égard de la société Chaudronnerie Brignolaise, au titre des désordres visés dans les assignations en référé ayant donné lieu aux ordonnances de référé du 15 juillet 2009 et 2 juillet 2010 ;

Débouter la société SAM de toutes ses demandes, fins et prétentions ;

Donner acte à la société Chaudronnerie Brignolaise de ce qu'elle s'en rapporte à la décision de la cour d'appel de Paris à venir sur les mérites de l'appel interjeté par la société Thermatic ;

Condamner la société SAM à verser à la société Chaudronnerie Brignolaise la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner la société SAM aux entiers dépens de la présente instance.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 1er décembre 2023, la société L'Auxiliaire demande à la cour de :

Confirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du 21 mars 2023 en ce qu'elle a jugé que les demandes formées par la société SAM à l'encontre de la société L'Auxiliaire en sa qualité d'assureur de la société CMBC Métal, au titre des désordres objet des ordonnances de référé des 15 juillet 2009 et 2 juillet 2010, sont irrecevables ;

Donner acte à la concluante de ce qu'elle s'en rapporte à la décision de la cour d'appel sur les mérites de l'appel interjeté par la société Thermatic ;

Rejeter tout appel incident et demande à l'encontre de la société L'Auxiliaire par toute partie à la procédure ;

Condamner la société SAM et la société Thermatic à payer à la société L'Auxiliaire la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de l'AARPI Teytaud-Saleh, représentée par Maître François Teytaud, avocat au Barreau de Paris, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 4 octobre 2023, les sociétés MMA IARD et MMA assurances mutuelles, en qualité d'assureur de la société Thermatic, demandent à la cour de :

Confirmer l'ordonnance rendue le 21 mars 2023 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris en ce qu'elle a déclaré irrecevables, car forcloses, les demandes formées par la société SAM au titre des désordres visés dans les assignations en référé ayant donné lieu aux ordonnances de référé du 15 juillet 2009 et juillet 2010 ;

Confirmer l'ordonnance rendue le 21 mars 2023 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris en ce qu'elle a déclaré irrecevables, car prescrites, les demandes formées par la société Thermatic à l'égard de son assureur, les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles;

Confirmer, plus généralement, l'ordonnance en toutes ses dispositions ;

En tout état de cause :

Condamner in solidum la société SAM et la société Thermatic à verser aux sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles, ès qualités d'assureur de la société Thermatic, la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner in solidum la société SAM et la société Thermatic aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Guillaume Aksil -SELARL Lincoln Avocats Conseil.

Dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 19 septembre 2023, les sociétés Bureau Alpes Contrôles et Euromaf demandent à la cour de :

Ordonner la jonction des procédures d'appel RG : 23/07417 et RG : 23/10154 ;

Donner acte aux concluantes de ce qu'elles s'en rapportent à justice sur les mérites de l'appel de la société Thermatic ;

Dire la société SAM non fondée en son appel ;

Confirmer l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état le 21 mars 2023 en ce qu'elle a déclaré irrecevables les demandes formulées par la société SAM au titre des désordres visés dans les assignations en référé et ayant donné lieu aux ordonnances de référé du 15 juillet 2009 et 2 juillet 2010;

Rejeter les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Réserver les dépens en fin d'instance ;

Faire droit à l'appel incident des concluantes ;

Infirmer l'ordonnance en ce qu'elle n'a pas dit que les demandes étaient irrecevables à l'égard de la société Bureau Alpes Contrôles et la compagnie Euromaf ;

Statuant à nouveau :

Déclarer irrecevables les demandes formulées par la société SAM à l'encontre de la société Bureau Alpes Contrôles et de la compagnie Euromaf au titre des désordres objets de l'ordonnance du 15 juillet 2009 et 2 juillet 2010 comme étant forcloses ;

Déclarer irrecevables comme étant prescrites les demandes formulées par la société SAM à l'encontre de la société Bureau Alpes Contrôles et de la société Euromaf au titre des désordres visés dans les assignations en référé ayant donné lieu aux ordonnances de référé du 15 juillet 2009 et 2 juillet 2010 ;

Rejeter toutes demandes à l'égard des concluantes ;

Condamner la société SAM à payer à la société Bureau Alpes Contrôles et la société Euromaf la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel, avec le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 19 septembre 2023, les sociétés NBJ Architectes, SDI et la MAF demandent à la cour de :

Donner acte aux concluantes de ce qu'en l'état, elles s'en rapportent à justice sur les mérites de l'appel de la société Thermatic ;

Dire l'appel de la société SAM non fondé ;

Confirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du 21 mars 2023 ;

Rejeter les demandes de la société SAM comme étant irrecevables ;

Condamner la société SAM à payer à la société MAF, la société NBJ Architectes, la société SDI la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 12 septembre 2023, la société Ineo MPLR demande à la cour de :

Infirmer l'ordonnance qui a rejeté les conclusions de la société Ineo visant à voir déclarer irrecevable à l'égard de la société Ineo la société SAM du chef de la modification de l'éclairage extérieur, du dysfonctionnement de la caméra Nord, du remplacement des 16 gâches ayant fait l'objet d'une réserve à la réception et au titre du solde du marché trop-payé.

Statuant à nouveau,

Déclarer irrecevables car manifestement prescrites les demandes de la société SAM à l'encontre de la société Ineo du chef de l'éclairage extérieur, des gâches électriques, du dysfonctionnement de la caméra nord, et du solde du marché ;

Débouter l'ensemble des parties de leurs demandes de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et plus généralement de l'ensemble de leurs demandes formulées à l'encontre de la société Ineo ;

Condamner la société SAM ou tout autre succombant à la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance dont le recouvrement sera directement poursuivi par la SELARL 2H Avocats, en la personne de Maître Patricia Hardouin, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 12 septembre 2023, la société P3G Ingénierie, la SMABTP, la société Travaux du midi, la société Eurovia Provence Alpes Côte d'Azur et la SMA demandent à la cour de :

Ordonner la jonction des procédures d'appel enregistrées sous le n°RG 23/07417 et 23/10154 ;

Juger forclose et/ou prescrite l'action engagée par la société SAM à l'égard des concluantes ;

En conséquence,

Confirmer l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris en date du 23 mars 2023 en ce qu'elle a déclaré irrecevables comme forcloses les demandes de la société SAM formées à l'encontre des concluantes ;

Donner acte aux concluantes qu'elles s'en rapportent à justice sur les mérites de l'appel de la société Thermatic ;

Rejeter toutes demandes formées à l'encontre des concluantes ;

Condamner la société SAM à payer à chacune des concluantes la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens qui pourront être recouvrés par la SELARL 2H Avocats, en la personne de Maître Patricia Hardouin, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 4 septembre 2023, les sociétés Swisslife assurances de biens et Swisslife France demandent à la cour de :

Déclarer la société Swisslife France recevable à se joindre à la présente instance et la recevoir en son appel incident ;

Infirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du 21 mars 2023 en ce qu'elle a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la société Swisslife tirée de son défaut de qualité d'assureur de la société Thermatic ;

Déclarer irrecevables la société SAM et tous autres demandeurs en leurs demandes dirigées à l'encontre de la société Swisslife France , cette dernière n'ayant pas qualité d'assureur de la société Thermatic ;

Débouter la société SAM des fins de son appel principal et la société Thermatic des fins de son appel incident ;

Confirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du 21 mars 2023 en ce qu'elle a déclaré irrecevables les demandes formées par la société SAM au titre des désordres visés dans les assignations en référé ayant donné lieu aux ordonnances de référé des 15 juillet 2009 et 2 juillet 2010 ;

Condamner la société SAM, partie qui succombe, aux dépens dont distraction au profit de Maître Benjamin Moisan, avocat, aux offres de droit ;

Condamner la société SAM à payer à la société Swisslife France et à la société Swisslife Assurances de biens la somme de 3 000 euros chacune au titre des frais irrépétibles qu'elles ont dû engager dans la présente instance.

Dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 31 août 2023, M. [B] et les sociétés MMA IARD et MMA assurances mutuelles demandent à la cour de :

Confirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du 21 mars 2023 ;

Rejeter les demandes de la société SAM comme irrecevables ;

Débouter toutes les parties de leurs demandes, fins et conclusions ;

Condamner la société SAM à payer à M. [B] et aux MMA la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

Condamner la société SAM aux entiers dépens d'appel.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 5 août 2023, la société CMBC Métal demande à la cour de :

Confirmer l'ordonnance rendue le 21 mars 2023 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris ;

Débouter la société SAM de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

Condamner la société SAM à payer à la société CMBC Métal la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner la société SAM aux entiers dépens.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 31 juillet 2023, la société AIG Europe demande à la cour de :

Accueillir la société AIG Europe en les présentes écritures et les y déclarer bien fondées ;

Confirmer l'ordonnance rendue le 21 mars 2023 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris en ce qu'elle a déclaré irrecevables, car forcloses, les demandes formées par la société SAM au titre des désordres visés dans les assignations en référé ayant donné lieu aux ordonnances de référé du 15 juillet 2009 et juillet 2010 ;

Confirmer, plus généralement, l'ordonnance en toutes ses dispositions ;

En tout état de cause :

Condamner la société SAM à verser à la société AIG Europe la somme de 11 241 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner la société SAM aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître [V] [O] sous sa due affirmation de droit.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 29 février 2024.

MOTIVATION

Sur la fin de non-recevoir tirée de la forclusion de l'action de la société SAM

Moyens des parties

Les sociétés P3G ingenierie, SMABTP, Travaux du midi, Eurovia et SMA soutiennent que les demandes de la société SAM sont irrecevables, son action étant forclose, dès lors qu'elles ont été assignées le 24 juin 2021 et que le délai de forclusion avait couru à leur égard à compter de l'ordonnance du 2 juillet 2010. Elles indiquent que l'assignation en référé expertise sollicitant une extension de mission n'a d'effet interruptif de prescription et de forclusion que pour les parties qui y sont mentionnées et non pour les parties déjà présentes à l'expertise.

Les sociétés NBJ architectes, SDI et la MAF soutiennent également qu'elles ont été assignées les 24 et 28 juin 2021, c'est-à-dire plus de dix ans après l'ordonnance de référé du 2 juillet 2010, et que les demandes de la société SAM sont irrecevables à leur égard, comme forcloses.

Les sociétés CMBC Métal, Chaudronnerie brignolaise, M. [B] et les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles, en qualité d'assureur de M. [B], AIG Europe, L'Auxiliaire, Swisslife assurances de biens et Swisslife France et Abeille IARD et santé soutiennent également qu'elles ont été assignées plus de dix ans après l'ordonnance du 2 juillet 2010 et que les demandes de la société SAM sont irrecevables à leur égard, le délai de forclusion étant expiré.

La société Inéo demande l'infirmation de l'ordonnance en ce qu'elle a rejeté ses conclusions tendant à voir déclarer irrecevables à son égard les demandes de la société SAM au titre de la modification de l'éclairage extérieur, du dysfonctionnement de la caméra Nord, du remplacement des seize gâches ayant fait l'objet d'une réserve à la réception et au titre du solde du marché trop payé. Elle soutient que la procédure n'étant pas assortie d'une ordonnance de clôture, elle pouvait déposer des écritures, qui rejoignaient la position de l'ensemble des défendeurs, jusqu'au jour de l'audience.

Les sociétés Bureau Alpes contrôles et Euromaf demandent l'infirmation de l'ordonnance en ce qu'elle n'a pas dit que les demandes étaient irrecevables à leur égard au titre des désordres objets de l'ordonnance du 15 juillet 2009 et du 2 juillet 2010.

La société Thermatic demande l'infirmation de l'ordonnance en ce qu'elle a déclaré irrecevables les demandes de la société SAM au titre des désordres visés dans les assignations ayant donné lieu aux ordonnances de référé du 15 juillet 2009 et du 2 juillet 2010 et que celle-ci soit déclarée irrecevable car forclose en tous points. Elle soutient que toute demande d'extension a un effet interruptif de prescription à l'égard de toutes les parties et pour tous les chefs de préjudice, que la décision du juge de la mise en état scinde la procédure et va entraîner la paralysie de certaines demandes et que l'action du maître de l'ouvrage doit être considérée comme intégralement irrecevable ou recevable sur le tout.

Selon la société SAM, lorsque la mission de l'expert judiciaire est étendue à d'autres désordres par une ordonnance de référé sur une assignation en extension de mission, la prescription est interrompue à l'égard de toutes les parties, y compris celles appelées uniquement à la procédure initiale, dès lors que celles-ci ont été nécessairement réassignées, et pour tous les chefs de désordres, c'est-à-dire aussi bien les nouveaux désordres que ceux déjà compris dans la mission initiale de l'expert qui va ainsi procéder à leur examen dans leur globalité. Elle indique qu'elle a fait délivrer des assignations en extension de mission en 2010, 2013 et 2016 à l'encontre de l'ensemble des parties aux opérations d'expertise. Elle précise que par ordonnance du 2 juillet 2010, le juge des référés a fait droit à ses demandes, de sorte qu'un nouveau délai de forclusion de dix ans a recommencé à courir à cette date, et que les assignations délivrées entre janvier et juin 2010 visaient l'ensemble des désordres affectant l'ouvrage au titre des travaux de voirie, terrassement et plantations, gros-oeuvre et bâtiment, charpentes métalliques, couverture et bardage, étanchéité, menuiseries intérieures, serrurerie, électricité, chauffage, ventilation, plomberie et revêtement des sols et sols souples. Elle indique que, par actes en date des 6, 9, 10 et 12 septembre 2013, elle a à nouveau assigné l'ensemble des locateurs d'ouvrage et leurs assureurs afin que la mission de l'expert soit étendue à de nouveaux désordres évoqués en cours d'expertise, que l'assignation rappelait qu'une expertise était déjà en cours pour l'ensemble des désordres affectant l'ouvrage, tels que listés par l'expert judiciaire dans sa note aux parties du 18 avril 2013, annexée et délivrée avec l'assignation, et que l'ordonnance de référé en date du 23 octobre 2013 a eu un effet interruptif de prescription à l'égard de toutes les parties, réassignées en 2013, et pour tous les chefs de préjudice relatifs aux désordres, de même que l'ordonnance de référé du 6 avril 2016 qui a fait courir un nouveau délai de forclusion de 10 ans, de sorte qu'elle n'était pas forclose en juin et juillet 2021 lorsqu'elle a assigné au fond les locateurs d'ouvrage et leurs assureurs. La société SAM fait également valoir qu'elle a nécessairement de nouveau interrompu le délai de forclusion à l'égard de la société Thermatic du fait de son appel le 16 novembre 2012 de l'ordonnance du juge de la mise en état du 26 octobre 2012 et de ses conclusions d'appel du 4 septembre 2023, qu'elle a interrompu le délai de forclusion à l'égard de la société Bouisse CMBC du fait de la déclaration de créance effectuée le 5 mars 2012 et que la reconnaissance de responsabilité par les sociétés Bareau, Bouisse CMBC et Eurovia est interruptive du délai décennal.

Réponse de la cour

Aux termes de l'article 1792-4-1 du code civil, toute personne physique ou morale dont la responsabilité peut être engagée en vertu des articles 1792 à 1792-4 du présent code est déchargée des responsabilités et garanties pesant sur elle, en application des articles 1792 à 1792-2, après dix ans à compter de la réception des travaux ou, en application de l'article 1792-3, à l'expiration du délai visé à cet article.

Aux termes de l'article 1792-4-3 du code civil, en dehors des actions régies par les articles 1792-3, 1792-4-1 et 1792-4-2, les actions en responsabilité dirigées contre les constructeurs désignés aux articles 1792 et 1792-1 et leurs sous-traitants se prescrivent par dix ans à compter de la réception des travaux.

Le délai de dix ans pour agir contre les constructeurs est un délai de forclusion, qui n'est pas, sauf dispositions contraires, régi par les dispositions concernant la prescription (3e Civ., 10 juin 2021, pourvoi n° 20-16.837, publié).

Une assignation en justice ne peut interrompre le délai de garantie décennale des constructeurs qu'en ce qui concerne les désordres qui y sont expressément mentionnés (3e Civ., 31 mai 1989, pourvoi n° 87-16.389, Bulletin 1989 III N° 122 ; 3e Civ., 20 mai 1998, pourvoi n° 95-20.870, Bull. 1998, III, n° 104; 3e Civ., 15 avril 2021, pourvoi n° 19-18.619, 19-18.093, publié).

En l'espèce, dans le cadre du litige initial opposant la société Bouisse CMBC et la société La Garenne de Sèvres, devenue la société SAM, le juge des référés a, par ordonnance du 15 juillet 2009, désigné un expert, à la demande du maître de l'ouvrage, ayant notamment pour mission de :

- examiner l'ouvrage litigieux, vérifier la réalité des désordres invoqués par la partie demanderesse dans son acte introductif d'instance ;

- rechercher si les travaux ont été effectués conformément aux conventions entre parties, aux normes et règlements en vigueur ainsi qu'aux règles de l'art, en décrivant, le cas échéant, les malfaçons ou moins-values constatées ;

Par ordonnance du 11 septembre 2009, l'expert empêché a été remplacé.

Par actes des 8, 11,12, 13, 14, 20 et 29 janvier 2010, 25 et 26 février 2010, 1er et 2 mars 2010, la société La Garenne de Sèvres a assigné la société d'architecture Arnaud Woiret, le Cabinet NB architectes, la société P3G Ingénierie, M. [B], la société SDI, la société Bureau Alpes contrôles, la société Eurovia méditerranée, la société Verdino constructions, la société SAPE, la société Bareau, la société Chaudronnerie brignolaise, la société Inéo MPLR, la société Thermatic, la société VB Résine et la MAIF devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Draguignan aux fins de leur rendre commune et opposable l'ordonnance de référé du 15 juillet 2009 et d'étendre la mission de l'expert, dans les mêmes termes que cette ordonnance, à tous les désordres et dommages affectant l'ensemble immobilier mentionnés dans l'assignation ainsi qu'à ceux constatés sur place.

L'assignation précisait, en les détaillant, qu'il s'agissait des désordres affectant les travaux de voirie, terrassement et plantations (lot n°1, société Eurovia méditerranée), les travaux de gros oeuvre et bâtiment (lot n°2, société Verdino construction), les travaux d'étanchéité (lot n°4, société SAPE), les travaux de menuiseries intérieures-équipements (lot n°7, société Bareau), les travaux de serrurerie (lot n°9, société Chaudronnerie brignolaise), les travaux d'électricité (lot n°12, société Inéo MPLR), les travaux de chauffage, ventilation et plomberie (lot n°12, la société Thermatic), les travaux de revêtements des sols (lot n°15, la société VB Résine).

Par ordonnance du 31 mars 2010, le juge des référés du tribunal de grande instance de Draguignan a ordonné la réouverture des débats pour que soit appelée dans la cause la société Bouisse CMBC.

Par actes du 12 mai 2010 et du 17 juin 2010, le maître de l'ouvrage a fait assigner les sociétés CMBC, L'Auxiliaire, la MAF, les sociétés Covéa Risks, Euromaf, Sagena, Chartis europe, anciennement AIG europe, SMABTP, Aviva assurances, Swisslife et le GAN aux fins que les ordonnances des 15 juillet et 11 septembre 2009, et celle du 31 mars 2010, leur soient déclarées communes et opposables, ainsi que les opérations d'expertise.

Par ordonnance du 2 juillet 2010, le juge des référés du tribunal de grande instance de Draguignan a déclaré communes et opposables à toutes les parties l'ordonnance de référé du 15 juillet 2009 et celle du 11 septembre 2009 et étendu la mission précédemment confiée à l'expert à l'examen des désordres allégués par la SCI La Garenne de Sèvres dans ses assignations des 8,11,12,13,14,20 et 29 janvier, 25 et 26 février 2010, 1er et 2 mars 2010, 26 février 2010 (MAIF), 12 mai 2010 et 17 juin 2010 et aux rapports contractuels liant la SCI La Garenne à toutes les entreprises appelées en cause.

Il s'ensuit que le délai de forclusion de dix ans pour agir contre les constructeurs a valablement été interrompu par les assignations susvisées pour les désordres qui y étaient expressément mentionnés.

L'interruption résultant de la demande en justice a produit ses effets jusqu'à l'extinction de l'instance, c'est-à-dire la date à laquelle l'ordonnance de référé a été rendue, soit le 2 juillet 2010.

Un nouveau délai de dix ans a commencé à courir à compter du 2 juillet 2010.

Il en résulte que le maître de l'ouvrage devait assigner les intervenants à l'opération de construction et leurs assureurs au plus tard le 2 juillet 2020 en réparation des désordres expressément mentionnés dans les assignations délivrées en 2010.

Or, force est de constater que le maître de l'ouvrage a assigné au fond les locateurs d'ouvrage et leurs assureurs en juin et juillet 2021, c'est-à-dire au delà du délai de dix ans.

Il soutient que l'assignation qu'il a délivrée en septembre 2013 à l'ensemble des locateurs d'ouvrage et leurs assureurs respectifs aux fins que la mission soit étendue à de nouveaux désordres et l'ordonnance rendue le 23 octobre 2013 qui a fait droit à cette demande ont eu un effet interruptif de prescription à l'égard de toutes les parties et pour tous les chefs de préjudice procédant du sinistre en litige.

Il résulte des termes de cette assignation que le maître de l'ouvrage sollicite l'extension de la mission de l'expert 'aux non- conformités relatives au système de chauffage, climatisation et ventilation listées dans la note technique établie par Monsieur [M] [D] et au nouveau désordre affectant le groupe de climatisation de la salle mémo 5', en les caractérisant de nouveaux désordres.

Si cette assignation a effectivement eu un effet interruptif à l'égard de toutes les parties assignées à nouveau et pour les nouveaux désordres qui y sont mentionnés, celui-ci ne saurait s'étendre aux désordres initiaux qui ont fait l'objet de la demande en justice initiale.

Le fait que la note de l'expert aux parties en date du 18 avril 2013, qui fait état des précédents désordres, ait été annexée à l'assignation, ne saurait suffire à étendre l'effet interruptif aux désordres initiaux, l'assignation délivrée en septembre 2013 ayant un objet manifestement différent de celles délivrées en 2010, l'extension de la mission à de nouveaux désordres.

De même, l'assignation délivrée en février 2016, qui a pour objet d'étendre les opérations d'expertise 'aux anomalies affectant le schéma de principe du système de chauffage, climatisation, ventilation telles que constatées par le sapiteur technicien' et 'au défaut d'étanchéité à l'air des portes localisées dans les réserves n°2, 3, 4, 6 et 7 ainsi que dans les locaux vert (PF15) et TGBT', c'est-à-dire à de nouveaux désordres, ne saurait avoir eu pour effet d'interrompre le délai de forclusion pour les désordres initiaux, le fait que cette assignation précise la mission initialement confiée à l'expert, les ordonnances précédentes et le rapport non clôturé de l'expert étant inopérant.

La société SAM soutient également qu'à l'égard de la société Thermatic, l'appel qu'elle a interjeté le 16 novembre 2012 à l'encontre de l'ordonnance d'incident du juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Draguignan le 26 octobre 2012, a de nouveau interrompu le délai de forclusion.

Cependant, force est de constater que cet appel, dans le cadre d'une autre instance intentée par la société Thermatic en paiement du solde de son marché, d'une ordonnance du juge de la mise en état ayant rejeté sa demande de sursis à statuer et condamné à payer une provision, ne saurait avoir interrompu le délai de forclusion du maître de l'ouvrage pour agir en réparation des désordres initiaux.

La société SAM soutient également que plusieurs constructeurs ont reconnu leur responsabilité en procédant ou en s'engageant à procéder aux réparations, notamment les sociétés Bareau, Bouisse CMBC et Eurovia, ce qui a nécessairement interrompu le délai à leur égard.

Cependant, le délai de dix ans pour agir contre les constructeurs sur le fondement des articles 1792-4-1 et 1792-4-3 du code civil est un délai de forclusion, qui n'est pas, sauf dispositions contraires, régi par les dispositions concernant la prescription.

Il s'ensuit que la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait n'interrompt pas le délai de forclusion ( 3e Civ., 10 juin 2021, pourvoi n° 20-16.837, publié).

En revanche, la déclaration de créance de la société SAM à la procédure de sauvegarde de la société Bouisse CMBC le 5 mars 2012, qui s'analyse en une demande en justice, a nécessairement interrompu le délai de forclusion à son égard. Dès lors, l'action au fond dirigée contre elle par acte d'huissier du 29 juin 2021, c'est-à-dire dans le délai de 10 ans, n'est pas tardive et les demandes de la société SAM dirigées contre cette société sont recevables pour tous les désordres mentionnés dans les assignations en référé ayant donné lieu aux ordonnances de référé du 15 juillet 2009 et 2 juillet 2010.

L'ordonnance du juge de la mise en état sera infirmée sur ce point.

En conséquence, pour l'ensemble de ces motifs, l'ordonnance du juge de la mise en état sera confirmée, mais seulement en ce qu'elle a déclaré irrecevables les demandes formées par la société SAM à l'encontre des sociétés P3G Ingénierie, SMA, SMABTP, Travaux du Midi Var, NBJ Architectes et la MAF, SDI, Thermatic, Chaudronnerie brignolaise, AIG en sa qualité d'assureur de la société Ineo, L'Auxiliaire en sa qualité d'assureur de la société CMBC Métal, Swisslife en sa qualité d'assureur de la société Thermatic, Abeille IARD et santé en sa qualité d'assureur de la société Chaudronnerie Brignolaise, M. [B] et ses assureurs, les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles, venues aux droits de la société Covéa Risks, au titre des désordres visés dans les assignations en référé ayant donné lieu aux ordonnances de référé du 15 juillet 2009 et 2 juillet 2010.

La cour constate que le juge de la mise en état a pris en compte les conclusions d'incident de la société Inéo aux fins de voir déclarer prescrite l'action de la société SAM en indemnisation des désordres d'électricité et au titre du solde du marché et retenu, comme à l'égard des autres parties, la forclusion de l'action, en ce compris celle au titre du trop payé, mais que cela ne figure pas dans le dispositif de sa décision, étant observé que, contrairement à ce qu'affirme la société SAM, il ne résulte pas de l'ordonnance que le juge de la mise en état a écarté les conclusions de la société Inéo puis statué malgré tout sur ses demandes, le dispositif de celle-ci ne mentionnant pas que ses conclusions ont été déclarées irrecevables.

Pour les mêmes motifs que ceux relevés précédemment, l'action de la société SAM à l'encontre de la société Inéo sera déclarée irrecevable au titre des désordres visés dans l'assignation en référé ayant donné lieu à l'ordonnance de référé du 2 juillet 2010.

Il sera ajouté à l'ordonnance sur ce point.

Enfin, la cour constate qu'il ne résulte pas de l'ordonnance du juge de la mise en état que les sociétés Bureau Alpes contrôles et Euromaf l'ont saisi, comme les autres parties, d'une demande d'irrecevabilité des demandes de la société SAM.

Elles ne peuvent donc, en cause d'appel, solliciter l'infirmation de l'ordonnance en ce qu'elle n'a pas déclaré les demandes de la société SAM irrecevables à leur égard, le juge de la mise en état n'étant pas saisi de ce chef.

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en garantie de la société Thermatic à l'encontre des MMA

Moyens des parties

Les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles, en qualité d'assureurs de la société Thermatic, soutiennent que l'article 20 des conditions générales du contrat d'assurance est conforme à l'article L.114-1 du code des assurances, que la prescription biennale est opposable à la société Thermatic, que le point de départ du délai de prescription doit être fixé au jour où l'assignation en référé expertise a été délivrée à la société Thermatic, l'arrêt rendu le 14 décembre 2022 par la Cour de cassation concernant exclusivement les appels en garantie entre constructeurs, et que l'assignation qui lui a été délivrée le 2 novembre 2021, plus de onze ans après l'assignation en référé, est manifestement tardive et les demandes dirigées contre elles irrecevables.

Selon la société Thermatic, l'article R.112-1 du code des assurances exige que le délai de prescription soit mentionné dans la police et les mentions de l'article 20 des conditions générales de la police ne sont pas strictement conformes à l'article L.114-1 du code des assurances et introduisent une ambiguïté qui doit profiter à l'assuré, ce dont il résulte que la prescription biennale lui est inopposable. Elle soutient également que le point de départ de la garantie biennale pour agir à l'encontre de l'assureur est l'assignation en reconnaissance d'un droit, soit l'assignation au fond, et que l'arrêt de la Cour de cassation du 14 décembre 2022 a vocation à s'appliquer à l'action en garantie de l'assuré à l'égard de son assureur.

Réponse de la cour

Aux termes de l'article L.114-1 du code des assurances, toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance.

Quand l'action de l'assuré contre l'assureur a pour cause le recours d'un tiers, le délai de la prescription ne court que du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l'assuré ou a été indemnisé par ce dernier.

Aux termes de l'article R.112-1 du code des assurances, les polices d'assurance doivent rappeler les dispositions des titres Ier et II, du livre Ier de la partie législative du code des assurances concernant la prescription des actions dérivant du contrat d'assurance.

Il résulte de cet article que l'assureur doit rappeler dans le contrat d'assurance, sous peine d'inopposabilité à l'assuré du délai de prescription biennale édicté par l'article L. 114-1, les différentes causes d'interruption de prescription mentionnées à l'article L. 114-2 et le point de départ de la prescription.

Il incombe à l'assureur de prouver qu'il a satisfait aux dispositions de l'article R. 112-1 du code des assurances qui prévoit que les polices d'assurance doivent rappeler les dispositions des titres Ier et II, du livre Ier de la partie législative du code des assurances concernant la prescription des actions dérivant du contrat d'assurance (2e Civ., 18 avril 2019, pourvoi n° 18-13.938, publié).

En l'espèce, la société Thermatic a souscrit auprès des MMA un contrat assurance des entreprises du BTP n°114248696 dont les conditions particulières, signées par le souscripteur, renvoient aux conditions générales du contrat d'assurance des entreprises du bâtiment et de génie civil (pièce n°7 des MMA).

L'article 20 des conditions générales relatif à la prescription stipule que l'assuré dispose d'un délai de deux ans pour intenter une action à compter de l'événement qui y donne naissance, que ce délai ne court, en cas de sinistre, que du jour où l'intéressé en a connaissance, s'il prouve qu'il l'a ignoré jusque là ou qu'il a été dans l'impossibilité d'agir.

Il précise que 'quand l'action de l'assuré contre l'assureur a pour cause le recours d'un tiers (principalement dans le cadre de la recherche de la responsabilité de l'assuré par un tiers), le délai de prescription ne court que du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l'assuré ou a été indemnisé par l'assuré' et que passé ce délai il y a prescription.

Enfin, il mentionne les causes d'interruption de la prescription de manière détaillée et rappelle que l'interruption fait courir un nouveau délai de deux ans.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que l'assureur, qui a rappelé dans le contrat d'assurance le délai de prescription biennale édicté par l'article L. 114-1, les différentes causes d'interruption de prescription et le point de départ de celle-ci, a satisfait aux exigences de l'article R.112-1 du code des assurances.

Contrairement à ce que soutient la société Thermatic, l'article 20 des conditions générales n'introduit aucune ambiguïté pour l'assuré.

Il en résulte que le délai de prescription biennale est opposable à la société Thermatic.

Selon l'article L.114-1 du code des assurances, quand l'action de l'assuré contre l'assureur a pour cause le recours d'un tiers, la prescription biennale ne court que du jour où ce tiers a exercé une action en justice contre l'assuré ou a été indemnisé par ce dernier.

Il résulte d'une jurisprudence constante que toute action en référé est une action en justice au sens de l'article L. 114-1, alinéa 3, du code des assurances (1re Civ., 10 mai 2000, pourvoi n° 97-22.651, Bull., n° 133 ; 2e Civ., 3 septembre 2009, pourvoi n° 08-18.092, Bull., n° 202).

Dès lors, une action en référé-expertise fait courir la prescription biennale de l'action de l'assuré contre l'assureur.

En l'espèce, il résulte des éléments versés aux débats, et il n'est pas contesté par les parties, que la société Thermatic a été assignée devant le juge des référés entre le 8 janvier et le 2 mars 2010.

Elle a assigné son assureur par acte d'huissier du 2 novembre 2021, c'est-à-dire bien au- delà du délai de deux ans prévu par le texte susvisé.

L'action de la société Thermatic à l'encontre des MMA est donc tardive, comme prescrite, et ses demandes à leur encontre manifestement irrecevables.

L'ordonnance du juge de la mise en état sera confirmée de ce chef.

Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité soulevée par la société Swisslife

Moyens des parties

Les sociétés Swisslife assurances de biens et Swisslife France soutiennent que, en application de l'article 32 du code de procédure civile, les demandes de la société SAM dirigées contre elles sont irrecevables puisqu'elle n'est pas l'assureur de la société Thermatic.

Selon la société SAM, l'argumentation des sociétés Swisslife ne relève pas de la compétence du juge de la mise en état, mais de celle des juges du fond, et la société Thermatic a confirmé dans son assignation en intervention forcée qu'elles étaient leur assureur décennal.

Réponse de la cour

Aux termes de l'article 32 du code de procédure civile, est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir.

Cependant, et comme retenu à bon droit par le premier juge, la contestation par les sociétés Swisslife de leur garantie constitue une question de fond, et non une fin de non-recevoir au sens de l'article 122 du code de procédure civile, qui n'est pas de la compétence du juge de la mise en état.

L'ordonnance sera confirmée de ce chef.

Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir soulevée par la société Abeille IARD et santé

Moyens des parties

La société Abeille IARD et santé soutient que la société SAM a déjà été indemnisée pour certains dommages matériels et que ses demandes sont irrecevables faute d'intérêt à agir.

Elle précise que la société SAM ne peut réclamer sa condamnation au titre de préjudices matériels qui affecteraient les travaux réalisés par la société Chaudronnerie brignolaise alors que la position de l'assureur dommages ouvrage à la suite de la déclaration de sinistre qui lui a été adressée du chef des désordres affectant ce lot n'a pas été communiquée, que rien n'exclut qu'elle n'ait déjà été indemnisée pour certains dommages matériels et que l'expert a indiqué dans son rapport que l'assureur dommages ouvrage lui aurait versé plus de 400 000 euros au titre de la réparation des dommages à la suite des déclarations de sinistre qui lui ont été adressées.

Selon la société SAM, l'argumentation relève de la compétence des juges du fond et est, en tout état de cause, non fondée. Elle indique que la MAIF a bien été mise en cause dans le cadre des opérations d'expertise, qu'il n'existe pas de stricte correspondance entre les désordres mentionnés dans la déclaration de sinistre du 8 février 2010 et ceux dont elle demande l'indemnisation dans le cadre de son assignation, que les demandes formulées à l'encontre de la société Abeille IARD et santé ne se limitent pas à l'indemnisation des stricts désordres imputables à son assurée et que l'argumentation de celle-ci n'est qu'alléguée et ne repose sur aucune preuve.

Réponse de la cour

La cour constate, comme le premier juge, que la société Abeille IARD et santé procède par voie d'affirmations, sans aucun élément de preuve, et ne démontre pas que la société SAM aurait déjà été indemnisée par l'assureur dommages-ouvrage pour les désordres concernant les travaux de la société Chaudronnerie brignolaise dont elle demande réparation, les indications contenues dans le rapport d'expertise judiciaire étant manifestement insuffisantes pour l'établir.

L'ordonnance sera confirmée de ce chef.

Sur les frais du procès

Le sens de l'arrêt conduit à confirmer l'ordonnance sur les dépens et le rejet des demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En cause d'appel, les société SAM et Thermatic seront condamnées in solidum aux dépens.

La société Thermatic sera condamnée à payer aux MMA IARD et MMA assurances mutuelles la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société SAM sera condamnée, sur le même fondement, à payer la somme de 1 000 euros chacune aux sociétés NBJ architectes, SDI, la MAF, Chaudronnerie brignolaise, L'Auxiliaire, Inéo, AIG europe, P3G ingenierie, SMABTP, Travaux du midi, Eurovia, SMA, M. [B] et ses assureurs les sociétés MMA IARD et MMA assurances mutuelles.

Les autres demandes seront rejetées.

Le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile sera accordé aux avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme l'ordonnance du juge de la mise en état du 21 mars 2023 en ses dispositions soumises à la cour mais seulement en ce qu'elle déclare irrecevables les demandes formées par la société SAM à l'encontre de la société CMBC Métal au titre des désordres visés dans les assignations en référé ayant donné lieu aux ordonnances de référé du 15 juillet 2009 et 2 juillet 2010 ;

Statuant à nouveau sur le chef infirmé et y ajoutant,

Déclare recevable l'action de la Société des Services de l'Automobile et de la Mobilité à l'encontre de la société CMBC Métal au titre des désordres visés dans les assignations en référé ayant donné lieu aux ordonnances de référé du 15 juillet 2009 et 2 juillet 2010 ;

Déclare irrecevable l'action de la Société des Services de l'Automobile et de la Mobilité à l'encontre de la société Inéo au titre des désordres visés dans l'assignation en référé ayant donné lieu à l'ordonnance de référé du 2 juillet 2010 ;

Condamne in solidum les sociétés des Services de l'Automobile et de la Mobilité et Thermatic aux dépens d'appel ; 

Admet les avocats qui en ont fait la demande et peuvent y prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Condamne la société Thermatic à payer la somme de 1 000 euros aux sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la Société des Services de l'Automobile et de la Mobilité à payer la somme de 1 000 euros chacune aux sociétés NBJ architectes, SDI, la MAF, Chaudronnerie brignolaise, L'Auxiliaire, Inéo, AIG europe, P3G ingénierie, SMABTP, Travaux du midi, Eurovia, SMA, M. [B] et ses assureurs les sociétés MMA IARD et MMA assurances mutuelles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette les autres demandes sur le même fondement.

La greffière, La conseillère faisant fonction de présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 23/07417
Date de la décision : 07/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-07;23.07417 ?
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