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07/06/2024 | FRANCE | N°20/04985

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 07 juin 2024, 20/04985


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 07 Juin 2024



(n° , 4 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 20/04985 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCFYR



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Juin 2020 par le Pole social du TJ d'EVRY RG n° 19/00971



APPELANTE

URSSAF - ILE DE FRANCE

[Adresse 2]

[Localité 5]

représenté par M. [N] [R] en vertu d'u

n pouvoir général



INTIMEE

S.A.R.L. [6]

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Anne-cécile FAURE, avocat au barreau de PARIS, toque : E1911





COMPOSITION DE LA COUR :



En applic...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 07 Juin 2024

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 20/04985 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCFYR

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Juin 2020 par le Pole social du TJ d'EVRY RG n° 19/00971

APPELANTE

URSSAF - ILE DE FRANCE

[Adresse 2]

[Localité 5]

représenté par M. [N] [R] en vertu d'un pouvoir général

INTIMEE

S.A.R.L. [6]

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Me Anne-cécile FAURE, avocat au barreau de PARIS, toque : E1911

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Avril 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Raoul CARBONARO, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Raoul CARBONARO, président de chambre

Mme Carine TASMADJIAN, présidente de chambre

M. Philippe BLONDEAU, conseiller

GREFFIER : Mme Fatma DEVECI, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par M Raoul CARBONARO, président de chambre et par Mme Fatma DEVECI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par l'URSSAF Île-de-France (l'URSSAF) d'un jugement rendu le 16 juin 2020 par le tribunal judiciaire d'Evry dans un litige l'opposant à la SARL [6] (la société).

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler qu'à la suite d'un contrôle relatif à l'application de législation sociale, l'URSSAF Île-de-France a délivré le 5 décembre 2018 une lettre d'observations à la société ; qu'après la clôture du contrôle, l'URSSAF a adressé une mise en demeure de payer la somme de 19 926,20 euros le 14 janvier 2019 ; que le 11 mars 2019, l'URSSAF a délivré une contrainte signifiée le 14 mars 2019 ; que le 8 mars 2019, la société a contesté la mise en demeure du 14 janvier 2019 ; qu'après vaine saisine de la commission de recours amiable, et sans avoir formé opposition à la contrainte régulièrement signifiée, la société a saisi une juridiction en charge du contentieux de la sécurité sociale de sa contestation.

Par jugement en date du 16 juin 2020, le tribunal a déclaré recevable le recours de la SARL [6] et prononcé la nullité de la mise en demeure délivrée à son encontre par l'URSSAF Île-de-France le 14 janvier 2019, d'un montant de 19 925, 20 euros avec toutes conséquences de droit, condamnant l'URSSAF aux dépens.

Le tribunal a considéré que l'existence d'une contrainte définitive ne saurait priver le justiciable de son droit de contester dans le délai réglementaire la mise en demeure qui lui est opposée même s'il eut été plus logique que le justiciable conteste également la contrainte. Au fond, il a jugé que les cotisations dues au titre de l'année 2015 étaient prescrites depuis le 1er janvier 2019 et a annulé en conséquence la contrainte.

Le jugement a été notifié par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception remise le 22 juin 2020 à l'URSSAF Île-de-France qui en a interjeté appel par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception adressée le 20 juillet 2020.

Par arrêt du 17 novembre 2023, la Cour :

déclare recevable l'appel de la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis ;

ordonne la réouverture des débats à l'audience du 2 avril 2024 afin que les parties s'expliquent sur la recevabilité du moyen de nullité soulevé par la SARL [6] en cause d'appel.

Par conclusions développées oralement à l'audience par son représentant, et se référant aux conclusions écrites déposées antérieurement, l'URSSAF Île-de-France demande à la cour de :

déclarer son appel régulier en la forme,

réformer en totalité le jugement rendu par le tribunal d'Evry en date du 16 juin 2020, notamment en ce qu'il a :

déclaré recevable la contestation de la SARL [6] ;

prononcé la nullité de la mise en demeure délivrée à l'encontre de la société le 14 janvier 2019 pour un montant de 19 925,20 euros ;

et statuant à nouveau :

déclarer la contestation de la SARL [6] irrecevable compte tenu de la contrainte définitive ;

confirmer la décision rendue par la Commission de Recours Amiable le 13 mai 2019 ;

condamner la SARL [6] à verser à l'URSSAF Île-de-France la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions écrites visées et développées oralement à l'audience par son avocat, la SARL [6] demande à la cour de juger les moyens qu'elle soulève recevables en cause d'appel.

Les parties ont convenu que la cour ne statue que sur la recevabilité de la contestation de la mise en demeure.

Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, et en application du deuxième alinéa de l'article 446-2 et de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie à leurs conclusions écrites visées par le greffe à l'audience du 2 avril 2024 qu'elles ont respectivement soutenues oralement.

SUR CE

- sur la recevabilité de la contestation de la mise en demeure :

Moyens des parties :

L'URSSAF Île-de-France expose qu'une contrainte devenue définitive en l'absence d'opposition formée dans les délais et devant la juridiction compétente ne peut être contestée par l'employeur au regard de se régularité et du bien-fondé de la dette objet de la contrainte ; que la société a été dûment informée des voies et délais de recours qui lui sont ouverts devant les juridictions de sécurité sociale puisque l'acte de signification de la contrainte précise clairement les modalités du recours.

La SARL [6] réplique que la contrainte du 14 mars 2019 n'a pas été délivrée ' à personne ', ce en violation des dispositions de l'article 654 du code de procédure civile ; que l'huissier de justice ne pouvait de contenter des formalités prévues aux articles 655 et suivants du de procédure civile alors que l'adresse utilisée n'était pas celle du siège social de la société qui était [Adresse 1]) jusqu'au 1er août 2020 ; qu'elle n'a pas été dûment informée des voies et délais de recours qui lui sont ouverts devant les juridictions du contentieux général de la sécurité sociale ; qu'en l'absence de délivrance régulière, le délai de 15 jours pour former opposition est inopposable à la société intimée. La contrainte n'a pas autorité de la chose jugée et elle n'a pas la force exécutoire d'un jugement ; que sont admissibles en cause d'appel les demandes qui sont « l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaires » (art. 566 CPC) des prétentions formées en première instance ; que sont admissibles les demandes reconventionnelles ; que le point de droit soulevé par la société vise à répondre à l'argumentaire de l'URSSAF et constitue « l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire » des prétentions formées en première instance ; que la procédure est orale.

Réponse de la Cour :

L'article L. 244-9 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue de l'ordonnance n° 2018-358 du 16 mai 2018 applicable au litige, énonce que :

« La contrainte décernée par le directeur d'un organisme de sécurité sociale pour le recouvrement des cotisations et majorations de retard comporte, à défaut d'opposition du débiteur devant le tribunal de grande instance spécialement désigné en application de l'article L. 211-16 du code de l'organisation judiciaire, dans les délais et selon des conditions fixés par décret, tous les effets d'un jugement et confère notamment le bénéfice de l'hypothèque judiciaire.

« Le délai de prescription de l'action en exécution de la contrainte non contestée et devenue définitive est de trois ans à compter de la date à laquelle la contrainte a été notifiée ou signifiée, ou un acte d'exécution signifié en application de cette contrainte ».

Il en résulte que le cotisant qui n'a pas formé opposition à une contrainte qui lui a été signifiée est irrecevable à contester la régularité et le bien-fondé des chefs de redressement qui en font l'objet.

En l'espèce, le 11 mars 2019, l'URSSAF a délivré une contrainte signifiée le 14 mars 2019. Le 8 mars 2019, la société a contesté devant une juridiction en charge du contentieux de la sécurité sociale la mise en demeure du 14 janvier 2019. A cette date, la contestation de la mise en demeure était recevable, la contrainte n'ayant pas encore acquis les effets d'un jugement. Toutefois, une fois passés les quinze jours à compter de la signification, et à défaut d'opposition formée, la contrainte a acquis la valeur d'un jugement.

La contestation de la mise en demeure est donc devenue irrecevable, sauf à ce qu'une décision de justice passée en force de chose jugée juge de la recevabilité de l'opposition à contrainte et rouvre devant la juridiction qui l'a rendue la recevabilité de la contestation, dès lors qu'il résulte des articles R. 133-3, R. 142-1 et R. 142-18 du code de la sécurité sociale , dans leur rédaction applicable au litige, que le cotisant qui n'a pas contesté la mise en demeure devant la commission de recours amiable peut, à l'appui de l'opposition à la contrainte décernée sur le fondement de celle-ci, contester la régularité de la procédure et le bien-fondé des causes de la contrainte.

La régularité de la signification de la contrainte est donc sans emport sur la solution du litige, le texte précité n'opérant aucune distinction et la société n'en ayant pas, à ce stade, formé opposition, la cour n'étant dès lors saisie ni de la recevabilité de l'opposition ni de la régularité de la contrainte.

Elle ne saurait juger par voie d'exception de la nullité de l'acte de signification pour juger du caractère non définitif de la contrainte comme moyen de recevabilité de la contestation de la régularité de la mise en demeure, dès lors que le caractère exécutoire de la contrainte ne saurait être suspendu en dehors des voies de recours prévues à cet effet, qu'un recours particulier est prévu pour la contester et que l'absence d'exercice effectif de ce recours est susceptible d'aboutir à une contrariété de décisions.

Le recours formé par la SARL [6] est donc devenu irrecevable. Le jugement déféré sera donc infirmé.

La SARL [6], qui succombe, sera condamnée aux dépens et au paiement de la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

INFIRME le jugement rendu le 16 juin 2020 par le tribunal judiciaire d'Evry en ses dispositions soumises à la Cour ;

STATUANT À NOUVEAU :

DÉCLARE irrecevable la contestation de la mise en demeure de payer la somme de 19 926,20 euros en date du 14 janvier 2019 ;

CONDAMNE la SARL [6] à payer à l'URSSAF Île-de-France la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SARL [6] aux dépens.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 20/04985
Date de la décision : 07/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-07;20.04985 ?
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