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06/06/2024 | FRANCE | N°23/03816

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 10, 06 juin 2024, 23/03816


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 10



ARRET DU 06 JUIN 2024

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/03816 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CHF24



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 13 Décembre 2022 -Juge de l'exécution de Paris RG n° 22/81496



APPELANTE



Madame [B] [S]

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée par Me Sylvie BELTRAN, avocat au barreau de PARIS, toque

: D1591

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2023/004588 du 15/03/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)



INTIMEE



LA SOCIÉTÉ CABOT SEC...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 10

ARRET DU 06 JUIN 2024

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/03816 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CHF24

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 13 Décembre 2022 -Juge de l'exécution de Paris RG n° 22/81496

APPELANTE

Madame [B] [S]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Sylvie BELTRAN, avocat au barreau de PARIS, toque : D1591

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2023/004588 du 15/03/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMEE

LA SOCIÉTÉ CABOT SECURITISATION EUROPE LIMITED, société par actions à responsabilité limitée de droit irlandais enregistrée au registre irlandais des sociétés sous

le numéro 572 606, dont le siège social est situé [Adresse 4] (IRLANDE), agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, élisant domicile au siège de son mandataire, la SAS CABOT FINANCIAL FRANCE, société par actions simplifiée

immatriculée au RCS de LYON sous le numéro 488 862 277, situé [Adresse 2]

Représentée par Me Olivier HASCOET de la SELARL HKH AVOCATS, avocat au barreau d'ESSONNE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 02 Mai 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Bénédicte PRUVOST, Présidente de chambre

Madame Valérie DISTINGUIN, Conseiller

Madame Catherine LEFORT, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Bénédicte Pruvost dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : M. Grégoire GROSPELLIER

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Bénédicte PRUVOST, Présidente de chambre et par Grégoire GROSPELLIER, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

Selon offre préalable de crédit du 27 mai 2000, la société Cofinoga a consenti à Mme [B] [S] un crédit utilisable par fractions, assorti d'un taux d'intérêt de 3,79% l'an.

Par ordonnance d'injonction de payer du 18 mai 2010, le juge du tribunal d'instance de Paris 11ème a enjoint à Mme [B] [S] de payer à la SA Laser Cofinoga une somme de 3167,63 euros, avec intérêts au taux contractuel de 3,79% à compter de la date de signification. Cette ordonnance a été signifiée par acte d'huissier remis à étude le 25 mai 2010. Le 12 juillet 2010, le greffier a apposé la formule exécutoire sur cette ordonnance.

A la suite d'une cession de créance intervenue le 29 mars 2016, la société de droit irlandais Cabot Securitisation vient aux droits de la société BNP Paribas Personal Finance, laquelle venait elle-même aux droits de la société Cofinoga à la suite d'une fusion-absorption.

Par acte d'huissier du 6 avril 2022, en vertu de l'ordonnance d'injonction de payer susvisée, la société Cabot Securitisation a fait pratiquer une saisie-attribution à l'encontre de Mme [S], entre les mains de la société Banque Postale, pour avoir paiement de la somme totale de 3069,95 euros. Cette saisie a été dénoncée à Mme [S] le 11 avril 2022.

Selon acte d'huissier du 11 août 2022, Mme [S] a assigné la société Cabot Securitisation devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris aux fins de voir ordonner la mainlevée de la saisie-attribution susvisée.

Par jugement du 13 décembre 2022, le juge de l'exécution a :

déclaré irrecevable la demande de mainlevée de la saisie-attribution du 6 avril 2022 ;

déclaré recevable la demande de délais de paiement ;

autorisé Mme [S] à s'acquitter de sa demande en 24 mensualités de 100 euros, la première payable dans le mois suivant la notification de la présente décision et les suivantes à même date, la 24ème correspondant au solde de la dette ;

dit qu'à défaut de paiement à son échéance d'une mensualité, la totalité de la dette sera immédiatement exigible passé le délai de huit jours suivant la présentation d'une mise en demeure par lettre recommandée avec demande d'avis de réception restée vaine ;

débouté les parties de leurs demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné Mme [S] aux dépens.

Pour statuer ainsi, il a rappelé que le juge de l'exécution ne peut être saisi de la contestation d'une mesure d'exécution forcée que si celle-ci est en cours ; que dès lors que la mesure d'exécution forcée a épuisé ses effets, toute contestation est irrecevable ; qu'en outre, si Mme [S] avait déposé sa demande d'aide juridictionnelle dans le délai d'un mois à compter de la dénonciation de la saisie-attribution, elle n'avait pas dénoncé sa contestation à l'huissier instrumentaire de la saisie-attribution et que le paiement du tiers saisi était intervenu le 18 mai 2022 ; qu'ainsi la demande de mainlevée de la saisie-attribution était irrecevable.

Ensuite, rappelant que l'octroi de délais ne pouvait porter que sur le reliquat de la créance après déduction des sommes saisies (à hauteur de 336,18 euros), soit un reliquat de 2733,77 euros, il a considéré que la situation financière et matérielle de la demanderesse (ressources en totalité insaisissables : AAH, majoration pour la vie autonome, APL) justifiait, au regard de la situation de la société de recouvrement, l'octroi de délais de paiement par voie de versements mensuels de 100 euros sur 24 mois.

Par déclaration du 17 février 2023, Mme [S] a formé appel de ce jugement.

Par dernières conclusions notifiées le 17 mai 2023, elle demande à la cour de :

la déclarer recevable et bien fondée en son appel ;

infirmer partiellement le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau,

donner mainlevée du procès-verbal de saisie-attribution dénoncé le 21 avril 2022 ;

A titre subsidiaire,

l'autoriser à s'acquitter du solde d'un montant de 2355,51 euros par des versements mensuels de 80 euros, qui seront effectués directement sur le compte bancaire de l'intimée ;

débouter la société Cabot Securitisation du surplus de ses demandes.

L'appelante soutient que :

elle n'a jamais eu connaissance de la signification de l'ordonnance d'injonction de payer en 2010, mais seulement et pour la première fois le 22 juin 2020 par la dénonciation d'une saisie-attribution précédente ;

elle a fait l'objet d'une procédure de surendettement en 2005, qui incluait cette dette Cofinoga, de sorte que la société Cofinoga n'était pas recevable à engager une procédure d'injonction de payer ;

la cession de créance du 29 mars 2016 au profit de la société Cabot Securitisation ne lui a pas été notifiée valablement ;

l'exécution est prescrite sur le fondement de l'article 2240 du code civil, l'ordonnance d'injonction de payer étant ancienne de plus de 10 ans ;

le solde de la créance retenu par le juge de l'exécution après prise en compte des acomptes est erroné, des prélèvements ayant été omis au titre de la saisie-attribution du 22 juin 2020, du 12 octobre 2020, enfin de la saisie-attribution litigieuse (du 6 avril 2022), de sorte que doit venir en déduction une somme totale de 2088,85 euros ; elle reste donc redevable d'une somme de 2355,51 euros et sollicite des délais de paiement à raison de 80 euros par mois, à régler directement à la société Cabot Securitisation, l'huissier lui ayant répondu le 26 janvier 2023 qu'il n'était plus en charge du dossier.

Par dernières conclusions notifiées le 15 juin 2023, la société Cabot Securitisation, représentée par la société Cabot Financial France, demande à voir :

déclarer Mme [S] mal fondée en ses demandes ;

confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

condamner Mme [S] à lui payer la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

la condamner aux entiers dépens.

Elle soutient que :

la contestation est irrecevable faute de dénonciation de la contestation à l'huissier poursuivant ; au surplus, la saisie-attribution avait épuisé ses effets ;

l'ordonnance d'injonction de payer a bien été signifiée à Mme [S] ; si celle-ci a bénéficié d'un plan de surendettement, l'existence d'un plan, dont il n'est pas démontré qu'il a été respecté, n'empêche pas le créancier de prendre un titre exécutoire ;

la prescription de l'article L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution a été interrompue par une saisie conservatoire le 22 août 2018, les paiements effectués par Mme [S] pour 1374,41 euros ainsi que mentionnés dans le décompte de l'huissier, enfin par la saisie-attribution du 6 avril 2022 ;

outre qu'elle a bénéficié de très longs délais de paiement, le titre exécutoire remontant à 2010, l'appelante ne démontre pas que les délais accordés par le premier juge ne pourraient pas être respectés.

MOTIFS

Sur la recevabilité de la contestation de la saisie-attribution

Aux termes de l'article R. 211-11 du code des procédures civiles d'exécution, à peine d'irrecevabilité, les contestations relatives à la saisie-attribution sont formées dans le délai d'un mois à compter de la dénonciation de la saisie au débiteur. Sous la même sanction, elles sont dénoncées le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, à l'huissier de justice qui a procédé à la saisie.

En l'espèce, il n'est pas contesté que Mme [S] n'a pas dénoncé à l'huissier de justice qui avait pratiqué la saisie-attribution du 6 avril 2022 sa contestation formée devant le juge de l'exécution. Ce seul manquement rend irrecevable la contestation de la saisie-attribution élevée par Mme [S].

Il s'ensuit que ses moyens tirés de l'absence de signification du titre exécutoire, de l'existence d'un plan de surendettement et de la prescription doivent être écartés, de même que celui tendant à contester le solde de la créance, après saisie, objet de la demande en délais de paiement.

Sur la demande en délais de paiement

L'article L.211-2 alinéa 1er du code des procédures civiles d'exécution dispose que  l'acte de saisie emporte, à concurrence des sommes pour lesquelles elle est pratiquée, attribution immédiate au profit du saisissant de la créance saisie, disponible entre les mains du tiers ainsi que de tous ses accessoires.

Les articles 1343-5 et suivants du code civil, en ce qu'ils sont conçus en des termes généraux, permettent l'octroi de délais de paiement y compris après la mise en oeuvre d'une mesure d'exécution. Toutefois, ils prévoient seulement que la décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées. Cette suspension, qui ne saurait être assimilée à une mainlevée, s'opère nécessairement dans l'état où se trouve la mesure d'exécution au jour de l'octroi des délais.

Ainsi, en matière de saisie-attribution, l'octroi de délais, qui ne permet pas de débloquer les comptes du débiteur, ne présente aucun intérêt pour les sommes effectivement saisies pour lesquelles la saisie-attribution litigieuse a produit ses effets. Comme l'a justement relevé le premier juge, la demande de délais ne peut porter que sur le solde de la créance, déduction faite des sommes saisies.

Et comme il a été dit plus haut, en raison de l'irrecevabilité de la contestation de la saisie-attribution, la cour ne peut remettre en cause le solde de la créance tel résultant de la saisie-attribution du 6 avril 2022.

Mme [S] demande à payer les mensualités d'apurement auprès de la société Cabot Securitisation directement et non de la SAS Waterlot & Associés, société de commissaires de justice, qui lui a répondu, par courriel du 26 janvier 2023, n'être plus en charge du dossier. Mais il n'est pas nécessaire de l'y autoriser, puisqu'un échéancier de paiement accordé par une juridiction, en l'occurrence le juge de l'exécution, est en principe exécutable directement entre les mains du créancier, ici la société de droit irlandais Cabot Securitisation domiciliée chez son mandataire, la société Cabot Financial France, et que ce n'est que si le créancier mandate un commissaire de justice que les paiements peuvent se faire entre les mains de celui-ci.

Quant à sa demande tendant à voir diminuer le montant de la mensualité d'apurement à 80 euros par mois, si Mme [S] justifie de sa situation matérielle et financière en 2021 et 2022, elle n'a pas actualisé sa situation à hauteur d'appel. Et surtout, eu égard à l'ancienneté de la dette et du titre exécutoire qui remonte à 14 ans, il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande de modification des mensualités d'apurement, telles que fixées à 100 euros par une juste appréciation du premier juge.

Par conséquent, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Sur les demandes accessoires

L'issue du litige commande de condamner l'appelante, qui succombe en ses prétentions, aux dépens d'appel.

En revanche, la disparité des situations économiques respectives des parties justifie de ne prononcer aucune condamnation sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à condamnation en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Mme [B] [S] aux dépens d'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 23/03816
Date de la décision : 06/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 12/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-06;23.03816 ?
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