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06/06/2024 | FRANCE | N°22/14226

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 3, 06 juin 2024, 22/14226


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 3



ARRET DU 06 JUIN 2024



(n° 156/2024, 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 22/14226 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGH5U



Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 octobre 2021 - Tribunal judiciaire de Bobigny (chambre 5 / section 2) RG n° 21/02518





APPELANTE



S.C.I. SHEHERAZADE

Immatriculée au R.C.S. de Bobigny sous le n° 401 0

58 342

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représentée et assistée par Me Antoine DELAPALME...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 3

ARRET DU 06 JUIN 2024

(n° 156/2024, 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 22/14226 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGH5U

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 octobre 2021 - Tribunal judiciaire de Bobigny (chambre 5 / section 2) RG n° 21/02518

APPELANTE

S.C.I. SHEHERAZADE

Immatriculée au R.C.S. de Bobigny sous le n° 401 058 342

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée et assistée par Me Antoine DELAPALME, avocat au barreau de Paris, toque : Z20

INTIMEE

S.A.R.L. EURO ORIENT ARTS

Immatriculée au R.C.S. de Bobigny sous le n° 444 048 425

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]

Défaillante, non constituée, déclaration d'appel et de conclusions signifiées le 15 novembre 2022 en vertu de l'article 659 du code de procédure civile

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 27 mars 2024, en audience publique, rapport ayant été fait par Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre, conformément aux articles 804, 805 et 907 du code de procédure civile, les avocats ne s'y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre

Mme Sandra Leroy, conseillère

Mme Emmanuelle Lebée, magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Greffier, lors des débats : Mme Sandrine Stassi-Buscqua

ARRÊT :

- défaut

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Nathalie Recoules, présidente de chambre et par Mme Sandrine Stassi-Buscqua, greffière, présente lors de la mise à disposition.

FAITS ET PROCÉDURE

Suivant contrat de bail en date du 15 janvier 1997, cessions en date du 17 mai 2000 et cession de bail sous seing privé enregistrée le 24 septembre 2002, la société Euro Orient arts est locataire d'un stand à usage commercial situé au rez-de-chaussée « Ilot 1 » [Adresse 1] et allée n° 2, lot n°101 à [Localité 2] (93), dont la SCI Sheherazade est propriétaire.

Par acte du 19 janvier 2021, la SCI Sheherazade a assigné la société Euro Orient arts devant le tribunal judiciaire de Bobigny auquel elle a demandé de constater que la défenderesse n'était pas occupante de bonne foi du stand susvisé, ne respectant pas son obligation essentielle qui est le règlement des loyers et charges, conformément aux clauses et conditions du bail et aux dispositions de l'article 1728 du code civil et prononcer la résiliation judiciaire du contrat de location vu les manquements par la locataire à ses obligations, conformément aux dispositions des articles 1224 et 1741 du code civil.

Par jugement du 12 octobre 2021, le tribunal judiciaire de Bobigny a :

- débouté la SCI Sheherazade de sa demande en résiliation du bail commercial en date du 15 janvier 1997 ;

- débouté la SCI Sheherazade de ses demandes d'expulsion et d'application des dispositions régissant les meubles trouvés dans les lieux ;

- débouté la SCI Sheherazade de sa demande en paiement des loyers et des charges ;

- débouté la SCI Sheherazade de sa demande en acquisition du montant du dépôt de garantie du bail commercial du 15 janvier 1997 ;

- débouté la SCI Sheherazade de ses demandes en fixation et en paiement d'indemnités ainsi que des charges d'occupation ;

- débouté la SCI Sheherazade de sa demande en paiement de dommages et intérêts ;

- débouté la SCI Sheherazade de sa demande en paiement des frais irrépétibles de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté la SCI Sheherazade de sa demande de prononcé de l'exécution provisoire du jugement ;

- condamné la SCI Sheherazade aux dépens et l'a déboutée de sa demande en paiement des frais du commandement de payer en date du 19 février 2020 ;

- débouté la SCI Sheherazade de ses demandes plus amples ou contraires.

Par déclaration du 26 juillet 2022, la SCI Sheherazade a interjeté appel total du jugement.

Malgré déclaration d'appel et conclusions régulièrement signifiées le 15 novembre 2022, la société Euro Orient arts n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 7 février 2024.

MOYENS ET PRÉTENTIONS

Aux termes de ses conclusions notifiées le 26 octobre 2022, la SCI Sheherazade, appelante, demande à la cour de :

- déclarer la SCI Sheherazade recevable et bien fondée en son appel et y faisant droit ;

- infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Bobigny du 12 octobre 2021 en toutes ses dispositions ;

Et statuant à nouveau :

- constater que la société Euro Orient arts n'est pas occupante de bonne foi du stand situé au rez-de-chaussée « îlot 1 » [Adresse 1] et allée n° 2, lot n° 101 à [Localité 2], ne respectant pas son obligation essentielle de règlement des loyers et charges, conformément aux clauses et conditions du bail et aux dispositions de l'article 1728 du code civil ;

- prononcer la résiliation judiciaire du contrat de bail commercial, eu égard aux manquements de la locataire à ses obligations, conformément aux dispositions des articles 1224 et 1741 du code civil ;

- en conséquence, ordonner l'expulsion immédiate et sans délai de la société Euro Orient arts ainsi que celle de tous occupants de son chef du stand sis à Saint-Ouen (93400) rez-de-chaussée « îlot 1 » [Adresse 1] et allée n° 2, lot n° 101, si besoin avec l'assistance du commissaire de police et d'un serrurier, conformément aux dispositions des articles L. 411-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

- dire que le sort des meubles sera réglé selon les dispositions des articles L. 433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

- condamner la société Euro Orient arts à payer à la SCI Shéhérazade la somme de 60.450 euros au titre des loyers et charges dus au 20 octobre 2022, et ce avec intérêts de droit à compter de la sommation de payer à hauteur de la somme de 9.300 euros et pour le surplus, avec intérêts de droit à compter de l'assignation en date du 19 janvier 2021 conformément aux dispositions de l'article 1231-6 alinéa 1er du code civil , ainsi qu'au paiement des loyers, impôts, taxes, charges et TVA échus à la date de la décision à intervenir ;

- fixer l'indemnité d'occupation au montant du loyer principal en vigueur à la date de la résiliation et au montant des charges en vigueur à a date de la résiliation ;

- condamner la société Euro Orient arts à payer mensuellement à la SCI Shéhérazade lesdites indemnités d'occupation et de charge, à compter de l'arrêt à intervenir et jusqu'à libération effective des lieux ;

- condamner la société Euro Orient arts à payer à la SCI Shéhérazade la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance infractions multiples aux clauses et conditions du bail, conformément aux dispositions de l'article 1231-6 alinéa 3 du code civil ;

- condamner la société Euro Orient arts à payer à la SCI Shéhérazade la somme de 5.000 euros en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Euro Orient arts aux dépens de première instance et d'appel.

Au soutien de ses prétentions, la SCI Shéhérazade soutient que

- sur la résiliation judiciaire du bail commercial,

sur l'existence du bail commercial, que le contrat de bail commercial a été conclu le 15 janvier 1997 avant de faire l'objet de plusieurs cessions ; que le seul exemplaire détenu par le bailleur a été égaré, de sorte que plusieurs démarches ont été entreprises pour retrouver un exemplaire du bail ; qu'une série de pièces nouvelles, non produites en première instance, permet de démontrer l'existence du bail, à savoir notamment des copies de chèques et des relevés des comptes bancaires ; que ces éléments permettent de retracer l'évolution du loyer et charges, qui étaient de 1.776 euros par mois jusqu'en avril 2019, avant d'être abaissé à 1.550 euros par mois à partir de mai 2019 ; que l'occupation des locaux est également démontrée par différentes pièces produites aux débats ;

sur la résiliation du bail commercial, que sur le fondement des articles 1224, 1728 et 1741 du code civil, la société Euro Orient arts n'est pas à jour de ses loyers depuis le mois d'août 2019 inclus, tel que cela résulte notamment des relevés bancaires de l'appelante ; que différentes sommations de payer lui ont été délivrées en raison de l'absence de paiement, ce qui démontre qu'elle n'a pas été occupante de bonne foi ;

- sur les sommes dues, que sur le fondement de l'article 1728 du code civil, la société Euro Orient arts ne verse plus de loyers depuis le mois d'août 2019 inclus, de sorte que la concluante est créancière de la somme de 60.450 euros à l'égard de la société Euro Orient arts, au titre des loyers et charges au 20 octobre 2022 ;

- sur l'indemnité d'occupation, qu'il y a lieu de fixer l'indemnité d'occupation mensuelle au montant du loyer principal en vigueur à la date de résiliation (1.204,59 euros), ainsi que l'indemnité due au titre des charges à la somme de 345,11 euros, et de condamner la société Euro Orient arts au paiement desdites sommes à compter de l'arrêt à intervenir et jusqu'à la libération effective des lieux, le sort des meubles se trouvant dans les lieux étant quant à lui régi par les articles L. 433-1 et suivants et R. 433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

- sur les dommages et intérêts, qu'il y a lieu de condamner la société Euro Orient arts au paiement de la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de ses obligations contractuelles, conformément aux dispositions de l'article 1231-6 alinéa 3 du code civil.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il convient de se référer aux conclusions ci-dessus visées pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties.

SUR CE,

La cour a sollicité les observations de l'appelant sur la recevabilité soulevée d'office, sur le fondement de l'article 930-1 du code de procédure civile, des conclusions déposées à l'audience par le bailleur, ainsi que de la pièce n° 24 actualisée à fin mars 202 dont il n'est pas justifié a minima d'une tentative de communication contradictoire au preneur.

Par message RPVA en date du 28 mai 2024, l'appelant reconnaît ne pas avoir notifié par message RPVA les conclusions remises à l'audience et les joints, pour régularisation à son message, et ne pas avoir tenté de communiquer à la partie adverse « qui ne s'est jamais manifesté depuis le début de la procédure » le décompte actualisé à fin mars 2024 de la dette locative.

Aux termes de l'article 9 du code de procédure civile, « Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement. »

L'article 930-1 du code de procédure civile dispose que « A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les actes de procédure sont remis à la juridiction par voie électronique.

Lorsqu'un acte ne peut être transmis par voie électronique pour une cause étrangère à celui qui l'accomplit, il est établi sur support papier et remis au greffe. En ce cas, la déclaration d'appel est remise au greffe en autant d'exemplaires qu'il y a de parties destinataires, plus deux. La remise est constatée par la mention de sa date et le visa du greffier sur chaque exemplaire, dont l'un est immédiatement restitué. »

Au cas d'espèce, la SCI Shéhérazade a remis à l'audience des conclusions actualisées qu'elle ne conteste pas ne pas avoir notifié préalablement par voie électronique, sans invoquer une cause étrangère qui ne lui aurait pas permis une transmission électronique de sorte que ces conclusions, datées du 27 mars 2024, seront déclarées irrecevables.

Il en sera de même du décompte locatif actualisé remis à l'audience, dont il n'est justifié d'aucune tentative de notification au preneur.

Sur l'existence d'un bail commercial et la demande de résiliation

Aux termes de l'article 1341 du code civil, dans sa version applicable au présent litige, « Il doit être passé acte devant notaires ou sous signatures privées de toutes choses excédant une somme ou une valeur fixée par décret, même pour dépôts volontaires, et il n'est reçu aucune preuve par témoins contre et outre le contenu aux actes, ni sur ce qui serait allégué avoir été dit avant, lors ou depuis les actes, encore qu'il s'agisse d'une somme ou valeur moindre.

Le tout sans préjudice de ce qui est prescrit dans les lois relatives au commerce. »

En l'espèce, le contrat de bail litigieux a été passé par acte sous seing privé, tel que mentionné dans le contrat de cession de bail en date du 30 septembre 2002, entre les Établissements Vergne & Barlan et M. [L] [K], comme décrit par motifs détaillés par le premier juge auxquels la cour renvoie. Il est en outre établi que le bail a fait l'objet de plusieurs cessions antérieures.

Il résulte de l'article susvisé que la preuve du bail consenti sous seing privé se fait par écrit.

Toutefois, pour les actes mixtes, l'existence d'un acte de commerce peut se prouver par tout moyen à l'égard du seul commerçant.

En l'espèce, la SCI Shéhérazade établit que cette preuve est impossible en ce que le bail a été détruit ou perdu et elle justifie, en cause d'appel, avoir sollicité auprès des services d'enregistrement de Paris puis des archives départementales de Paris une copie de l'acte, ce en vain.

Elle produit, en cause d'appel, d'une part, quatorze copies de chèque, dont certains se révéleront sans provision, émis par la société Euro Orient arts au bénéfice de la SCI Shéhérazade d'un montant de 1.776 euros datés des 2 février, 2 novembre et 26 décembre 2015, 19 septembre 2016, 16 janvier, 7 mars et 27 novembre 2017, 5 janvier, 12 novembre et 10 décembre 2018, 23 septembre et 14 octobre 2019 et 13 janvier 2020, d'autre part, les relevés des comptes bancaires de l'appelante, de janvier 2015 à janvier 2022, laissant apparaître des encaissements réguliers de chèques, à d'autres dates que celles susvisées, d'un montant de 1.776 euros sur les années 2015 à 2018 mais aucun sur les années 2019 et 2020.

Par ailleurs, il ressort de la sommation de payer délivrée le 19 février 2020 que cet acte a été remis la personne de M. [L] [K] en sa qualité de gérant, de la sommation de payer délivrée le 2 mai 2022 que l'adresse est confirmée par le voisinage et la boutique fermée indique « Tapis Tapisserie », du K Bis de la SARL Euro Orient arts et de ses statuts, en date respectivement des 14 janvier 2021 et 30 septembre 2002 que l'adresse des locaux est mentionnée comme siège social, ce que constate l'huissier venu délivré une sommation interpellative le 24 octobre 2022, qui se heurte à une boutique fermée mais qui, de ses recherches notamment sur société.com ne trouve trace d'aucun changement de siège ou avis de fermeture de l'établissement. L'ensemble de ces éléments atteste de l'occupation des lieux.

Ainsi, les éléments essentiels du contrat, notamment, le paiement du prix convenu sont démontrés et l'existence du contrat ainsi prouvé.

Aux termes de l'article 1224 du code civil, « La résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice. »

L'article 1741 du même code prévoit en outre que « Le contrat de louage se résout par la perte de la chose louée, et par le défaut respectif du bailleur et du preneur de remplir leurs engagements », dont, aux termes de l'article 1728, le paiement du prix du bail fait l'objet de l'une des obligations principales du preneur.

En l'espèce, le bailleur établit par la production des chèques, extraits de compte et actes délivrés, énoncés ci-dessus, que le preneur n'est pas à jour du paiement de ses loyers et, notamment, il ressort de la sommation de payer, délivrée le 19 février 2020, l'existence d'un arriéré locatif d'un montant de 9.300 euros arrêté au 31 janvier 2020 et calculé sur la base d'un loyer porté à la somme de 1.550 euros charges comprises et d'un tableau valant compte entre les parties, reprenant, sur la période courant de janvier 2015 à fin octobre 2022, le montant des sommes versées par le preneur et le montant des loyers et dont il ressort que la dette de loyer et indemnité d'occupation se monte à la somme de 60.450 euros à fin octobre 2022.

L'absence récurrente de paiement du loyer caractérise le manquement grave du preneur à ses obligations. Il sera fait droit à la demande de résiliation du bail, à effet au 19 janvier 2021, avec toutes conséquences de droit, et la société Euro Orient arts sera condamnée à payer à la SCI Shéhérazade la somme de 60.450 euros.

Le jugement sera infirmé de ces chefs.

Sur l'indemnité d'occupation

En application de l'article 1240 du code civil, celui qui se maintient sans droit dans des lieux après l'expiration de son titre d'occupation commet une faute quasi-délictuelle qui ouvre droit pour le propriétaire au paiement d'une indemnité d'occupation, laquelle en raison de sa nature mixte, à la fois indemnitaire et compensatoire, a vocation à indemniser la poursuite de l'occupation des locaux par l'occupant sans droit ni titre et à compenser le préjudice résultant pour le bailleur de l'impossibilité à disposer librement des lieux.

Le montant de l'indemnité d'occupation, usuellement fixée au montant du dernier loyer acquitté au regard de son caractère mixte indemnitaire et compensatoire, peut être inférieur à ce plafond si le préjudice subi par le bailleur était moindre.

En l'espèce, il sera fait droit à la demande du bailleur qui sollicite que l'indemnité d'occupation soit fixée au montant du loyer principale en vigueur à la date de la résiliation et des charges en vigueur à cette même date.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur la résistance abusive

Aux termes des dispositions de l'article 1153 du code civil, applicable au présent litige et remplacé par l'article 1231-6 du même code visé par le bailleur, « Dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les dommages-intérêts résultant du retard dans l'exécution ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal, sauf les règles particulières au commerce et au cautionnement.

Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte.

Ils ne sont dus que du jour de la sommation de payer, excepté dans le cas où la loi les fait courir de plein droit.

Le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance. »

Au cas d'espèce, le bailleur ne justifie ni de la mauvaise fois du preneur, ni d'un préjudice distinct des retards de paiement, de sorte que la demande à ce titre sera rejetée.

Sur les demandes accessoires

Le jugement sera infirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SCI Shéhérazade, les frais par elle engagés au titre de l'article 700 du code de procédure civile. La SARL Euro orient arts sera donc condamnée à lui payer la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles engagés en première instance et en appel et supportera la charge des dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS 

LA COUR, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort ;

Déclare irrecevable les conclusions de la SCI Shéhérazade remises à l'audience le 27 mars 2024 ainsi que le décompte de l'arriéré locatif actualisé au 1er trimestre 2024 ;

Infirme le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Bobigny le 12 octobre 2021, sous le numéro de RG 21/2518, en toutes ses dispositions ;

Statuant de nouveau ;

Prononce la résiliation judiciaire du contrat de bail commercial liant la SCI Shéhérazade et la société Euro Orient arts, en date du 15 janvier 1997 portant sur le local situé au rez-de-chaussée « Ilot 1 » [Adresse 1] et allée n° 2, lot n° 101 à [Localité 2] ;

Ordonne l'expulsion immédiate et sans délai de la SARL Euro Orient arts ainsi que celle de tous occupants de son chef de ces lieux, si besoin avec l'assistance du commissaire de police et d'un serrurier, conformément aux dispositions des articles L. 411-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

Dit que le sort des meubles sera réglé selon les dispositions des articles L. 433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

Condamne la SARL Euro Orient arts à payer à la SCI Shéhérazade la somme de 60.450 euros au titre des loyers, indemnité d'occupation et charges arrêtés au 20 octobre 2022 ;

Fixe l'indemnité d'occupation au montant du loyer principal en vigueur à la date de la résiliation et au montant des charges en vigueur à la date de la résiliation ;

Condamne la SARL Euro Orient arts à payer mensuellement à la SCI Shéhérazade lesdites indemnités d'occupation et de charge, à compter de la date de résiliation et jusqu'à libération effective des lieux ;

Rejette la demande de dommages et intérêts ;

Condamne la SARL Euro Orient arts à payer mensuellement à la SCI Shéhérazade la somme de 5.000 € en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SARL Euro Orient arts à supporter la charge des dépens de première instance et d'appel.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 22/14226
Date de la décision : 06/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 12/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-06;22.14226 ?
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