La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/06/2024 | FRANCE | N°21/13065

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 11, 06 juin 2024, 21/13065


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11



ARRET DU 06 JUIN 2024



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/13065 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEBEP



Décision déférée à la Cour : jugement du 04 mai 2021 - tribunal judiciaire de PARIS

RG n° 19/03017





APPELANTE



S.A.S.U. QUALICONSULT EXPLOITATION

[Adresse 2]

[Loca

lité 10]

Représentée et assistée par Me Patrice ITTAH de la SCP LETU ITTAH ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0120





INTIMEES



Madame [X] [B]

[Adresse 8]

[Localité 13]

Née...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11

ARRET DU 06 JUIN 2024

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/13065 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEBEP

Décision déférée à la Cour : jugement du 04 mai 2021 - tribunal judiciaire de PARIS

RG n° 19/03017

APPELANTE

S.A.S.U. QUALICONSULT EXPLOITATION

[Adresse 2]

[Localité 10]

Représentée et assistée par Me Patrice ITTAH de la SCP LETU ITTAH ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0120

INTIMEES

Madame [X] [B]

[Adresse 8]

[Localité 13]

Née le [Date naissance 3] 1977 à [Localité 14] (PAKISTAN)

Représentée et assistée par Me Jean-Michel SCHARR, avocat au barreau D'ESSONNE

S.A.R.L. HOTEL MODERNE DU TEMPLE

[Adresse 6]

[Localité 9]

Représentée par Me Julie AUZAS de la SELARL RUFF AUZAS AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0262

Assistée par Me Lucie BLACHIER, avocat au barreau de PARIS

S.A. GENERALI IARD

[Adresse 4]

[Localité 9]

Représentée par Me Juliette BARRE de la SCP NORMAND & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0141

Assistée par Me Capucine POTIER, avocat au barreau de PARIS

S.A. KONE

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Localité 1]

Représentée par Me Fabien GIRAULT de la SELARL GFG AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : D0697

Assistée par Me Dounia SCOTET, avocat au barreau de PARIS

PARTIES INTERVENANTES

Etablissement Public Industriel et Commercial CAMPUS FRANCE

[Adresse 5]

[Localité 9]

Représenté et assisté par Me Matthieu NICOLET de la SELEURL MN AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : D0511

CPAM DU VAL DE MARNE

[Adresse 11]

[Localité 12]

n'a pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Nina TOUATI, présidente de chambre, chargée du rapport, et Mme Dorothée DIBIE, conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Nina TOUATI, présidente de chambre

Mme Dorothée DIBIE, conseillère

Mme Sylvie LEROY, conseillère

Greffier lors des débats : Mme Emeline DEVIN

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Nina TOUATI, présidente de chambre et par Emeline DEVIN, greffière, présente lors de la mise à disposition à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Le 30 octobre 2010, à [Localité 9], alors qu'elle séjournait dans un hôtel exploité par la société Hôtel moderne du temple (la société Hôtel moderne), assurée auprès de la société Generali IARD (la société Generali), Mme [X] [B], étudiante de nationalité pakistanaise qui venait d'achever un stage post-doctorat de six mois dans une université française, a été gravement blessée à la suite de la chute accidentelle de la cabine d'ascenseur de l'établissement dont l'entretien et la maintenance avaient été confiés à la société Koné.

Par ordonnance en date du 7 novembre 2011, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris a ordonné une expertise médicale de Mme [B] confiée au Docteur [W] qui a conclu dans un rapport établi le 15 juin 2012 que l'état de santé de cette dernière n'était pas consolidé.

Parallèlement, par ordonnance en date du 25 novembre 2011, le juge des référés du tribunal de commerce de Paris a ordonné une expertise technique de l'ascenseur, confiée à M. [V] qui a déposé son rapport le 28 janvier 2013.

Par actes d'huissier en date des 18 et 21 mars 2014, Mme [B] a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Paris, la société Hôtel moderne, la société Generali, la société Koné, et l'Etablissement public industriel et commercial Campus France (Campus France), tiers payeur, afin d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices.

Par exploit en date du 13 juillet 2014, la société Koné a fait assigner en intervention forcée et en garantie la société Qualiconsult exploitation (la société Qualiconsult) en qualité de contrôleur technique.

Les deux instances ont été jointes.

Par jugement en date du 19 décembre 2017, le tribunal de grande instance de Paris a :

- déclaré la société Hôtel moderne entièrement responsable à l'égard de Mme [B] de l'accident survenu le 30 octobre 2010,

- condamné in solidum la société Hôtel moderne et la société Generali à indemniser l'entier préjudice de Mme [B],

- condamné la société Koné à relever et garantir la société Hôtel moderne et la société Generali de l'intégralité des condamnations prononcées à leur encontre, au principal et accessoires,

- condamné la société Qualiconsult à relever et garantir la société Koné de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre, au principal et accessoires, à concurrence de 50%,

- avant dire droit sur l'indemnisation des préjudices de Mme [B], ordonné une expertise médicale,

- ordonné le sursis à statuer sur les demandes indemnitaires formées par Mme [B] et par Campus France, agissant en qualité de tiers payeur, dans l'attente du dépôt des conclusions de l'expert,

- condamné in solidum la société Hôtel moderne et la société Generali à payer à Mme [B] la somme de 70 000 euros à titre de provision à valoir sur l'indemnisation de son préjudice,

- réservé l'application de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens,

- débouté les parties de leurs demandes,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement.

L'expert initialement commis a été remplacé par le Docteur [T] qui a établi un rapport définitif le 20 juillet 2018, complété le 11 octobre 2018.

Par arrêt en date du 12 novembre 2019, la cour d'appel de Paris a confirmé le jugement en ce qu'il a dit que la société Hôtel moderne était responsable de plein droit de l'accident subi par Mme [B], condamné la société Koné à relever et garantir la société Hôtel moderne et la société Generali de l'ensemble des condamnations prononcées à leur encontre, en principal et accessoires et condamné la société Qualiconsult à relever et garantir la société Koné de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre, en principal et accessoires à hauteur de 50%.

Par jugement du 4 mai 2021, le tribunal judiciaire de Paris a :

- condamné in solidum la société Hôtel moderne et la société Generali à payer à Mme [B] les sommes suivantes à titre de réparation de son préjudice corporel, en derniers ou quittance, provisions non déduites :

* tierce personne temporaire : 19 376 euros

* dépenses de santé futures : 4 100 euros

* semelles : 8 160 euros

* cannes anglaises : 482,50 euros

* fauteuil roulant : 8 514,36 euros

* tierce personne définitive : 1 468 357,60 euros

* perte de gains professionnels actuels : 43 056 euros

* perte de gains professionnels futurs : 685 643,50 euros

* déficit fonctionnel temporaire : 26 816,40 euros

* souffrances endurées : 40 000 euros

* déficit fonctionnel permanent : 280 500 euros

* préjudice esthétique temporaire : 8 000 euros

* préjudice esthétique définitif : 20 000 euros

* préjudice sexuel : 30 000 euros

ces sommes avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

- dit qu'il convient de déduire de ces sommes les provisions versées à hauteur de 166 500 euros,

- débouté Mme [B] de ses demandes d'indemnisation au titre du préjudice d'incidence professionnelle, du préjudice d'agrément et du préjudice d'établissement,

- réservé l'indemnisation des postes d'aménagement du logement et d'aménagement du véhicule,

- condamné in solidum la société Hôtel moderne et la société Generali à payer à Campus France la somme de 113 548, 76 euros au titre de son recours subrogatoire, avec intérêts au taux légal à compter du 10 octobre 2011,

- dit que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l'article 1343-2 du code civil,

- condamné la société Koné à relever et garantir la société Hôtel moderne et la société Generali de l'ensemble des condamnations prononcées à leur encontre en principal et accessoires,

- condamné la société Qualiconsult à relever et garantir la société Koné de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre en principal et accessoires, à hauteur de 50 %,

- condamné in solidum la société Hôtel moderne et la société Generali à payer à Mme [B] une somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum la société Hôtel moderne et la société Generali à payer à Campus France une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum la société Hôtel moderne et la société Generali aux dépens et dit que Maître Matthieu Nicolet pourra les recouvrer directement pour ceux dont il a fait l'avance sans avoir reçu provision,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement à concurrence des deux tiers de l'indemnité allouée et en totalité en ce qui concerne les frais irrépétibles et les dépens,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Par déclaration du 9 juillet 2021, la société Qualiconsult a interjeté appel de ce jugement en ce qu'il a :

- condamné in solidum la société Hôtel moderne et la société Generali à payer à Mme [B] les sommes suivantes à titre de réparation de son préjudice corporel, en deniers ou quittance, provisions non déduites :

* tierce personne temporaire : 19 376 euros

* tierce personne définitive : 1 468 357,60 euros

* perte de gains professionnels futurs : 685 643,50 euros

* déficit fonctionnel temporaire : 26 816,40 euros

- condamné la société Koné à relever et garantir la société Hôtel moderne et la société Generali de l'ensemble des condamnations prononcées à leur encontre en principal et accessoires,

- condamné la société Qualiconsult à relever et garantir la société Koné de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre en principal et accessoires, à hauteur de 50 %,

- condamné in solidum la société Hôtel moderne et la société Generali à payer à Mme [B] une somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Campus France qui n'avait pas été intimée par la société Qualiconsult a été assignée en intervention forcée à la demande du conseiller de la mise en état par acte d'huissier en date du 6 octobre 2021.

La caisse primaire d'assurance maladie du Val-de-Marne, assignée par Mme [B] par acte d'huissier en date du 8 novembre 2022, délivré à personne habilitée, n'a pas constitué avocat.

Par arrêt en date du 15 juin 2023, la cour d'appel de Paris a :

- déclaré recevable l'appel incident de Campus France,

- confirmé le jugement hormis en ses dispositions relatives à l'indemnisation de dépenses de santé futures d'un montant de 4 100 euros et à celles des postes du préjudice corporel de Mme [B] liés à l'assistance permanente par une tierce personne et à la perte de gains professionnels futurs,

- débouté Mme [B] de sa demande d'indemnisation au titre des soins psychiatriques,

- condamné in solidum la société Hôtel moderne et la société Generali à payer à Mme [B], provisions et sommes versées au titre de l'exécution provisoire du jugement non déduites, une indemnité d'un montant de 1 485 807, 20 euros au titre de l'assistance permanente par une tierce personne,

- rappelé que la société Koné doit relever et garantir la société Hôtel moderne du temple et la société Generali de l'ensemble des condamnations prononcées à leur encontre en principal et accessoires,

- rappelé que la société Qualiconsult doit relever et garantir la société Koné de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre en principal et accessoires, à hauteur de 50 %,

- sursis à statuer sur la demande de Mme [B] au titre de la perte de gains professionnels futurs,

- invité Mme [B] à produire tous éléments justificatifs de sa situation professionnelle depuis la date de la consolidation et des revenus qu'elle perçoit,

- renvoyé l'affaire à la mise en état,

- sursis à statuer sur les demandes présentées en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu les dernières conclusions de la société Qualiconsult, notifiées le 22 février 2024, aux termes desquelles, elle demande à la cour de :

- déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté par la société Qualiconsult,

- infirmer le jugement rendu le 4 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Paris en ce qu'il a condamné in solidum l'Hôtel moderne du temple et la société Generali à payer à Mme [B] les sommes suivantes à titre de réparation de son préjudice corporel, en deniers ou quittances, provisions non déduites :

*pertes de gains professionnels futurs : 685 643, 50 euros

Statuant à nouveau,

- juger que le BCRIV 2023 sera applicable,

- juger qu'il n'existe pas de perte de chance pour Mme [B] de « recouvrir » un emploi,

- juger que la perte de gains professionnels futurs sera indemnisée en prenant en considération un euro en rente temporaire à 60 ans (21,48 euros), âge légal de départ à la retraite au Pakistan, pour une victime âgée de 36 ans à la consolidation, sur la base de 598 euros (1 196 euros/2) par mois,

- juger qu'il sera versé à Mme [B] la somme de 169 712, 40 euros au titre de sa perte de gains professionnels futurs,

- débouter Mme [B] du surplus de ses demandes,

En tout état de cause,

- débouter Campus France de ses demandes formulées au titre de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de la société Qualiconsult,

- débouter Campus France de sa demande formulée à l'encontre de la concluante au titre des dépens,

- débouter l'ensemble des parties de leurs demandes plus amples et/ou contraires,

- condamner Mme [B] à verser à Qualiconsult la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [B] aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions de Mme [B], notifiées le 16 février 2024, aux termes desquelles, elle demande à la cour de :

Vu l'article 1240 du code civil,

- débouter la société Qualiconsult et la société Hôtel moderne du temple de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

Ce faisant,

- confirmer le jugement en ce qu'il a admis l'existence de perte de gains professionnels futurs, et l'existence d'une tierce personne post-consolidation (tierce personne définitive),

- confirmer le jugement en ce qu'il a retenu l'euro de rente à titre viager pour le calcul de la perte de gains professionnels futurs, s'agissant du barème de la gazette du palais,

En y ajoutant après réouverture des débats,

- allouer à Mme [B] une somme de 1 254 652 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs,

- condamner la société Qualiconsult à payer à Mme [B] une somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Hôtel moderne du temple à payer à Mme [B] une somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Qualiconsult et la société Hôtel moderne du temple aux entiers dépens d'appel, que Maître Jean-Michel Scharr, avocat, pourra directement recouvrer conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions de la société Hôtel moderne, notifiées le 28 février 2024, aux termes desquelles, elle demande à la cour de :

- recevoir la société Hôtel moderne en ses présentes écritures d'intimé et d'appel incident, fins et conclusions et l'y déclarer recevable, bien fondée et y faisant droit,

En conséquence,

- infirmer le jugement rendu le 4 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Paris en ce qu'il a condamné in solidum la société Hôtel moderne et la société Generali à payer à Mme [B] la somme de 685 643,50 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs sur la base d'un salaire mensuel de 2 330 euros avec application d'une perte de chance de 90%,

- confirmer le jugement rendu le 4 mai 2021 en ce qu'il a appliqué le barème de la Gazette du palais 2018,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- débouter Mme [B] de sa demande d'application du barème de la gazette du Palais 2022,

- fixer à 60% la perte de chance de percevoir un salaire qui ne saurait excéder le montant du salaire pakistanais de 1 196 euros,

- fixer l'indemnisation au titre de la perte de gains professionnels futurs à une somme qui ne saurait excéder 191 048,08 euros,

En tout état de cause,

- confirmer le jugement dont appel pour le surplus de ses dispositions, et notamment en ce qu'il a jugé que la société Koné est tenue de garantir et relever indemne de toute condamnation éventuelle prononcée à l'encontre de la société Hôtel moderne et son assureur, la société Generali, tant en principal qu'en accessoires,

- donner acte à la société Hôtel moderne de ce qu'elle s'en rapporte à justice concernant la demande indemnitaire de Campus France,

- débouter Mme [B] du surplus de ses demandes,

- débouter Campus France de ses demandes formulées au titre de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de la société Hôtel moderne.

Vu les dernières conclusions de la société Generali, notifiées le 15 février 2024, aux termes desquelles, elle demande à la cour de :

- recevoir la société Generali en ses conclusions et l'y dire bien fondée,

- infirmer le jugement rendu le 4 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Paris en ce qu'il a condamné in solidum l'Hôtel moderne du temple et la société Generali à payer à Mme [B] la somme de 685 643,50 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs,

Statuant à nouveau,

- allouer à Mme [B] la somme de 191 048,08 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs,

- débouter Mme [B] de sa demande d'application du barème de capitalisation de la Gazette du palais 2022,

- dire n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions de la société Koné, notifiées le 28 février 2024, aux termes desquelles elle demande à la cour de :

Vu l'article 9 du code de procédure civile,

Statuant sur la demande formulée par Mme [B] au titre de la perte de gains professionnels futurs sur laquelle la cour a ordonné un sursis à statuer par arrêt du 15 juin 2023,

- déclarer la société Qualiconsult recevable en son appel,

- infirmer le jugement rendu le 4 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Paris en ce qu'il a condamné in solidum la société Hôtel moderne et la société Generali à payer à Mme [B] la somme de 685 643,5 euros à titre de réparation de son préjudice corporel, en deniers ou quittances, provisions non déduites,

Et statuant à nouveau,

- liquider le poste de préjudice dont il est sollicité l'infirmation à la somme suivante :

* perte de gains professionnels futurs : 203 654, 88 euros et subsidiairement 430 525,55 euros,

- débouter Mme [B] du surplus de ses demandes,

- déclarer que les intérêts au taux légal ne courront le cas échéant qu'à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir,

- confirmer que le jugement rendu le 4 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Paris en ce qu'il a condamné la société Qualiconsult à relever et garantir la société Koné de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre au principal et accessoire, à hauteur de 50%,

- débouter Mme [B] et tout contestant de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions contraires aux présentes,

- débouter Mme [B] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ou subsidiairement, réduire cette demande à de plus justes proportions,

- débouter Campus France et tout autre partie de leur demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ou subsidiairement, réduire cette demande à de plus justes proportions.

Vu les dernières conclusions de Campus France, notifiées le 15 février 2024, aux termes desquelles, il demande à la cour de :

- condamner in solidum, ou encore l'une à défaut de l'autre, la société Hôtel moderne, la société Generali, la société Koné et la société Qualiconsult au paiement au profit de Campus France de la somme de 2 400 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum, ou encore l'une à défaut de l'autre, la société Hôtel moderne, la société Generali, la société Koné et la société Qualiconsult aux dépens d'appel.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il convient de rappeler qu'il a été définitivement statué par jugement du 19 décembre 2017, confirmé par un arrêt du 12 novembre 2019, devenu irrévocable, sur les responsabilités encourues, les débiteurs d'indemnisation et les appels en garantie, la société Hôtel Moderne et la société Generali ayant été condamnées in solidum à indemniser l'entier préjudice de Mme [B], la société Koné condamnée à relever et garantir la société Hôtel moderne et la société Generali de l'intégralité des condamnations prononcées à leur encontre, en principal et accessoires et la société Qualiconsult condamnée à relever et garantir la société Koné de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre, en principal et accessoires, à concurrence de 50 %.

Dans son précédent arrêt du 15 juin 2023; la cour a statué sur la liquidation de tous les postes du préjudice corporel de Mme [B] dont elle était saisie, à l'exception de la perte de gains professionnels futurs sur laquelle elle a sursis à statuer dans l'attente de la production par Mme [B] de tous éléments justificatifs de sa situation professionnelle depuis la date de la consolidation et des revenus qu'elle perçoit.

Elle a également confirmé le jugement en ses dispositions relatives au recours subrogatoire de Campus France.

Sur la perte de gains professionnels futurs et le préjudice de retraite

Ce poste est destiné à indemniser la victime de la perte ou de la diminution directe de ses revenus à compter de la date de consolidation, consécutive à l'invalidité permanente à laquelle elle est désormais confrontée dans la sphère professionnelle à la suite du fait dommageable.

Il peut inclure la perte de droits à la retraite, notamment lorsque la victime encore scolarisée ou étudiante à l'époque de l'accident n'était pas encore entrée dans la vie active.

Après avoir relevé que l'accident de Mme [B] était survenu en France et qu'elle y était demeurée pour une prise en charge adaptée de ses soins et traitements, le tribunal a retenu l'existence d'une perte de chance de 90 % de percevoir un salaire de 2 330 euros net par mois, correspondant au salaire en France d'un docteur en sciences travaillant dans le domaine de la recherche.

Le tribunal a alloué à Mme [B] la somme de 685 643,50 euros en réparation de cette perte de chance de gains, avec capitalisation à compter du 24 novembre 2020 sur la base de l'euro de rente viagère prévu par le barème de la Gazette du palais 2018 pour une femme âgée de 43 ans à cette date.

La société Qualiconsult relève que l'expert a conclu que Mme [B] pourrait reprendre une activité dans son domaine de compétence, sur un poste adapté, sans déplacement, et probablement à temps partiel et qu'à aucun moment, il n'a retenu une impossibilité totale de reprendre une activité professionnelle quelconque.

Elle relève que si Mme [B] justifie bénéficier de l'allocation adulte handicapés, elle n'explique pas les raisons pour lesquelles elle n'a effectué depuis 2013, soit depuis 10 ans, aucune recherche d'emploi.

Elle estime que Mme [B] qui ne souffre d'aucun trouble cognitif et a atteint un niveau de formation très avancé, est en mesure de trouver un emploi adapté à son handicap dans son domaine de compétence ; elle souligne qu'un travail de recherche pouvant être mené en laboratoire ou dans un bureau, les aménagements rendus nécessaires par le handicap de Mme [B] sont tout à fait envisageables.

Elle critique en outre l'indemnisation par le tribunal d'une perte de chance de percevoir le salaire d'un chercheur en France, alors que Mme [B] avait fait le choix de rentrer dans son pays d'origine pour y travailler, qu'elle bénéficiait d'une offre d'emploi au Pakistan et que le tribunal a ainsi réparé la perte d'une chance à laquelle la victime n'avait jamais prétendu.

Elle considère que le salaire de référence retenu par le tribunal correspond à un revenu hypothétique.

L'expert ayant retenu que Mme [B] pouvait travailler à temps partiel, elle estime que la perte de gains professionnels futurs de Mme [B] est limitée à la moitié du salaire qu'elle devait percevoir au Pakistan, soit 598 euros (1 196 euros / 2), et chiffre sa perte de revenus jusqu'à l'âge de 60 ans, âge légal de départ à la retraite au Pakistan, à la somme de 169 712,40 euros.

La société Generali relève, dans le même sens, que Mme [B] ne justifie pas des démarches entreprises pour trouver un emploi depuis plus de 10 ans.

Elle estime que dès lors que l'incapacité professionnelle de la victime n'est que partielle, il convient de limiter son indemnisation à 60 % de sa perte de revenus, calculée sur la base du salaire de 1 196 euros qu'elle devait percevoir au Pakistan ; elle demande ainsi à la cour de chiffrer ce poste de préjudice à la somme de 191 048,08 euros.

La société Koné fait valoir que Mme [B] ayant fait le choix avant l'accident de rentrer au Pakistan, il convient d'évaluer sa perte de revenus, sont sur la base du salaire d'un chercheur en France mais sur celle du salaire mensuel de 1 196 euros qu'elle devait percevoir au Pakistan.

Elle demande ainsi à la cour, à titre principal, la perte de gains professionnels futurs de Mme [B] jusqu'à l'âge de 60 ans, âgé légal de départ à la retraite au Pakistan, à la somme de 203 654,88 euros.

La société Hôtel moderne qui indique faire sienne l'argumentation de la société Generali propose d' évaluer ce préjudice à la somme de 191 048,08 euros.

Mme [B] fait valoir que si l'expert a estimé qu'elle pouvait, en théorie, reprendre une activité dans son domaine de compétence, sur un poste adapté, en fauteuil roulant, sans déplacement et probablement à temps partiel, elle est en réalité inapte à exercer une activité de recherche, nécessitant mémoire et concentration, en raison de son état de stress post-traumatique sévère avec syndrome anxio-dépressif.

Elle ajoute que tout avenir professionnel lui est désormais impossible, à tout le moins dans son domaine, et ajoute que les décisions prises depuis 2013 par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées reconnaissent l'existence d'une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi du fait de son handicap, et que les décisions successives par cette commission sur une période de 10 ans démontrent la difficulté qu'elle a à retrouver un emploi ou à se reconvertir dans un autre domaine ;

Elle estime qu'il ne peut lui être reproché de ne pas justifier de recherches d'emploi, et demande à la cour d'évaluer sa perte de gains professionnels futurs, non sur la base du salaire en roupies correspondant au poste qu'elle devait occuper au Pakistan, soit après conversion, environ 1 200 euros par mois, mais en fonction de la rémunération en France d'un docteur en sciences travaillant dans la recherche, soit 2 330 euros nets par mois, l'indemnisation de son préjudice devant tenir compte de la réalité économique du pays dans lequel elle a été contrainte de résider à la suite du fait dommageable.

En retenant, comme l'ont fait les premiers juges, une indemnisation limitée à 90 % du revenu de référence, Mme [B] chiffre son préjudice à la somme de 1 254 652 euros, calculée d'un salaire de 2 330 euros par mois, avec capitalisation à compter du 24 novembre 2020 en fonction de l'euro de rente viagère prévu par le barème de la Gazette du palais 2022 avec un taux d'intérêts de 0 % pour une femme âgée de 43 ans à cette date.

Sur ce, il ressort des pièces versées aux débats que Mme [B], a bénéficié d'une bourse du ministère des affaires étrangères pour effectuer pendant six mois un stage post-doctorat en chimie organique dans une université française (pièces n° 33 et de Mme [B]).

Elle était, à l'issue de ce stage, en attente de son vol de retour vers le Pakistan lorsque l'accident est survenu, ainsi que le rappelle un membre de l'ambassade du Pakistan dans une lettre du 13 juillet 2011.

Mme [B] verse aux débats une lettre en date du 28 octobre 2010 aux termes de laquelle le professeur [Z] du centre international de chimie et de biologie de l'université de [Localité 14] lui a offert un poste de professeur assistant en chimie organique à compter du 1er décembre 2010, moyennant un salaire de base 80 000 roupies par mois, une couverture médicale et diverses indemnités, dont une indemnité de doctorant de 5 000 roupies, cette promesse d'embauche ferme n'étant affectée d'aucune condition.

Il est mentionné entre parenthèses dans la traduction libre de ce document rédigé en anglais la conversion en euros de la rémunération prévue en roupies, soit 1 196,15 euros pour le salaire de base de 80 000 roupies et 74,76 euros pour l'indemnité de doctorant de 5 000 roupies.

Il résulte de ce qui précède que Mme [B] dont l'embauche était certaine, n'a pu occuper ce poste en raison de la survenance du fait dommageable le 31 octobre 2010, qui a justifié plusieurs hospitalisations entre le 30 octobre 2010 et le 22 novembre 2013.

L'expert, le Docteur [T], indique dans son rapport en date du 20 juillet 2018, complété le 11 octobre 2018, que Mme [B] a présenté à la suite de l'accident des fractures tassements du plateau vertébral de D 12 et de L1, une fracture de la jambe gauche au tiers moyen, une fracture du calcanéum gauche et du calcanéum droit.

Il relève que Mme [B], dont l'état est consolidé depuis le 22 novembre 2013, conserve comme séquelles une raideur sévère des deux pieds et des deux chevilles, accompagnée d'une symptomatologie algique majeure, d'une douleur permanente du rachis dorso-lombaire, le tout retentissant sur la marche, ainsi qu'un état de stress post-traumatique sévère avec syndrome anxio-dépressif, ces séquelles justifiant un taux de déficit fonctionnel permanent de 60 %.

L'expert précise dans son rapport complémentaire en date du 11 octobre 2018 que Mme [B] ne peut marcher avec des béquilles que sur quelques mètres à domicile, et qu'elle se déplace le reste du temps en fauteuil roulant ; il relève également l'existence d'un contexte particulier d'hyperalgie, d'asthénie, de dépression et de polymédication.

Il retient également, au titre des soins postérieurs à la consolidation le renouvellement des thérapeutiques algiques et des soins psychiatriques.

Le Docteur [T], indique page 26 de son rapport, s'agissant du retentissement professionnel de l'accident : « Nous rappellerons que l'intéressée était en post-doctorat de chimie. Elle a perdu son autonomie physique mais il n'y a aucune atteinte cognitive (pas de traumatisme crânien). Il est certain que son état de stress post-traumatique et son cortège de manifestations anxiodépressives ont un retentissement sur les capacités de concentration de l'intéressée. Elle pourrait reprendre une activité dans son domaine de compétence, sur un poste adapté, en fauteuil, sans déplacement et, probablement, à temps partiel du fait des nécessités thérapeutiques et des répercussions psychologiques de l'accident ».

Toutefois, cet avis qui ne lie pas le juge ne peut être retenu.

En effet les séquelles objectivées tant sur le plan physique que psychologique, incluant un stress post-traumatique sévère nécessitant un traitement psychiatrique et des phénomènes d'hyperalgie, d'asthénie et de dépression, ne permettent pas à Mme [B], même si elle ne présente pas d'atteinte cognitive liée à un traumatisme crânien, d'exercer une activité de chercheur, d'enseignant-chercheur ou d'ingénieur en chimie ou en chimie organique, laquelle implique la réalisation de tâches complexes et une actualisation constante des connaissances, qui requièrent des capacités de concentration élevées.

Mme [B] verse ainsi aux débats une étude des profils de l'ingénieur chimiste, mettant en évidence le niveau d'exigence de la profession, incluant des travaux de recherche afin de « trouver des molécules, des matériaux ou des voies de nouvelles synthèses et procédés ».

Par ailleurs, en raison de sa fatigabilité (asthénie), des phénomènes algiques majeurs constatés par l'expert, de son stress-post traumatique sévère, justifiant, selon l'expert la poursuite de soins psychiatriques et de l'importance des séquelles fonctionnelles et psychologiques justifiant un taux de déficit fonctionnel permanent de 60 %, les possibilités de retour à l'emploi de Mme [B], compte tenu de son âge (36 ans à la date de consolidation et 46 ans à la date de la liquidation), apparaissent totalement illusoires, même sur un poste moins qualifié ou aménagé.

Mme [B] justifie au vu des avis d'imposition versés aux débats et des décisions successives de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées du Finistère, qu'elle n'a perçu aucun revenu d'activité entre 2011 à 2012 et que ses seules ressources sont constituées par l'allocation aux adultes handicapés qui lui a été attribuée à compter du 1er février 2013.

Il ne peut être reproché à Mme [B], qui n'est pas tenue de minimiser son préjudice dans l'intérêt du responsable, de ne pas justifier de recherches d'emploi ou de son inscription à Cap emploi.

S'il résulte des données qui précèdent que Mme [B], dont les possibilités d'accéder à une activité professionnelle rémunérée sont totalement illusoires compte tenu de la nature et de l'importance des séquelles de l'accident, justifie d'une perte de gains professionnels futurs totale, force est de constater qu'elle limite sa demande à 90 % du revenu de référence qu'elle retient, admettant ainsi implicitement mais nécessairement, que comme l'a retenu le tribunal, son préjudice correspond à une perte de chance de gains.

S'agissant du salaire de référence sur la base duquel Mme [B] doit être indemnisée, il convient de relever que c'est en raison de l'événement traumatique résultant de la chute accidentelle de la cabine d'ascenseur dans laquelle elle avait pris place, qu'elle a été contrainte de demeurer en France et de renoncer au poste qui lui était offert au Pakistan.

Il ressort des données de l'expertise qu'elle a été hospitalisée à de nombreuses reprises entre le 30 octobre 2010 et le 22 novembre 2013, y compris en clinique psychiatrique, et qu'elle a été contrainte de demeurer en France pour poursuivre ses soins, ainsi qu'il résulte des certificats médicaux des Docteurs [Y] et [S] en date des 24 juin 2016 et 5 juillet 2017 attestant que son état de santé nécessite des soins réguliers qui ne peuvent être dispensés dans son pays d'origine.

Mme [B] subissant son préjudice en France où elle a été contrainte de demeurer en raison du fait dommageable, il convient, compte tenu du principe de réparation intégrale du préjudice sans perte ni profit pour la victime, d'indemniser sa perte de revenus après consolidation, non en fonction du salaire de base de 80 000 roupies (1 196,15 euros) qu'elle devait percevoir au Pakistan pour le poste de professeur assistant en chimie organique auquel elle a été contrainte de renoncer à la suite de l'accident, mais, comme l'ont justement retenu les premiers juges, sur la base du salaire en France d'un docteur en sciences travaillant dans le domaine de la recherche, soit 2 330 euros nets par mois, cette rémunération, compte tenu de la différence du coût de la vie entre la France et le Pakistan, étant seule de nature à assurer à la victime un niveau de revenu en France équivalent à celui dont elle aurait bénéficié dans son pays d'origine avec un salaire de base de 1 196,15 euros, voire de 1 270,91 euros si on inclut la prime de doctorant de 75,74 euros.

Il convient d'observer à ce titre, que selon les pièces versées aux débats par la société Qualiconsult, le salaire de base que devait percevoir Mme [B] au Pakistan, soit 1 196,15 euros est 9 fois supérieur au salaire moyen au Pakistan d'un montant de 175,97 euros, alors qu'il est inférieur au SMIC net en France.

Il y a lieu de distinguer les pertes de gains professionnels échues (tenant compte d'un coefficient de perte de chance de 10 % admis par la victime) entre la date de consolidation et celle de la liquidation et celles à échoir qui seront capitalisées de manière viagère pour tenir compte du préjudice de retraite de Mme [B], dont les possibilités d'accéder à une activité rémunérée ont été totalement obérées par l'accident.

Le préjudice devant être évalué à la date à laquelle le juge statue, le barème de capitalisation utilisé sera celui publié par la Gazette du palais du 22 octobre 2022, avec un taux d'intérêts de 0 %, qui est le plus approprié comme reposant sur les données démographiques, économiques et monétaires les plus pertinentes.

Au bénéfice de ces observations, le préjudice de Mme [B] lié à la perte de gains professionnels fururs, incluant le préjudice de retraite, s'établit de la manière suivante :

- pertes de gains professionnels futurs échues du 23 novembre 2013, lendemain de la date de la consolidation, jusqu'à la date du présent arrêt :

* (2 330 euros x 90 %) x 126,42 mois = 265 102,74 euros

- pertes de gains professionnels à échoir par capitalisation viagère en fonction de l'euro de rente viagère prévu par le barème retenu par la cour pour une femme âgée de 46 ans à la date de la liquidation, soit 39,996

* perte annuelle : 25 164 euros (2 330 euros x 12 mois x 90 %)

* arrérages à échoir : 25 164 euros x 39,996 = 1 006 459,34 euros

Soit une somme totale de 1 271 562,08 euros, qui sera ramenée à celle de 1 254 652 euros, compte tenu des limites de la demande.

En l'absence de prestations perçues par Mme [B] devant s'imputer sur ce poste de préjudice, cette somme revient intégralement à la victime, étant rappelé que l'allocation aux adultes handicapés qui n'est pas visée à l'article 29 de la loi du 5 juillet 1985 n'ouvre droit à aucun recours subrogatoire et ne peut être déduite du poste de préjudice lié à la perte de gains professionnels futurs.

Le jugement sera réformé.

Sur les demandes annexes

La cour a, dans son précédent arrêt du 15 juin 2023, confirmé les dispositions du jugement déféré relatives aux dépens et aux frais irrépétibles, condamné in solidum la société Hôtel moderne et la société Generali aux dépens d'appel exposés jusqu'au jour de l'arrêt et sursis à statuer sur les demandes présentées en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Hôtel moderne et la société Generali qui succombent partiellement dans leurs prétentions et sont tenues à indemnisation supporteront la charge des dépens d'appel exposés depuis l'arrêt du 15 juin 2023.

L'équité commande d'allouer, en application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 5 000 euros à Mme [B] et celle de 2 000 euros à Campus France au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel et de rejeter le surplus des demandes formulées à ce titre, étant observé que Mme [B] ne formule aucune prétention de ce chef à l'encontre de la société Generali.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire, par mise à disposition au greffe,

Vu l'arrêt du 15 juin 2023,

- Déclare recevable l'appel incident de l'Etablissement public industriel et commercial Campus France,

- Infirme le jugement en ses dispositions relatives à l'indemnisation du poste de préjudice corporel de Mme [X] [B] lié à la perte de gains professionnels futurs,

- Condamne in solidum la société Hôtel moderne du temple et la société Generali IARD à payer à Mme [X] [B], provisions et sommes versées au titre de l'exécution provisoire du jugement non déduites, une indemnité d'un montant de 1 254 652 euros au titre de perte de gains professionnels futurs, incluant le préjudice de retraite,

- Rappelle que la société Koné doit relever et garantir la société Hôtel moderne du temple et la société Generali IARD de l'ensemble des condamnations prononcées à leur encontre en principal et accessoires,

- Rappelle que la société Qualiconsult exploitation doit relever et garantir la société Koné de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre en principal et accessoires, à hauteur de 50 %,

- Condamne la société Hôtel moderne du temple à payer à Mme [X] [B], en application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

- Condamne in solidum la société Hôtel moderne du temple et la société Generali IARD à payer à l'Etablissement public industriel et commercial Campus France, en application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

- Condamne in solidum la société Hôtel moderne du temple et la société Generali IARD aux dépens d'appel exposés jusqu'à ce jour, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 21/13065
Date de la décision : 06/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-06;21.13065 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award