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05/06/2024 | FRANCE | N°21/07015

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 05 juin 2024, 21/07015


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 02 MAI 2024



(n° /2024, 1 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/07015 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEEXR



Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Juin 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL - RG n° 20/00181





APPELANTE



la SELARL FIDES prise en la personne de Me [C] [N] [S],

es qualité de mandateur liquidateur de la Societe d'économie mixte locale d'aménagement de [Localité 7] - SEMAF dont le siège social est situé [Adresse 8].

[Adresse 3]

[...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 02 MAI 2024

(n° /2024, 1 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/07015 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEEXR

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Juin 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL - RG n° 20/00181

APPELANTE

la SELARL FIDES prise en la personne de Me [C] [N] [S], es qualité de mandateur liquidateur de la Societe d'économie mixte locale d'aménagement de [Localité 7] - SEMAF dont le siège social est situé [Adresse 8].

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Charles-hubert OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029

INTIME

Monsieur [Z] [O]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Charlotte BERNIER de la SELEURL L'ARSENAL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

PARTIE INTERVENANTE

L'UNEDIC AGS CGEA IDF EST

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Florence ROBERT DU GARDIER, avocat au barreau de PARIS, toque : P0061

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Janvier 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Florence MARQUES, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Mme. MEUNIER Guillemette, présidente de chambre

Mme. NORVAL-GRIVET Sonia, conseillère

Mme. MARQUES Florence, conseillère rédactrice

Greffier, lors des débats : Madame Clara MICHEL

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Guillemette MEUNIER, Présidente de chambre et par Clara MICHEL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société d'économie mixte d'aménagement de [Localité 7] (SEMAF) intervient sur des projets d'aménagement urbain de la ville de [Localité 7] (94).

Elle a engagé M. [Z] [O] suivant contrat de travail à durée indéterminée en date du 2 janvier 2004, en qualité de responsable comptable secrétaire, statut cadre.

M. [O] exerçait ses fonctions sous la responsabilité et la supervision de Monsieur [W] en sa qualité de directeur administratif et financier de la SEMAF et de Mme [G] en qualité de PDG de la SEMAF.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective SYNTEC.

Au dernier état de la relation de travail, la rémunération mensuelle moyenne brute de M. [O] s'établissait à la somme de 5.257,94 euros.

M. [O] a été convoqué une première fois le 17 octobre 2019, avec mise à pied conservatoire, à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 28 octobre suivant.

M. [O] a fait l'objet d'une seconde convocation le 13 novembre 2019 pour un entretien préalable fixé au 22 novembre suivant, et reçu notification de son licenciement pour faute grave par lettre recommandée en date du 26 novembre 2019.

M. [O] a saisi le conseil de prud'hommes de Créteil, le 14 février 2020, aux fins de voir juger, à titre principal, que son licenciement est nul et à titre subsidiaire, dépourvu de cause réelle et sérieuse, et condamner son employeur à lui verser diverses sommes.

Par jugement en date du 17 juin 2021, auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud'hommes de Créteil a notamment :

- débouté la SEMAF de sa demande de surseoir à statuer,

- joint l'incident au fond,

- requalifié le licenciement pour faute grave de M. [O] en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamné la SEMAF à payer à M. [O], dont la moyenne des derniers salaires s'élève à 5.257,94 euros, les sommes suivantes :

* 15 451,49 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 1.545,14 euros de congés payés afférents,

* 1 077,82 euros à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire, outre 107,78 euros de congés payés afférents,

* 28 543 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

* 4 793,46 euros à titre de rappel sur l'indemnité compensatrice de congés payés non pris,

* 31 548 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 1 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté M. [O] du surplus de ses demandes,

- débouté la SEMAF de sa demande d'application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SEMAF aux éventuels dépens, comprenant les éventuels frais d'exécution en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Par déclaration au greffe en date du 29 juillet 2021, la SEMAF a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par jugement du 23 février 2022, le tribunal de commerce de Créteil a ouvert la procédure de liquidation judiciaire de la SEMAF et désigné la SELARL Fides, prise en la personne de Maître [C] [N] [S], en qualité de mandataire liquidateur.

Aux termes de ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 2 mai 2023, la SELARL Fides, prise en la personne de Maître [C] [N] [S], es qualité de mandataire liquidateur de la SEMAF demande à la cour de :

- prendre acte de l'intervention volontaire et de la reprise d'instance de la SELARL Fides, prise en la personne de Mme [C] [N] [S], es qualités de mandataire liquidateur, de la SEMAF,

In limine litis :

- faire droit à l'appel formé par la SEMAF,

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la SEMAF de sa demande de surseoir à statuer et joint l'incident au fond,

En conséquence,

- prononcer le sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale,

A titre principal, si la cour devait refuser de prononcer le sursis à statuer :

- faire droit au présent appel,

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

* requalifié le licenciement pour faute grave de M. [O] en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* condamné la SEMAF à payer à M. [O], dont la moyenne des derniers salaires s'élève à 5 257,94 euros, les sommes suivantes :

15 451,49 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 1.545,14 euros de congés payés afférents,

1 077,82 euros à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire, outre 107,78 euros de congés payés afférents,

28 543 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

4 793,46 euros à titre de rappel sur l'indemnité compensatrice de congés payés non pris,

31 548 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

1 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

* débouté la SEMAF de sa demande d'application de l'article 700 du code de procédure civile,

* condamné la SEMAF aux éventuels dépens, comprenant les éventuels frais d'exécution en application de l'article 699 du code de procédure civile,

En conséquence,

- débouter M. [O] de la totalité de ses demandes,

A titre subsidiaire, si la cour devait refuser de prononcer le sursis à statuer et confirmer que le licenciement de M. [O] ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse :

- limiter le montant de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à 15 773,82 euros,

- infirmer jugement déféré en ce qu'il a condamné la SEMAF à verser à M. [O] la somme de 4 793,46 euros à titre de rappel sur l'indemnité compensatrice de congés payés non pris,

- débouter M. [O] de sa demande à titre de dommages et intérêts pour procédure de licenciement brutale et vexatoire : 5 257,94 euros (1 mois de salaire),

- débouter M. [O] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- déclarer la présente décision opposable à l'AGS,

En tout état de cause :

- condamner M. [O] à verser à la SELARL Fides la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [O] aux entiers dépens de l'instance.

Aux termes de ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 26 octobre 2023, M. [O] demande à la cour de :

In limine litis :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la SEMAF de sa demande de sursis à statuer,

En conséquence,

- débouter la SELARL Fides es qualités de cette demande,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

* jugé que le licenciement de M. [O] était dénué de cause réelle et sérieuse,

* condamné la SEMAF à verser à M. [O] les sommes suivantes :

28 543 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

15 451,49 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

1.545,14 euros à titre de congés payés afférents à l'indemnité compensatrice de préavis,

1 077,82 euros à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire,

107,78 euros à titre de congés payés afférents au rappel de salaire de la mise à pied conservatoire,

4 793,46 euros à titre de rappel sur l'indemnité compensatrice de congés payés non pris,

* condamné la SEMAF aux entiers dépens,

* débouté la SEMAF de toutes ses demandes,

- infirmer le jugement déféré pour le surplus,

Et, statuant à nouveau et y ajoutant :

- condamner la SELARL Fides ès qualités et fixer au passif de la liquidation de la SEMAF au profit de M. [O] les créances suivantes :

68 353,22 euros (13 mois) de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

5 257,94 euros (1 mois de salaire) de dommages-intérêts pour procédure de licenciement brutale et vexatoire,

- condamner la SELARL Fides es qualités à verser à M. [B] somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- déclarer la présente décision opposable aux AGS dans les conditions des articles L.3253-6 et D.3253-5 du code du travail, étant précisé que le plafond de garantie de l'AGS s'entend en sommes brutes,

- condamner la SELARL Fides es qualités aux dépens.

Aux termes de ses uniques conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 28 juillet 2022, l'Unedic délégation AGS-CGEA IDF EST demande à la cour de :

Sur les demandes de M. [O] :

- infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

- débouter M. [O] de l'ensemble de ses demandes,

Sur la garantie de l'AGS :

- dire et juger que s'il y a lieu à fixation, la garantie de l'AGS ne pourra intervenir que dans les limites de la garantie légale,

- dire et juger que la garantie prévue suivant les dispositions de l'article L.3253-6 du code du travail ne peut concerner que les seules sommes dues en exécution du contrat de travail au sens de l'article L.3253-8 du Code du travail, les astreintes, dommages et intérêts mettant en oeuvre la responsabilité de droit commun de l'employeur ou l'article 700 du code de procédure civile étant ainsi exclus de la garantie,

- dire et juger que la garantie de l'AGS ne pourra excéder, toutes créances avancées pour le compte du salarié confondues, l'un des trois plafonds des cotisations maximum du régime d'assurance chômage conformément aux dispositions des articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail,

- statuer ce que de droit quant aux frais d'instance ' dont les dépens ' sans qu'ils puissent être mis à la charge de l'AGS.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 14 novembre 2023.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties pour un exposé complet du litige.

MOTIFS DE LA DECISION

1-Sur la demande de sursis à statuer

La Selarl Fides prise en la personne de Maître [C] [N] [S] ès qualité de mandataire liquidateur de la Semaf expose qu'elle a déposé une première plainte le 16 septembre 2019 puis une deuxième le 21 novembre 2019, toujours en cours, dont l'issue est susceptible d'influer sur la solution du litige prud'homal.

M. [O] soutient que cette demande revêt un caractère purement dilatoire et n'est pas sérieuse dès lors que la Semaf disposait de tous les éléments lui permettant de vérifier les faits dénoncés.

Les circonstances de l'espèce ne justifie pas qu'il soit sursis à statuer, ainsi que le sollicite l'appelante, d'autant qu'il n'est produit aucune pièce pour justifier à quel stade en est la plainte.

Le conseil de prud'homme a, à juste titre, rejeté cette demande.

2-Sur la demande au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés

M. [O] expose que le solde de ses congés payés était de 87 jours sur son bulletin de paie d'octobre 2019 (12,5 sur N et 74,5 sur N-1) et que de manière arbitraire et sans raison, son employeur a indiqué un solde de 42 jours sur le bulletin de paie de novembre 2019, qu'il a reçu une indemnité compensatrice de congés payés d'un montant de 4260,06 euros alors que sur le fondement de 42 jours, il aurait du percevoir la somme de 9053,52 euros. Il sollicite en conséquence un rappel de 4793,46 euros.

La Selarl Fides prise en la personne de Maître [C] [N] [S] mandataire liquidateur de la Semaf se prévalant des dispositions de l'article L.3141 du code du travail fait observer que le droit à congé est annuel et que M. [Z] [O] ne peut exiger le report de tout ou partie de ses congés sur l'année suivante.

Toutefois, c'est par une analyse exacte des congés auxquels le salarié pouvait prétendre eu égard aux mentions figurant sur ses bulletins de salaire que celui-ci réclame sur la base de 42 jours de congés acquis durant la période de référence un rappel à hauteur de 4793, 46 euros.

Il y a donc lieu de fixer cette créance au passif de la liquidation judiciaire.

3-Sur le licenciement pour faute grave

L'article L.1231-1 du code du travail dispose que le contrat à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié. Aux termes de l'article L.1232-1 du même code, le licenciement par l'employeur pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

Il résulte par ailleurs des dispositions combinées des articles L 1232-1, L 1232-6, L 1234-1 et L 1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d'un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l'employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d'une part d'établir l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d'autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise.

En l'espèce, aux termes de la lettre de rupture du 26 novembre 2019, il est reproché à M. [O] de :

1- avoir violé les règles légales et réglementaires en matière de frais professionnels, en mettant en remboursement des frais non conformes et non professionnels engagés par M. [T], au préjudice de la SEMAF. Des exemples sont mentionnés;

2- ne pas avoir alerté la présidente et directrice générale (PDG) de certaines anomalies comptables et administratives, et d' avoir ainsi manqué à son obligation de loyauté : l'existence de 5 lignes téléphoniques au nom de la SEMAF alors qu'il n'y a que deux salariés, bulletins de paie de M. [T] non conformes, le paiement deux fois par ans de RTT au profit de M. [T] alors qu'il est cadre dirigeant;

3- avoir téléchargé illégalement de nombreux films et séries sur son temps de travail et sur son ordinateur professionnel;

4- avoir de très nombreux éléments téléchargés ou rédigés par lui-même pendant son temps de travail qui s'avèrent être totalement étrangers à l'activité de la Semaf. Il est reproché au salarié d'avoir participé, de façon récurrente, à la gestion d'un certain nombre d'entreprises en parrallèle de son activité professionnelle;

5- avoir refusé de communiquer lors du second entretien ses identifiants et mots de passe.

M. [Z] [O] conteste les griefs qui lui sont reprochés et soutient avoir eu un comportement exemplaire depuis son arrivée à la Semaf, rappelant que la sanction doit être proportionnée aux faits allégués. Il expose qu'en réalité le motif de son licenciement est économique et que Mme [G], PDG, avait la volonté d'arrêter l'activité de la Semaf ainsi que cela ressort de son programme politique en vue des élections municipales de 2020, que l'origine des difficultés économiques de la Semaf est la conséquence de la décision de l'employeur de mettre fin à l'opération « Moulin de Berny».

Il fait valoir qu'il n'a jamais fait l'objet d'observations et/ou de sanctions disciplinaires antérieures et qu'il n'a pas été remplacé. Il fait enfin observer que la mise en oeuvre de la procédure de licenciement n'a pas été précédée d'une demande d'explications et que la rupture du contrat de travail est intervenue avant la notification du licenciement.

En ce qui concerne ce dernier argument, rien ne permet de constater, et même si les relations entre les parties étaient tendues, que la décision de rompre le contrat de travail a été prise par l'employeur avant même que soit mise en oeuvre la procédure de licenciement.

S'agissant des griefs tenant au téléchargement de films sur son temps de travail et son activité au profit d'autres entreprises, la Selarl Fides prise en la personne de Maître [C] [N] [S] en sa qualité de mandataire liquidateur de la Semaf justifie qu'ont été retrouvés des téléchargements sur l'ordinateur professionnel de M. [Z] [O] dans des dossiers intitulés download" (téléchargements) ou sur le bureau, nullement identifiés comme étant des dossiers personnels.

Elle communique à cet égard la capture de l'écran de l'ordinateur professionnel du salarié montrant qu'il a téléchargé entre mai et septembre 2019, plusieurs épisodes de la série Game of Thrones et 'Gomorra" ainsi que cinq films, ces téléchargements pour certains ayant eu lieu sur le lieu et pendant le temps de travail.

Il est par ailleurs établi que divers documents ont été retrouvés dans les fichiers informatiques professionnels concernant notamment la société Sas Garden (relevés bancaires, situation de compte, attestation d'homologation d'une rupture conventionnelle...), la société Bistrot 58 (facture, modèle contrat de travail à temps partiel...), la société Brasserie de l'hôtel de ville (relevés de compte), la société Valophis Habitat (devis, copies de conseil d'administration) et que M. [Z] [O] était en outre en possession d'un tampon de la société Urbarenov.

La Selarl Fides prise en la personne de Maître [C] [N] [S] en sa qualité de mandataire liquidateur de la Semaf se prévaut de la clause d'exclusivité du contrat de travail emportant engagement de M. [O] 'à ne travailler que pour la présente société et à n'exercer en conséquence aucune activité concurrentielle de celle de la Semaf pendant toute la durée du contrat'.

M. [O] fait observer que ce dernier grief n'a été invoqué qu'à l'occasion du second entretien préalable, qu'il s'agit d'un grief de pure opportunité, et qu'en raison de son ancienneté, de l'absence de charte informatique et de sanctions antérieures, et surtout de la moindre conséquence sur l'activité de la société, il aurait dû conduire à une mise en demeure ou à à l'extrême un avertissement. Il soutient que la clause d'exclusivité est illicite comme étant particulièrement étendue et lui imposant des restrictions bien plus larges que le strict nécessaire.

Or, il ressort des pièces versées que de mai à septembre 2019 le salarié a téléchargé des films et séries sur son ordinateur professionnel.

La cour constate qu'il est également établi que le salarié a, en 2016, 2017 et 2019 eu une activité professionnelle pour d'autres sociétés sur son temps de travail pour la SEMAF.

Son argumentation relative à l'illicité de la clause d'exclusivité est inopérante dans la mesure ou il ne lui est pas reproché d'avoir, en plus, travaillé pour d'autres sociétés mais d'avoir eu une autre activité professionnelle sur son temps de travail contractuelllement convenu avec la Semaf.

A cet égard, l'appelante souligne que le salarié a été rémunéré pendant de très nombreuses années à effectuer des tâches étrangères à ses fonctions et qu'au surplus cette activité parrallèle a eu un impact sur la qualité de son travail alors qu'il était retrouvé des retards dans le paiement des factures selon l'attestion de la nouvelle personne chargée de la comptabilité, l'état des factures et les mises en demeure reçues.

Le manquement de M. [O] à son obligation contractuelle de consacrer l'intégralité de son temps de travail à l'exécution de la prestation attendue par l'employeur, telle que définie dans le contrat de travail, réitéré à de nombreuses reprises et de façon récurrente dans le temps, caractérise à lui seul-et sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres griefs- une faute grave, de nature à altérer de manière durable la confiance nécessaire dans une relation de travail et rendait impossible le maintien du salarié dans l'entreprise sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l'employeur.

La faute grave étant établie par l'employeur, le jugement entrepris qui a requalifié le licenciement de M. [O] en licenciement sans cause réelle et sérieuse sera infirmé de ce chef.

Le jugement est également infirmé en ce qu'il a alloué à M. [O] une somme au titre du rappel de salaire durant la mise à pied conservatoire et les congés payés afférents, une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents et une somme au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement et une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

4 - Sur la demande de dommages-intérêts pour conditions brutales et vexatoires du licenciement

M. [O] fait valoir que la lettre de convocation à l'entretien préalable lui a été remise par acte d'huissier avec mise à pied ce qui est extrêmement brutal et vexatoire après 16 ans d'ancienneté. Il souligne que la mise à pied a été très longue.

Il ajoute que chacun de deux entretiens auxquels il a été convoqué a eu lieu en présence de tiers, le directeur des services généraux de la ville de [Localité 7] lors du premier, la cheffe de cabinet du maire pour le second. Il indique que sa réputation a été ternie.

Le salarié ne justifie toutefois pas de son préjudice et doit par conséquent être débouté de sa demande de dommages-intérêts formés à ce titre.

Le jugement est confirmé.

5-Sur la garantie de l'AGS

Il convient de déclarer le présent arrêt opposable à l'AGS qui sera tenue à garantie dans les termes et conditions des articles L3253-6 et suivants du code du travail, et les plafonds prévus aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail.

6-Sur les demandes accessoires

Le jugement est infirmé sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile sauf en ce qu'il a débouté la Semaf de sa demande au titre des frais irrépétibles.

Les dépens de première instance et d'appel seront mis à la charge du salarié.

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel au profit de l'une ou l'autre des parties.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME le jugement déféré sauf en ce qu'il a:

-débouté la société d'économie mixte locale d'aménagement de [Localité 7] (SEMAF) de sa demande de sursis à statuer et de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile;

- débouté M. [Z] [O] de sa demande de dommages et intérêts pour conditions brutales et vexatoires du licenciement,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

DIT le licenciement de M. [Z] [O] fondé sur une faute grave;

FIXE la créance de M. [Z] [O] au passif de la liquidation judiciaire de la société d'économie mixte locale d'aménagement de [Localité 7] (SEMAF) à la somme de 4793, 46 euros à titre de rappel de l'indemnité compensatrice de congés payés;

DÉBOUTE M. [Z] [O] de sa demande au titre du rappel de salaire durant la mise à pied conservatoire et des congés payés afférents, de ses demandes d' indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, d'indemnité conventionnelle de licenciement et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;

DÉCLARE le présent arrêt opposable à l'AGS qui sera tenue à garantie dans les termes et conditions des articles L3253-6 et suivants du code du travail, et les plafonds prévus aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile;

DIT que les dépens de première instance et d'appel seront supportés par M. [Z] [O].

Le greffier La présidente de chambre


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 21/07015
Date de la décision : 05/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-05;21.07015 ?
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