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05/06/2024 | FRANCE | N°20/17139

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 2, 05 juin 2024, 20/17139


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 2



ARRET DU 05 JUIN 2024



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/17139 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCWWU



Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Octobre 2020 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CRETEIL - RG n° 19/04817





APPELANTS



Monsieur [W] [R]

né le 08 mai 1941 Ã

  [Localité 6] (93)

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représenté par Me Alain CROS, avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, toque : PC 182



Madame [Z] [F] épouse [R]

née le 26 mars 1935 à [Loc...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 2

ARRET DU 05 JUIN 2024

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/17139 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCWWU

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Octobre 2020 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de CRETEIL - RG n° 19/04817

APPELANTS

Monsieur [W] [R]

né le 08 mai 1941 à [Localité 6] (93)

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Alain CROS, avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, toque : PC 182

Madame [Z] [F] épouse [R]

née le 26 mars 1935 à [Localité 8] (68)

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Alain CROS, avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, toque : PC 182

INTIME

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES [Adresse 5] A [Localité 10] représenté par son syndic, le Cabinet NEXITY LAMY, SASU immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 487 530 099 dont le siège social est [Adresse 9]

C/O Société NEXITY - Agence Nation

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Tiphaine EOCHE DUVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : C1383

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 Mars 2024 devant Madame Perrine VERMONT, Conseillère chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre

Madame Perrine VERMONT, Conseillère

Madame Caroline BIANCONI-DULIN, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Dominique CARMENT

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre, et par Dominique CARMENT, Greffière présente lors de la mise à disposition.

* * * * * * * * *

FAITS & PROCÉDURE

M. [W] [R] et Mme [Z] [F] épouse [R] sont propriétaires des lots n° 11, 14, 15 et 19 dans un ensemble immobilier situé [Adresse 5] à [Localité 10], qu'ils ont acquis par acte authentique du 16 avril 1985 ;

Le règlement de copropriété décrit ainsi le lot n° 19 :

'ce lot est constitué de la jouissance d'une bande de terrain sur l'avenue Aubert limitée :

- au sud par l'avenue Aubert,

- à l'est par une ligne perpendiculaire à l'avenue Aubert, et parallèle au bâtiment A, située à une distance de un mètre cinquante centimètres de la façade sur jardin dudit bâtiment,

- au nord par une ligne parallèle à l'avenue Aubert et située à une distance de douze mètres de ladite avenue,

- à l'ouest, par une ligne perpendiculaire à l'avenue Aubert, et située à une distance de deux mètres de l'axe de la porte d'entrée commune sur l'avenue.

Cette bande de terrain est destinée à l'édification ultérieure de constructions qui pourront prendre accès soit sur le terrain, soit sur l'avenue'.

Par courrier du 25 mai 2018, M. [R] a sollicité l'ajout à l'ordre du jour de la prochaine assemblée générale d'une résolution en vue d'obtenir l'accord de l'assemblée pour la construction sur le lot n°19 de boxes ou de maison, en accord avec le PLU de la ville de [Localité 10] et avec l'accompagnement d'un architecte.

Lors de l'assemblée générale du 13 mars 2019, les copropriétaires ont rejeté la demande par la résolution n° 14.

M. et Mme [R] ont assigné devant le tribunal judiciaire de Créteil le syndicat des copropriétaires en annulation de la résolution n° 14 de l'assemblée générale du 13 mars 2019.

Par jugement du 22 octobre 2020, le tribunal judiciaire de Créteil a :

- débouté M. [W] [R] et Mme [Z] [F] épouse [R] de toutes leurs demandes,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamné M. [W] [R] et Mme [Z] [F] épouse [R] à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à [Localité 10] représenté par son syndic la société Nexity agence [Localité 7] Nation la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [W] [R] et Mme [Z] [F] épouse [R] aux dépens,

- rejeté toutes les autres demandes, plus amples ou contraires, des parties.

M. [W] [R] et Mme [Z] [F] épouse [R] ont relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 26 novembre 2020.

La procédure devant la cour a été clôturée le 6 décembre 2023.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu les conclusions notifiées le 8 janvier 2021 par lesquelles M. [W] [R] et Mme [Z] [F] épouse [R], appelants, invitent la cour, au visa des articles 1er, 26, 42 de la loi du 10 juillet 1965, 1103 et 1188 du code civil, à :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes et les a condamnés au paiement de la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de première instance,

statuant à nouveau,

- juger que le lot n°19 du règlement de copropriété du [Adresse 5] à [Localité 10] constitue un lot transitoire,

- prononcer l'annulation de la résolution n°14 de l'assemblée générale du 13 mars 2019,

- juger qu'en application de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965, ils seront dispensés de toute participation à la dépense commune des frais de procédure, dont la charge est répartie entre les autres copropriétaires,

- condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à [Localité 10], à leur payer la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel ;

Vu les conclusions notifiées le 2 avril 2021 par lesquelles le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 5] à [Localité 10], intimé, demande à la cour, au visa des articles 1er, 3, 8, 25 b), 26, 37, 37-1, 42 de la loi du 10 juillet 1965, 1 à 3, 10 et 11 du décret du 17 mars 1967, de :

- confirmer le jugement,

- débouter les époux [R] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

- juger que le lot n°19 ne répond pas aux exigences de l'article 1er de la loi du juillet 1965, de sorte qu'il ne constitue pas un lot transitoire régulier et valable,

- juger que l'article 42 du règlement de copropriété ('Chapitre III : Droits et Servitudes particulières' 'Article n°42 ' Lot n°19', pages 22-23) constitue une convention réservée de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1965 réservant au propriétaire du lot n°19 l'exercice du droit accessoire aux parties communes de construire de nouveaux bâtiments dans la cour-jardin partie commune de l'immeuble du [Adresse 5] à [Localité 10] lui appartenant, de sorte que ce droit n'ayant pas été exercé dans les dix ans suivant la promulgation de la loi du 10 juillet 1965, il est caduc et expiré,

- condamner solidairement les époux [R] à lui verser la somme de 6.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire que les époux [R] ne seront pas dispensés de participer à la dépense commune des frais de procédure,

- condamner solidairement les mêmes aux dépens ;

SUR CE,

La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel ;

En application de l'article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions ;

Sur la qualification du lot n° 19

M. et Mme [R] font valoir que le lot n°19 est un lot transitoire répondant aux conditions édictées par l'article 1er alinéa 3 de la loi du 10 juillet 1965, issu de la loi du 23 novembre 2018, dite loi ELAN, à savoir un lot formé par une partie privative constituée d'un droit de construire précisément défini quant aux constructions qu'il permet de réaliser, sur une surface déterminée du sol et d'une quote-part de parties communes correspondante, puisque le lot n°19 est formé du droit de construire sur une surface déterminée, des constructions qui pourront servir soit à usage d'habitation, de commerce, d'industrie ou de garage et correspond à 75/1.000èmes des parties communes ;

Ils allèguent que la cour d'appel de Paris a déjà retenu la qualification de lot transitoire pour le lot n° 19 dans un arrêt du 4 janvier 1993 ;

Le syndicat des copropriétaires allègue qu'il ne s'agit pas d'un lot transitoire, et que le lot n°19 est un lot donnant un droit de jouissance qui est irrégulier puisqu'un droit de jouissance sur une partie commune ne peut pas constituer un lot privatif ; il soutient que, en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1965, la convention par laquelle le propriétaire du lot n°19 avait le droit de construire sur le terrain partie commune de l'immeuble, est caduque depuis 40 ans ;

Il fait valoir que, dans l'instance ayant donné lieu à un arrêt de la cour d'appel le 4 janvier 1993, il n'était pas demandé à la cour d'examiner la qualification du lot et donc de déterminer si le lot répondait bien aux conditions de l'article 1er de la loi du 10 juillet 1965 ;

L'article 1er alinéa 2 à 4 de la loi du 10 juillet 1965 dispose :

'Le lot de copropriété comporte obligatoirement une partie privative et une quote-part de parties communes, lesquelles sont indissociables.

Ce lot peut être un lot transitoire. Il est alors formé d'une partie privative constituée d'un droit de construire précisément défini quant aux constructions qu'il permet de réaliser et d'une quote-part de parties communes correspondante.

La création et la consistance du lot transitoire sont stipulées dans le règlement de copropriété' ;

La description du lot n° 19, 'bande de terrain destinée à l'édification ultérieure de constructions qui pourront prendre accès soit sur le terrain, soit sur l'avenue', est complétée par plusieurs dispositions du règlement de copropriété :

- article 5 : le propriétaire du lot n°19 a la faculté d'édifier un bâtiment en façade sur l'avenue,

- article 36 : les constructions à édifier par les propriétaires des lots n°18 et 19, pourront être affectées à usage, soit de remises à voitures, soit de commerce, soit d'habitation, soit d'industrie,

- article 42 : Lot n°19 - Le propriétaire de ce lot aura la faculté dans les limites permises par les règlements d'urbanisme, d'élever sur la totalité du terrain, des constructions qui pourront servir soit à usage d'habitation, de commerce, d'industrie ou de garage ;

Par arrêt du 4 janvier 1993, la cour d'appel de Paris, pour confirmer le jugement ayant débouté M. et Mme [R] de leurs demandes fondées sur le fait que la consistance du lot n° 19 impliquait la jouissance privative du sol, exclusive de toute jouissance par les autres copropriétaires, a relevé que :

'Considérant que ces dispositions [l'article 42 du règlement de copropriété], avec celles précitées de l'état de division, démontrent qu'il s'agit d'un lot transitoire, comme les appelants l'admettent dans la note précitée du 29 octobre 1992, lot qui, aussi longtemps que les constructions prévues n'auront pas été édifiées, ne comprend nulle fraction de la propriété de l'immeuble, comme le voudrait le premier alinéa de l'article premier de la loi du 10 juillet 1965" ;

C'est à tort que le syndicat des copropriétaires prétend que cet arrêt n'a pas autorité de la chose jugée au motif que l'objet du litige n'était pas le même, dès lors que la cour s'est prononcée sur la qualification du lot n° 19 ;

Contrairement à ce qu'il soutient et à ce qu'a retenu le tribunal, le lot n° 19, en ce qu'il est constitué par un droit de jouissance d'une bande de terrain destinée à l'édification ultérieure de constructions et est doté d'une quote-part dans les parties communes de 75/1.000èmes, constitue bien un lot de copropriété à part entière, qualifié de lot transitoire ;

Sur la résolution n° 14

M. et Mme [R] soutiennent que le droit de construire sur un lot transitoire n'est pas soumis aux règles d'autorisation de la copropriété, de sorte que l'assemblée générale ne pouvait valablement refuser cette autorisation ;

L'article 26 alinéa 6 de la loi du 10 juillet 1965 dispose 'l'assemblée générale ne peut, à quelque majorité que ce soit, imposer à un copropriétaire une modification à la destination de ses parties privatives ou aux modalités de leur jouissance, telles qu'elles résultent du règlement de copropriété' ;

Il ressort du procès-verbal de l'assemblée générale du 13 mars 2019 que la résolution n° 14 rejetant la demande de M. et Mme [R] a été rejetée à la majorité absolue prévue à l'article 25 de la loi ; en votant ainsi, l'assemblée générale a, en violation des dispositions précitées, d'ordre public, imposé à M. et Mme [R] une modification de la destination de leur lot, partie privative ;

Dès lors, cette résolution doit être annulée ;

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Le sens du présent arrêt conduit à infirmer le jugement sur les dépens et l'application qui y a été faite de l'article 700 du code de procédure civile ;

Le syndicat des copropriétaires, partie perdante, doit être condamné aux dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'à payer à M. & Mme [R]la somme de 3.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause de première instance et d'appel ;

Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du code de procédure civile formulée par le syndicat des copropriétaires ;

Sur l'application de l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965

M. & Mme [R] sollicitent d'être dispensés de toute participation à la dépense commune des frais de procédure, dont la charge sera répartie entre les autres copropriétaires, en application de l'article 10-1 de la loi du 10 Juillet 1965 ;

Selon l'article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 'le copropriétaire qui, à l'issue d'une instance judiciaire l'opposant au syndicat, voit sa prétention déclarée fondée par le juge, est dispensé, même en l'absence de demande de sa part, de toute participation à la dépense commune des frais de procédure, dont la charge est répartie entre les autres copropriétaires' ;

M. et Mme [R], gagnant leur procès contre le syndicat, sont dispensés de toute participation à la dépense commune des frais de procédure de première instance et d'appel, incluant les dépens, l'application de l'article 700 du code de procédure civile, les honoraires du syndic et de l'avocat du syndicat des copropriétaires, dont la charge est répartie entre les autres copropriétaires ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,

Infirme le jugement en ses dispositions frappées d'appel ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que lot n° 19 de la copropriété du [Adresse 5] à [Localité 10] constitue un lot transitoire ;

Annule la résolution n° 14 de l'assemblée générale du 13 mars 2019 ;

Condamne le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à [Localité 10] aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, ainsi qu'à payer à M. [W] [R] & Mme [Z] [F] épouse [R], globalement, la somme de 3.000 € par application de l'article 700 du même code en cause de première instance et d'appel ;

Dispense M. [W] [R] et Mme [Z] [F] épouse [R] de toute participation à la dépense commune des frais de procédure de première instance et d'appel, incluant notamment les dépens, l'application de l'article 700 du code de procédure civile, les honoraires du syndic et de l'avocat du syndicat des copropriétaires, dont la charge est répartie entre les autres copropriétaires ;

Rejette toute autre demande.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 20/17139
Date de la décision : 05/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-05;20.17139 ?
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