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04/06/2024 | FRANCE | N°21/04804

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 13, 04 juin 2024, 21/04804


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 13



ARRET DU 04 JUIN 2024



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/04804 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDI22



Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Février 2021 - Tribunal Judiciaire de PARIS - RG n° 19/14844



APPELANT



Monsieur [I] [O]

[Adresse 1]

[Localité 4]

ReprÃ

©senté par Me Jean-marie GILLES de la SELEURL CABINET GILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : E0024



INTIME



Monsieur [E] [M]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Ayant pour avocat postulant Me...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 13

ARRET DU 04 JUIN 2024

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/04804 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDI22

Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Février 2021 - Tribunal Judiciaire de PARIS - RG n° 19/14844

APPELANT

Monsieur [I] [O]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Jean-marie GILLES de la SELEURL CABINET GILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : E0024

INTIME

Monsieur [E] [M]

[Adresse 5]

[Localité 3]

Ayant pour avocat postulant Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

Ayant pour avocats plaidants Me Laurent CAZELLES, avocat au barreau d'Aix-en-Provence, et Me Christophe LAVERNE, avocat au barreau de Paris

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Sophie VALAY-BRIERE, Première Présidente de chambre, et devant Mme Estelle MOREAU, Conseillère, chargée du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Sophie VALAY-BRIERE, Première Présidente de chambre

Mme Marie-Françoise d'ARDAILHON MIRAMON, Présidente de chambre

Mme Estelle MOREAU, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Florence GREGORI

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 04 juin 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Sophie VALAY-BRIERE, Première Présidente de chambre et par Victoria RENARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

***

Ayant été informé d'une réorganisation de l'activité du groupe emportant la suppression de son poste, M. [I] [O], né le [Date naissance 2] 1957 et salarié de la société Albéa Services, a sollicité, par courriel du 22 février 2015, M. [E] [M], avocat, pour des conseils en droit du travail.

Il a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement le 21 avril 2015, à la suite duquel la société Albéa Services lui a notifié son licenciement pour motif économique par courrier du 28 mai 2015 avec dispense d'effectuer son préavis de trois mois et possibilité de bénéficier d'un congé de reclassement d'une durée de 9 mois.

Par lettre du 2 juin 2015, M. [O] a indiqué à la société Albéa Services qu'il contestait son licenciement et refusait d'adhérer au congé de reclassement.

Le 25 avril 2016, M. [O] a signé une convention d'honoraires avec M. [M] avec pour mission l'assistance, la négociation et la conclusion d'un protocole transactionnel à la suite de son licenciement économique.

M. [O] a conclu avec la société Albéa Services un protocole d'accord transactionnel aux termes duquel il a renoncé à contester la régularité de son licenciement en contrepartie du versement d'une indemnité d'un montant de 100 000 euros.

Par courrier du 10 décembre 2018, Pôle Emploi a informé M. [O] qu'il cesserait d'être indemnisé en tant que demandeur d'emploi à compter du 9 janvier 2019, soit à l'âge de 61 ans et 8 mois, aux motifs qu'il ne remplissait pas les conditions requises pour bénéficier d'un 'rechargement de ses droits'.

C'est dans ces circonstances que par acte du 13 décembre 2019, M. [O] a fait assigner M. [M] devant le tribunal de grande instance de Paris, lequel, par jugement du 24 février 2021, a :

- rejeté les demandes de dommages et intérêts formées par M. [O] à l'encontre de M. [M],

- condamné M. [O] aux dépens,

- dit que Me [G] [K] peut recouvrer directement contre M. [O] les dépens dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

- condamné M. [O] à payer à M. [M] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes.

Par déclaration du 11 mars 2021, M. [O] a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 31 mai 2021, M. [I] [O] demande à la cour de :

- dire et juger que M. [M] a gravement manqué à son devoir de conseil à son égard,

- dire et juger que ce manquement engage la responsabilité contractuelle de M. [M] à son égard,

- dire et juger, qu'en conséquence, M. [M] doit l'indemniser de ses différents chefs de préjudice,

- condamner M. [M] à lui payer à titre de dommages et intérêts, avec intérêts légaux à compter de l'assignation du 13 décembre 2019 :

- 96 793,20 euros au titre de la perte de revenus depuis le 9 janvier 2019, à parfaire,

- 300 000 euros au titre de la perte de ses droits à la retraite,

- 100 000 euros au titre du préjudice moral,

- condamner M. [M] à lui payer la somme de 3 500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [M] aux entiers dépens de première instance et d'appel,

- débouter M. [M] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 19 août 2021, M. [E] [M] demande à la cour de :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

- débouter M. [O] de ses demandes, fins et prétentions,

- le condamner aux entiers dépens de l'instance en application de l'article 699 du code de procédure civile,

- le condamner à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 23 janvier 2024.

SUR CE,

Sur la responsabilité de l'avocat :

Le tribunal a jugé, sur l'étendue de la mission de l'avocat, que si aucune lettre de mission, ni aucune convention d'honoraires n'ont été formalisées entre les parties avant le 25 avril 2016, il ressort de leurs échanges de courriels et de la facture de l'avocat du 21 juillet 2015 que la mission de ce dernier ne s'est pas cantonnée à la négociation et conclusion du protocole d'accord, ses prestations portant également sur une 'consultation en droit social (procédure de licenciement économique par l'employeur)' et M. [M] ayant revu et commenté un projet de courrier que lui avait soumis son client le 22 avril 2015 et lui ayant adressé le 1er juin 2015 une consultation écrite portant sur le contenu de la lettre de licenciement et mentionnant notamment 'ne pas être certain que l'adhésion au congé de reclassement lui apporte un avantage appréciable', avant d'exposer les avantages et inconvénients d'une telle adhésion.

Les premiers juges n'ont retenu aucune faute de l'avocat aux motifs que :

- en vertu de son devoir de conseil, l'avocat devait fournir à son client sur l'adhésion au congé de reclassement des informations exactes et un avis reposant sur des éléments de droit et de fait après avoir recueilli de sa propre initiative l'ensemble des documents et éléments lui permettant d'assurer au mieux sa mission de conseil,

- il ne peut être reproché à l'avocat, dans le cadre d'une consultation en droit social consacrée à la lettre de licenciement et à ses suites directes, de ne pas avoir envisagé une absence de retour à l'emploi de M. [O] avant la fin de la période d'indemnisation chômage de trois ans, qui était alors purement hypothétique et incertaine, l'avocat ayant mentionné à juste titre que l'acceptation du congé de reclassement entraînerait un décalage de six mois de la prise en charge de l'intéressé par Pôle Emploi,

- la faute alléguée de l'avocat, consistant à avoir déconseillé à M. [O] d'opter pour le congé de reclassement qui lui était proposé par son employeur en invoquant les conséquences de ce choix sur ses droits en matière d'indemnisation chômage et ses futurs droits à la retraite, n'est donc pas caractérisée.

M. [O] soutient que :

- la mission de l'avocat incluait son accompagnement complet dans la gestion de son licenciement annoncé ainsi que cela ressort des courriels échangés et de la facture du 21 juillet 2015,

- M. [M] a manqué à son devoir de conseil :

- en omettant de vérifier les conditions requises pour sa prise en charge alors que la nouvelle convention Pôle Emploi du 14 mai 2014 applicable permettait une indemnisation continue jusqu'à l'âge de la retraite à la condition qu'il bénéficie de l'allocation de retour à l'emploi (ARE) à l'âge de 62 ans et non plus 61 ans conformément à la convention Pôle Emploi du 29 mai 2013,

- en lui déconseillant, par courriel du 1er juin 2015, d'opter pour le congé de reclassement qui lui était proposé par son employeur, alors qu'il était informé de son âge de 58 ans et qu'une telle mesure aurait eu pour effet de décaler de six mois le début de sa prise en charge par Pôle Emploi et de percevoir encore l'ARE à l'âge de 62 ans, lui permettant d'être indemnisé jusqu'à son départ à la retraite,

- en ne l'alertant pas sur une éventuelle difficulté entre la fin de son chômage et sa prise en charge par les régimes de retraite alors qu'il avait 58 ans et qu'il devait impérativement être pris en charge par Pôle Emploi jusqu'à l'âge de sa retraite.

M. [M] réplique que :

- sa mission consistait uniquement en une assistance dans la négociation et la conclusion d'un protocole transactionnel à la suite du licenciement économique de l'appelant, ainsi qu'il ressort de la convention d'honoraires et la facture modique du 21 juillet 2015,

- il n'était pas tenu de reconstituer la carrière complète de son client afin de s'interroger sur sa situation au regard de Pôle Emploi et de ses futurs droits à la retraite dans l'hypothèse où il ne retrouverait pas d'emploi ou ne concrétiserait pas son projet de reconversion en suite de son licenciement, ni de calculer ses futurs droits à la retraite, M. [O] lui ayant fait part de son intention, avec l'indemnité octroyée, de créer sa propre entreprise et de ce qu'il n'envisageait pas une cessation d'activité,

- à défaut de demande particulière sur ce point, l'appelant ne saurait lui reprocher de ne pas avoir envisagé une absence de retour à l'emploi avant la fin de la période d'indemnisation chômage de trois ans,

- le choix de refuser le congé de reclassement est personnel à M. [O] qui a été correctement informé des effets liés à l'adhésion au congé de reclassement tant par lui que par son employeur,

- le fait qu'il ait conclu ne pas être certain que l'adhésion audit congé apporte à M. [O] un avantage appréciable ne saurait être constitutif d'une faute, cette conclusion étant en phase avec les projets et attentes d'alors de M. [O] dont le but n'était pas à l'époque d'être pris en charge le plus longtemps possible par Pôle Emploi.

L'engagement de la responsabilité de l'avocat nécessite la démonstration d'une faute, d'un lien de causalité et d'un préjudice.

L'avocat, tenu à une obligation d'information et à un devoir de conseil, doit informer son client sur l'étendue de ses droits, l'éclairer sur les options s'offrant à lui et leurs conséquences juridiques et lui délivrer des conseils conformes à ses intérêts.

Par courriel du 22 février 2015, M. [O] a contacté M. [M] en précisant être 'en recherche de conseils en droit du travail pour [s]on compte personnel'. Le lendemain, il lui a joint l'historique de son emploi actuel mentionnant notamment '20 février 2015: proposition de poste sur le site industriel en Italie, en contrat local, sans évolution de salaire, logement et déplacement à ma charge ou proposition de reclassement dans une usine du groupe dans le monde aux mêmes conditions ou licenciement économique. Accord sur ma proposition de me sortir des effectifs fin mai 2015 afin d'avoir 58 ans au moment de mon départ (couverture spéciale par Pôle Emploi). Facilités pour avoir des indemnités 'améliorées' sans plus de précisions, facilitant le choix de mon départ', et sollicité une entrevenue en précisant 'Cette première approche a pour but de poser le problème et de pouvoir réfléchir à la validité de certains aspects du dossier, dans l'intention de prévoir une entrevue future'. Le 25 février 2015, il a demandé à l'avocat d'établir une 'feuille de route' dans la perspective de son entretien préalable à un éventuel licenciement en précisant 'Pourriez-vous m'indiquer un ordre de grandeur sur une éventuelle indemnisation extra-conventionnelle, étant donné que la différence entre mes indemnités de chômage et mon salaire si j'étais resté jusqu'à mon départ en retraite, est estimé à environ 300 000 euros''.

Il lui a ensuite communiqué la lettre de licenciement économique qui lui a été notifiée le 28 mai 2015, l'informant notamment de la possibilité de bénéficier d'un congé de reclassement d'une durée de 9 mois et à laquelle était jointe une note explicative sur ledit congé, non produite aux débats.

L'avocat a facturé le 21 juillet 2015 pour un montant de 300 euros HT ses prestations comprenant une 'consultation en droit social (Procédure de licenciement économique par employeur)' en particulier une 'consultation écrite du 01/06/2015", avant de conclure avec M. [O] une convention d'honoraires le 25 avril 2016 au titre de la régularisation d'un protocole d'accord.

La mission de l'avocat consistait ainsi, outre la conclusion d'un protocole d'accord conformément à la convention d'honoraires ultérieurement conclue, à éclairer M. [O] sur l'étendue de ses droits antérieurement à son entretien préalable et consécutivement à la notification de son licenciement au regard des diverses options s'offrant à lui, dont le bénéfice d'un congé de reclassement proposé par son employeur.

Dans la consultation adressée par courriel du 1er juin 2015, M. [M], après avoir donné son avis sur le contenu de la lettre de licenciement, a indiqué à son client sur ce point ' Je ne suis pas certain que l'adhésion au congé de reclassement vous apporte un avantage appréciable :

'Les Plus :

- rémunération de 65% (du 4ème au 9ème mois) au lieu de l'allocation-chômage,

- maintien de la couverture sociale de l'entreprise,

- décalage de 6 mois de la prise en charge par Pôle Emploi

(d'où prolongation correspondante de la durée de prise en charge de 2 ans)

Semblent neutralisés par les moins :

- report du versement de l'indemnité de licenciement au terme du congé (soit à J + 9 mois au lieu de J + 3 mois)

- encadrement contraignant par une cellule de reclassement

- absence de liberté d'action

- 'acceptation implicite' du licenciement prononcé par l'employeur'.

Sont jointes à ce courriel des trames de courriers de contestation du motif économique de licenciement et de non adhésion au congé de reclassement, M. [O] étant par ailleurs invité à prendre rendez-vous au cabinet pour faire le point sur sa situation.

Par lettre du 10 décembre 2018, Pôle Emploi a notifié à M. [O], qui avait bénéficié de l'assurance chômage à compter de septembre 2015 et percevait depuis le 11 janvier 2016 l'allocation de retour à l'emploi (ARE), la fin de sa prise en charge le 9 janvier 2019, soit à l'âge de 61 ans et 8 mois, à défaut de pouvoir bénéficier d'un rechargement de ses droits.

Dans son courriel du 9 janvier 2019, Pôle Emploi a précisé à M. [O] que les allocataires âgés de 62 ans continuent d'être indemnisés jusqu'à la veille de leur retraite lorsqu'ils remplissent certaines conditions :

- être en cours d'indemnisation depuis un an au moins, soit avoir perçu au moins 365 jours d'indemnisation depuis l'ouverture de droits,

- justifier de 12 ans d'affiliation au régime d'assurance chômage ou de périodes assimilées, dont une période d'emploi d'une année continue ou de plusieurs périodes d'emploi discontinues totalisant au moins deux années dans une ou plusieurs entreprises au cours de cinq années précédant la fin du contrat de travail prise en compte pour l'ouverture de droits,

- justifier de 100 trimestres validés par l'assurance vieillesse au titre des articles L.351-1 à L.351-5 du code de la sécurité sociale,

- condition d'âge : l'indemnisation est possible jusqu'à ce que le demandeur d'emploi accède à la retraite à taux plein c'est à dire lorsqu'il atteint l'âge légal de départ à la retraite (62 ans pour les personnes nées à compter du 1er janvier 1955) et justifie de 166 trimestres pour les personnes nées entre le 1er janvier 1955 et le 31 décembre 1957, l'âge maximum pour être indemnisé au titre de l'ARE étant de 67 ans pour ces personnes.

L'avocat, missionné pour délivrer une consultation de droit social à son client sur les diverses options s'offrant à lui consécutivement à la notification de son licenciement pour motif économique, a présenté chacune de ces options en précisant leurs avantages et inconvénients. Il a en particulier précisé à juste titre les effets liés au choix de souscrire au congé de reclassement, entraînant un décalage de six mois de la prise en charge par Pôle Emploi et une prolongation correspondante de la durée de prise en charge de 2 ans.

La demande de M. [O] à M. [M] de lui indiquer 'un ordre de grandeur sur une éventuelle indemnisation extra-conventionnelle, étant donné que la différence entre mes indemnités de chômage et mon salaire si j'étais resté jusqu'à mon départ en retraite, est estimé à environ 300 000 euros' ne peut s'analyser comme un mandat donné à son conseil de s'assurer de la continuité de prise en charge par Pôle Emploi jusqu'au bénéfice des droits à la retraite à taux plein, mais comme une demande d'estimation de l'indemnité de licenciement à laquelle il pouvait prétendre, demande à laquelle M. [M] a répondu.

L'appelant ne justifie pas de l'intérêt qu'il portait au moment de la consultation à une telle continuité de prise en charge, seule étant mentionnée dans son historique de carrière une prise en charge spéciale par Pôle Emploi à partir de 58 ans, dont il a effectivement bénéficié et qui n'est pas en débat.

La mission confiée à l'avocat ne lui imposait pas, au titre de son devoir de conseil, en l'absence de demande de son client en ce sens, de s'assurer de la continuité de sa prise en charge par Pôle Emploi jusqu'au bénéfice des droits à la retraite à taux plein en s'assurant que celui-ci remplissait les conditions requises, notamment celle de justifier à l'âge de 62 ans de 100 trimestres validés par l'assurance vieillesse de l'assurance maladie, ce qui impliquait de reconstituer sa carrière, alors que l'appelant ne discute pas l'avoir informé à l'époque de son projet professionnel, consistant en la conception et la fabrication d'une machine qu'il a réalisées mais qui n'ont pas abouti ainsi qu'il ressort de son courrier de réclamation à Pôle Emploi du 7 janvier 2019. L'avocat n'avait pas, dans ces circonstances, à s'interroger sur une hypothétique fin de droits de M. [O] à l'issue de la perception de trois ans d'indemnités chômage.

Dans ces conditions, l'information donnée sur les avantages et inconvénients de la mesure de reclassement, précisant un décalage de la période de prise en charge par Pôle Emploi mais également le caractère contraignant de la mesure et le fait qu'elle impliquait de renoncer au bénéfice d'une indemnité pour licenciement économique non justifié, était suffisante et conforme aux intérêts de M. [O] qui avait pour objectif de déployer une nouvelle activité professionnelle indépendante.

Il ne peut davantage être fait grief à l'avocat, après avoir exposé les diverses options envisagées et leurs conséquences directes, d'avoir conseillé à M. [O] de contester le motif de son licenciement économique plutôt que d'adhérer au congé de reclassement, cette solution qui permettait de lui assurer une liberté d'action et de négocier une indemnité de licenciement, qu'il a obtenue à hauteur de 100 000 euros, étant conforme à son projet de conversion professionnelle.

Il n'est donc caractérisé aucune faute de l'avocat en confirmation du jugement.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

Les dépens d'appel qui pourront être recouvrés selon les modalités de l'article 699 du code de procédure civile, incombent à l'appelant, partie perdante, qu'il est également équitable de condamner au paiement d'une indemnité de procédure de 3 000 euros.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

y ajoutant,

Condamne M. [I] [O] à payer à M. [E] [M] une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [I] [O] aux dépens d'appel avec les modalités de recouvrement de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 21/04804
Date de la décision : 04/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-04;21.04804 ?
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