La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/05/2024 | FRANCE | N°23/17526

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 30 mai 2024, 23/17526


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 2



ARRÊT DU 30 MAI 2024



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/17526 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIN76



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 22 Septembre 2023 -Président du TJ de Tribunal Judiciaire de BOBIGNY - RG n° 23/01112





APPELANTE



S.C.P.C.I. BUROBOUTIC, RCS de Nan

terre sous le n°339 967 473, représentée par la société FIDUCIAL GERANCE, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audi...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRÊT DU 30 MAI 2024

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/17526 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIN76

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 22 Septembre 2023 -Président du TJ de Tribunal Judiciaire de BOBIGNY - RG n° 23/01112

APPELANTE

S.C.P.C.I. BUROBOUTIC, RCS de Nanterre sous le n°339 967 473, représentée par la société FIDUCIAL GERANCE, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée par Me Bruno REGNIER de la SCP CAROLINE REGNIER AUBERT - BRUNO REGNIER, AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0050

Ayant pour avocat plaidant Me Caroline LAHEYNE, avocat au barreau de PARIS, toque : L301

INTIMES

LE SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DEL'IMMEUBLE DIT 'BOUTIQUE [Localité 7]', représenté par son syndic en exercice la S.A.S. ORPI VERNIER ADB TORCY

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représenté par Me Jean-claude BENHAMOU de l'ASSOCIATION BENHAMOU SAMAMA-SAMUEL, du barreau de SEINE-SAINT-DENIS

S.A.S. VERNIER, RCS de Meaux sous le n°399 336 437, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représenté par Me Delphine BERTHELOT-EIFFEL, du barreau de PARIS, toque : C1922

LA S.E.L.A.R.L. DE CHIRURGIENS-DENTISTES DU [Adresse 3], RCS de Bobigny sous le n°829 684 802, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 7]

Représenté par Me Henri ROUCH de la SELARL WARN AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0335, substitué par Me Johanna IBGHI

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 804, 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Avril 2024, en audience publique, devant Laurent NAJEM, Conseiller, chargé du rapport, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre,

Michèle CHOPIN, Conseillère,

Laurent NAJEM, Conseiller,

Qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

****

EXPOSÉ DU LITIGE

La société Buroboutic est propriétaire d'un local commercial sis [Adresse 3] à [Localité 7]. Ce local est loué à la société de Chirurgiens-dentistes du [Adresse 3] aux termes d'un acte sous signature privée du 18 mars 2016.

Un dégât des eaux est survenu dans les parties communes de l'immeuble au cours de l'année 2017.

La société Vernier a été désignée en qualité de syndic en 2019.

Par acte du 26 juin 2023, la société Buroboutic a fait assigner le syndicat des copropriétaires de l'immeuble dit Boutique [Localité 7] sis [Adresse 2] à [Localité 7], la société Vernier et la société de Chirurgiens-dentistes du [Adresse 3] devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Bobigny aux fins de voir :

désigner un expert judiciaire pour donner un avis sur les désordres affectant le bien immobilier, leur origine et les moyens d'y remédier, ainsi que sur l'évaluation des préjudice ;

condamner la société Vernier et subsidiairement le syndicat des copropriétaires sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter du prononcé de l'ordonnance à produire la copie du contrat d'assurance conclu avec la société Allianz ainsi que l'ensemble des courriers transmis par cette dernière au titre du sinistre.

A titre accessoire,

condamner le syndicat des copropriétaires à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Par ordonnance contradictoire du 22 septembre 2023, le juge des référés du tribunal judiciaire de Bobigny, a :

débouté la société Buroboutic de sa demande de communication de pièces sous astreinte

rejeté comme non justifiée la demande d'expertise ;

condamné la société Buroboutic à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 2] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

débouté la société Buroboutic et la société de Chirurgiens-dentistes du [Adresse 3] de leurs propres demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné la société Buroboutic aux entiers dépens du présent référé ;

rejeté les demandes plus amples ou contraires ;

rappelé que la présente décision est exécutoire par provision.

Par déclaration du 25 octobre 2023, la société Buroboutic a relevé appel de la décision.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 25 mars 2024, elle demande à la cour, au visa des articles 133, 134, 145, 564 et suivants du code de procédure civile, de :

déclarer la société Buroboutic recevable et bien fondée en son appel ;

débouter le syndicat des copropriétaires et la société Vernier de leurs demandes ;

débouter la société de Chirurgiens-dentistes du [Adresse 3] de ses demandes ;

déclarer irrecevable et, en toute hypothèse, mal fondée la demande de la société de Chirurgiens-dentistes du [Adresse 3] tendant à voir condamner la société Buroboutic au paiement d'une somme provisionnelle de 300.000 euros ;

infirmer l'ordonnance de référé rendue le 22 septembre 2023 par le tribunal judiciaire de Bobigny en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

condamner le syndicat des copropriétaires, représenté par la société Vernier, à remettre à la société Buroboutic, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir, la copie du contrat d'assurance conclu avec la société Allianz ainsi que de l'ensemble des courriers transmis par cette dernière au titre de ce sinistre ;

désigner tel expert qui lui plaira avec mission de : convoquer les parties, se rendre sur place, [Adresse 2] à [Localité 7], visiter les lieux, entendre tout sachant, se faire communiquer tous documents et pièces qu'il estimera utile l'accomplissement de sa mission, constater les désordres visés dans l'assignation, notamment ceux affectant les fondations du bâtiment, faire toutes constatations, prélèvements, sondages, instrumentations, s'il y'a lieu de relatifs l'existence des dommages allégués, dire si ces désordres menacent la solidité de la construction, la destination de l'ouvrage, la solidité des éléments d'équipement qui ne peuvent pas être dissociés de l'ouvrage et de la sécurité des personnes, déterminer l'origine de ces désordres, donner son avis sur les travaux nécessaires pour mettre un terme aux désordres signalés et les évaluer à l'aide de devis d'entreprises fournis par les parties, dans le cas où, en raison, d'un réel danger, il serait nécessaire de procéder à des mesures de sauvegarde ou des travaux particuliers de nature à éviter une aggravation des désordres ou à assurer la sécurité des personnes, décrire lesdits travaux, en chiffrer le coût et réunir tous les éléments techniques permettant de déterminer ultérieurement l'imputabilité du coût des travaux en cause, donner son avis sur les préjudices subis par la société Buroboutic, ainsi que sur les responsabilités encourues, fournir de façon générale tous les éléments techniques ou de fait de nature à permettre à la juridiction du fond éventuellement saisie de se prononcer sur les responsabilités encourues et les préjudices subis, recueillir tous dires ou observations des parties, du tout, dresser un rapport ;

déclarer que l'expert accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et que, sauf conciliation des parties, il déposera son rapport au secrétariat du Greffe du tribunal judiciaire de Bobigny dans les 3 mois de sa saisine ;

déclarer qu'en cas de difficulté l'expert saisira le président qui aura ordonné l'expertise ;

fixer la provision à consigner au Greffe, à titre d'avance sur les honoraires de l'Expert, dans le délai qui sera imparti par l'arrêt à intervenir ;

condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] à payer à la société Buroboutic la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens de l'instance.

Elle fait valoir que plusieurs experts sont intervenus sur place et ont pu constater l'importance des désordres ; que la société 1G Solutions a uniquement mis en évidence la présence de vides en sous-sol mais n'en a pas déterminé les causes ; que les désordres sont évolutifs ; qu'aucune pièce ne justifie d'un contrôle régulier de la situation par la société 1G Solutions pas plus que de la stabilisation de l'immeuble.

Elle soutient que les travaux ont été votés en urgence en novembre 2023 sans en connaître les tenants et les aboutissants ; que le syndicat des copropriétaires et le syndic sont dépassés par la situation ; que les mesures préalables n'ont pas été anticipées ; qu'aucune démarche pour faire évacuer l'immeuble occupé par de nombreux commerces, en vue de permettre la réalisation des travaux, n'a été entreprise par le syndicat des copropriétaires ; qu'aucune date de départ n'a été fixée ; qu'il incombe au syndicat des copropriétaires de prendre en charge les indemnités d'éviction qui seront dues aux locataires commerciaux en place ; qu'il y a urgence à ce qu'un expert soit désigné et propose des mesures conservatoires.

S'agissant de la condamnation sous astreinte, elle allègue que malgré de nombreuses relances, elle n'a pu obtenir la copie du contrat d'assurance ; que les documents non signés n'ont aucune valeur contractuelle ni aucune force probante ; que ses demandes sont légitimes au sens de l'article 145 du code de procédure civile ; que le syndicat des copropriétaires, dans une résolution, a reconnu ne pas disposer de tous les éléments nécessaires ; qu'il est indispensable que les copropriétaires puissent obtenir la copie du contrat d'assurance pour faire valoir leurs droits.

Le syndicat des copropriétaires demande à la cour, par ses dernières conclusions remises et notifiées le 1er février 2024, de :

confirmer en toutes ses dispositions les termes de l'ordonnance entreprise du 22 septembre 2023 ;

En conséquence,

débouter la société Buroboutic et la société de Chirurgiens-dentistes du [Adresse 3] de l'ensemble de leur demandes fins et conclusions ;

condamner la société Buroboutic en cause d'appel à lui payer la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens d'appel.

S'agissant du contrat d'assurance, il détaille les pièces versées par la société Buroboutic et estime qu'il ne peut être prétendu que l'existence même du contrat d'assurance sera discutée par l'assureur qui l'a même exécuté, via son délégataire de gestion. Il souligne que la société Allianz n'a pas été mise dans la cause ; qu'il ne peut transmettre plus de pièces que celles qu'il a déjà transmises.

Sur l'expertise, il fait valoir que les investigations ont déjà permis de déterminer les causes du désordre et les moyens d'y remédier, à savoir les travaux qui ont fait l'objet d'un vote des copropriétaires lors de l'assemblée générale du 13 juin 2022 ; que l'appelante a ainsi validé l'analyse de la société 1G Solutions, sauf à admettre qu'elle n'a pas lu le rapport de ce maître d''uvre du 18 janvier 2022 ; que seule la garantie « dégât des eaux » du contrat d'assurance souscrit par la copropriété était mobilisable ; que la mesure d'expertise est sans intérêt ; que si l'immeuble était en péril, le maître d''uvre n'aurait pas manqué de le signaler. Il s'interroge sur le fait de savoir si l'appelante ne tente pas de procéder à un détournement de procédure pour retarder les travaux et de contourner le caractère définitif des résolutions relatives aux travaux.

Il souligne que la nécessité d'évacuer l'immeuble était connue, que cette problématique a été abordée au moins oralement à l'occasion de chacune des assemblées générales et qu'il a été évoqué « l'inoccupation des locaux ».

Il considère que par son attitude, la société Buroboutic fait obstacle à l'établissement d'un calendrier définitif.

Il allègue qu'eu égard au coût des travaux, les copropriétaires ont bien compris qu'il convenait de ne pas en rajouter s'ils souhaitaient effectivement procéder à la restauration de l'immeuble, plutôt qu'à sa destruction ; qu'ils ont donc renoncé à lui réclamer la moindre indemnisation.

S'agissant de l'appel incident du cabinet de chirurgiens-dentistes, il considère qu'il n'y a pas lieu de donner mission à l'expert de chiffrer le préjudice subi par un locataire juridiquement étranger à la copropriété et que ce n'est pas parce qu'il a invité les copropriétaires qui le souhaitent à faire connaître leurs éventuelles demandes d'indemnisation qu'il a reconnu devoir ladite indemnisation.

La société de Chirurgiens-dentistes du [Adresse 3] demande à la cour, par des dernières conclusions remises et notifiées le 22 mars 2024, au visa des articles 145 du code de procédure civile et 1719 du Code civil, de :

déclarer la société de Chirurgiens-dentistes du [Adresse 3], recevable et bien fondée en son appel incident ;

débouter le syndicat des copropriétaires ainsi que son syndic la société Vernier, de leurs demandes, fins et conclusions ;

Y faisant droit,

infirmer partiellement l'ordonnance rendue par le Président du Tribunal judiciaire de Bobigny le 22 septembre 2023, en ce qu'elle a débouté la société Buroboutic de sa demande d'expertise judiciaire ;

Statuant à nouveau,

prendre acte des protestations et réserves d'usage formulées par la société de Chirurgiens-dentistes du [Adresse 3] ;

désigner tel expert qu'il plaira à la cour d'appel ;

compléter la mission de l'expert telle que proposée par la société Buroboutic en indiquant que l'expert devra également :

- donner son avis sur les préjudices subis par la société de Chirurgiens-dentistes du [Adresse 3] ;

- chiffrer l'intégralité des préjudices subis par la société de Chirurgiens-dentistes du [Adresse 3] au besoin en s'adjoignant un sapiteur expert-comptable ;

- donner son avis sur les responsabilités éventuellement encourues ;

juger que la mesure d'expertise sera réalisée aux frais exclusifs du demandeur à qui incombe la charge de la preuve ;

A titre subsidiaire,

condamner la société Buroboutic à lui régler la somme provisionnelle de 300.000 euros valoir sur son préjudice ;

En tout état de cause,

condamner le syndicat des copropriétaires, ou tout autre succombant, à payer à la société de Chirurgiens-dentistes du [Adresse 3] la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

le condamner aux entiers dépens de la présente procédure d'appel.

Elle fait valoir que l'expertise est indispensable pour déterminer la cause des désordres, s'agissant de travaux aussi onéreux, mais également pour chiffrer les préjudices subis par les différentes parties et notamment les siens ; qu'elle exploite un local très impacté par les désordres ; qu'elle ne peut que s'associer à la demande d'expertise.

S'agissant de son appel incident, elle allègue qu'elle ne peut jouir paisiblement de son local ; qu'elle doit pouvoir obtenir réparation des importants préjudices existants et à venir ; qu'il résulte des écritures du syndicat des copropriétaires que ce dernier reconnaît son entière responsabilité dans le cadre de cette affaire et son devoir d'indemniser les préjudices subis ; que l'exercice de son activité impose un environnement propre, ce qui n'est pas le cas des locaux ; que les travaux envisagés nécessitent un déménagement complet et la fermeture du cabinet notamment ; qu'il est indispensable de faire chiffrer les préjudices ; que la mission de l'expert doit être complétée en ce sens.

A titre subsidiaire, elle s'estime fondée à solliciter une provision de 300 000 euros à valoir sur son préjudice. Elle soutient qu'une fermeture du centre pendant 6 mois occasionnerait une perte de marge au moins à cette hauteur ; que le préjudice est plus que certain ; que les troubles et préjudices qu'elle va devoir supporter ne sont nullement le fait d'un tiers ; que c'est le bailleur qui a voté les travaux et a indiqué qu'il faisait siennes les relations avec ses locataires.

La société Vernier demande à la cour par ses dernières conclusions signifiées le 15 décembre 2023 de :

confirmer l'ordonnance de référé rendu le 22 septembre 2023 par le tribunal judiciaire de Bobigny en son intégralité ;

condamner la société Buroboutic au paiement d'une somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure civile.

Elle fait valoir que les travaux ont été votés après établissement de plusieurs rapports d'étude ; que la proposition technique de la société d'1G Solutions comporte une analyse de l'origine des désordres ; que les fonds ont été réunis dans leur quasi-totalité ; que le planning a été établi ; qu'une expertise judiciaire n'est donc pas justifiée et exposerait les copropriétaires à suspendre les travaux.

S'agissant du contrat d'assurance, elle fait valoir que l'appelante n'a pas mis dans la cause la société Allianz alors qu'elle dispose du numéro de la police ; que l'assemblée générale a décidé d'annuler la décision de mandater un avocat dans le sinistre dégât des eaux ; que la société Allianz a indemnisé la surconsommation d'eau et des investigations mais a expliqué plusieurs fois son refus d'indemniser le syndicat de copropriétaires des travaux de confortation des sols ; qu'elle n'a pas reçu d'autres documents d'Allianz que ceux communiqués.

L'ordonnance de clôture est intervenue au 4 avril 2024.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

SUR CE,

Sur l'expertise

Aux termes de l'article 145 du code de procédure civile, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé.

L'article 145 suppose l'existence d'un motif légitime c'est à dire un fait crédible et plausible, ne relevant pas de la simple hypothèse, qui présente un lien utile avec un litige potentiel futur dont l'objet et le fondement juridique sont suffisamment déterminés et dont la solution peut dépendre de la mesure d'instruction sollicitée, à condition que cette mesure ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d'autrui. Elle doit être pertinente et utile.

Ainsi, si le demandeur à la mesure d'instruction n'a pas à démontrer l'existence des faits qu'il invoque puisque cette mesure in futurum est justement destinée à les établir, il doit néanmoins justifier d'éléments rendant crédibles ses suppositions et justifier que le litige potentiel n'est pas manifestement voué à l'échec et que la mesure est de nature à améliorer la situation probatoire du demandeur.

Il ressort du procès-verbal de l'assemblée générale en date du 13 juin 2022 (pièce 34- Buroboutic) que les copropriétaires, à la demande de la société Buroboutic, ont décidé de réaliser des travaux de confortement du bâtiment (résolution n°8) pour un budget maximum de 801 757 euros.

Une résolution n°9 confie la mission de maîtrise d''uvre au cabinet 1G Solutions, « suivant proposition jointe ».

Le rapport de la société 1G Solutions en date du 18 janvier 2022 (pièce 33- Buroboutic) au titre du rappel des faits (2.2) détaille les causes des désordres à la suite des investigations géothermiques menées par cette société, en deux temps. Ces investigations ont mis en évidence de manière particulièrement exhaustive la nature des « vides » rencontrés et les propriétés mécaniques des terrains sous-jacents : il est précisé que ce ne sont pas des « vides » tels que notés dans une précédente étude mais une multitude de petites cavités réparties sur la profondeur (pages 5 et 6). Il n'est cependant pas indiqué que l'immeuble serait en péril.

Les propositions de solutions de réparations sont également détaillées.

Il est en outre indiqué dans cette étude (page 9) que le cantonnement de chantier se fera sur site, que la durée totale des travaux est estimée à 3 à 4 mois, que le bâtiment ne devra pas être occupé et les véhicules stationnant devront être déplacés. La nécessité d'évacuer le bâtiment était connue, il résulte de la résolution n°8 précitée que les « frais d'inoccupation » notamment ne seront pas gérés par le syndicat des copropriétaires et resteront « à la charge de chacun ».

Il est précisé dans le rapport 1G Solutions que la dépose des doublages/mobilier/cloisons et leurs évacuations sont à la charge du maître de l'ouvrage et devront être réalisés avant les travaux.

En outre un devis établi EIBTP et en date du 5 janvier 2022 pour un montant de 694.762,08 euros était annexé à la convocation pour l'assemblée générale (pièce 13 - SDC).

En votant la résolution relative à des travaux conformément à cette étude, d'ailleurs à son initiative, la société Buroboutic a approuvé ses conclusions tant sur les causes des désordres ainsi établies que les travaux à entreprendre pour y remédier, y compris en ce qu'il en résultait une inoccupation des locaux.

Elle ne saurait reprocher au syndicat des copropriétaires l'absence de date de départ précise pour les travaux alors que d'une part l'expertise sollicitée est sans lien avec cette problématique et que d'autre part la présente procédure retarde nécessairement le démarrage des travaux visant à mettre fin aux désordres. Un planning sur six mois a été établi en tout état de cause et adressé par courriel du 13 décembre 2023 (pièces 46 et 47- SDC) et les travaux sont sous la responsabilité du maître d''uvre s'agissant d'une éventuelle aggravation des désordres.

Enfin, comme le relève le syndicat des copropriétaires, il apparaît à la lecture de la résolution précitée qu'aucune indemnisation n'a été prévue au titre de l'inoccupation, de sorte que la société Buroboutic ne justifie pas davantage d'un motif légitime à voir ordonner une expertise sur ce point. Le fait que le syndicat des copropriétaires ait invité les copropriétaires à faire reconnaître leurs éventuelles demandes d'indemnisation ne vaut nullement reconnaissance du bien-fondé de ces demandes et de leur prise en charge, en l'absence d'une assemblée générale en ce sens décidant d'un nouveau budget intégrant, contrairement à la résolution du 13 juin 2023, lesdites indemnisations.

En tout état de cause, une telle expertise conduirait nécessairement à remettre en cause la résolution de l'assemblée générale pourtant définitive qui a déjà décidé de la nature des travaux à entreprendre pour y remédier, tenus dès lors pour acquis sur la base d'un rapport d'étude. Le juge des référés ne dispose pas d'un tel pouvoir.

Cette demande présente en outre incontestablement un caractère tardif, compte tenu des travaux déjà votés. Une expertise conduirait à différer au détriment de tous les copropriétaires les travaux a minima de plusieurs mois.

La société Buroboutic ne justifie pas d'un motif légitime au sens de l'article 145 du code de procédure civile et c'est à bon droit que le premier juge a rejeté la demande d'expertise.

L'ordonnance sera confirmée sur ce point.

Sur le contrat d'assurance Allianz

Les mesures de production de pièces, bien qu'elles ne relèvent pas formellement du sous-titre « Les mesures d'instruction », peuvent être prescrites sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile.

Il est rappelé que la production forcée doit porter sur des actes ou des pièces déterminées ou déterminables. Elle ne peut porter sur un ensemble indistinct de documents. Ceux-ci doivent être suffisamment identifiés.

Par ailleurs, la production ne peut être ordonnée que si l'existence de la pièce est certaine. Le demandeur doit ainsi faire la preuve que la pièce ou l'acte recherché est détenu par celui auquel il le réclame.

La société Buroboutic fait valoir que seules des conditions générales de la société Allianz, des tableaux synthétiques et des attestations d'assurance pour les années 2017 à 2019 ont été communiqués mais elle estime que ces documents non signés sont dépourvus de valeur probante. Elle réclame en outre l'ensemble des courriers transmis à raison du sinistre « dégâts des eaux ».

Le syndicat des copropriétaires, comme le syndic, font valoir qu'ils ne détiennent que les pièces déjà transmises. Rien ne vient utilement les contredire.

Le syndicat des copropriétaires a communiqué les échanges avec la société Courtage de France qui reprennent la position de la société Allianz, ainsi que des courriels de relances (pièces 19 à 22 et 24).

Les attestations d'assurance (2017 à 2019) font la preuve de l'existence d'une garantie : il s'agit de leur objet même. Elles sont signées de l'assureur.

En outre, la société Allianz, par l'intermédiaire de la société Courtage de France assurances, a effectué un virement de 74 330,40 euros (pièces 15 et 19- SDC) et elle a fait valoir sa position en ce qu'elle considère que la fuite d'eau résultant de la canalisation enterrée ne constitue pas le facteur déterminant des travaux de confortation envisagés et que lesdits travaux ne peuvent pas être pris en charge.

Ainsi, la société Allianz n'a nullement entendu remettre en question l'existence même d'un contrat d'assurance mais uniquement l'étendue de sa garantie au regard des éléments de l'espèce. Or, la production d'un contrat signé n'aurait une utilité que dans la mesure où le principe d'une assurance aurait été dénié, ce qui n'est pas le cas.

Il sera relevé en outre que la société Buroboutic n'a pas attrait la société Allianz à la présente procédure de sorte que s'il avait été fait droit à sa demande d'expertise, les opérations n'auraient pas été contradictoires à l'égard de l'assureur.

Par conséquent c'est à bon droit et par des motifs pertinents que le premier juge a rejeté cette demande. L'ordonnance entreprise sera confirmée de ce chef.

Sur la demande provisionnelle de la société de Chirurgiens-dentistes du [Adresse 3]

La société de Chirurgiens-dentistes du [Adresse 3] qui s'était associée à la demande d'expertise réclame à titre reconventionnel la somme provisionnelle de 300.000 euros à valoir sur son préjudice lié à une fermeture du centre pendant une durée de six mois. Elle considère que le préjudice est certain dans son principe et que sa demande est recevable.

La société Buroboutic soulève l'irrecevabilité de cette demande comme étant nouvelle.

Selon l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

En première instance, la société de Chirurgiens-dentistes du [Adresse 3] avait uniquement indiqué être favorable à la mesure d'expertise sollicitant que la mission soit complétée, la société Buroboutic expose, sans être démentie que ce complément de mission, portait sur le chiffrage des préjudices. Elle n'avait pas formé de demande provisionnelle subsidiaire alors même que le syndicat des copropriétaires concluait au rejet de la demande d'expertise.

Il en résulte que cette demande provisionnelle est nouvelle au sens de l'article 564 du code de procédure civile et n'est pas l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire de la demande initiale.

Partant, elle sera déclarée irrecevable en cette demande.

Sur les demandes accessoires

Le sens de la présente décision conduit à confirmer les dispositions de l'ordonnance entreprise sur les dépens et les frais irrépétibles.

A hauteur d'appel, la société Buroboutic, perdant à titre principal, sera condamnée aux dépens ainsi qu'au paiement au syndicat des copropriétaires de la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le surplus des demandes sur ce fondement sera rejeté.

PAR CES MOTIFS

Confirme la décision entreprise ;

Y ajoutant,

Déclare irrecevable la demande provisionnelle de la société de Chirurgiens-dentistes du [Adresse 3] ;

Condamne la société Buroboutic à payer au syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 2] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Buroboutic aux dépens d'appel ;

Rejette le surplus des demandes.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 23/17526
Date de la décision : 30/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 05/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-30;23.17526 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award