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28/05/2024 | FRANCE | N°23/18482

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 3, 28 mai 2024, 23/18482


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 3



ARRÊT DU 28 MAI 2024



(n° 231, 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/18482 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIREV



Décision déférée à la cour : ordonnance du 08 novembre 2023 - président du TC de Paris - RG n° 2023054604





APPELANTE



S.A.S.U. ELIXIR EVENT ET MEDIA, RCS de Paris n°827522079, pri

se en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 8]



Représentée par Me Belgin PELIT-JUMEL de la SELEURL BELGIN PELIT-...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 3

ARRÊT DU 28 MAI 2024

(n° 231, 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/18482 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIREV

Décision déférée à la cour : ordonnance du 08 novembre 2023 - président du TC de Paris - RG n° 2023054604

APPELANTE

S.A.S.U. ELIXIR EVENT ET MEDIA, RCS de Paris n°827522079, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 8]

Représentée par Me Belgin PELIT-JUMEL de la SELEURL BELGIN PELIT-JUMEL AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : D1119

Ayant pour avocat plaidant Me Chantal TEBOUL-ASTRUC la SAS ASTRUC AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

INTIMEES

S.A.S. GOUT DE PARIS, RCS de Paris n°8481147310, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentée par Me Serge BOUGANIM, avocat au barreau de PARIS, toque : C0106

S.A.S. SABINE.5, RCS de Paris n°899840862, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Emmanuel ESCARD DE ROMANOVSKY, avocat au barreau de PARIS, toque : B0140

S.A.R.L. EVE EXPERIENCES, RCS de Chambéry n°840255376, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

Défaillante, la déclaration d'appel ayant été signifiée le20 décembre 2024 à personne habilitée à recevoir l'acte

S.A.S. OVERLOOK EVENTS, RCS de Chambéry n°795040880, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

Défaillante, la déclaration d'appel ayant été signifiée le 20 décembre 2023 à personne habilitée à recevoir l'acte

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 22 avril 2024, en audience publique, rapport ayant été fait par Jean-Christophe CHAZALETTE, président de chambre, conformément aux articles 804, 805 et 905 du CPC, les avocats ne s'y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Jean-Christophe CHAZALETTE, président de chambre

Anne-Gaël BLANC, conseillère

Valérie GEORGET, conseillère

Greffier lors des débats : Jeanne PAMBO

ARRÊT :

- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-Christophe CHAZALETTE, président de chambre et par Jeanne PAMBO, greffier, présent lors de la mise à disposition.

********

La SAS Goût de Paris a intégré à son capital, le 27 juillet 2021, les sociétés Sabine.5 et Elixir event et média.

Au cours de l'assemblée générale ordinaire du 30 juin 2023, les propositions figurant à l'ordre du jour ont été approuvées en dépit de l'opposition de la société Elixir event et média, qui a voté contre à chaque résolution, et notamment :

1ère résolution : approbation des comptes annuels ;

2e résolution : affectation au compte de report à nouveau du résultat 2022, soit une perte de 577 206,67 euros, portant le solde débiteur du compte de report à nouveau à la somme de 1 450 961,38 euros ;

4e résolution : constatant que la société a perdu plus de la moitié de ses capitaux propres, l'assemblée générale donne tous pouvoirs au président pour convoquer dans les meilleurs délais, et dans les quatre mois, une assemblée générale extraordinaire en vue de statuer sur la continuation de l'activité.

Une assemblée générale mixte du 1er septembre 2023 a statué sur une réduction de capital permettant d'absorber les pertes, puis une augmentation de capital, en vue de recapitaliser la société.

Par ordonnance réputée contradictoire du 8 novembre 2023, le juge des référés du tribunal de commerce de Paris, saisi par assignation la société Elixir event et média délivrée aux sociétés Goût de Paris, Anime Virtual Ltd, Eve expériences, Overlook Events et Sabine.5, a :

rejeté l'exception de nullité de l'assignation soulevée par les parties défenderesses présentes ;

rejeté la demande de la société Elixir event et média de suspension des effets des délibérations de l'assemblée générale mixte de la société Goût de Paris en date du 1er septembre 2023 jusqu'à la décision du juge du fond d'ores et déjà saisi sur la validité de cette assemblée générale ;

dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné la société Elixir event et média aux dépens ;

dit que la présente décision est de plein droit exécutoire par provision en application de l'article 514 du code de procédure civile.

Par déclaration du 16 novembre 2023, la société Elixir event et média a interjeté appel de cette décision en ce qu'elle :

a rejeté sa demande de suspension des effets des délibérations de l'assemblée générale mixte de la société Goût de Paris en date du 1er septembre 2023 jusqu'à la décision du juge du fond d'ores et déjà saisi sur la validité de cette assemblée générale ;

l'a condamnée aux dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 27 mars 2024 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens développés, elle demande à la cour de :

confirmer l'ordonnance de référé rendue le 8 novembre 2023 par le président du tribunal de commerce de Paris en ce qu'elle a rejeté l'exception de nullité de l'assignation introductive d'instance ;

en conséquence,

débouter la société Goût de Paris de sa demande visant à « annuler l'assignation introductive d'instance pour erreur sur les dispositions de la saisie du Juge ainsi que pour le défaut de motivation des demandes en droit » ;

infirmer l'ordonnance de référé rendue le 8 novembre 2023 par le président du tribunal de commerce de Paris en ce qu'elle a :

rejeté la demande de la société Elixir event et média de suspension des effets des délibérations de l'assemblée générale mixte de la société Goût de Paris en date du 1 er septembre 2023 jusqu'à la décision du juge du fond d'ores et déjà saisi sur la validité de ladite assemblée générale ;

et l'a condamnée aux dépens ;

statuant à nouveau,

suspendre les effets des délibérations de l'assemblée générale mixte de la société Goût de Paris en date du 1er septembre 2023 jusqu'à la décision du juge du fond d'ores et déjà saisi sur la validité de l'assemblée générale ;

subsidiairement,

suspendre les effets des résolutions n° 3 à 7 correspondant aux délibérations extraordinaires de l'assemblée générale mixte de la société Goût de Paris en date du 1er septembre 2023 jusqu'à la décision du juge du fond d'ores et déjà saisi sur la validité de cette assemblée ;

en tout état de cause,

débouter la société Goût de Paris et la société Sabine.5 de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

condamné in solidum les sociétés Goût de Paris et Sabine.5 au paiement de la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

La société Goût de Paris, aux termes de ses dernières conclusions en date du 26 mars 2024 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens développés, demande à la cour de :

à titre principal :

annuler l'assignation introductive d'instance pour erreur sur les dispositions de saisine du juge, ainsi que pour le défaut de motivation des demandes en droit ;

à titre subsidiaire :

confirmer l'ordonnance déférée et dire n'y avoir lieu à référé ;

en conséquence :

débouter la société Elixir event et média de ses demandes ;

condamner la société Elixir event et média à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 code de procédure civile pour la première instance, outre une somme de 4 000 euros sur le même fondement en cause d'appel ;

condamner la société Elixir event et média aux entiers dépens.

La société Sabine.5, aux termes de ses dernières conclusions en date du 14 avril 2024 auxquelles il convient de se reporter pour l'exposé détaillé des moyens développés, demande à la cour de :

débouter la société Elixir event et média de l'intégralité de ses fins, demandes et conclusions ;

en conséquence,

confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé déférée, rendue le 8 novembre 2023 par le président du tribunal de commerce de Paris ;

condamner la société Elixir event et média à lui payer la somme de 7 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner la société Elixir event et média aux entiers dépens.

Par ordonnance du 28 mars 2024, le conseiller délégué par le premier président de cette cour a prononcé la caducité partielle de la déclaration d'appel à l'égard de la société Anime Virtual Ltd.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 avril 2024, avant l'ouverture des débats.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

Sur ce,

Sur la nullité de l'assignation introductive d'instance

La société Goût de Paris reproche à l'assignation introductive d'instance d'avoir exclusivement visé l'article 835 du code de procédure civile, concernant le tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection.

Les parties ne produisent pas cette assignation introductive d'instance, dont la date n'est pas même mentionnée dans l'ordonnance entreprise. En l'absence de pièce, la demande sera rejetée et l'ordonnance confirmée de ce chef, par substitution de motifs.

Sur la demande de suspension des effets des délibérations de l'assemblée générale mixte du 1er septembre 2023

En vertu du 1er alinéa de l'article 873 du code de procédure civile, le juge des référés peut, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le trouble manifestement illicite désigne toute perturbation résultant d'un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit et le dommage imminent s'entend de celui qui n'est pas encore réalisé mais qui se produira sûrement si la situation dénoncée perdure.

Sur le trouble manifestement illicite

La société Elixir event et média expose que la convocation à l'assemblée générale mixte a été délibérément adressée pendant les congés d'été, le 10 août 2023, alors que l'assemblée générale du 30 juin 2023 avait fixé un délai de quatre mois pour qu'il soit décidé sur la reconstitution des capitaux propres. Elle ajoute que la convocation ne l'a pas touchée et que c'est le dirigeant de la société Anime Virtual Ldt qui l'a informée par message du 30 août 2023.

La société Elixir event et média soutient que sa dirigeante Mme [H] s'est présentée au lieu indiqué dans la convocation, soit « dans les bureaux du Plateau de Gravelle », lieu distinct de l'adresse du siège social à laquelle s'étaient tenues les précédentes réunions. Elle affirme que Mme [H] a attendu seule dans un bureau où elle avait été conduite par un vigile et qu'aucun de ses associés ne s'est présenté. Elle soutient qu'elle était présente au lieu de l'assemblée générale à l'heure de la convocation mais n'a pu participer à l'assemblée dès lors que ni le dirigeant de la société Goût de Paris ni les autres associés n'étaient présents.

Les attestations produites sont sans rapport avec le déroulement de l'assemblée générale. Par ailleurs, la société Elixir event et média produit un courriel envoyé par son conseil, Mme [C], avocate, au conseil de la partie adverse horodaté du 1er septembre 2023 à 12h16 affirmant que sa cliente était « présente depuis midi » pour assister à l'assemblée générale et que, en dehors d'une présence importante de vigiles, ni le représentant légal ni les associés n'étaient présents (P20 Elixir). En réponse, son confrère, M. [P], l'informait par courriel horodaté du 1er septembre 2023 à 12h39 qu'il avait pu joindre M. [U], président de la société Sabine.5 qui avait confirmé la tenue de l'assemblée générale dans le local du restaurant à 12h, l'assemblée ayant été levée vers 12h20 (P21 Elixir). Tout comme son courriel envoyé à 12h16, la réponse de Mme [C] envoyé à 12h45 (P22 Elixir), ne contient que les allégations de sa cliente qui prétend être sur place avec des vigiles et que les locaux du restaurant sont inaccessibles au regard des travaux en cours. Il n'est ni établi ni allégué que Mme [C] se trouvait sur place avec sa cliente. Les échanges de courriel n'établissement pas l'existence d'un trouble manifestement illicite tenant à l'existence de l'assemblée, à sa localisation ou à son horaire.

Les constats de commissaire de justice (P26, P39 Elixir) produits par Mme [H] ont été établis plusieurs semaines voire plusieurs mois après la date de l'assemblée litigieuse. Ces constats tardifs sur les téléphones personnels des requérants ne sont pas de nature à assurer l'authenticité des messages et médias qui s'y trouvent, notamment quant à l'horodatage, qui est paramétrable à volonté par le possesseur du téléphone, étant précisé que la géolocalisation des prises de vue n'a pas été contrôlée par le commissaire de justice.

Ainsi, s'agissant du procès-verbal de constat du 14 septembre 2023, le commissaire de justice est requis par Mme [H] et son mari M. [H] de se rendre [Adresse 4], siège social de la société Elixir event et média. Le commissaire de justice constate un échange de messages WhatsApp entre Mme [H] et M. [W], représentant de la société Anime Virtual Ltd. Pour la journée du 1er septembre, ces échanges ont lieu à partir de 12h14. Mme [H] affirme à M. [W] qu'elle est sur place et qu'il n'y a personne. Il résulte aussi de la conversation que Mme [H] n'a pas cherché à téléphoner à « [F] » ([F] [O], dirigeant du Goût de Paris) avant que M. [W] le lui recommande à 12h19. Mme [H] montre ensuite au commissaire de justice une vidéo horodatée du 1er septembre 2023 à 12h21, représentant l'extérieur d'un bâtiment et un parking extérieur sur lequel sont garées trois voitures.

S'agissant du procès-verbal de constat du 18 septembre 2023, le commissaire de justice est requis par Mme [H] et son mari M. [H] de se rendre [Adresse 4], siège social de la société Elixir event et média. M. [H] montre au commissaire de justice une vidéo horodatée du 1er septembre 2023 à 12h02, représentant une fontaine dans un jardin.

S'agissant du procès-verbal de constat du 21 février 2024, à l'étude du commissaire de justice, Mme [H] présente une vidéo de 38 secondes datant du 1er septembre à 12h21, figurant un court échange avec un vigile, duquel aucun renseignement précis ne peut être retenu, Mme [H] répétant à deux reprises qu'elle est arrivée à midi moins cinq. Une seconde vidéo, horodatée du 1er septembre à 12h46, figure une salle en travaux avec quelques ouvriers déjeunant à l'extérieur. Mme [H] pose à plusieurs reprise la question de savoir si le chantier est interdit au public pour finir par conclure qu'elle pénètre dans les lieux.

Il ne se déduit aucun trouble manifestement illicite des éléments de preuve décrits ci-dessus. D'une part, il n'est pas démontré, ni allégué, que la convocation à l'assemblée générale ni les documents qui l'accompagnaient aient présenté des irrégularités quelconques au regard des statuts et des dispositions des articles L. 225-96 et suivants du code de commerce. D'autre part, aucune vidéo ni aucun message n'est produit pendant la durée de l'assemblée générale, Mme [H] n'ayant pas pénétré dans le bâtiment avant12h46 (constat pièce 39 Elixir) et étant resté à l'extérieur du restaurant, sans chercher à joindre ni son avocat avant 12h15 ou 12h16, ni le dirigeant de la société le Goût de Paris avant 12h19 ou 12h20.

La société Elixir event et média fait également valoir qu'il ressort du procès-verbal de l'assemblée générale mixte du 1er septembre 2013 que les associés auraient participé à l'assemblée « soit par leur présence physique dans les locaux du Plateau de Gravelle, soit par visio communication ». Elle soutient que la convocation ne mentionnait pas la possibilité de participer à l'assemblée par visioconférence, et en déduit qu'elle a été sciemment empêchée de participer à cette assemblée et de voter contre les résolutions présentées ayant notamment pour objet de diluer la participation des associés minoritaires. Pourtant l'article 19 des statuts prévoit expressément que les décisions collectives peuvent être prises en assemblée générale, qui peut faire l'objet d'une consultation écrite et être prises par tous moyens de télécommunication électronique. Aucun trouble manifestement illicite n'est donc caractérisé de ce chef.

Par ailleurs, la société Elixir event et média soutient que, au mépris des conventions existant entre les associés et de l'intérêt social, la société Sabine.5 a réalisé un « coup d'accordéon » en utilisant la contrainte légale de reconstitution des capitaux propres dans le seul but de diluer la participation de la société Elixir event et média et de l'empêcher de solliciter une expertise de gestion permettant de faire la lumière sur des irrégularités de gestion manifestes. Elle explique que cette préméditation est confirmée par une attestation de Mme [Y]. Cependant, outre que la pièce produite est incomplète et ne comprend qu'une page de témoignage sans signature, il en résulte que Mme [Y] se fait l'écho de conversations qui lui ont été rapportées et dont elle n'a pas personnellement constaté la teneur. En outre, il convient de rappeler que le « coup d'accordéon » dont la société Elixir event et média se plaint et qui a pour effet d'entraîner une perte de valeur des actions qu'elle détient est une conséquence des pertes importantes de la société Goût de Paris dont les capitaux propres étaient devenus inférieurs à la moitié du capital social ' fait qui n'est pas contesté par la société Elixir event et média. Or dans cette hypothèse, la société Goût de Paris était tenue, par application des dispositions d'ordre public de l'article L. 225-248 du code de commerce, soit de procéder à la dissolution anticipée de la société, soit, si, comme en l'espèce, les capitaux propres n'étaient pas reconstitués à concurrence d'une valeur au moins égale à la moitié du capital social, de réduire son capital social pour absorber les pertes avant, le cas échéant de procéder à une augmentation de capital pour recapitaliser la société. Il convient de relever que la convocation à l'assemblée générale du 10 août 2023, régulièrement expédiée à la société Elixir event et média par lettre recommandée avec avis de réception (avis de dépôt LR du 10 août 2023, pièce 6B Goût de Paris ; retour de la convocation, pièce  6C Goût de Paris) contenait un bulletin de souscription à l'augmentation de capital (pièce 6 Goût de Paris). Aucun trouble manifestement illicite n'est donc caractérisé de ce chef.

Sur le dommage imminent

La société Elixir event et média fait état du dommage imminent causé par les décisions prises à l'occasion de l'assemblée générale mixte en date du 1er septembre 2023 ayant dilué la participation des associés minoritaires, et les empêchant de solliciter une expertise gestion. Le préjudice subi par la société Elixir event et média n'est pas un dommage imminent au sens de l'article 835 précité, dès lors qu'il résulte de l'obligation légale de la société Goût de Paris de réduire son capital social pour absorber les pertes excédant la moitié du capital social.

Par ailleurs, la société Elixir event et média expose que la société Goût de Paris est titulaire d'un contrat de concession avec la Ville de Paris qui l'oblige à informer celle-ci au préalable des opérations sur le capital ainsi que des modifications dans la répartition du capital social dès lors que celle-ci aurait pour effet de modifier substantiellement la répartition du capital social. La société Elixir event et média indique qu'elle ignore si l'intimée a informé préalablement la Ville de Paris des modifications dans la répartition de son capital social intervenue le 1er septembre 2023 et si celle-ci a émis un avis favorable à cette opération. Il en résulte que la société Elixir event et média formule un moyen hypothétique qui ne peut justifier l'existence d'un dommage imminent.

En définitive, l'ordonnance entreprise sera confirmée en ce qu'elle a rejeté la demande de suspension des effets des délibérations de l'assemblée générale mixte de la société Goût de Paris en date du 1er septembre 2023, étant observé que cette décision de rejet recouvre la demande subsidiaire de suspension des effets des résolutions n° 3 à 7 correspondants aux délibérations extraordinaires de l'assemblée générale mixte de la société Goût de Paris en date du 1er septembre 2023.

Sur les autres demandes

En d'absence d'appel incident, la demande de la société Goût de Paris relative à l'indemnisation des frais irrépétibles de première instance n'a pas été dévolue à la cour. Les  dispositions de l'ordonnance entreprise seront confirmées quant à la charge des dépens et au rejet des demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

En cause d'appel, la société Elixir event et média sera tenue aux dépens et à payer une somme de 4 000 euros à la société Goût de Paris et de 4 000 euros à la société Sabine.5, sur le fondement de l'article 700 précité.

PAR CES MOTIFS

Constate que les conclusions de la société Goût de Paris sont dépourvues d'effet dévolutif quant à la demande d'indemnisation fondée sur l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exposés en première instance ;

Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Condamne la société Elixir event et média à payer à la société Goût de Paris une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exposés en cause d'appel ;

Condamne la société Elixir event et média à payer à la société Sabine.5 une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais exposés en cause d'appel ;

Condamne la société Elixir event et média aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 23/18482
Date de la décision : 28/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-28;23.18482 ?
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