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28/05/2024 | FRANCE | N°23/15194

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 3, 28 mai 2024, 23/15194


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 3



ARRÊT DU 28 MAI 2024



(n° 223 , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/15194 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIHOQ



Décision déférée à la cour : ordonnance du 02 août 2023 - président du TC de PARIS - RG n° 2023039703





APPELANTE



S.A.R.L. LE DISTIL, RCS de Paris n°478586118, prise en la pers

onne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représentée par Me Céline ASTOLFE de la SELARL CELINE ASTOLFE membre de L'ASSOC...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 3

ARRÊT DU 28 MAI 2024

(n° 223 , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/15194 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIHOQ

Décision déférée à la cour : ordonnance du 02 août 2023 - président du TC de PARIS - RG n° 2023039703

APPELANTE

S.A.R.L. LE DISTIL, RCS de Paris n°478586118, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Céline ASTOLFE de la SELARL CELINE ASTOLFE membre de L'ASSOCIATION LOMBARD BARATELLI ASTORLFE & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : E0183

INTIMEE

S.A.S. OBD GRAND PARIS, RCS de Paris n°388427874, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Martine LEBOUCQ BERNARD de la SCP Société Civile Professionnelle d'avocats HUVELIN & associés, avocat au barreau de PARIS, toque : R285

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 11 mars 2024, en audience publique, rapport ayant été fait par Anne-Gaël BLANC, conseillère, conformément aux articles 804, 805 et 905 du CPC, les avocats ne s'y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Jean-Christophe CHAZALETTE, président de chambre

Anne-Gaël BLANC, conseillère

Valérie GEORGET, conseillère

Greffier lors des débats : Jeanne PAMBO

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-Christophe CHAZALETTE, président de chambre et par Jeanne PAMBO, greffier, présent lors de la mise à disposition.

La société OBD Grand Paris, qui exerce une activité de distributeur de boissons au service des cafés, hôtels et restaurants, a, entre le 2 décembre 2022 et le 16 mars 2023, émis des factures correspondant à des livraisons de marchandises pour un montant total de 120 346,15 euros au nom de la société Le Distil, qui exploite quatre restaurants sous l'enseigne 'Chez Bouboule'.

Suivant courrier recommandé avec accusé de réception du 9 juin 2023, elle a mis en demeure la société Le Distil de régler les montants ainsi facturés.

Par acte extrajudiciaire du 7 juillet 2023, la société OBD Grand Paris a fait assigner la société Le Distil devant le juge des référés du tribunal de commerce de Paris aux fins de voir :

condamner par provision, la société Le Distil à lui payer la somme due en principal, soit 120 346,15 euros, augmentée des intérêts de retard calculés au taux d'intérêt appliqué par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage à compter du lendemain de la date d'échéance de chaque facture en application de l'article L.441-10 du code de commerce ;

condamner par provision la société Le Distil à lui payer à la somme de 1 600 euros au titre de l'indemnité de recouvrement conformément à L.441-10 du code de commerce.

Par ordonnance réputée contradictoire du 2 août 2023, le juge des référés du tribunal de commerce de Paris a :

condamné la société Le Distil à payer à la société OBD Grand Paris, à titre de provision, la somme de 120 346,15 euros, avec intérêts au taux appliqué par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majorée de 10 points de pourcentage à compter du 14 juin 2023, date de la mise en demeure ;

condamné la société Le Distil à payer à la société OBD Grand Paris, à titre de provision, la somme de 1 600 euros d'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement ;

condamné la société Le Distil à payer à la société OBD Grand Paris la somme de 1 000 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

débouté toutes demandes plus amples ou contraires de la partie demanderesse ;

condamné en outre la société Le Distil aux dépens de l'instance.

Par déclaration remise sur support papier au greffe de la cour le 5 septembre 2023, la société Le Distil a relevé appel de cette décision en critiquant l'ensemble des chefs de son dispositif.

Par message du 7 mars 2024, l'appelante a été invitée à présenter des explications sur la raison pour laquelle sa déclaration d'appel avait été déposée sous format papier et non par la voie électronique.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 8 mars 2024, la société Le Distil demande à la cour de :

à titre principal :

infirmer l'ordonnance de référé du 2 août 2023 en ce qu'elle a :

condamné la société Le Distil à payer à la société OBD Grand Paris, à titre de provision, la somme de 120 346,15 euros, avec intérêts au taux appliqué par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majorée de 10 points de pourcentage à compter du 14 juin 2023, date de la mise en demeure ;

condamné la société Le Distil à payer à la société OBD Grand Paris, à titre de provision, la somme de 1 600 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement ;

condamné la société Le Distil à payer à la société OBD Grand Paris la somme de 1 000 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné en outre la société Le Distil aux dépens de l'instance ;

et, statuant à nouveau,

débouter la société OBD grand Paris de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

subsidiairement :

lui accorder les plus larges délais de paiement ;

en tout état de cause :

condamner la société OBD Grand Paris à lui verser la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner la société OBD Grand Paris aux entiers dépens d'instance

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 6 mars 2024, la société OBD Grand Paris demande à la cour de :

recevoir la société OBD Grand Paris en ses demandes et l'y déclarer bien fondée ;

débouter la société Le Distil de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

infirmer l'ordonnance rendue le 2 août 2023 par le tribunal de commerce de Paris en ce qu'elle a fixé à la date de la mise en demeure du 14 juin 2023 le point de départ des intérêts de retard calculés sur la somme principale de 120 346, 15 euros 

statuant à nouveau,

condamner la société Le Distil à payer à OBD Grand Paris la somme de 120 346,15 euros, avec intérêts de retard calculés au taux d'intérêt appliqué par  la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage à compter de la date d'échéance de chaque facture ;

confirmer les autres dispositions de l'ordonnance en ce qu'elle a condamné Le Distil à payer à OBD Grand Paris la somme de 1 600 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, 1 000 euros au titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 code de procédure civile et aux dépens de l'instance.

subsidiairement, si la cour venait à consentir un échelonnement du paiement à Le Distil, il est demandé à la cour de dire qu'à défaut de règlement d'une seule mensualité à l'échéance, la totalité du solde restant dû deviendra exigible sans mise en demeure préalable ;

en tout état de cause, condamner la société Le Distil à payer à OBD Grand Paris la somme de 5 000 euros au titre de l'article du code de procédure civile ;

condamner la société Le Distil aux entiers dépens de la présente instance.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 mars 2024.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

Par message du 13 mai 2024, la cour a sollicité les observations des parties par voie de note en délibéré avant le 21 mai suivant minuit, sur la recevabilité de l'appel incident de la société OBD Grand Paris. Les parties ont répondu par message du 21.

Sur ce,

Sur la recevabilité de l'appel principal

L'article 930-1 du code de procédure civile dispose que, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les actes de procédure sont remis à la juridiction par voie électronique mais que lorsqu'un acte ne peut être transmis par voie électronique pour une cause étrangère à celui qui l'accomplit, il est établi sur support papier et remis au greffe ou lui est adressé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. En ce cas, la déclaration d'appel est remise ou adressée au greffe en autant d'exemplaires qu'il y a de parties destinataires, plus deux. La remise est constatée par la mention de sa date et le visa du greffier sur chaque exemplaire, dont l'un est immédiatement restitué.

Au cas présent, le 5 septembre 2023, la déclaration d'appel de la société Le Distil a été remise sur support papier au greffe de la cour qui y a apposé son visa.

Pour démontrer l'existence d'une cause étrangère justifiant que cette remise n'ait pas été effectuée par la voie électronique, l'appelante fait valoir qu'elle a tenté à de nombreuses reprises d'utiliser le réseau privé virtuel des avocats ce qui s'est avéré impossible compte tenu de l'indisponibilité de ce service. Elle en justifie en versant aux débats des captures d'écran de la page 'météo des services' accessible sur le site Internet du Conseil national du barreau ainsi que plusieurs messages d'erreur à chaque tentative de transmission de sa déclaration d'appel à 12h05, 12h55, 13h42, 14h18, 15h01, 15h37 puis 16h08.

Ce faisant, la société Le Distil établit la cause étrangère dont elle se prévaut de sorte qu'il n'y a pas lieu de déclarer d'office son appel irrecevable.

Sur l'irrecevabilité de l'appel incident

Dans sa version applicable au litige, l'article 905-2 du code de procédure civile dispose que, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, l'intimé dispose d'un délai d'un mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant pour remettre ses conclusions au greffe et former, le cas échéant, appel incident ou appel provoqué.

Dès lors, alors que l'appel incident de la société intimée a été formé pour la première fois dans ses conclusions du 6 mars 2024, soit plus d'un mois après les conclusions de l'appelant remises et notifiées le 13 novembre 2023, celui-ci sera déclaré irrecevable.

Sur la demande de provision

En application de l'article, 873 alinéa 2, du code de commerce, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal de commerce peut accorder une provision au créancier. Si l'obligation ne présente un tel caractère que partiellement, le juge ne doit accorder une provision qu'à hauteur du montant non sérieusement contestable.

Une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

Par ailleurs, l'article 1103 du code civil prévoit que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. En outre, aux termes de l'article L.110-3 du code de commerce, à l'égard des commerçants, les actes de commerce peuvent se prouver par tous moyens à moins qu'il n'en soit autrement disposé par la loi et l'article L.123-23 du code de commerce prévoit que la comptabilité régulièrement tenue peut être admise en justice pour faire preuve entre commerçants pour faits de commerce.

Au cas présent, pour conclure à la confirmation de l'ordonnance sur la condamnation au paiement d'une provision équivalente au montant des factures entre le 2 décembre 2022 et le 16 mars 2023, la société OBD Grand Paris fait valoir que, dans le cadre de relation d'affaires établies, elle a régulièrement effectué au profit de l'appelante des livraisons de marchandises. Elle ajoute que la prestation a bien été fournie ce que la société Le Distil ne conteste pas, mais que l'appelante ne l'a pas payée malgré ses relances et mises en demeure. Pour établir l'existence de sa créance, elle produit les factures dont elle réclame le paiement, les extraits de compte correspondant ainsi que les courriers de mise en demeure, étant précisé que les pièces 13 à 18 annoncées dans son dernier bordereau de communication ne figurent pas dans le dossier qu'elle a produit devant la cour.

En réplique, la société Le Distil se prévaut de l'existence de contestations sérieuses faisant obstacle à la demande.

Elle indique en premier lieu que les remises qui avaient été convenues avec son cocontractant n'ont pas été déduites du montant effectivement facturé et réclamé. Elle en veut pour preuve, au regard du montant global réclamé, le fait que la remise figurant en colonne 9 n'est pas déduite du montant HT figurant en colonne 7. Elle produit également un message de l'intimé qui fait état d'une proposition de réduction à hauteur de 35%.

Cependant, il ressort de l'examen des factures litigieuses que, conformément à ce que souligne la société OBD Grand Paris, le montant de la remise est d'ores et déjà déduit du montant HT figurant dans la colonne 7 puisque le libellé de la colonne 9 'Dt Remise' signifie 'Dont remise' de telle sorte qu'il n'y a pas lieu à nouvelle déduction. Par ailleurs, comme le souligne l'intimée, aucun accord effectif faisant suite à la proposition de remise à hauteur de 35% n'est établi.

Aucune contestation sérieuse ne saurait dès lors s'élever sur ce point.

En deuxième lieu, l'appelante fait valoir qu'elle a déjà contesté des factures émises par la société OBD Grand Paris par plusieurs courriers. Elle produit ainsi des messages et courriels aux termes desquels elle émet des interrogations sur les factures émises.

Cependant, l'appelante ne reprend pas dans ses écritures les contestations qu'elle soutient avoir ainsi formées et qui concernent pour la majorité des factures antérieures. En outre, les termes des messages et courriers électroniques qu'elle produit ne traduisent pas de véritables contestations mais des interrogations auxquelles la société intimée répond.

Aucune contestation sérieuse ne saurait davantage être établie de ce chef.

Enfin, en troisième lieu, la société Le Distil soutient que les factures seraient irrégulières dans la mesure où les duplicatas ne seraient pas conformes aux originaux. Elle produit la facture 20230104709 du 30 janvier 2023 et son duplicata qui mentionnent des dates de commande et des soldes différents. Elle souligne également que le numéro d'identification TVA est manquant.

Cependant, alors que la livraison effective des produits n'est pas contestée et que la différence de solde de 402,70 euros est intervenue au bénéfice de l'appelante et correspond, conformément à l'intitulé de la ligne de la facture comme de son duplicata, à une déconsigne dont la société OBD explique, sans être contredite, qu'elle est appliquée rétroactivement et mentionnée a posteriori sur le duplicata, aucune contestation sérieuse ne saurait être caractérisée du fait de ces seules différences ou omission formelles.

La décision sera dès lors confirmée sur le montant et le principe de la provision allouée.

Sur les délais de paiement

L'article 1343-5 du code civil dispose que le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Au cas présent, l'appelante affirme qu'elle est dans l'incapacité de payer en une seule fois dans la mesure où cela compromettrait sa situation financière et sa capacité à conserver ses salariés. Cependant, elle ne produit aucun document comptable de nature à en justifier.

La demande de délais sera dès lors rejetée.

La décision sera complétée de ce chef, cette demande n'ayant pas été présentée au premier juge.

Sur les demandes accessoires

La décision sera confirmée sur les dépens et les frais irrépétibles.

La société Le Distil sera également condamnée aux dépens de l'appel ainsi qu'au paiement de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Déclare irrecevable l'appel incident de la société OBD Grand Paris ;

Confirme l'ordonnance entreprise en ses dispositions soumises à la cour ;

Y ajoutant ;

Rejette la demande de délais ;

Condamne la société Le Distil au paiement à la société OBD Grand Paris de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne la société Le Distil aux dépens de l'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 23/15194
Date de la décision : 28/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-28;23.15194 ?
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