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24/05/2024 | FRANCE | N°21/02897

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 24 mai 2024, 21/02897


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 24 Mai 2024



(n° , 5 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 21/02897 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDM6T



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Novembre 2020 par le Pole social du TJ de BOBIGNY RG n° 19/00424





APPELANT

Monsieur [H] [Z]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représenté par Me Grégoire BR

AVAIS, avocat au barreau de PARIS, toque : P43, substitué par Me BOLEN Marine, avocat au barreau de PARIS



INTIMEE

CPAM DE LA SEINE SAINT DENIS

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Florenc...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 24 Mai 2024

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 21/02897 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDM6T

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 Novembre 2020 par le Pole social du TJ de BOBIGNY RG n° 19/00424

APPELANT

Monsieur [H] [Z]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représenté par Me Grégoire BRAVAIS, avocat au barreau de PARIS, toque : P43, substitué par Me BOLEN Marine, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

CPAM DE LA SEINE SAINT DENIS

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Mars 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Raoul CARBONARO, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Raoul CARBONARO, président de la chambre

Mme Carine TASMADJIAN, présidente de chambre

M. Gilles RIVELLES, conseiller

Greffier : Mme Fatma DEVECI, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par M. Raoul CARBONARO, président de la chambre et par Mme Fatma DEVECI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par M. [H] [Z] (l'assuré) d'un jugement rendu le 16 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Bobigny dans un litige l'opposant à la Caisse primaire d'assurance-maladie de la Seine-Saint-Denis (la caisse).

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de préciser que M. [H] [Z] a formé un recours devant une juridiction en charge du contentieux de la sécurité sociale à l'encontre de la décision de la commission de recours amiable de la Caisse primaire d'assurance-maladie de la Seine-Saint-Denis ayant confirmé qu'il n'existait pas de lien de causalité directe entre son accident du travail du 18 novembre 1993 et les lésions et troubles invoqués à la date du 15 juin 2017 et rappelant que son état de santé était en rapport avec un état pathologique indépendant de l'accident, évoluant pour son propre compte.

Par jugement en date du 8 août 2019, le tribunal a ordonné une mesure d'expertise technique.

Par jugement en date du 16 novembre 2020, le tribunal a :

dit que les lésions et troubles déclarés à la date du 15 juin 2017 ne constituent pas une aggravation de l'état de santé de M. [H] [Z] due à son accident du travail du 18 novembre 1993 ;

en conséquence, dit que les soins et arrêts de travail prescrit au titre des lésions invoquées le 15 juin 2017 ne peuvent être pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels ;

dit que les frais d'expertise sont à la charge de la Caisse primaire d'assurance-maladie de la Seine-Saint-Denis et l'a condamnée à les payer ;

condamne M. [H] [Z] aux dépens de l'instance qui seront recouvrés selon les dispositions de l'aide juridictionnelle totale dont il bénéficie.

Le tribunal, retenant que les conclusions de l'expert étaient motivées et claires, précises, étayées et dénuées d'ambiguïté en a adopté les motifs en relevant que l'assuré ne produit aucun document et/ou analyse médicale pouvant permettre de retenir un tel lien de causalité entre l'accident et lésions et troubles invoqués à la date du 15 juin 2017.

Le jugement a été notifié par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception remise le 20 novembre 2020 à M. [H] [Z] qui en a interjeté appel par déclaration formée par voie électronique le 15 mars 2021.

Par conclusions écrites visées et développées oralement à l'audience par son avocat, M. [H] [Z] demande à la cour de :

infirmer le jugement rendu le 16 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Bobigny (RG 19/00424) en ce qu'il a :

dit que les lésions et troubles déclarés à la date du 15 juin 2017 ne constituaient pas une aggravation de l'état de santé due à l'accident du travail du 18 novembre 1993 ;

dit que les soins et arrêts de travail prescrits au titre des lésions invoqués le 15 juin 2017 ne pouvaient être pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels;

condamné Monsieur [Z] aux dépens de l'instance ;

confirmer le jugement rendu le 16 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Bobigny (RG 19/00424) en ce qu'il a dit que les frais d'expertise sont à la charge de la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis et la condamne à les payer ;

en conséquence,

dire et juger que les lésions et troubles déclarés à la date du 15 juin 2017 constituaient une aggravation de l'état de santé due à l'accident du travail du 18 novembre 1993 ;

dire et juger que les soins et arrêts de travail prescrits au titre des lésions invoqués le 15 juin 2017 doivent être pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels ;

dire et juger que les frais d'expertise sont à la charge de la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis et la condamner à les payer ;

condamner la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 2° du code de procédure civile ;

condamner la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis aux entiers débours et dépens de l'instance.

M. [H] [Z] expose que les conclusions du premier expert n'étaient pas motivées ; que les conclusions du Dr [O] [G] lui étaient contraires ; que son état de santé ne cesse de se dégrader depuis cet accident de travail de novembre 1993 ; que l'accident dont il a été victime et sa rechute présentent un lien non contestable avec le travail qu'il effectuait ; qu'en effet, il a été démontré l'absence d'état antérieur ; que l'assurance maladie ne démontre pas de manière certaine l'origine des causes des pathologies dont il est atteint ; qu'il souffre d'un canal lombaire étroit, cette pathologie étant liée à la survenance de l'accident de travail dont il a été victime alors que celle-ci peut survenir à la suite de mouvements inconsidérés au niveau du dos, ce qu'il est la description de son accident de travail ; que ce syndrome peut provoquer des épisodes de lombalgies ou de sciatiques à répétition, ce dont il souffre ; qu'il souffre également d'autres symptômes liés à ce syndrome du canal lombaire étroit tel que celui de la vessie irritable ; qu'il a été constaté qu'il présente des difficultés à la marche ; qu'il ne peut donc sérieusement être contesté que ce syndrome du canal lombaire étroit a été provoqué par son accident de travail et que la dégradation longue de son état de santé est nécessairement liée à cet accident de travail ; que cet état de fait est d'ailleurs de nouveau attesté par le Docteur [M] le 8 décembre 2020.

Par observations développées oralement à l'audience par son avocat, la Caisse primaire d'assurance-maladie de la Seine-Saint-Denis demande à la cour de confirmer le jugement.

Elle expose que l'assuré a été déclaré guéri suite à son accident du travail le 19 novembre 1993 ; que le 15 juin 2017, il invoque une rechute , indiquant souffrir d'une hernie discale et de douleurs sciatiques en lien avec l'accident qui avait entraîné des douleurs lombaires ; que le médecin conseil a estimé qu'il n'y avait pas d'aggravation de la guérison et qu'il n'existait aucun lien avec l'accident ; que l'expert technique a contesté tout lien entre l'accident et l'aggravation invoquée ; que l'expertise judiciaire confirme les conclusions, les lésions présentées étant d'ordre structurel et dégénératif ; que les pièces médicales présentées démontrent l'absence de tout lien ; que par ailleurs l'assuré s'est fait reconnaître en état d'invalidité pour une lombosciatique, établissant ainsi la reconnaissance de l'absence de tout lien entre l'accident et l'aggravation invoquée.

SUR CE

L'article L. 443-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue de la li n° 2012-1404 du 17 décembre 2012, énonce que :

« Sous réserve des dispositions du deuxième alinéa du présent article, toute modification dans l'état de la victime, dont la première constatation médicale est postérieure à la date de guérison apparente ou de consolidation de la blessure, peut donner lieu à une nouvelle fixation des réparations.

« Cette nouvelle fixation peut avoir lieu à tout moment pendant un délai déterminé qui suit la date de guérison ou de consolidation de la blessure. Après l'expiration de ce délai, une nouvelle fixation des réparations allouées ne peut être faite qu'à des intervalles dont la durée ne peut être inférieure à un délai fixé dans les mêmes conditions. Ces délais subsistent même si un traitement médical est ordonné. Les intervalles peuvent être diminués de commun accord.

« (') »

En la présente espèce, l'assuré a été victime d'un accident de travail pris en charge par la caisse primaire d'assurance-maladie le 19 novembre 1993. Il a souffert de douleurs lombaires et d'une contracture de la région paravertébrale des deux côtés. Il n'est pas contesté qu'il n'a été déclaré guéri par le médecin-conseil de la caisse.

Le 14 avril 2017, le médecin traitant de l'assuré établi un certificat médical de rechute pour une hernie discale L3-L4 et L4-L5 entraînant une sciatique gauche.

Les conclusions motivées de l'expertise technique dénient tout lien de causalité directe entre l'accident du travail dans l'assuré a été victimes le 18 novembre 1993 et lésions et troubles invoqués à la date du 15 juin 2017. Si l'assuré conteste les conclusions, il ne communique pas à la cour le corps de l'expertise dont il est seul dépositaire, la caisse ne pouvant en faire état en raison du secret médical.

Pour contester ces conclusions, le Docteur [O] [G] mentionne le fait que les radiographies du rachis lombaire du 5 novembre 1996 et du 19 mars 2003 sont normales et que le scanner du rachis lombaire du 5 mai 2003 fait part d'un signe de canal lombaire étroit congénital, confirmé par un scanner du 6 juin 2003 précisant le siège du canal lombaire étroit en L3. Ce praticien s'appuie en outre sur un certificat du médecin traitant du 10 juillet 2007 attestant de la présence d'une lombosciatique chronique sur une hernie discale L5-S1 avec un canal lombaire étroit ainsi qu'une comitialité traitée et des gonalgies séquellaires gauches avec rupture du ligament croisé.

L'expert judiciaire désigné par le tribunal conclut de même à l'absence de tout lien entre l'affection dont souffre l'assuré et l'accident du travail.

À cet égard, il sera noté le certificat médical du 18 juin 2013 du Dr [R] qui a assisté l'assuré lors de la mesure d'expertise technique qui indique qu'il avait prévenu ce dernier d'une difficulté médicolégale. Il se satisfait d'une prise en charge de la pathologie rachidienne et des troubles dépressifs en lien avec le harcèlement moral outre d'autres pathologies sans lien avec l'accident du travail.

De même, l'analyse de l'IRM du 3 décembre 2019 indique une lombarthrose étagée faite essentiellement de débords discaux en postérieur sur un canal lombaire de dimension constitutionnellement limite sans conflit discoradiculaire décelable.

L'expert mentionne une IRM du 25 janvier 2018 contestant partiellement cette conclusion dès lors qu'il impute à la discarthrose étagée de L1 à L 2 jusqu'à L4-L5 la responsabilité du rétrécissement canalaire central, la discopathie L3-L4 étant responsable du rétrécissement foraminal gauche mettant à l'étroit la racine nerveuse.

Au vu de ces pièces, l'expert indique que l'assuré présente un état dégénératif lombaire responsable d'une lombalgie chronique entraînant parfois des sciatalgies. Si l'accident du travail du 18 novembre 1993 avait entraîné des douleurs lombaires basses musculaires et des contractures, l'expert considère qu'à plus de 20 ans, les effets minimes de l'accident du travail sont épuisés. Il impute l'état dégénératif à un état physiologique qui se développe pour son propre compte justifiant d'une éventuelle reconnaissance d'invalidité.

Pour contester l'expertise, l'assuré présente un certificat du 8 décembre 2020 faisant état de l'aggravation des douleurs lombaires, avec des irradiations dans les jambes, due à l'aggravation de la hernie discale L5-S1.

Les pièces présentées par l'assuré ne sont pas de nature à remettre en cause les conclusions de l'expert alors que les IRM pratiqués à 10 ans de l'accident ne démontraient aucun symptôme apparent, le rachis lombaire étant normal. L'apparition de symptômes dégénératifs est constatée dans l'IRM du 19 juillet 2012. Les douleurs, apparues en 2004, trouvent, selon l'expert leur origine dans le canal étroit qualifié de congénital par le Docteur [O] [G].

Aucune pièce d'ordre critique et émanant d'une littérature médicale scientifiquement reconnue ne permet de discuter le fait que la distance très importante entre l'accident de 1993 et l'apparition de symptômes 19 ans après ne permettent pas d'établir un lien entre eux.

En conséquence, les conclusions de l'expert seront retenues par la cour, le jugement déféré étant dès lors confirmé.

M. [H] [Z], qui succombe, sera condamné aux dépens.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

DÉCLARE recevable l'appel de M. [H] [Z] ;

CONFIRME le jugement rendu le 16 novembre 2020 par le tribunal judiciaire de Bobigny ;

CONDAMNE M. [H] [Z] aux dépens ;

DIT n'y avoir lieu à recouvrement au titre de l'aide juridictionnelle.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 21/02897
Date de la décision : 24/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-24;21.02897 ?
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