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24/05/2024 | FRANCE | N°19/11052

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 12, 24 mai 2024, 19/11052


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12



ARRÊT DU 24 Mai 2024



(n° , 2 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 19/11052 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA4Y5



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 Octobre 2019 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS RG n° 18/00622



APPELANTE

SAS [5]

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Madame [Y] [D] en vertu

d'un pouvoir spécial



INTIMEE

CPAM 07 - ARDECHE

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Amy TABOURE, avocat au barreau de PARIS substituée par

Me Camille MACHELE, avocat au barreau ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 12

ARRÊT DU 24 Mai 2024

(n° , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 19/11052 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA4Y5

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 Octobre 2019 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS RG n° 18/00622

APPELANTE

SAS [5]

[Adresse 3]

[Localité 4]

représentée par Madame [Y] [D] en vertu d'un pouvoir spécial

INTIMEE

CPAM 07 - ARDECHE

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Amy TABOURE, avocat au barreau de PARIS substituée par

Me Camille MACHELE, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Février 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Marie-Odile DEVILLERS, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Odile DEVILLERS, Présidente de chambre

Monsieur Christophe LATIL, Conseiller

Monsieur Philippe BLONDEAU, Conseiller

Greffier : Madame Claire BECCAVIN, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Madame Marie-Odile DEVILLERS, Présidente de chambre et par Madame Agnès ALLARDI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté la société [5]par à l'encontre d'un jugement rendu le 3 octobre 2019 par le tribunal judiciaire de Paris dans un litige l'opposant à la CPAM de l'Ardèche.

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Le 3 juillet 2008, la société [5] a déclaré l'accident de travail de son salarié

M. [W] [M] avec les circonstances suivantes :

Date, heure et lieu de l'accident : CNPE [Localité 6] 1 juillet 2008 à 6h15

heures de travail : de 6 h à 12h

Circonstances : selon les dires de l'intérimaire, en allant chercher des poteaux et en les ramenant sur la zone de travail, M. [M] en voulant éviter le chemin de câble apparent s'est pris les pieds dedans et a trébuché en voulant reprendre son équilibre il a posé son pied dans le caniveau au sol, son pied a ripé et sa cheville a cédé. Il est sorti de la zone, pensant que ça passerait et il a appelé M. [N] à 7h20. Nous émettons des réserves sur les circonstances de l'accident (courrier joint).

Siège et nature des lésions: entorse/foulure pied gauche.

Il était précisé que l'accident avait été constaté par l'employeur à 7h20 et que la victime avait été transportée à la clinique.

Le courrier d'envoi de la déclaration d'accident de travail précisait : 'compte-tenu des circonstances dans lesquelles l'intéressé prétend avoir été victime, nous émettons des réserves d'ordre médical. En effet M. [M] avait déjà la cheville fragilisée par une précédente entorse ayant entraîné un arrêt maladie du 12 au 20 juin 2008'.

Cette lettre porte une mention manuscrite signée mais non datée: 'vu avec employeur pas de réserves sur le fait accidentel'.

Le certificat médical initial joint mentionne 'entorse cheville gauche' et prescrit un arrêt jusqu'au 18 juillet.

Le 12 août 2008, le médecin conseil a émis un avis favorable en indiquant: 'les lésions sont imputables à l'accident du travail' et le 04 août 2008 la caisse a informé l'emp1oyeur de la possibilité de consulter le dossier avant la prise de décision devant intervenir le 28 août 2008.

A cette date la caisse a accordé la prise en charge de l'accident du 1er juillet 2008 de M. [M] au titre de la législation professionnelle.

M. [M] a bénéficié d'arrêts de travail de prolongation du 16 juillet 2008 au

19 janvier 2009 et il a été déclaré consolidé par le médecin conseil le 23 janvier 2009 sans séquelles indemnisables.

La société [5] a saisi la commission de recours amiable le 28 août 2015, puis en l'absence de décision de cette dernière le TASS de Paris le 6 février 2018.

Par jugement du 3 octobre 2019, le tribunal de Paris a :

- écarté le moyen de la prescription quinquennale,

- dit que la caisse de l'assurance maladie de l'Ardeche a fait une exacte application des textes en vigueur,

- débouté la société [5] de ses demandes,

- condamné la société [5] aux dépens.

La société a fait appel le 30 octobre 2010 de cette décision qui lui a été notifiée le

7 octobre.

Lors de la première audience du 21 avril 2023, la société demandait un renvoi au vu des écriture de la CPAM mais n'était pas présente, lors de l'audience du 7 novembre 2023, la société, qui n'avait pas conclu, à nouveau a sollicité le renvoi parce qu'informée tardivement de la date d'audience.

A l'audience du 27 février 2024 les conseils de la société et de la CPAM ont soutenu oralement leurs conclusions écrites visées par le greffe.

La société a fait soutenir oralement à l'audience par son conseil des conclusions dans lesquelles elle demande à la cour :

- d'infirmer le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de Paris le 3 octobre 2019 en ce qu'il a déclaré opposable à la société la décision de prise en charge de l'accident déclaré par M. [M] au titre de la législation professiomelle,

Et statuant à nouveau :

- de déclarer inopposable à l'égard de l'employeur la décision de prise en charge de l'accident du 1er juillet2008 déclaré par M. [M],

- de débouter la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de l'Ardèche de toutes ses demandes.

Elle soutient qu'elle a formulé des réserves et que la caisse avait donc l'obligation de diligenter une instruction, qu'en effet aucune motivation des réserves n'était exigée avant le 1er janvier 2010 puisque ce n'est que le décret du 29 juillet 2009 qui a inséré cette obligation à l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale cette obligation de motivation des réserves afin de les rendre effectives, qu'auparavant, dès lors que l'employeur transmettait des réserves à la caisse primaire préalablement à sa prise de décision, cette dernière avait l'obligation d'envoyer un questionnaire au salarié et à l'employeur, que faute d'avoir agi ainsi la prise en charge est inopposable à l'employeur.

Elle soutient également que la caisse avait prolongé les délais d'instruction, puisqu'elle avait envoyé le 5 août 2008 une lettre intitulée : 'délai complémentaire d'instruction', elle était tenue à une obligation d'information préalable de l'employeur, qu'elle avait indiqué dans sa lettre de prise en charge : ' après instruction du dossier'. Elle prétend qu'en menant une instruction sans informer la société de l'avis du médecin-conseil, de la fin de la procédure et sans lui donner la possibilité de consulter le dossier la Caisse a violé le principe de la contradiction.

La caisse demande à la cour de :

- à titre principal dire et juger que la prescription quinquennale s'appliquant, la contestation de l'employeur de l'opposabilité de l'accident du travail du 3 juillet 2008 est irrecevable,

- Confirmer 1e jugement du 3 octobre 2019 pour le surplus.

La caisse demande l'application de la prescription quinquennale, elle soutient que l'employeur devait contester la prise en charge dans un délai de 5 ans après la fin du délai maximal d'information, soit trois mois après la déclaration d'accident de travail : le 8 octobre 2008. Elle fait valoir qu'ayant été informé le 28 août 2008, alors qu'il n'y avait pas d'obligation, l'employeur devait agir avant le 28 août 2013. Elle estime donc que l'action intentée le 28 août 2015 par saisine de la commission de recours amiable, était irrecevable.

Elle soutient également qu'il est acquis que la société [5] avait saisi la CARSAT, par courrier du 05 mars 2012 d'un " recours conservatoire visant expressément l'accident du travail de M. [M] et l'imputation dudit accident sur les comptes employeur de 2008 et 2009, et qu'ainsi à cette date, la société [5] ne pouvait valablement ignorer l'existence de la prise en charge de l'accident du travail, de sorte qu'a compter de cette date, la prescription avait commencé a courir et que le 6 février 2018, date de sa saisine du Tribunal, elle était manifestement prescrite, qu'en l'absence de caractère obligatoire de la commission de recours amiable, celle-ci n'avait pas interrompu la prescription.

Elle prétend que la contestation de l'employeur étant d'ordre purement médical et soutient que puisqu'il ne remettait pas en cause dans son courrier de réserves la réalité de l'accident et ses ciconstances, elle n'avait pas à mener d'enquête et envoyer des questionnaires, mais seulement à interroger le médecin-conseil, ce qu'elle a fait.

SUR CE LA COUR

Sur la prescription quinquennale

La prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident de M. [M] est intervenue avant le décret du 29 juillet 2009 réformant la procédure d'instruction des déclarations d'accident de travail. Notamment avant l'intervention de ce décret l'envoi de la décision de prise en charge à l'employeur ne présentait un caractère qu'informatif et ne constituait donc pas une notification qui pouvait faire courir des droits et une prescription, que notamment l'absence de mention de voies de recours sur la notification empêchait toute prescription de l'action en contestation.

La caisse est donc mal fondée à invoquer la prescription quinquennale et le jugement qui a rejeté cette exception doit être confirmé sur ce point.

Sur l'absence d'envoi d'un questionnaire

L'article R. 441-11 dans sa rédaction antérieure au décret du 29 juillet 2009 disposait:

'Hors les cas de reconnaissance implicite et en l'absence de réserves de l'employeur, la caisse primaire assure l'information de la victime, de ses ayants clroits et de l'employeur; préalablement à sa décision, sur la procédure d'instruction et sur les points susceptibles de leur faire grief .

En cas de réserves de l'employeur, ou si elle l'estime nécessaire, la caisse envoie un questionnaire ou procède à une enquête auprès des intéressés portant sur les circonstances de l'accident ou les causes de la maladie.'

Aucune obligation de motiver les réserves n'existait avant le décret du 29 juillet 2009.

Or en l'espèce l'employeur dans la déclaration d'accident de travail indiquait clairement: 'Nous émettons des réserves sur les circonstances de l'accident', et même sans explication et motivation cette phrase suffisait à justifer qu'une instruction soit ordonnée. Même si ensuite l'employeur ne remettait pas en cause clairement la réalité d'un éventuel accident il émettait sérieusement un doute sur l'existence d'une lésion résultant d'un accident au travail, ce qui correspond à la remise en cause de l'accident de travail.

La Caisse aurait donc dû déligenter une instruction en envoyant au salarié et à l'employeur un questionnaire.

Sur le non respect du caractère contradictoire de la procédure

Même sans l'absence d'envoi d'un questionnaire, la caisse reconnaît elle-même avoir mené une instruction: elle évoque un 'délai complémentaire d'instruction', et dans la lettre de prise en charge , elle précise :' après instruction du dossier'. Elle a reconnu à tout le moins, suite aux 'réserves' de l'employeur , avoir sollicité l'avis du médecin conseil.

En n'offrant pas la possibilité à l'employeur de consulter le dossier contenant cet avis elle a manqué à son devoir d'information.

Il apparaît donc que la décision de la Caisse prise sans envoi d'un questionnaire et sans donner à l'employeur la possibilité de consulter le dossier, doit être déclarée inopposable à la société et le jugement déféré sera infirmé.

PAR CES MOTIFS

DÉCLARE recevable l'appel de la SAS [5],

CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a écarté le moyen de la prescription quinquennale ;

INFIRME le jugement pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

DÉCLARE inopposable à l'égard de la société [5] la décision de prise en charge de l'accident du 1er juillet2008 déclaré par M. [M] ;

CONDAMNE la CPAM de l'Ardèche aux dépens.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 12
Numéro d'arrêt : 19/11052
Date de la décision : 24/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-24;19.11052 ?
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