RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 10
ARRÊT DU 23 MAI 2024
(n° , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/07660 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDQ5S
Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Mars 2021 - Tribunal judiciaire de CRETEIL RG n° 19/06530
APPELANTE
S.A.S. FRANCE TELEVISIONS PUBLICITE INTER OCEANS, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés ès qualités audit siège
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée et assistée par Me Grégory MOUY de la SELEURL MOUY AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : D1112, substitué à l'audience par Me Matthieu MAZO, avocat au barreau de PARIS, toque : L0129
INTIMÉ
Monsieur [R] [D] [L]
né le [Date naissance 1] 1982 à [Localité 6] (97)
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représenté et assisté à l'audience par Me Clélia PAPOUNAUD, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : 409
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été plaidée le 07 Mars 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Florence PAPIN, Présidente
Mme Valérie MORLET, Conseillère
Mme Anne ZYSMAN, Conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Anne ZYSMAN, Conseillère dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Ekaterina RAZMAKHNINA
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Florence PAPIN, Présidente et par Ekaterina RAZMAKHNINA, greffier, présent lors de la mise à disposition.
***
EXPOSE DU LITIGE
La société France Télévisions Publicité Inter Océans (FTPIO), sous le nom commercial France Télévisions Publicité Outre-Mer, est l'une des régies publicitaires du groupe audiovisuel exploité par la société France Télévisions. En sa qualité de régie, la société FTPIO commercialise auprès des annonceurs, sur le territoire des DROM-COM, des espaces publicitaires sur l'antenne des chaînes France 2, France 3, France 4, France 5, France Ô et Guadeloupe 1ère ainsi que sur les différents sites internet que ces chaînes exploitent.
Créée le 2 décembre 2013 sous la forme d'une association régie par la loi du 1er juillet 1901, le comité Miss Guadeloupe Pageant a notamment pour objet la mise en 'uvre d'actions de développement local, en particulier dans le domaine social, culturel et touristique de la Guadeloupe.
M. [R] [L] a été président du comité Miss Guadeloupe Pageant du 2 décembre 2013 au 20 avril 2017.
Le 23 avril 2014, la société France Télévisions, la société France Télévisions Publicité Inter Océans et le comité Miss Guadeloupe Pageant, représenté par M. [R] [L] en sa qualité de président de l'association, ont conclu un contrat de partenariat dont l'objet était la participation de Guadeloupe 1ère à la mise en avant de Miss Guadeloupe à travers la production et la réalisation en direct de l'élection Miss Guadeloupe 2014 et de programmes courts autour de cet événement, diffusés sur Guadeloupe 1ère entre le 28 avril et le 26 juillet 2014.
Cette convention prévoyait, en son article 3, une participation financière de l'association à hauteur de 40.000 euros HT soit 43.400 euros TTC dont elle devait s'acquitter en trois versements, les deux premiers de 10.850 euros TTC devant intervenir les 11 juin et 11 juillet 2014 et le dernier versement de 21.700 euros TTC au plus tard 40 jours après l'élection.
Le comité Miss Guadeloupe Pageant n'ayant pas effectué les versements prévus, la société FTPIO lui a adressé plusieurs mises en demeure.
Le 29 juin 2015, M. [R] [L] a signé une attestation aux termes de laquelle il a reconnu devoir à FTP Guadeloupe la somme de 43.500 euros et s'est engagé à rembourser cette somme au plus tard le 7 août 2015.
Aucun règlement n'est intervenu à cette date.
M. [R] [L] a quitté ses fonctions au sein de l'association le 20 avril 2017 et l'association a été dissoute par décision de l'assemblée générale extraordinaire du 7 juin 2017, publiée au journal officiel le 5 octobre 2017.
C'est dans ce contexte que, par acte du 2 août 2019, la société France Télévisions Publicité Inter Océans a fait assigner M. [R] [L] devant le tribunal de grande instance de Créteil pour obtenir, au visa des articles 1343-2 et 1376 du code civil, sa condamnation à lui payer la somme de 43.500 euros TTC.
Par jugement du 9 mars 2021, le tribunal devenu tribunal judiciaire de Créteil a :
- dit que la reconnaissance de dette souscrite le 29 juin 2015 par M. [R] [L] au bénéfice de la société France Télévisions Publicité Inter Océans (FTPIO) est frappée de nullité pour défaut de cause,
- débouté la société France Télévisions Publicité Inter Océans (FTPIO) de l'ensemble de ses demandes,
- débouté M. [R] [L] du surplus de ses demandes,
- condamné la société France Télévisions Publicité Inter Océans (FTPIO) à payer à M. [R] [L] la somme 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société France Télévisions Publicité Inter Océans (FTPIO) aux entiers dépens de l'instance,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la décision,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Par déclaration du 20 avril 2021, la société France Télévisions Publicité Inter Océans a interjeté appel de ce jugement.
Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 11 janvier 2022, la société France Télévisions Publicité Inter Océans demande à la cour de :
Vu le jugement rendu le 9 mars 2021 par la 3ème chambre du tribunal judiciaire de Créteil,
Vu les pièces versées aux débats,
Vu la reconnaissance, par la jurisprudence, de la validité d'un engagement unilatéral de payer la dette d'autrui,
- Réformer le jugement dont appel en ce qu'il a :
' dit que la reconnaissance de dette souscrite le 29 juin 2015 par M. [R] [L] est frappée de nullité pour défaut de cause,
' débouté la société France Télévisions Publicité Inter Océans (FTPIO) de l'ensemble de ses demandes,
' condamné celle-ci au versement d'une somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens,
En conséquence :
- Dire que M. [R] [L] s'est valablement engagé à régler personnellement la dette contractée par l'association comité Miss Guadeloupe Pageant envers la société France Télévisions Publicité Inter Océans,
- Débouter M. [R] [L] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions envers la société France Télévisions Publicité Inter Océans,
- Condamner M. [R] [L] à régler à la société France Télévisions Publicité Inter Océans une somme de 7.500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,
- Ordonner la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;
- Condamner M. [R] [L] à régler à la société France Télévisions Publicité Inter Océans, pour les procédures de première instance et d'appel, la somme de 15.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Le condamner aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de Me Grégory Mouy, avocat, en application de l'article 699 du même code.
Par dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 13 octobre 2021, M. [R] [L] demande à la cour de :
Vu les articles 548 et suivants et les articles 908 et suivants du code de procédure civile,
Vu les articles 1326, 1131, 2224 et suivant du code civil en vigueur au 29 juin 2015,
Vu l'article 1382 du code civil en vigueur au 29 juin 2015,
Vu l'article 1241 du code civil,
Vu l'article L. 341-2 du code de la consommation en vigueur au 29 juin 2015,
Vu l'article L. 137-2 du code de la consommation en vigueur au 29 juin 2015,
A titre principal
- Déclarer recevable mais mal fondé l'appel principal interjeté par la société France Télévisions Publicité Inter Océans (FTPIO) et ainsi :
- Confirmer le jugement critiqué en ce qu'il a :
' dit que la reconnaissance de dette souscrite le 29 juin 2015 par M. [R] [L] au bénéfice de la société France Télévisions Publicité Inter Océans est frappée de nullité pour défaut de cause,
' débouté la société France Télévisions Publicité Inter Océans de l'ensemble de ses demandes,
' condamné la société France Télévisions Publicité Inter Océans à payer à M. [R] [L] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
' condamné la société France Télévisions Publicité Inter Océans aux entiers dépens de l'instance,
A titre subsidiaire et dans le cas où la Cour ne confirmerait pas le jugement sur les chefs précités :
Statuant à nouveau :
- Dire et juger que l'acte sous seing privé du 29 juin 2015 doit être qualifié de cautionnement,
En conséquence :
- Juger nul l'acte de cautionnement du 29 juin 2015 pour défaut des mentions obligatoires,
A titre très subsidiaire,
- Juger l'action de la société FTPIO prescrite sur le fondement de l'article L. 137-2 du code de la consommation,
A titre infiniment subsidiaire
- Infirmer le jugement critiqué en ce qu'il a débouté M. [R] [L] du surplus de ses demandes,
- Juger l'action de la société France Télévisions Publicité Inter Océans constitutive d'un abus de droit,
- Condamner sur ce fondement la société France Télévisions Publicité Inter Océans à payer 43.500 euros à M. [R] [L],
- Ordonner compensation entre les condamnations réciproques des parties,
A titre très infiniment subsidiaire et dans le cas où la Cour infirmerait le jugement et condamnerait M. [R] [L] à payer à la société France Télévisions Publicité Inter Océans la somme de 43.500 euros TTC :
- Juger que M. [R] [L] pourra s'acquitter à hauteur de 400 euros par mois durant
23 mois et le solde le 24ème,
En tout état de cause
- Déclarer recevable et fondé l'appel incident formé par M. [R] [L],
- Infirmer le jugement critiqué en ce qu'il a débouté M. [R] [L] du surplus de ses demandes,
- Condamner la société France Télévisions Publicité Inter Océans à verser 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral subi,
- Condamner la société France Télévisions Publicité Inter Océans à 7.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,
- Débouter la société France Télévisions Publicité Inter Océans de l'ensemble de ses demandes.
La clôture a été prononcée le 13 décembre 2023.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur l'engagement souscrit par M. [R] [L]
Le tribunal a retenu qu'en l'absence de mention manuscrite portant l'indication du débiteur cautionné et de l'obligation souscrite par son garant dans les formes prescrites par l'article L. 341-2 du code de la consommation tel qu'applicable aux faits de l'espèce, l'acte dont se prévaut la société FTPIO au soutien de ses prétentions ne pouvait s'analyser en un cautionnement mais en une reconnaissance de dette.
Il a considéré que, s'agissant d'un acte unilatéral dactylographié, dépourvu de la mention de la somme due en chiffres, cette reconnaissance de dette était irrégulière mais constituait néanmoins un commencement de preuve par écrit en application de l'article 1347 du code civil tel qu'applicable à l'espèce.
Il a toutefois estimé que la dette ayant été contractée, non pas pour M. [R] [L] personnellement mais pour le compte de l'association par l'intermédiaire de son représentant légal, l'acte litigieux était nul pour défaut de cause dès lors qu'il apparaissait peu contestable que ladite reconnaissance de dette n'avait été signée par M. [L], le 29 juin 2015, que dans le prolongement de la convention de partenariat à laquelle l'association était partie et dont elle était l'unique bénéficiaire des prestations fournies par la société FTPIO moyennant une contrepartie financière.
Au soutien de son appel, la société FTPIO fait valoir que l'acte litigieux constitue, non pas une reconnaissance de dette stricto sensu qui n'a pas pour objet ni pour effet de créer une nouvelle obligation, son auteur reconnaissant simplement devoir une dette préexistante, mais un engagement unilatéral de payer la dette d'autrui, qui crée une nouvelle obligation à la charge de son signataire. Elle soutient qu'un tel engagement est valable et que sa cause peut résulter d'une obligation morale de prendre personnellement en charge la dette d'autrui. Elle soutient qu'en l'espèce, l'engagement unilatéral de M. [L] de payer la dette d'autrui est causé par l'obligation morale de prendre en charge personnellement la dette contractée par l'association, exprimée par M. [L] lui-même dans son mail du 6 mai 2015.
Elle en déduit que les dispositions de l'article 1326 ancien du code civil sont inapplicables. Elle ajoute que le fait qu'aucune prestation n'ait été accomplie au profit de M. [L] est inopérant dès lors que cet engagement est parfaitement causé par l'engagement moral pris par celui-ci de solder la dette contractée par l'association.
Elle soutient par ailleurs que les autres moyens invoqués à titre subsidiaire par M. [L] ne sont pas fondés en indiquant que :
- l'acte du 29 juin 2015 ne peut être qualifié de cautionnement dès lors que le cautionnement ne se présume pas et que l'engagement pris par M. [L] ne saurait être regardé comme l'accessoire d'une obligation principale dont il viserait à garantir le paiement, relevant qu'à l'époque où M. [L] a pris l'engagement de rembourser la société FTPIO aux lieu et place de l'association, l'inexécution de l'obligation initiale de cette dernière était consommée ;
- les dispositions du code de la consommation ne sont pas applicables, la société FTPIO ne pouvant être regardée vis-à-vis de M. [L] comme un professionnel ayant fourni un bien ou un service à un consommateur, rappelant que l'objet du contrat qui fonde sa créance est de nature professionnelle.
M. [L] demande la confirmation du jugement en ce qu'il a qualifié l'acte du 29 juin 2015 de reconnaissance de dette, irrégulière en l'absence des mentions imposées par l'article 1326 ancien du code civil, et dépourvue de cause au sens de l'article 1131 ancien du code civil dès lors qu'il résulte de la convention tripartite du 23 avril 2014 et de l'aveu même de la société FTPIO qu'aucune obligation n'a été réalisée à son bénéfice, la somme de 43.500 euros TTC résultant d'un contrat auquel il n'est pas partie, si ce n'est en qualité de représentant de l'association Comité Miss Guadeloupe Pageant. Il précise que ses fonctions au sein de l'association ont été réalisées à titre bénévole.
A titre subsidiaire, il fait valoir que l'acte litigieux doit être qualifié de cautionnement dès lors que l'association est le débiteur principal de l'obligation résultant du contrat conclu par cette dernière, dans son intérêt exclusif ; que cet acte ne respectant pas les formes prévues par l'article 1326 du code civil et l'article L. 341-2 du code de la consommation, sa nullité doit être constatée.
A titre très subsidiaire, il invoque la prescription de l'action de la société FTPIO en application des dispositions de l'article L. 137-2 du code de la consommation.
Sur ce
Il convient de se référer aux dispositions du code civil antérieures à l'ordonnance du 10 février 2016, celle-ci n'étant applicable qu'aux seuls contrats conclus à compter du 1er octobre 2016.
Aux termes de l'article 1315 du code civil celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le payement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
Par ailleurs, il résulte de l'article 12 du code de procédure civile que le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.
L'acte litigieux, intitulé « ATTESTATION » est rédigé comme suit :
« Je soussigné [R] [L], domicilié (...) reconnais devoir à FTP Guadeloupe, la somme de quarante-trois mille euros.
Je m'engage à rembourser cette somme, au plus tard le 07 Août 2015 sans aucune majoration quelconque.
Fait à Paris,
Le 29/06/2015 »
Le document porte in fine le nom « [R] [L] » et sa signature.
Il ressort des pièces versées aux débats qu'en vertu du contrat de partenariat du 23 avril 2014, M. [L] a pris l'engagement, en sa qualité de président du comité Miss Guadeloupe Pageant, de verser à la société FTPIO une participation financière d'un montant de 43.400 euros TTC en contrepartie des prestations publicitaires promises par cette dernière en vue de promouvoir l'élection de Miss Guadeloupe 2014 à l'époque où il était encore président de l'association. Il n'est pas discuté par les parties que cette dette n'a jamais été réglée par l'association avant qu'elle ne soit dissoute volontairement.
Ainsi, la dette a été contractée, non pas pour M. [R] [L] personnellement mais pour le compte de l'association par l'intermédiaire de son représentant légal.
Il en résulte que M. [L] ne pouvait s'engager à prendre en charge cette dette qu'en qualité de caution ou en vertu d'une reconnaissance de dette.
Ces deux types d'engagement répondent pour leur validité à des exigences de forme posées par les articles 2011 et suivants du code civil et L. 341-2 du code de la consommation pour le cautionnement, et par les articles 1326 et 1341 du code civil pour la reconnaissance de dette.
En l'occurrence, c'est à bon droit que le premier juge a considéré qu'en l'absence de mention manuscrite portant l'indication du débiteur cautionné et de l'obligation souscrite par son garant dans les formes prescrites par l'article L. 341-2 du code de la consommation, l'acte litigieux devait s'analyser, non pas en un cautionnement mais en une reconnaissance de dette. En effet, par cet acte, M. [L] ne s'est pas engagé à satisfaire l'obligation de paiement du Comité Miss Guadeloupe Pageant si celle-ci n'y satisfaisait pas elle-même et son engagement n'a rien d'accessoire, notamment en ce qu'il n'est pas expressément rattaché à des modalités de la dette d'un autre débiteur, mais a reconnu devoir une certaine somme à titre personnel.
Cette reconnaissance de dette est soumise au formalisme de l'article 1326 du code civil qui prévoit que l'acte juridique par lequel une seule partie s'engage envers une autre à lui payer une somme d'argent ou à lui livrer un bien fongible doit être constaté dans un titre qui comporte la signature de celui qui souscrit cet engagement ainsi que la mention, écrite par lui-même, de la somme ou de la quantité en toutes lettres et en chiffres. En cas de différence, l'acte sous seing privé vaut pour la somme écrite en toutes lettres.
L'acte irrégulier au regard de ces mentions ne peut produire effet, en tant que commencement de preuve par écrit, que s'il est complété par des éléments extrinsèques établissant la connaissance, par le souscripteur, de la nature et de l'étendue de l'engagement consenti.
Comme l'a justement relevé le premier juge, la reconnaissance de dette litigieuse, dépourvue de la mention de la somme due en chiffres, est irrégulière mais constitue néanmoins un commencement de preuve par écrit au sens de l'article 1347 du code civil.
Par ailleurs, selon l'article 1132 du code civil, la convention n'est pas moins valable, quoique la cause n'en soit pas exprimée.
Cet article pose le principe selon lequel l'existence de la cause de l'engagement du souscripteur est présumée exister, quand bien même elle n'aurait pas été mentionnée dans l'acte. Il énonce une règle de preuve mettant à la charge du débiteur la preuve de l'inexistence ou de l'inexactitude de la cause de l'acte.
La présomption posée par l'article 1132 du code civil s'applique nonobstant l'absence d'un acte conforme aux exigences de l'article 1326 du code civil.
Une reconnaissance de dette a pour cause l'obligation préexistante en contrepartie de laquelle le souscripteur de l'acte a consenti à s'engager.
En l'espèce, il résulte des développements précédents que M. [L] n'est pas tenu au paiement de la somme qu'il s'est engagé à régler à la société FTPIO.
Si l'engagement personnel de payer une somme peut avoir pour objet la dette d'autrui, il incombe à celui qui se prévaut de l'engagement de démontrer la cause de cet engagement.
Or, en l'espèce, la reconnaissance de dette ne mentionne pas la cause de l'engagement de M. [L] à rembourser la dette du Comité Miss Guadeloupe Pageant à l'égard de la société FTPIO, pas plus que le mail de M. [L] en date du 6 mai 2015 dans lequel il indique qu'à défaut de réception d'un règlement attendu par le comité Miss Guadeloupe Pageant permettant de solder la dette, il mobilisera ses fonds personnels pour l'intégralité de la dette et transmettra une reconnaissance de dette personnelle afin de se porter garant du comité. Il ne résulte pas des pièces versées aux débats que M. [L] a souscrit son engagement en pleine connaissance de cause et en toute lucidité, celui-ci n'ayant aucun intérêt à engager son patrimoine en vertu d'une obligation morale non démontrée.
Faute de cause susceptible de justifier l'engagement unilatéral de M. [L] de régler la dette de l'association Comité Miss Guadeloupe Pageant, le jugement sera confirmé en ce qu'il a annulé la reconnaissance de dette souscrite le 29 juin 2015 par M. [R] [L] au bénéfice de la société FTPIO pour absence de cause.
Sur les dommages et intérêts
La société FTPIO soutient qu'en s'engageant personnellement à solder la dette de l'association qu'il présidait en tentant ensuite d'échapper à ses obligations en refusant d'honorer celle-ci, M. [L] a fait preuve de résistance abusive. Elle sollicite sa condamnation à lui payer la somme de 7.500 euros à titre de dommages et intérêts.
M. [L] ne conclut pas sur ce point et réclame, pour sa part, la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi du fait des manoeuvres et de la pression exercée volontairement par la société FTPIO, tant pour recevoir l'acte du 29 juin 2015 que pour tenter d'exécuter cet acte litigieux, celle-ci n'ayant pas hésité à salir sa réputation et à exercer par tous moyens des pressions à son égard.
Sur ce
Aux termes de l'article 1240 du code civil, « Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».
La demande principale de la société FTPIO n'étant pas accueillie, sa demande en paiement de dommages intérêts pour résistance abusive ne peut qu'être rejetée.
En outre, l'exercice d'une action en justice constitue en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de mauvaise foi. En l'espèce, M. [L] ne démontre pas la mauvaise foi ou l'intention de nuire de la société FTPIO, pas plus qu'il ne démontre l'existence d'un préjudice distinct des frais qu'il a dû exposer pour la présente instance et qui seront indemnisés sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [L] de sa demande de dommages et intérêts.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles de première instance, mis à la charge de la société FTPIO, seront confirmées.
La société FTPIO, qui succombe en son recours, sera condamnée aux dépens d'appel.
Elle devra en outre verser à M. [R] [L] une indemnité de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et ne peut elle-même prétendre à l'application de ce texte à son profit.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme le jugement déféré,
Y ajoutant
Déboute la société France Télévisions Publicité Inter Océans de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,
Déboute M. [R] [L] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral,
Condamne la société France Télévisions Publicité Inter Océans à payer à M. [R] [L] la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société France Télévisions Publicité Inter Océans aux dépens d'appel,
Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,