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22/05/2024 | FRANCE | N°21/09955

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 22 mai 2024, 21/09955


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRET DU 22 MAI 2024



(n° 2024/ , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/09955 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEYMM



Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Septembre 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 21/01278



APPELANT



Monsieur [I] [B]

[Adresse 2]

[Locali

té 4]

Représenté par Me Michel FILLIOZAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C2281

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/049015 du 15/11/2021 accordée par le bur...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRET DU 22 MAI 2024

(n° 2024/ , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/09955 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEYMM

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Septembre 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 21/01278

APPELANT

Monsieur [I] [B]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Michel FILLIOZAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C2281

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/049015 du 15/11/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMEE

S.A.R.L. PIMOUSS

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Sandra CARNEREAU, avocat au barreau de PARIS, toque : E1981

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Fabrice MORILLO, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Stéphane MEYER, président

Fabrice MORILLO, conseiller

Nelly CHRETIENNOT, conseiller

Greffier, lors des débats : Monsieur Jadot TAMBUE

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Stéphane MEYER, président de chambre et par Monsieur Jadot TAMBUE, greffier à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er février 2003, avec reprise d'ancienneté au 13 octobre 1999, M. [I] [B] a été engagé en qualité de responsable rayon par la société PIMOUSS, celle-ci employant habituellement moins de 11 salariés et appliquant la convention collective nationale du commerce de détail des fruits et légumes, épicerie et produits laitiers.

M. [B] a fait l'objet d'un avis médical d'inaptitude le 20 janvier 2020 dans le cadre d'une visite de reprise, le médecin du travail indiquant que « L'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ».

Après avoir été convoqué à un entretien préalable fixé au 10 février 2020, M. [B] a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement suivant courrier recommandé du 14 février 2020.

Suivant courrier du 15 mai 2020, la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne a informé M. [B] de la prise en charge de sa maladie professionnelle suite à sa déclaration du 3 décembre 2018.

Sollicitant de voir prononcer la nullité de son licenciement, contestant à titre subsidiaire son bien-fondé et s'estimant insuffisamment rempli de ses droits, M. [B] a saisi la juridiction prud'homale le 15 février 2021.

Par jugement du 22 septembre 2021, le conseil de prud'hommes de Paris a :

- débouté M. [B] de l'ensemble de ses demandes,

- débouté la société PIMOUSS de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [B] aux seuls dépens exposés par la partie défenderesse,

- laissé les dépens exposés par M. [B] à la charge de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Par déclaration du 7 décembre 2021, M. [B] a interjeté appel du jugement.

Par ordonnance sur incident du 3 janvier 2023, le conseiller de la mise en état de la cour d'appel a déclaré irrecevables les conclusions de la société PIMOUSS remises par voie électronique le 10 juin 2022.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 22 février 2024, M. [B] demande à la cour de :

- infirmer le jugement sauf sur le défaut de formation, l'absence d'entretien professionnel et l'absence d'attestation Pôle emploi conforme, et, statuant à nouveau,

- annuler son licenciement pour discrimination liée à l'état de santé et atteinte au droit à un recours effectif,

- condamner en conséquence la société PIMOUSS à lui payer la somme de 36 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul,

à titre subsidiaire,

- condamner la société PIMOUSS à lui payer la somme de 30 000 euros nets à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

en tout état de cause,

- condamner la société PIMOUSS à lui payer les sommes suivantes :

- 13 727,32 euros à titre de rappel d'indemnité de licenciement,

- 4 000 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 400 euros au titre des congés payés afférents,

- 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour défaut de certificat de travail conforme,

- ordonner la remise d'un bulletin de salaire conforme à l'arrêt à intervenir,

- condamner la société PIMOUSS aux intérêts légaux à compter du 12 février 2021, date de la saisine du conseil de prud'hommes,

- condamner la société PIMOUSS au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ainsi qu'aux entiers dépens.

L'instruction a été clôturée le 12 mars 2024 et l'affaire a été fixée à l'audience du 13 mars 2024.

MOTIFS

En application de l'article 954 du code de procédure civile, la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs, étant rappelé que l'intimé dont les conclusions sont déclarées irrecevables est réputé ne pas avoir conclu et s'être approprié les motifs du jugement attaqué.

Par ailleurs, il sera rappelé qu'en application de l'article 906 du code de procédure civile, les pièces communiquées et déposées au soutien de conclusions irrecevables sont elles-mêmes irrecevables, ladite irrecevabilité concernant tant les pièces de première instance que celles d'appel.

Sur la rupture du contrat de travail

Sur la nullité du licenciement

L'appelant fait valoir que le licenciement pour inaptitude est nul en ce qu'il constitue une discrimination en raison de l'état de santé et en ce qu'il l'a privé de son droit à un recours effectif, et ce eu égard au fait qu'une demande de reconnaissance de maladie professionnelle était en cours depuis le 3 décembre 2018. Il affirme que l'employeur, qui était informé de cette procédure et a tardé à transmettre les éléments sollicités par l'assurance maladie, ne pouvait ainsi rompre le contrat de travail que pour faute grave ou pour impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie. Il ajoute qu'en tardant à répondre à la caisse primaire d'assurance maladie puis en lui notifiant son licenciement sans attendre la réponse de la caisse, la société intimée a agi de manière déloyale.

Selon l'article L. 1132-1 du code du travail, dans sa version applicable au litige, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de nomination ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation sexuelle, de son identité de genre, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une prétendue race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de son exercice d'un mandat électif local, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou de sa domiciliation bancaire, ou en raison de son état de santé, de sa perte d'autonomie ou de son handicap, de sa capacité à s'exprimer dans une langue autre que le français.

Par ailleurs, en application de l'article L. 1134-1 du code du travail, lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Aux termes de l'article L. 1226-9 du code du travail, au cours des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur ne peut rompre ce dernier que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie.

Si l'appelant indique qu'il a été licencié en raison de son état de santé et présente des éléments de fait (déclaration de maladie professionnelle du 3 décembre 2018, courrier de la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne en date du 16 septembre 2019 l'informant de la nécessité d'un délai complémentaire d'instruction dans l'attente de la réponse au questionnaire de l'employeur et courrier de la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne du 15 mai 2020 l'informant de la prise en charge de sa maladie professionnelle) qui, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'une discrimination en raison de son état de santé, outre le fait que les mentions de la lettre de licenciement relatives à l'état de santé de l'appelant se rapportent uniquement à l'avis d'inaptitude établi par la médecine du travail le 20 janvier 2020 ainsi qu'aux conséquences de celui-ci, ainsi que cela a été justement retenu par les premiers juges, la cour rappelle en toute hypothèse qu'il résulte des dispositions de l'article L. 1133-3 du code du travail que les différences de traitement fondées sur l'inaptitude constatée par le médecin du travail en raison de l'état de santé ou du handicap ne constituent pas une discrimination lorsqu'elles sont objectives, nécessaires et appropriées.

Il sera par ailleurs observé que, si les dispositions précitées de l'article L. 1226-9 du code du travail ne permettent à l'employeur de rompre le contrat de travail, au cours des périodes de suspension du contrat pour accident du travail ou maladie professionnelle, qu'en cas de faute grave ou d'impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l'accident ou à la maladie, il résulte cependant des éléments précités que la visite de reprise effectuée le 20 janvier 2020 par le médecin du travail, dans les conditions prévues aux articles R. 4624-31 et R. 4624-32 du code du travail, a eu pour effet de mettre fin à la période de suspension du contrat de travail, permettant ainsi à l'employeur, en présence d'un avis médical d'inaptitude, d'engager le cas échéant une procédure de licenciement pour inaptitude.

S'agissant de l'éventuelle connaissance par l'employeur de l'origine professionnelle de l'inaptitude au moment du licenciement, la caractérisation de celle-ci ayant pour seul objet de permettre de déterminer quelles sont les dispositions applicables en matière de licenciement pour inaptitude (articles L. 1226-2 et suivants du code du travail en cas d'inaptitude consécutive à une maladie ou un accident non professionnel ou articles L. 1226-10 et suivants en cas d'inaptitude consécutive à un accident du travail ou à une maladie professionnelle), il en résulte que cette éventuelle connaissance ne peut en elle-même s'analyser comme étant constitutive d'une discrimination fondée sur l'état de santé.

Enfin, l'application des règles protectrices relatives aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle n'étant pas subordonnée à la reconnaissance préalable par la caisse primaire d'assurance maladie du caractère professionnel d'un accident ou d'une maladie, la cour retient que le fait que le licenciement pour inaptitude litigieux ait été prononcé antérieurement à la décision de prise en charge de la maladie professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie n'était pas de nature à priver l'appelant de son droit à un recours effectif, et ce alors qu'en conséquence de la visite médicale de reprise et de la déclaration d'inaptitude, l'employeur doit immédiatement engager des démarches aux fins de reclassement ou mettre en oeuvre une procédure de licenciement pour inaptitude en cas d'impossibilité de reclassement.

Dès lors, au vu de l'ensemble des développements précédents, les premiers juges ayant justement retenu que l'employeur établissait que ses différentes décisions étaient justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination en raison de l'état de santé, eu égard par ailleurs à l'absence de méconnaissance par l'employeur de ses obligations en matière de suspension du contrat de travail ou de droit du salarié à un recours effectif, la cour confirme le jugement en ce qu'il a débouté l'appelant de ses différentes demandes afférentes à la nullité du licenciement.

Sur l'origine de l'inaptitude et le bien-fondé du licenciement

L'appelant fait valoir que l'inaptitude a une origine professionnelle et que la société intimée a manqué à son obligation de reclassement, en ce qu'exerçant sous l'enseigne « FRANPRIX », elle aurait dû tenter de le reclasser auprès des différentes sociétés exerçant sous la même enseigne, que ce soit sous forme de franchise ou autre.

En application des dispositions des articles L.1226-1 et suivants du code du travail, il est établi que les règles protectrices relatives aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée et invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement, ladite application n'étant pas subordonnée à la reconnaissance par la caisse primaire d'assurance maladie du caractère professionnel d'un accident ou d'une maladie, le juge prud'homal n'étant pas lié par les décisions des organismes de sécurité sociale et devant apprécier par lui-même l'ensemble des éléments qui lui sont soumis, sans se limiter aux mentions figurant sur l'avis du médecin du travail ou aux décisions des organismes sociaux.

En l'espèce, au vu des différents éléments médicaux afférents à la situation de l'appelant et notamment de la déclaration de maladie professionnelle du 3 décembre 2018 ainsi que du courrier de la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne en date du 16 septembre 2019 informant le salarié de la nécessité d'un délai complémentaire d'instruction dans l'attente de la réponse au questionnaire de l'employeur, éléments dont il résulte que la société intimée avait ainsi nécessairement été informée par l'assurance maladie de l'existence d'une demande de reconnaissance de maladie professionnelle formée par le salarié, eu égard par ailleurs à l'existence d'arrêts de travail de manière ininterrompue, l'appelant n'ayant jamais repris le travail jusqu'à l'engagement de la procédure de licenciement litigieuse, la cour retient que la société intimée avait manifestement connaissance au moment du licenciement de l'origine professionnelle à tout le moins partielle de l'inaptitude litigieuse, de sorte que les règles protectrices applicables aux victimes d'une maladie professionnelle résultant des articles L. 1226-10 et suivants du code du travail devaient dès lors recevoir application.

Aux termes de l'article L. 1226-10 du code du travail, lorsque le salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Cette proposition prend en compte, après avis du comité économique et social, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.

Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce.

En application de l'article L. 1226-12 du code du travail, lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement.

L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans l'emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l'emploi.

L'obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l'employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, en prenant en compte l'avis et les indications du médecin du travail.

S'il prononce le licenciement, l'employeur respecte la procédure applicable au licenciement pour motif personnel prévue au chapitre II du titre III.

En l'espèce, si l'appelant soutient que la société intimée a manqué à son obligation de reclassement en s'abstenant de tenter de le reclasser auprès des différentes sociétés exerçant sous la même enseigne « FRANPRIX », la cour relève cependant, ainsi que l'ont justement retenu les premiers juges, que le médecin du travail avait expressément mentionné dans le cadre de l'avis médical d'inaptitude du 20 janvier 2020 que l'état de santé du salarié faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi, de sorte qu'en application des dispositions précitées, l'employeur était dispensé de rechercher et de proposer au salarié des postes de reclassement.

Dès lors, la cour confirme le jugement en ce qu'il a retenu que le licenciement pour inaptitude était fondé sur une cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences financières de la rupture

En application de l'article L. 1226-14 du code du travail, la rupture du contrat de travail dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article L. 1226-12 ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L. 1234-5 ainsi qu'à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L. 1234-9.

Toutefois, ces indemnités ne sont pas dues par l'employeur qui établit que le refus par le salarié du reclassement qui lui est proposé est abusif.

Les dispositions du présent article ne se cumulent pas avec les avantages de même nature prévus par des dispositions conventionnelles ou contractuelles en vigueur au 7 janvier 1981 et destinés à compenser le préjudice résultant de la perte de l'emploi consécutive à l'accident du travail ou à la maladie professionnelle.

En application de ces dispositions et sur la base d'une rémunération de référence de 1 999,99 euros, l'appelant étant en droit d'obtenir une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L. 1234-5 du code du travail, soit en l'espèce un préavis d'une durée de 2 mois, il convient de lui accorder, par infirmation du jugement, une somme de 3 999,98 euros à titre d'indemnité compensatrice. L'indemnité prévue par ce texte, dont le montant est égal à celui de l'indemnité prévue à l'article L. 1234-5 du code du travail, n'ayant cependant pas la nature d'une indemnité de préavis et n'ouvrant dès lors pas droit à congés payés, le salarié sera débouté, par confirmation du jugement, de sa demande au titre des congés payés y afférents.

Par ailleurs, le salarié étant en droit de bénéficier d'une indemnité spéciale de licenciement égale, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, au double de l'indemnité prévue par l'article L. 1234-9, soit une somme de 23 777,64 euros compte tenu d'une ancienneté de 20 ans et 4 mois, et ce alors que l'employeur lui a uniquement réglé la somme de 13 727,32 euros, il convient de lui accorder un rappel d'indemnité spéciale de licenciement d'un montant de 10 050,32 euros, et ce par infirmation du jugement.

Sur la demande de dommages-intérêts pour défaut de certificat de travail conforme

L'appelant fait valoir que le certificat de travail délivré par la société intimée ne mentionne qu'une partie de son ancienneté et qu'un seul des postes occupés et qu'en l'état, ce certificat l'a gêné dans ses démarches tant de recherche d'emploi que d'indemnisation de son chômage.

En application des dispositions des articles L. 1234-19, L. 1234-20 et R. 1234-9 du code du travail et au vu des pièces versées aux débats, il apparaît que l'employeur ne justifie pas avoir effectivement délivré à l'appelant un certificat de travail conforme, et ce s'agissant notamment de son ancienneté globale, cette absence de délivrance conforme ayant manifestement généré des difficultés relativement à l'indemnisation de l'appelant par Pôle Emploi au titre de l'intégralité de sa période d'emploi.

Dès lors, les premiers juges ayant estimé de manière erronée que l'appelant ne justifiait pas de son préjudice, la cour accorde à l'appelant, en réparation du préjudice subi, la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts, et ce par infirmation du jugement.

Sur les autres demandes

Il convient d'ordonner à l'employeur de remettre au salarié un bulletin de paie récapitulatif conforme à la présente décision, et ce par infirmation du jugement.

En application des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil, il y a lieu de rappeler que les condamnations portent intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes pour les créances salariales et à compter du présent arrêt pour les créances indemnitaires.

L'employeur, qui succombe partiellement, supportera les dépens de première instance, et ce par infirmation du jugement, ainsi que ceux d'appel.

En application des dispositions de l'article 700 2° du code de procédure civile et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, l'employeur sera condamné à payer à Maître Filliozat, avocat du salarié, bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, la somme de 2 000 euros au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés en cause d'appel s'il n'avait pas eu cette aide.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

INFIRME le jugement en ce qu'il a débouté M. [B] de ses demandes d'indemnité compensatrice en application de l'article L. 1226-14 du code du travail, de rappel d'indemnité spéciale de licenciement, de dommages-intérêts pour défaut de certificat de travail conforme et de remise d'un bulletin de paie conforme ainsi que sur la charge des dépens ;

LE CONFIRME pour le surplus ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

CONDAMNE la société PIMOUSS à payer à M. [B] les sommes suivantes :

- 3 999,98 euros à titre d'indemnité compensatrice en application de l'article L. 1226-14 du code du travail,

- 10 050,32 euros à titre de rappel d'indemnité spéciale de licenciement,

- 500 euros à titre de dommages-intérêts pour défaut de certificat de travail conforme ;

RAPPELLE que les condamnations portent intérêts au taux légal à compter de la réception par la société PIMOUSS de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes pour les créances salariales et à compter du présent arrêt pour les créances indemnitaires ;

ORDONNE à la société PIMOUSS de remettre à M. [B] un bulletin de paie récapitulatif conforme à la présente décision ;

CONDAMNE la société PIMOUSS aux dépens de première instance et d'appel ;

CONDAMNE la société PIMOUSS à payer à Maître Filliozat, avocat de M. [B], bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 2° du code de procédure civile et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 en cause d'appel ;

DÉBOUTE M. [B] du surplus de ses demandes.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 21/09955
Date de la décision : 22/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-22;21.09955 ?
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